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Le droit de
savoir est une façon de dire qu'on se place du point de vue des travailleurs,
et ceux-là ont le droit de savoir tout ce qui se fait pour le développement de
leur compagnie.
Au plan économique, cette phase que subit Air Algérie, la plonge dans une espèce de léthargie, du moins la place dans une posture de wait and see. La compagnie par son immobilisme depuis très longtemps, souffre déjà d'une hémiplégie manifeste, ce qui laissera sans doute des séquelles sur son fonctionnement. Quand on procède à une comparaison par rapport aux objectifs tracés dans la création des filiales, nous constatons que nous sommes les derniers comparés à nos voisins où les groupes de la RAM et Tunisair ont déjà créé leurs filiales et qui sont déjà opérationnelles depuis très longtemps. Les stratégies de développement sont presque inexistantes pour Air Algérie sur le terrain et la concrétisation de tous ses projets qui restent toujours des projets. En réalité, Air Algérie n'est dotée d'aucune filiale si ce n'est sur papier, et encore moins de partenariats, alors que partout dans le monde et plus spécialement les compagnies aériennes de la Tunisie et du Maroc sont très bien avancées à ce stade et ont multiplié les filiales et les partenariats à tous les niveaux, raisons pour lesquelles leurs adhésions à des alliances mondiales sont avancées. Chez nous, la règle des 51%-49%, adoptée par l'Etat dans une loi régissant les investissements, existe bel et bien, mais le management d'Air Algérie reste inerte et ne semble pas être pressé afin de rattraper tout le temps perdu. Air Algérie continue à naviguer à vue. Aucun partenariat ne semble se dessiner à l'horizon, donc l'inertie et l'hibernation continue. Afin de consolider notre position dans la perspective de l'ouverture de l'espace algérien à la concurrence étrangère, la compagnie devrait opérer une vaste action de restructuration destinée à améliorer nos capacités de gestion et d'exploitation. Les transporteurs peuvent offrir l'ensemble ou une partie des caractéristiques suivantes à une alliance mondiale. 1. Étendue du marché. La complémentarité de l'exploitation des routes est d'une importance vitale, de sorte que chaque membre doit apporter au réseau commun un marché considérable que ce réseau ne pourrait obtenir autrement. 2. Pivots et points d'accès. Le candidat qui veut être un des associés principaux doit disposer d'un ou de plusieurs aéroports pivots continentaux susceptibles d'être transformés en points d'accès internationaux. Il doit posséder une base solide de trafic sur l'ensemble du marché continental ainsi qu'un champ d'action international propre à faciliter les raccordements avec des membres importants de l'alliance sur d'autres continents. 3. Compatibilité. Les principes et les styles de gestion doivent être compatibles, de même que les images de marque. La coordination des horaires, des systèmes de réservation, des services d'escale, etc., à l'échelle du réseau, exigera une coopération considérable entre les compagnies. La ressemblance des images de marque et des réputations sur le plan de la qualité est un facteur important de la réussite de l'alliance. 4. Efficacité de la structure des coûts. Pour présenter de l'intérêt comme partenaire éventuel, le transporteur doit être perçu comme un gagnant sur la longue durée. Le coût-efficacité par rapport à la concurrence est à cet égard un facteur important. 5. Solidité financière. Les partenaires éventuels qui sont très endettés ou dont la viabilité économique à long terme n'est guère assurée présentent peu d'intérêt. Il existe à l'heure actuelle trois alliances mondiales de premier plan et une grande alliance intra-européenne. Qu'en-t-il pour Air Algérie eu égard à ses considérations introductives ? L'état des lieux d'Air Algérie fait ressortir des faiblesses majeures qui s'opposent aux bénéfices attendues d'une intégration à une alliance. A. Le marché et réseau Air Algérie non optimisés Deux activités passages aux poids inégaux : En 2018, l'activité domestique absorbe 38% des sièges offerts et produit 35% des passagers transportés, et seulement 12% des recettes. Les deux réseaux sont articulés autour de 8 escales mixtes (d'où partent des lignes domestiques et internationales) dont 4 escales principales, Alger, Oran, Annaba, Constantine. Les exploitations internationale et domestique sont connectées du fait de nombreuses mises en place d'appareils : sur une semaine type, on compte 50% de rotations mixtes domestique/internationale. Pour autant, aucune des escales mixtes n'est organisée sous forme de hub (point 2), au sens strict du terme : réseau en étoile, succession de plages horaires de départ et d'arrivée tout au long de la journée, maximisation des possibilités de correspondance, organisation facilitant les correspondances de passagers et de bagages. Air Algérie a un grand nombre d'escales (67) mais les 8 escales mixtes et les 11 escales françaises (soit au global 30% de l'ensemble des escales) concentrent 86% du trafic. Le trafic moyen des autres escales est inférieur à 10 000 passagers par an. Seules Alger et dans une moindre mesure Oran et Constantine combinent les trois types de lignes : domestiques, France et internationales (hors France). B. Une faiblesse de la performance économique d'Air Algérie : ? Le ratio {Résultat net réel / actifs} négatif en 2018 4 Une rentabilité économique négative ou nulle ne permet pas à la compagnie d'augmenter ses capitaux permanents 4 Air Algérie voit ses profits décroitre alors que ses besoins de capitaux permanents augmentent (acquisition de la nouvelle flotte, coût de la mise à niveau...) ? Le ratio {Chiffre d'affaires / actifs aéronefs} 4 Ce ratio franchit la valeur 1,7, AH (ratio=0.88) atteint la zone de turbulence par insuffisance de revenus par rapport à la valeur de ses aéronefs 4 Air Algérie devrait réaliser un chiffre d'affaires d'au moins 164 milliards de DA au lieu de 113 milliards DA en 2018 Le ratio {Disponibilités / remboursements en principal et intérêts de l'année} excède favorablement celui de la moyenne de l'industrie 4 Cette situation signifie que le résultat généré par Air Algérie n'est pas suffisant pour financer le renouvellement de sa flotte, puisque pour payer ses frais financiers, elle doit d'abord puiser dans ses dotations aux amortissements ; celles-ci peuvent être interprétées comme des réserves accumulées afin de renouveler les actifs ; le renouvellement ne peut donc plus se faire au bon rythme 4 Air Algérie fait face en 2018 à un EBIT négatif (marge opérationnelle après amortissements mais avant charges financières). Nous pouvons dire qu'Air Algérie perd du terrain sur son marché ce qui implique sur l'érosion des parts des marchés et la baisse de son chiffre d'affaires. Il n'existe aucune politique commerciale entreprise qui puisse apporter des fruits sur le court/moyen/long terme, donc la concurrence est rude pour notre compagnie, qui n'arrive pas à sortir la tête de l'eau à cause d'une gestion rudimentaire et archaïque tel que stipulé par le ministre des Transports lui-même. Air Algérie n'est associée avec aucune compagnie aérienne dans le cadre d'obtention des miles et Air Algérie Plus. Donc, on constate encore une fois, une paralysie générale de notre compagnie quant à son programme de fidélisation. Air Algérie devient un fantôme seule face à sa destinée, tel est la mauvaise gestion de son management, raison pour laquelle il faudra toute une nouvelle réorganisation et restructuration en profondeur. En conclusion, Air Algérie se révèle moins efficiente de l'ensemble des principaux transporteurs aériens composant ces alliances. De plus sa position de quasi-monopole en Algérie (réseau domestique) aggrave vraisemblablement son infériorité sur le plan de l'efficience par rapport aux principales compagnies. Air Algérie se trouverait en fin de compte incapable de soutenir la concurrence des transporteurs dans l'éventualité d'une adhésion à l'une des alliances. La RAM et Tunisair sont en accords de codes partagés avec plusieurs compagnies aériennes de renommée internationale, par contre Air Algérie n'a pas jusqu'à présent renforcé sa présence nulle part dans le monde, à part la vieille histoire de la France, et n'offre aucune opportunité de correspondances sur d'autres destinations. Même Air Sénégal International est en partage de codes avec South African Airlines sur les destinations de New York et Johannesburg. Les transporteurs clés s'assureront une proportion croissante du trafic intercontinental long-courrier, tandis qu'Air Algérie partenaire de second plan remplira dans une grande mesure une fonction d'apport aux plaques tournantes de leur réseau mondial. À l'heure actuelle, il existe trois grandes alliances qui prédominent le monde de l'aérien, dont Star Alliance, OneWorld, et SkyTeam se disputent les marchés mondiaux du transport aérien. Le groupe le plus important, la Star Alliance, représente quelque 20 pour 100 du marché mondial du transport de passagers ; vient ensuite OneWorld, dont la part de ce marché s'établit à environ 16 pour 100. Les autres alliances traînent en bas de division pour ce qui concerne leurs parts du marché mondial. La plupart des 50 principaux transporteurs aériens du monde sont membres de l'une ou l'autre de ces trois alliances stratégiques. La RAM était candidate à Skyteam, 2ème alliance du marché aérien qui comprend notamment AF/KLM et Delta Airlines. Au final, la Royal Air Maroc s'est désistée face aux prérequis d'une telle adhésion, qui impliquerait une renonciation partielle à certaines dessertes en Afrique (marché pourtant très lucratif pour le groupe RAM). De plus, la RAM avait obtenu le statut de membre associé. Aujourd'hui, la RAM est en discussion avec Oneworld pour une future adhésion, alors que la compagnie Air Algérie est au stade de l'inertie et l'immobilisme total. Nous vous rappelons que Tunisair est candidate à une entrée au sein de Skyteam, mais elle est membre depuis 2006 d'Arabesk, une alliance aérienne panarabe composée de 09 compagnies aériennes nationales, alors qu'Air Algérie est au stade du nulle part. Aucune action n'était entreprise quant à une future adhésion pour Air Algérie à l'une des 03 alliances mondiales, si ce n'est qu'on fait semblant d'avancer des projets inertes et qui n'avancent nullement pas. Qu'en-t-il de la position d'Air Algérie pour une adhésion à une alliance ? Air Algérie devrait peser (quantifier) les coûts et les avantages (pour sa propre économie) d'une adhésion à une alliance. Les transporteurs adhèrent à des alliances pour accroître leur compétitivité sur le marché et améliorer leurs résultats économiques. Mais les alliances stratégiques améliorent-elles effectivement les résultats économiques de leurs membres, en particulier la rentabilité marginale ? Nous vous faisons savoir que contrairement à Air Algérie, plusieurs compagnies africaines et arabes sont déjà lancées dans des alliances stratégiques, et cela est tout simplement dû à leurs managers qui sont des vrais visionnaires et qui contribuent au développement économique de leurs pays respectifs. Les exemples ne manquent pas, tels que Egyptair, Ethiopian Airlines, South African Airlines sont déjà membres de plein droit à l'alliance Star Alliance, ainsi que Kenya Airways, Middle East Airlines, Saudia Airlines sont aussi déjà membres de l'alliance Skyteam. 1. Avantage pour Air Algérie : incertitude totale dans les conditions actuelles de fonctionnement La plupart des alliances aident leurs membres à accroître leur productivité, leur rentabilité et la compétitivité de leurs prix. Cependant, les effets de la conclusion d'une alliance sur la productivité, la rentabilité et les prix des partenaires dépendent dans une large mesure de l'ampleur de la coopération prévue, c'est-à-dire du point de savoir s'il s'agit d'une alliance stratégique (multidimensionnelle) ou seulement d'une alliance tactique. Les alliances tactiques, quant à elles, n'ont pas d'effets significatifs sur la productivité, la rentabilité ou les prix des transporteurs qu'elles associent. Selon certaines études, les alliances stratégiques permettent à leurs membres d'accroître en moyenne : - 5% la productivité totale de leurs facteurs définit comme le rapport d'un indice d'extrant (revenu passager, charter, fret à un indice d'intrant (toutes charges excluant les amortissements). Il s'agit d'une approximation car son calcul obéit à une règle dont la mise en application nécessitera des données désagrégées. - 1,4% leur rentabilité, - réduire leurs prix à la consommation de 5,5%. L'application de ces résultats sur les performances actuelles de la compagnie (en 2018 la rentabilité s'établit pour Air Algérie à 0.93, rapport produits/charges) ne doit pas être accompagnée par un gain important eu égard à la dimension de l'activité de la compagnie demeurant peu conséquente (absence d'effet d'échelle) d'une part et l'écart de performance important qu'il s'agisse tout d'abord de combler. La quantification et le niveau de cet avantage demeure insignifiant et surtout incertain. Il ne peut compenser le coût associé à la mise au standard de l'activité de la compagnie. En revanche les coûts du programme d'investissement sont incertains. 2. Coûts certains, non perdus à moyens termes Une mise à niveau de la compagnie Air Algérie est requise, ce qui doit se traduire par le lancement d'un programme d'investissement pour se mettre au standard des compagnies aériennes. 1. Systèmes d'information et redéfinition des processus 2. Gestion des revenus (gestion en temps réel des catégories d'inventaire, monitoring des tarifs des concurrents, gestion des programmes de fidélisation...) 3. La mise en place d'un Hub à Alger (programme d'investissement pour supporter l'augmentation du trafic généré par le Hub...) 4. Système de gestion financière et support à la décision 5. Redéfinition des réseaux Air Algérie 6. Formation du personnel 7. Le renforcement de la flotte et son adaptation 8. L'amélioration de sa productivité Cette liste n'est pas exhaustive et sa mise en œuvre exige du temps et de l'expertise interne qui font défaut actuellement au niveau d'Air Algérie. Air Algérie estimera probablement prête à adhérer à de telles alliances quand son savoir-faire de gestion se sera suffisamment modernisé, c'est-à-dire dans trois à cinq ans, période correspondante à sa remise à niveau. Ce temps permettra à Air Algérie de mettre en place et de renforcer le pivot d'Alger et éventuellement un pivot secondaire (par exemple Oran), lui donner la possibilité d'améliorer sa productivité et son efficience et à accroitre sa stabilité financière. La phase prochaine et prioritaire doit porter sur la mise en place de la nouvelle organisation cible et le lancement des projets boosters (esquissés dans mes précédentes contributions). - Le déploiement de la nouvelle organisation, il s'agit d?organiser et piloter le déploiement de l'organisation cible définie afin qu'elle devienne une réalité opérationnelle. Ce processus doit poursuivre un objectif précis : - L'appropriation de la nouvelle structure et des modes de fonctionnement et la déclinaison opérationnelle. Il s'agit d'agir aussi concrètement sans tarder sur certains leviers de performance pour donner une nouvelle impulsion stratégique parallèlement à la nouvelle dynamique d'organisation du groupe Air Algérie. La mise en place de la stratégie de croissance qui couvre tous ces différents aspects doit se faire de pair avec une stricte politique de contrôle des coûts. La dynamique économique des réseaux mondiaux provoquera vraisemblablement à long terme une hiérarchisation naturelle des compagnies en transporteurs clés et transporteurs d'apport. Les points noirs de notre compagnie sont la qualité et la ponctualité, et Air Algérie doit s'appuyer beaucoup plus dans des processus continus de certification de ses métiers par leur mise en conformité avec les normes d'assurance qualité les plus élevés dans l'industrie du transport aérien. Air Algérie doit garantir un niveau de qualité de service sans cesse amélioré, apprécié et reconnu par la clientèle. Pour cela, Air Algérie doit faire de la satisfaction client un reflexe naturel, présent dans tous les esprits du personnel et à tous les niveaux de fonctionnement de l'entreprise. Le client doit être au centre de nos préoccupations, et Air Algérie doit définir une vision, une identité économique pour se hisser au niveau des grandes compagnies aériennes arabes et africaines. En finale, la réorganisation de l'entreprise, son développement, son émancipation, sont-ils renvoyés aux calandres grecques ? La question reste posée, mais par contre on rafle être Chef, c'est une devise à Air Algérie, mais pas responsable, c'est aussi une qualité mesquine de nos rentiers qui n'ont rien (même pas le nif!!!) pour s'imposer en tant qu' «Hommes de terrain», «Technocrates», «Justiciers» ou «Hommes» tout court, sinon des carriéristes égocentriques, qui ne savent pas que ce n'est pas le champ qui nourrit, mais c'est bien la Culture ! *DOCTEUR D'ETAT EN AERONAUTIQUE CONSULTANT ET EXPERT INTERNATIONAL EN AVIATION CIVILE MEMBRE EMINENT DE BRITISH ASSOCIATION OF AVIATION CONSULTANTS MEMBRE OF THE INSTITUTE OF MANAGEMENT MEMBRE OF THE INSTITUTION OF HIGHWAYS AND TRANSPORTATION MEMBRE OF THE CHARTERED INSTITUTE OF TRANSPORT MEMBRE OF THE ROYAL AERONAUTICAL SOCIETY |
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