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«Les opérations de secours,
comme celle menée par l'Ocean Viking, sont accusées
par l'agence européenne de contrôle aux frontières Frontex
d'« influencer la planification » des réseaux d'immigration clandestine. Les
associations, elles, réfutent toute collusion. Viking, Rise Above,
Géo Barents, Mare Jonio, Sea
Watch 3, Open Arms Uno et
tant d'autres bateaux ambulants, la flotte des ONG en Méditerranée n'a jamais
été aussi étoffée. La moitié est liée à des ONG allemandes. Ces navires sont au
moins une vingtaine à se répartir les interventions en mer, épousant le rythme
effréné imprimé par les réseaux du crime organisé qui s'enrichissent sur la
détresse humaine en mettant à l'eau, principalement depuis les côtes libyennes,
des embarcations surchargées d'exilés. Avec, en toile de fond, cette question
lancinante dans les pays d'accueil : les humanitaires sont-ils, sans le
vouloir, les garants d'un système qui ne fonctionnerait pas aussi bien sans eux
? », écrit le journal le Figaro dans son édition du 20
novembre 2022.
Quand on apprend quelques jours plus tard, le 29 novembre 2022, que « le gouvernement allemand a présenté un projet de réforme visant à simplifier l'accès à la nationalité allemande pour les immigrés », toute cette lucrative affaire de charité « immigrationniste » éclaire d'un jour nouveau les sombres plans de la bourgeoisie européenne impérialiste. En effet, le ministre de l'Intérieur allemand, Nancy Faeser, a dévoilé un projet de réforme qui vise à changer les règles d'attribution de la nationalité. L'objectif est de faciliter l'intégration des immigrés dans une Allemagne sénile pénalisée par le manque de main-d'œuvre en les naturalisant plus rapidement. Actuellement, les immigrés doivent justifier de huit années passées en Allemagne pour faire une demande de nationalité. La nouvelle loi compte réduire ce délai d'attente à cinq, voire à trois ans si le résident maîtrise parfaitement la langue ou a fait du bénévolat. Bénévolat ? Encore ce paravent de charité (chrétienne) excipé comme gage de vertu... de la soumission à l'ordre social inique. Comme l'avaient écrit Karl Marx et Friedrich Engels : « Les principes sociaux du christianisme (remplacés aujourd'hui par les droits-de-l'hommisme otaniens et l'humanitarisme bourgeois interventionniste) ont justifié l'antique esclavage, glorifié le servage du Moyen-Âge et s'entendent également au besoin à défendre l'oppression du prolétariat malgré tous les petits airs navrés qu'ils se donnent. Les principes sociaux du christianisme prêchent la nécessité d'une classe dominante et d'une classe opprimée, et n'ont à offrir à cette dernière que le pieux souhait que la première veuille bien se montrer charitable. Les principes sociaux du christianisme placent dans le ciel le règlement consistorial de toutes les infamies subies sur cette terre. Les principes sociaux du christianisme proclament que toutes les infamies des oppresseurs envers les opprimés sont ou bien la juste punition du péché originel et des autres péchés, ou bien l'épreuve à laquelle le Seigneur, dans sa sagesse, soumet ceux qu'il a sauvés. Les principes sociaux du christianisme prêchent la lâcheté, le mépris de soi-même, l'abaissement, la soumission, l'humilité, bref toutes les qualités de la canaille. Les principes sociaux du christianisme (aujourd'hui par les droits-de-l'hommisme otaniens et l'humanitarisme bourgeois interventionniste) sont des principes de cafards, et le prolétariat est révolutionnaire ». La charité, cette œuvre d'âmes viles et serviles, est la sœur jumelle de la religion, cet autre refuge d'aliénation qui sert d'« abri atomique » cultuel pour se soustraire à la question sociale, à la mission salvatrice de la révolte sociale, à l'émancipatrice insurrection révolutionnaire. Une chose est sûre : la charité, cette action caritative épisodiquement pratiquée pour se donner bonne conscience, n'a jamais éliminé la misère. « C'est donc une triste mais instructive vérité à reconnaître et à mettre à profit cette impuissance de la charité collectivement et individuellement exercée. Il est donc malheureusement incontestable que cette charité, malgré son organisation puissante, malgré les nombreuses sociétés d'assistance qu'elle a fondées, malgré l'abondance des offrandes et des legs pieux, et malgré le concours actif de la bienséance municipale; c'est une triste et instructive vérité à proclamer bien haut, que la charité, alimentée par tant de canaux et tant de sources intarissables, ne peut pas préserver la cité qui se dit et se croit la plus civilisée de l'univers, d'avoir en son sein, à côté des merveilles d'une construction gigantesque, à côté de ses fastueux palais et de ses riches comptoirs, des populations nues et affamées, dont les privations et les souffrances extrêmes ne sont pas purement locales », dénonçait déjà au début du XIXe le saint-simonien François Barthélemy Arlès-Dufour. Aujourd'hui, dans cette phase de décadence du capitalisme, marquée par le désordre mondial délibérément entretenu par le capital belligène, notamment par les multiples guerres impérialistes et les boucheries interethniques, induisant un exode massif de populations transformées en hordes vagabondes, la bourgeoisie européenne instrumentalise ces convulsions en force opportunément exploitable à son avantage. Notamment la question sensible des migrants. Quoique chacun de son respectif État, officiellement, prône la fermeté en matière de politique migratoire, la bourgeoisie européenne œuvre en sous-main à l'ouverture des frontières par des appels d'air soigneusement orchestrés par des instances patronales via des filières clandestines, agissant sous couvert d'humanitarisme. De nos jours, avec la crise systémique du capitalisme, la seule perspective offerte aux prolétaires est le chômage. Le seul avenir échu aux pauvres des pays sous-développés est l'exil vers les continents riches, notamment l'Europe et l'Amérique du Nord. Et cette émigration est favorisée et soutenue par les puissances financières, le grand capital occidental, assoiffé de main-d'œuvre corvéable et taillable à merci. Immigration convoitée également pour son pouvoir d'inflexion baissière des salaires. Il est communément reconnu que la main-d'œuvre immigrée tire les salaires vers le bas. Et la conscience de classe ouvrière vers les abîmes de l'idiotisme politique, vers l'esprit tribal et la dévotion religieuse. Dans le Capital publié en 1867, Marx écrit : «Le système capitaliste développe aussi les moyens (...) d'augmenter en apparence le nombre des travailleurs employés en remplaçant une force supérieure et plus chère par plusieurs forces inférieures et à bon marché, l'homme par la femme, l'adulte par l'adolescent et l'enfant, un Yankee par trois Chinois». Entre la date de la rédaction de ce texte et notre époque contemporaine, aucun changement notable de cette réalité décrite ingénieusement par Marx. Sinon, celui des trois Chinois : ils ont été remplacés par des millions de migrants, ces «forces inférieures» disposées à s'employer à bon marché. Cette armée industrielle de réserve mondiale, réservoir inépuisable du capital. Ces dernières décennies, la survie du capital européen sénile se paye au prix de la «traite négrière». Le capitalisme européen est né avec la mise forcée au travail de paysans autochtones chassés de leurs terres et d'esclaves étrangers capturés, il survit par l'importation clandestine de forces africaines et orientales pour les exploiter avec des salaires de misère. Enfin, preuve de la nature foncièrement bourgeoise des ONG négrières œuvrant sur les mers de la Méditerranée, ces thuriféraires des flux migratoires : elles ne s'attaquent jamais aux causes capitalistes et impérialistes de l'émigration. L'humanitarisme de ces ONG « immigrationnistes » ressemble à celui de la Croix-Rouge opérant au cours de la Première Guerre mondiale sur les fronts de guerre, dont le jeune Léon Trotski raillait l'activisme philanthropique militairement intéressé : «Elle sert à soigner plus vite les blessés pour les renvoyer se faire tuer au front». Les ONG négrières arrachent les migrants des affres de la misère africaine pour les convoyer vers les bagnes industriels des pays capitalistes européens mortifères, aux populations autochtones affligées de maladies psychiatriques contagieuses et gangrenées par un racisme décomplexé réservé justement aux seuls migrants africains, maghrébins et orientaux. En tout état de cause, la question migratoire ne peut être résolue ni dans le cadre national ni au sein du système capitaliste. Encore moins dans le cadre d'une mission humanitaire, ni par une œuvre de charité. Mais par le sabordage du capitalisme, ce système en plein tangage économique qui précipite l'humanité dans le naufrage existentiel. |