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Puisque
les actifs de dette publique américaine sont détenus par la Chine, la Russie,
les pays arabes exportateurs de pétrole..., en bons de Trésor US, la Fed achète
les « passifs » de dette publique auprès des banques occidentales SVT. Pour
l'achat de ces passifs, la Fed fait marcher la « planche à billets »,
c'est-à-dire procède à la création monétaire. En échange des passifs, la Fed
verse les liquidités créées dans les comptes que les banques SVT détiennent
auprès d'elle. Ces liquidités sont « stérilisées » et restent « bloquées »
jusqu'à ce que les pays étrangers, en besoin de liquidités, viennent présenter
leurs actifs de dettes publiques pour remboursement.
Une question se pose. Pourquoi la BCE est suiveuse de la Fed américaine ? Pourquoi la BCE est conditionnée par la Fed ? Il est évident que la BCE peut procéder à des quantitative easing mais le problème est que la BCE est limitée. Tout QE ou politique monétaire non conventionnelle menée par la BCE, sans concertation avec la Fed, se traduit par une dépréciation de l'euro. Précisément, la BCE qui a pour mission principale d'assurer la stabilité des prix, évite les quantitative easing sauf dans une situation forcée. Maintenant pourquoi la Fed mène une politique monétaire non conventionnelle sans danger pour le dollar US. La monnaie américaine ne risque pas de se déprécier comme l'aurait subi l'euro. La réponse est simple. Le dollar US est la 1ère monnaie mondiale, tous les pays du monde ont besoin du dollar américain ; il compte entre 60 et 65% dans les réserves de change mondiales ; il est la première monnaie de compte dans les transactions mondiales. Enfin, un dernier point, le dollar est la seule monnaie de facturation des transactions pétrolières des pays OPEP qui comptent pour 33% dans les exportations mondiales. Ce qui explique d'ailleurs les guerres que mènent les États-Unis au Moyen-Orient pour maintenir leur emprise sur les gisements pétroliers les plus importants du monde. Toutes les guerres moyen-orientales sont liées au « pétrodollar » ; sans le pétrodollar, le Moyen-Orient perd son caractère géostratégique central pour les États-Unis. Lorsque la Fed crée massivement des liquidités en dollars ex nihilo (et donc adossées à rien), elle fait fonctionner le « levier » qu'est le prix du pétrole. Et comme le commerce international du pétrole brut, ainsi que celui des produits pétroliers intermédiaires et des produits finis, est centralisé sur deux marchés et ces Bourses sont situées à New York au NYMEX (Bourse de cotation spécialisée dans l'énergie et les métaux) et à Londres à l'ICE (Bourse de cotation pétrole Brent, gaz naturel et liquéfié...), la coordination par des politiques discrétionnaires entre les Bourses d'énergie mondiales et la Fed est de fait ; elle assure la pleine maîtrise dans la « financiarisation du monde » ; et ce faisant la politique monétaire de la Fed en particulier est non conventionnelle. Lorsque la Fed avait injecté des liquidités monétaires massives ex nihilo (adossées à rien) pour soutenir l'effort de guerre, entre 2003 et 2008, le prix du pétrole qui a fortement augmenté a été mis à contribution pour servir de contreparties physiques à la création monétaire ex nihilo par la Fed. D'ailleurs, pour éviter que le prix du pétrole atteigne des cours très élevés, insupportables pour l'économie mondiale, à cette époque, la hausse du prix de l'or-métal a été mise à contribution ; elle a joué de substitut complémentaire contre les fortes hausse du prix du pétrole ; l'or facturé lui aussi en dollars est passé à des sommets, passant de moins 300 dollars l'once, en 2000, à près de1000 dollars, en 2008. Dès lors, la Fed américaine n'a pas de problème dans la création de 200 milliards de dollars US qui vont servir pour racheter les passifs de dettes publiques américaines. Sauf que la Fed n'a pas acheté pour 200 Md$ de dettes publiques auprès des banques occidentales SVT, mais beaucoup plus. Comme l'écrit le journal économique et financier français, La Tribune : « 4.000 milliards de dollars. Voici le montant record dépassé par les actifs de la Réserve fédérale américaine (Fed), gonflés par sa politique monétaire ultra-accommodante, selon les chiffres publiés jeudi par la Banque centrale américaine. Le bilan de la Fed a atteint jeudi le montant exact 4.008 milliards de dollars. A titre de comparaison, avant la crise financière de 2008, celui-ci ne dépassait pas 900 millions. Le bilan de la Fed va continuer à augmenter... Il faut dire que le bilan de la Banque centrale a enflé après les différentes phases exceptionnelles d'assouplissement monétaire où, pour soutenir la reprise économique et influer sur les taux à la baisse, la Fed a acheté en masse des bons du Trésor notamment. Pour rappel, les actifs portés au bilan de la Fed sont notamment composés d'obligations du Trésor pour 2.200 milliards de dollars, de titres adossés à des créances hypothécaires pour 1.500 milliards et d'autres actifs immobiliers. » (3) Et ce gonflement du bilan de la Fed par les quantitative easing s'est accompagné d'une hausse pratiquement ininterrompue (sauf entre le 2ème semestre 2008 et l'année 2009) du prix du pétrole, au-dessus de 100 dollars le baril entre 2008 et 2014. La Banque centrale américaine devait procéder au sauvetage des banques touchées par la crise des subprimes et financière (2007-2008) et soutenir financièrement l'économie américaine. En décembre 2013, les chiffres donnés par le journal La Tribune, qui repose sur les chiffres publiés par la Banque centrale américaine, font ressortir que 2. 200 milliards Md$ ont été injectés dans l'économie américaine et mondiale puisque une grande partie de ces obligation du Trésor US a été acquise par les pays étrangers. Pour la Chine, cela a été grâce aux exportations de marchandises et services vers le reste du monde, faisant fortement augmenter ses excédents commerciaux qu'elle a placés aux États-Unis et en Europe. Pour les pays exportateurs de pétrole (Russie, Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Qatar...), c'est la forte hausse du prix du pétrole, entre 2008 et 2014, qui a permis les excédents commerciaux et leurs placements aux États-Unis, en Europe et dans d'autres pays occidentaux. Durant toutes ces années, tout a bien fonctionné pour les pays étrangers dans les achats de bons de Trésor américains jusqu'à ce que la Fed américaine mette fin à la politique monétaire non conventionnelle ; elle a procédé, en octobre 2014, à la dernière tranche du QE3. Et dès le 2ème semestre 2014, le prix du pétrole a commencé à chuter ; le baril de pétrole est passé de 115,11 dollars, le 16 juin 2014, à 49,76 dollars, le 29 décembre 2014. La baisse des prix de l'or noir va toucher le fond, le 11 janvier 2016, pour atteindre 28,79 dollars le baril. (4) A partir de 2014, la situation va être très difficile pour les pays exportateurs de pétrole ; ils vont enregistrer déficits sur déficits ; les excédents commerciaux pour les pays se sont transformés jusqu'à aujourd'hui, en pleine pandémie, malgré des hausses conjoncturelles du prix du pétrole, en déficits. Précisément, durant toutes ces années, les pays exportateurs de pétrole ne feront que puiser dans leurs réserves de change qui sont placés aux États-Unis et en Europe, et, par conséquent, à présenter leurs titres de bons de Trésor de dettes publiques US aux guichets des banques américaines, européennes... pour se faire rembourser. Les pays émergents sont aussi impactés par la crise déflationniste, et eux aussi puisent dans leurs réserves de change, mais beaucoup moins que les pays exportateurs de pétrole. Les banques occidentales SVT auront alors à effectuer des virements de liquidités de leurs comptes qu'ils ont auprès de la Banque centrale aux comptes des pays étrangers. Les actifs de bons de Trésor US récupérés sont alors transmis à la Fed américaine. C'est ainsi que la Banque centrale américaine vient à détenir à la fois les « passifs » et les « actifs ». Va-t-elle les détruire ? Rien ne l'empêche puisque personne ne lui doit de l'argent, elle a acheté des passifs et elle a récupéré les actifs, rappelons-le, pour 200 Md$. Cependant le Trésor US lui doit de l'argent puisqu'elle a acheté pour lui ces actifs et passifs que le Trésor a émis. Mais comme le Trésor US et la Banque centrale américaine (Fed) sont deux institutions de l'administration fédérale, et sont responsables de la croissance de l'économie américaine, et ils sont complémentaires, ces titres de dettes publiques ayant été remboursés, si la Fed les maintient dans son bilan importe peu puisqu'elle doit de l'argent au Trésor US, et le Trésor US fait partie d'elle-même comme la Fed fait partie du Trésor, l'essentiel est l'objectif visé « désendetter les États-Unis ». Et donc moins de dépendance financière vis-à-vis du reste du monde non dans la sphère occidentale. Ce remboursement grâce au 200 Md$ a donc permis de diminuer la dette publique d'une dette extérieure de 200 Md$. En revenant maintenant à la BCE, puisque les liquidités injectées par la Fed durant pratiquement sept années de quantitative easing, le change de l'euro s'est fortement apprécié durant cette période, évoluant, en moyenne, entre 1,3 et 1,45 dollar pour un euro, cela signifie que BCE avait toute latitude d'injecter massivement des liquidités dans le cadre de quantitative easing. Se rappeler les différents plans de la zone euro LTRO, TLTRO, MES, QE... qui sont tous des programmes de soutien financier aux États-membres de la zone euro, en difficultés financières. Lorsque la BCE achète pour 100 Md d'euros de titres, c'est qu'elle a l'aval indirect de la Fed. Comment ? Par le taux de change euro/dollar. Si la BCE n'avait pas injecté des liquidités pour venir au secours aux États européens, que serait-il passé ? Le taux de change de l'euro par rapport au dollar n'évoluerait pas entre 1,30 dollar et 1,45 dollar, mais atteindrait des sommets inimaginables. Un euro pourrait valoir 2 dollars voire 2,5 ou 3 dollars. Le dollar serait chaotique, provoquant une crise mondiale. La zone euro serait paralysée par un euro très cher, celui-ci nuirait à ses exportations vers le reste du monde. En conséquence, le seul moyen pour ne pas amener l'euro à des sommets inacceptables pour l'économie européenne, et aussi occidentale et mondiale, la BCE doit elle aussi mener des quantitative easing, et injecter des liquidités ex nihilo pour « contrecarrer » une forte « appréciation » de l'euro. Ce qui lui donne aussi un pouvoir financier considérable, presque comme la Fed, ce qui lui permet d'acheter des titres de la zone euro par le seul pouvoir de création monétaire. Le taux de change de l'euro ramené entre 1,3 et 1,45 dollar. Comme la Fed, la BCE aura « acheté » pour 100 milliards d'euros de bons de Trésor (émis par les États-membres), donc de dettes publiques auprès des banques occidentales SVT. Et elle n'aura acheté que des « passifs ». Même processus que la Fed. Après 2014, les déficits commerciaux enregistrés par les pays émergents et exportateurs de pétrole vont les amener à puiser dans leurs réserves de change (placés en Occident) pour financer leurs économies. Présentant leurs actifs de dettes publiques aux banques occidentales SVT qui les remboursent en virant de leurs comptes qu'elles ont auprès de la BCE aux comptes des pays étrangers les montants que ces pays ont demandés. Les bons de Trésor récupérés par les banques SVT sont remis à la BCE. La BCE est propriétaire des passifs et des actifs de dettes publiques de la zone euro pour un montant de 100 milliards d'euros qu'elle a « créé ». Et rien ne l'empêche de les détruire puisque la BCE, les Banques centrales des pays-membres de la zone euro et leurs Trésors publics sont toutes des institutions centrales relevant de leurs États et de la Commission européenne. C'est donc 100 Md d'euros sur soi, sur le soi des États et non sur leurs peuples. Une dette de 100 Md d'euros a été réglée à ceux qui la détenaient, les pays étrangers ; que la BCE la maintient dans son bilan importe peu puisque personne ne va réclamer à la BCE de rembourser ce qu'elle a acquis par la création monétaire ex nihilo ; les Trésors publics de la zone euro sont absous de rembourser puisqu'ils font étatiquement un avec la BCE ; même en supposant que les Trésors publics remboursent les 100 Md d'euros à la BCE, que fera la BCE ? Elle ne les gardera pas mais les répartira entre les pays de la zone euro, et donc à leurs Trésors publics. On voit là que les processus de quantitative mis en place par les deux Banques centrales américaine et européenne leur octroient un pouvoir prédominant sur le monde. Bien entendu, les Banques centrales d'Angleterre, du Japon et de la Chine, en tant qu'émettrices de monnaies internationales, usent aussi de la politique monétaire non conventionnelle ; elles sont concernées aussi par les fluctuations erratiques des taux de change qui peuvent atteindre des sommets, et nuiraient à leurs exportations (devenues très chères). Il est intéressant d'écouter un expert financier sur le problème des quantitative easing. L'expert est français, il est économiste, et surtout bardé de bagages. Docteur en économie, agrégé de Sciences économiques, professeur à l'Université Paris Panthéon-Assas, ayant occupé plusieurs postes comme directeur des études économiques du Crédit Lyonnais et pour le Crédit Agricole, membre du Cercle des économistes, il a été membre pendant huit ans du Conseil d'Analyse Economique auprès du Premier ministre. Il appartient au Conseil d'analyse économique (depuis 2004) et à l'International Conference of Commercial Bank Economists (ICCBE). Il préside la Commission des affaires économiques et financières de Business Europe, l'Union des industries de la communauté et d'autres postes que cet économiste a occupés. Il a écrit plus de vingt ouvrages et rapports, selon les données de sa biographie. Par conséquent, son jugement compte sur le problème des quantitative easing, qui en fait ne sont pas seulement un problème mais véritablement un « phénomène monétaire extraordinaire ». Ecoutons cet expert et jugeons. Ben Bernanke n'est plus à la barre de la Fed depuis janvier 2014, mais ses décisions vont encore peser pendant dix ans au moins : quinze ans d'influence ! Mario Draghi reste, pendant un an encore, à celle de la BCE, et ses décisions vont peser presque une décennie: dix ans d'influence ! Pourquoi ces persistances, indépendamment de la maestria de ces deux présidents ? Réponse : les magots de bons du Trésor accumulés des années durant, sous leur égide et au plus fort de la crise, sous le nom de code de Quantitative Easing. Il s'est ainsi agi de faire baisser les taux longs, en complément de ce qu'ils faisaient sur les taux courts en les menant à zéro : de la « répression financière » sur longue période, même si le mot paraît violent. Avec cette dernière grande crise, la boîte à outils de la politique monétaire, la « toolkit », s'est renforcée. On connaît la traditionnelle arme des taux courts. On y a ajouté le langage, avec la « forward guidance », plus la surveillance bancaire, avec la stabilité macrofinancière, et surtout les trillions de bons du Trésor, acquis non sans difficulté ni suspicion au début. Trillions dont on ne mesure pas tous les effets Ce magot à amortir, c'est le secret de la prolongation de l'effet des politiques monétaires actuelles. Bien sûr, le banquier central parle constamment de ses objectifs financiers. C'est l'inflation en zone euro ? avec les broderies autour du « près de 2% mais au-dessous, à moyen terme » que tisse Mario Draghi. [...] C'est risqué, quand les taux remontent. Les entreprises et les ménages trop endettés seront les premiers à souffrir. C'est pourquoi le Quantitative Easing (QE) est là pour pouvoir jouer les prolongations ! Mais cette politique est secrète. Aux Etats-Unis, le magot ne baisse que de quelques milliards de dollars par mois : rien pour alimenter aujourd'hui la hausse des taux longs. En zone euro, le magot montera jusqu'à la fin de l'année, et rien n'est dit sur sa baisse à partir de 2019. Le sujet n'a pas été discuté par la BCE, comme l'a confirmé Mario Draghi le 25 octobre. Il reste un à deux mois pour le faire, dit-il. De toute manière, le réinvestissement des titres du magot qui arrivent à maturité va se poursuivre « for an extended period of time », répète Mario Draghi, sans plus de précisions. » (5) Aux mots codés « magots », « politique monétaire secrète », l'économiste français a été direct, il n'a pas pris de gants. Ces quantitative easing, il les apparente à des magots qui dans un sens le sont pour les quantitative easing, sauf que les programmes sont légaux, relevant du droit des cinq grandes Banques centrales sous la houlette de la première parmi elles, la « Fed américaine » qui crée l'argent et les entraîne à financer l'ensemble de la planète, bien sûr dans leur intérêt bien compris. Ecoutons une autre analyse qui corrobore cette analyse. « Comment la Fed est devenue maître de l'économie mondiale ? », un article du journal français Le Monde. Le titre est éloquent. On devrait plutôt dire « Comment la Fed et la BCE sont devenues des maîtresses du monde ? » Sans sa consœur BCE, la Fed aurait eu beaucoup de difficultés pour s'imposer au monde. « La Réserve fédérale américaine fête ses 100 ans le 23 décembre. Si sa mission se limite en théorie à veiller à la stabilité des prix et au plein-emploi aux Etats-Unis, c'est aujourd'hui elle qui donne le tempo de l'économie mondiale comme de l'ensemble des marchés financiers. Et ce n'est pas près de changer... LA FED, LE DOLLAR ET LA PUISSANCE Branle-bas de combat chez les argentiers de la planète. A Bruxelles et Washington, cette semaine, on va phosphorer sur l'avenir de l'euro, du dollar et des banques. Car tout cela est le même sujet, celui du lien indéfectible entre l'économie, la monnaie, les banques et la souveraineté des nations. Auront-ils, tous ces banquiers et fonctionnaires en costume croisé, une pensée émue pour le flamboyant Alexander Hamilton (1757-1804), l'un des Pères fondateurs de la nation américaine ? C'est lui qui fut à l'origine du premier embryon de banque centrale en Amérique. A l'époque, en 1791, il s'agissait de trouver une solution pour payer la dette de la guerre d'indépendance. Il fallut un siècle de plus et de nombreuses crises financières avant que n'émerge la Réserve fédérale des Etats-Unis. Née le 23 décembre 1913 sur les décombres d'une gigantesque panique bancaire, la Banque centrale américaine est investie de deux missions principales : la stabilité de l'économie et du système financier. Elle doit surveiller l'évolution des prix et du chômage, et superviser banques et institutions financières. Ce qu'Hamilton avait perçu, il y a deux cents ans, c'est qu'une monnaie ne peut pas se développer sans un système financier puissant et régulé. Il était persuadé, comme Adam Smith (1723-1790), que les banques sont la « nurserie de la richesse nationale », celles qui transforment des stocks inertes d'or et d'argent en capital productif, irriguant l'économie et donc la prospérité d'un pays. LE POUVOIR DES MOTS C'est ce qu'avaient oublié les pères fondateurs de l'euro. Ils avaient bien créé une banque centrale puissante et indépendante, mais sans le pouvoir sur les banques. C'est ce qui sera corrigé, espère-t-on, cette semaine à Bruxelles avec l'adoption de l'union bancaire. Cela sera-t-il suffisant ? Pas sûr. Dans ce domaine, l'Europe évolue en territoire inconnu. Jusqu'à présent, toutes les tentatives d'établir une monnaie supranationale ont échoué. Comme le souligne l'économiste Michel Aglietta, la monnaie, qui est le langage de l'économie de marché, est indissociable de la souveraineté, qui se traduit aussi par une union politique et budgétaire. Et son statut reflète la puissance de son maître. Le dollar s'est construit sur les ruines des deux guerres mondiales et son hégémonie (qui a remplacé celle de la livre anglaise) a été consacrée par les accords de Bretton Woods en 1944. Aujourd'hui encore, en dépit de l'abandon de Bretton Woods au début des années 1970 et de la tourmente monétaire qui s'en est suivie, plus de 80% des échanges mondiaux se libellent en dollar. C'est ce qui autorise les Etats-Unis à s'endetter hors de proportion sans en payer le prix acquitté par les Européens ou les Asiatiques. C'est ce qui constitue la force de la Fed, capable de plonger n'importe quel pays du monde dans la crise par le seul pouvoir des mots. Car le commerce international a besoin d'une monnaie de référence. Aussi, pendant encore longtemps, le dollar sera roi, et la Fed sera reine. » (6) L'auteur de cet article ne voit que la Fed qui émet le dollar, en disant que « l'Europe évolue en territoire inconnu. Jusqu'à présent, toutes les tentatives d'établir une monnaie supranationale ont échoué. ». La même pensée revient sur l'absence d'une « union politique et budgétaire », comme le recommandent les Banquiers de la zone euro, Jens Weidmann pour l'Allemagne et François Villeroy pour la France. Cependant cette avancée dans la constitution de la BCE a demandé plus de 70 ans. Le premier jalon a été le Marché commun européen né avec le traité de Rome de 1957. Et des jalons historiques ont succédé pour arriver au formidable progrès qu'est la BCE. Elle joue, depuis deux décennies, en Europe et dans le monde, sur trois fronts économique, financier et monétaire. La BCE n'est pas seulement la Banque centrale de l'Europe des Dix-Neuf, elle est à la suite de sa consœur-aînée, la Fed américaine, la 2ème Banque centrale des Banques centrales du monde. Quant à l'union politique et monétaire européenne, elle surviendra inéluctablement. C'est une question de temps et tout viendra en son temps comme tous les progrès passés. Quant à ceux qui pensent, en Europe, que l'on sorte de l'euro, en France et ailleurs, ils ne savent simplement pas ce qu'ils disent. On ne tire pas d'un trait sur une structure qui a soixante-dix ans d'histoire. De plus, ce ne sont pas les Européens qui ont construit l'Europe même si ce sont eux qui l'ont construite, c'est avant tout l'histoire et les grands événements (guerres mondiales, crises, constitution de blocs, guerre froide...) qui l'ont dictée. Aujourd'hui, le monde est à la croisée des chemins. Les dirigeants du monde, et cela concerne les Banquiers centraux américains et européens, comprendraient-ils qu'il n'y a pas que la Chine qui peut être un « grain de sable » dans ce pouvoir hégémonique qu'ils ont sur le monde ? La Chine cherche à leur disputer le pouvoir monétaire exorbitant qu'ils ont sur le monde. La question qui se pose est qu'à force de tirer sur ce pouvoir prédominant que sont les quantitative easing et leur rupture, la corde pourrait casser. La pandémie du coronavirus n'a-t-elle pas bouleversé les plans étasuniens et européens, et qui a plongé le monde entier sauf la Chine dans la récession, en 2020, au point qu'elle a amené les Banquiers centraux de changer fusil d'épaule, en particulier le Banquier de la Fed américaine, et d'injecter massivement des liquidités monétaires, en l'espace de deux ans, et avec les plans de relance, pour un total de plus de 5000 milliards de dollars, soit près de 20% du Pib américain. Objectif : « sortir les États-Unis des conséquences de la crise sanitaire mondiale. » Une déflation mondiale (crise de liquidités) s'est transformée en inflation mondiale ; les prix de pétrole ont remonté de nouveau pour jouer leur jeu monétaire qui leur est échu depuis 48 ans ; plus précisément depuis les crises monétaires intra-occidentales au début des années 1970, avec la fin du dollar-or métal et son remplacement par le dollar-or noir ou « pétrodollar », en 1973. La hausse des prix de pétrole et des matières premières qui a suivi a fait le bonheur du plus grand nombre d'humains vivant sur cette planète Terre. Aussi se pose-t-on la question : « la pandémie est-elle venue par un simple hasard de temps, un simple concours de circonstances dans l'espace et le temps ? N'est-elle pas une réponse de quelque chose qui dépasse les humains ? D'autant plus que la pandémie est toujours là, change de virus comme une personne « missionnée » qui change d'habit pour faire ce qu'elle a à faire. Pour régler ce qu'elle a à régler ? Cette pandémie ne pousse-t-elle pas les Banquiers centraux à « réfléchir » sur son message sanitaire qui est aussi métaphysique ? Comme les politiques monétaires non conventionnelles sont à l'échelle mondiale, la pandémie est aussi mondiale. Ne pose-t-elle pas une question de moralité sur ce qui se passe sur cette planète Terre ? Ne dit-elle pas : « Est-ce moral pour les Banquiers centraux occidentaux de maintenir les pays d'Afrique depuis 2014, aujourd'hui on est en 2022, la neuvième année, d'enregistrer année après année des déficits commerciaux, avec une montée de l'inflation dans leurs économies et une paupérisation, une déchéance dans les guerres, les crises politiques et économiques sans cesse renouvelées pour leurs peuples ? Selon le FMI, en 2020, l'Afrique comptait 28 pays en surendettement sur 54, soit plus de la moitié de l'Afrique. Et le nombre de pays à ce train de quantitative easing, « s'il sera interrompu, comme le laisse entendre le Banquier central américain Jay Powell, avec trois augmentations prévues du taux d'intérêt court directeur de la Fed en 2022, et trois autres en 2023 », demain, c'est-à-dire dès fin 2022, 2023... le prix du pétrole et des matières premières chuteront. De nouveau, une situation très difficile pour les pays d'Afrique. Ce ne sera pas 28 pays mais 40 pays d'Afrique qui seront en surendettement, soit les trois quarts de l'Afrique. Et de nouveau une situation déflationniste au niveau mondial. Comment l'Afrique pourrait-elle rembourser ? Comment l'Afrique pourrait-elle s'en sortir ? Et l'Amérique du Sud et ailleurs. Et l'Occident ne sera-t-il pas asphyxié financièrement ? Mais l'Occident pourra toujours s'en sortir contrairement aux peuples d'Afrique... qui n'ont pas de BCE et de Fed. La pandémie n'est-elle pas un signal d'alarme ? N'est-elle pas un avertisseur d'autres dangers à venir dont on ne sait lesquels et qui peuvent frapper n'importe qui sur la Terre. Comme l'a énoncé Jacques Chirac, de son vivant, dans son discours à l'Élysée « Déclaration de M. Jacques Chirac, Président de la République, sur la recherche d'une mondialisation humanisée et maitrisée, Paris le 15 avril 2003. » (7) Ne faut-il pas penser à une « mondialisation plus humaine plus solidaire ». Et cela passe par les convictions des Banquiers centraux occidentaux de penser à cette perspective sinon c'est l'histoire qui décidera de la marche à suivre pour le monde humain. Une marche qui sera sous la contrainte comme elle l'est aujourd'hui. Il existe des peuples qui ont aussi le droit d'exister, non dans la richesse, mais de vivre aussi, non dans la crainte d'être affamés, une crainte qui viendra de ceux qui dominent le monde, de ceux qui ne pensent qu'eux seuls existent sur terre. Est-ce juste ? *Auteur et Chercheur indépendant en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective - www.sens-du-monde.com Notes : 3. « Le bilan de la Fed passe le seuil des 4.000 milliards de dollars », par la Tribune.fr. Le 20 décembre 2013 https://www.latribune.fr/actualites/economie/international/20131220trib000802072/le-bilan-de-la-fed-passe-le-seuil-des-4.000-milliards-de-dollars.html 4. Prix du baril https://prixdubaril.com/ 5. « Quantitative Easing : la politique monétaire secrète », par Jean-Paul Betbeze. Le 20 novembre 2018 http://www.jpbetbeze.com/medias/quantitative-easing-la-politique-monetaire-secrete/ 6. « Comment la Fed est devenue maître de l'économie mondiale », le Journal Le Monde. Du 17 décembre 2013 https://www.lemonde.fr/emploi/article/2013/12/17/comment-la-fed-est-devenue-maitre-de-l-economie-mondiale-dans-le-monde-du-17-decembre_5995247_1698637.html 7. Déclaration de Jacques Chirac, à l'Elysée, le 15 avril 2003 https://www.elysee.fr/front/pdf/elysee-module-10190-fr.pdf |
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