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Le ton est donné, l'émigration
est le sujet principal des candidats déclarés ou putatifs des élections
présidentielles françaises de 2022, alors que les Français, plus préoccupés par
la baisse de leur pouvoir d'achat ne partagent pas cette «angoisse». En effet,
aucune des enquêtes d'opinion réalisées depuis le début de la campagne ne place
l'immigration comme sujet de préoccupation majeure des Français. En réalité,
les études placent désormais alternativement les thèmes du pouvoir d'achat ou
de la sécurité en première position.
Le 20 octobre dernier, un sondage sérieux faisait du pouvoir d'achat, et de très loin, le thème «qui comptera le plus dans le choix des électeurs». 45% des personnes interrogées (sur un échantillon représentatif de 1.002 personnes) plaçaient le pouvoir d'achat dans les trois thèmes les plus importants. 23% des sondés le plaçaient en première position. Le pouvoir d'achat des Français est en tête des préoccupations. Pourtant, les candidats au Congrès LR ont passé près de 60% du temps de leur débat à parler d'immigration ou de sécurité. Dans l'équipe de Michel Barnier, on espère aussi que les thématiques, ou plutôt l'ordre des thématiques, varieront lors des deux prochains débats. «L'immigration et la sécurité correspondent à des préoccupations des Français». Même si la première préoccupation des électeurs potentiels, c'est le pouvoir d'achat, peut-être aurait-il été préférable pour les candidats de ne pas focaliser le débat sur l'immigration et la sécurité. La tonalité diffère dans l'équipe de Xavier Bertrand. Si l'immigration n'apparaît jamais comme la principale préoccupation des Français, les candidats et? les médias en font leur cheval de bataille. Les candidats à l'investiture présidentielle du parti Les Républicains rivalisent de propositions pour limiter l'immigration et lutter contre l'insécurité, allant jusqu'à reprendre les discours de Marine Le Pen et d'Éric Zemmour. «Arrêter l'immigration familiale», «cesser le droit du sol automatique», «baisse de 30% de l'immigration de travail», «moratoire» pour «donner un coup d'arrêt immédiat à tous les flux». Michel Barnier, Xavier Bertrand, Éric Ciotti, Philippe Juvin et Valérie Pécresse ont consacré bien plus de temps à l'immigration, à la sécurité et au terrorisme, qu'aux sujets qui préoccupent réellement les Français. «Une immigration incontrôlée et une intégration ratée, ça peut disloquer une nation. Car oui, il y a un lien entre immigration, islamisme et terrorisme et un lien entre immigration et insécurité», a ainsi affirmé Valérie Pécresse. Ce thème a été celui du FN puis du RN depuis des décennies. Thème qui, pendant longtemps, a valu à l'extrême droite française, en général, et au FN, en particulier, d'être ostracisés par les appellations de raciste, xénophobe et même diabolique. L'arrivée de Zemmour, qui récupère une partie de l'électorat de Marine Le Pen, met celle-ci dans une position difficile et rend sa présence au deuxième tour incertaine. Ce qui inquiète aussi Macron qui se voyait réélu dans un fauteuil à l'occasion de ce duel tant espéré. Valérie Pécresse dénonce «l'aveuglement d'Emmanuel Macron sur l'islamisme et l'immigration incontrôlée». Elle déplore que le nombre d'étrangers en situation irrégulière «ne cesse d'augmenter dans notre pays», alimentant «la misère publique, l'économie souterraine et les trafics en tous genres». Xavier Bertrand, quant à lui, se déclare comme Marine Le Pen en faveur d'un référendum sur la laïcité et l'immigration. Le président du Conseil régional des Hauts-de-France met en garde contre la «poussée de l'islamisme». Il promet 20.000 places de prison supplémentaires et d'expulser «systématiquement» les délinquants étrangers en fin de peine. Il partage les craintes de Zemmour, en affirmant :»Il y a aujourd'hui un vrai risque de guerre civile». Michel Barnier a promis, s'il était élu, un référendum pour permettre à la France de retrouver sa «liberté de manœuvre» en matière migratoire. Eric Zemmour ? Son programme, en gros celui du RPR UDF de 1990. Il a imposé à tous les thèmes de l'immigration et sécuritaires comme sujets majeurs. Pour lui, l'immigration est la mère des batailles, car il est persuadé que du gain de cette bataille dépend la résolution des autres problèmes, identité, insécurité, violence, communautarisme, islamisme, réformes de la justice et une part aussi des problèmes économiques. Pourtant, le sujet de l'immigration ne semble pas inquiéter plus que ça la population française, qui a d'autres soucis. «L'immigration fait partie du monde dans lequel nous vivons. Toutes les démocraties connaissent aujourd'hui cette réalité. L'immigration n'est pas quelque chose dont nous pourrions nous départir. De surcroît, l'immigration se révèle une chance d'un point économique, culturel, social». C'est l'avis d'un grand nombre de Français qui ne placent pas ce sujet dans leurs préoccupations premières. Pour certains économistes, «l'immigration est une chance et une richesse pour la France». Lors d'une conférence de presse, Marine Le Pen a proposé un référendum sur la citoyenneté, l'immigration et l'identité si elle est élue à la présidentielle de 2022. Sur ce sujet, elle apparaît en réalité très à la remorque. Sur ce thème qui l'identifie aux yeux de son électorat, elle arrive avec une proposition qui est assez peu «disruptive» à ce stade de la campagne. L'idée d'un référendum a en effet déjà été avancée par des candidats issus de LR comme Xavier Bertrand. La stratégie de Marine Le Pen sur ces thèmes demeure la même, conserver sa base tout en allant mordre sur le centre droit, en donnant des gages de crédibilité. Marine Le Pen abat ses propositions sur l'immigration pour rebondir. Emmanuel Macron tente également de jouer sur le terrain de l'émigration puisqu'il a décidé de réduire de 50% les visas accordés à l'Algérie et au Maroc. Le président sortant cherche-t-il, lui aussi, à s'insérer dans le sujet commun de la campagne grâce à cette mesure. Pour Emmanuel Macron, il faut se montrer crédible sur ce thème s'il veut parler à l'électorat de centre droit. Le problème, et il l'a compris, c'est qu'à ce stade, ce sujet «empoisonnant» de l'immigration passe par des bras de fer politiques avec les pays d'origine qui refusent de reprendre leurs ressortissants. C'est la bonne stratégie si l'on est dans un rapport de force favorable avec lesdits pays, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. Ainsi, en pleine campagne présidentielle, la thématique sécuritaire est remise en avant par le biais des sondages et des discours politiques. L'émigration selon Zemmour et Marine est synonyme de terreur, de terrorisme et de la façon dont on peut s'en protéger. Ces «affirmations» sont ainsi entrées dans le champ lexical des candidats et de leurs programmes. À tel point qu'il importe de se demander si la peur du terrorisme et de la terreur n'est pas devenue un outil récurrent du politique ces dernières décennies. Ainsi donc, l'immigration s'impose comme un thème de campagne en 2022. Michel Barnier, lui aussi, a demandé un «moratoire sur l'immigration». Cela répond-il à une inquiétude partagée par la majorité des Français ? Pas vraiment, puisque dans l'enquête IFOP-Sopra, le sujet n'arrive qu'à la cinquième place avec 30% seulement des Français le jugeant comme étant une priorité. Il ne faut donc pas céder à l'idée que ce thème écraserait les autres. Il n'est pas judicieux de faire de la campagne sur l'immigration le sujet principal des candidats. Mais pour certains d'entre eux, notamment Marine Le Pen et Éric Zemmour, l'immigration peut être aussi une porte d'entrée sur la plupart des sujets traités. Pourquoi tout le monde parle aujourd'hui de référendum sur l'immigration ? Parce qu'il y a déjà plusieurs lois par quinquennat qui sont consacrées au sujet et qui n'ont jamais réglé le problème. Les politiques se disent que si l'on fait passer le texte par référendum, cela sera plus fort?, sauf que, un référendum sur l'immigration est inconstitutionnel eu égard à l'article 11 de la Constitution française et depuis 2005. Donc, il ne peut pas y avoir de référendum sur l'immigration sans, d'abord, réviser la Constitution, ce qui implique l'aval du Sénat. Ce sujet cher à Marine Le Pen et repris pas d'autres candidats sur un référendum sur l'immigration est donc irréalisable. On sait pertinemment que des tensions autour des politiques migratoires en France, il y en a toujours eu. Mais elles ont été gérées diplomatiquement, sans grande publicité. Alors, ces annonces de Marine et consorts sont pour le moins choquantes et surtout «électoralisantes». Malgré ces réalités, certains candidats persistent à vouloir faire croire que l'émigration est le principal, voire le seul souci des Français en ce moment. On reconnaît les médiocres au fait qu'ils ne s'interdisent aucune ambition; les locataires de l'Elysée de ces trois derniers quinquennats peuvent leur donner à penser, il est vrai, que tout est possible et permis en ce bas monde dont l'affaissement se confirme jour après jour. Les nostalgiques de l'Algérie française n'en démordent pas. C'est les émigrés (surtout algériens) qui sont à l'origine de leurs malheurs. Zemmour et Marine Le Pen, tout comme Arnaud Montebourg, fils de Leïla Ould Cadi, née à Oran en 1939, petit-fils d' Ahmed Ould Cadi, agha de Frenda, qui combattit aux côtés de l'armée française lors de la conquête de l'Algérie, et qui fut fait chevalier de la Légion d'honneur en 1842, officier en 1852, commandeur en 1860 puis grand officier dans cet ordre en 1867, ne sont en réalité que les enfants et petits-enfants de leurs ancêtres car ces nostalgiques d'un temps à jamais révolu, ne sont que la continuation de la guerre d'Algérie par d'autres moyens; transmission de génération en génération de la haine. Les propos d'Arnaud Montebourg sur son projet d'interdire les transferts d'argent privés vers les pays refusant d'octroyer des laissez-passer consulaires à leurs ressortissants expulsés, ont été perçus par les membres qui les ont repérés avant tout comme une «manœuvre politicienne». La thématique la plus réclamée par les Français est «le pouvoir d'achat» (63%, 62% pour les sympathisants de droite) devant l'éducation (54%, 51% chez les sympathisants de droite). La France est en panne économiquement, et pour les opérateurs commerciaux, ce qui se passe aujourd'hui en Afrique est bien plus grave puisque leurs entreprises perdent leurs monopoles dans des domaines stratégiques au profit d'entreprises chinoise, américaine ou russe. Sénégal, Algérie, Cameroun, Côte d'Ivoire? La France perd des parts de marché sur l'ensemble du continent africain et dans presque tous les secteurs au profit de plusieurs pays européens, de l'Inde, de la Turquie et de la Chine. Les ventes françaises en Afrique reculent dans tous les principaux secteurs exportateurs. Cette baisse de la part de marché française atteint entre 15 et 20 points de pourcentage en Algérie, au Maroc, en Côte d'Ivoire ou au Cameroun et 25 points au Sénégal. Ce que ne veulent pas comprendre les candidats à la présidentielle, c'est que le pouvoir d'achat est un classique des présidentielles qui ne se dément pas : il s'impose peu à peu comme un thème majeur. La flambée des prix du gaz (+57% en un an) ou de l'essence (+30% en un an pour le diesel) le rend encore plus incisif et inflammable en cette campagne en vue de 2022. Comment remplir le frigo ? Une grande majorité des Français attendent toujours une réponse à cette question dans la campagne présidentielle. 81% des Français estiment que leur pouvoir d'achat a baissé au cours des dernières années. Un sentiment qui touche»toutes les catégories de revenus et toutes les sensibilités politiques» (82% des sympathisants de gauche et 85% des sympathisants de droite). Le pouvoir d'achat est pour 45% des Français le thème le plus décisif pour choisir un nouveau président de la République ou reconduire le sortant. L'Algérie, qui était l'un des plus importants clients de la France sur le plan économique, est en train de revoir sa position. En effet, les relations algéro-françaises traversent une période de fortes turbulences depuis les déclarations d'Emmanuel Macron sur l'inexistence de la nation algérienne avant la colonisation française. En réaction aux propos controversés du président français, l'Algérie a rappelé son ambassadeur à Paris, Mohamed Antar Daoud, et interdit le survol de son territoire par les avions militaires français en opération au Mali. Suite à cela, l'Algérie a récemment connu une progression importante dans le rapprochement et de la coopération avec la Turquie, au détriment de la France, dont les relations avec les pays arabes connaissent un refroidissement et une crise qui ont renforcé les récentes déclarations du président Emmanuel Macron. De plus, les importations algériennes de blé français sont en baisse. Selon le cabinet spécialisé dans les cotations de céréales, l'Algérie a importé 179.000 t de blé de cette origine au mois d'août. Agritel indique que la France est talonnée de très près par les pays baltes, qui augmentent leurs exportations vers l'Algérie. A titre de comparaison, les importations nationales de blé provenant de l'hexagone avaient atteint les 432.000 t en janvier dernier. L'Algérie, qui veut jouer son va-tout sur la production nationale, tente de diversifier ses sources d'approvisionnement en blé, afin de casser le monopole français et créer une dynamique de concurrence chez ses fournisseurs. L'Algérie était jusque-là le principal débouché du blé français à l'export. Aujourd'hui, la France pourrait perdre sa place fragile de leader, entre la Russie qui cherche à pénétrer le marché et devenir un fournisseur du pays, et l'Algérie qui, de son côté, cherche à rationaliser ses achats en misant sur la production nationale. Jusque-là, chaque année, entre 20 et 25% des exportations françaises de blé se font à destination de l'Algérie. S'agissant des exportations françaises de blé, ce sont en moyenne plus de deux tonnes sur cinq partaient vers l'Algérie. En 2017/18 et 2018/19, c'était même plus d'une tonne sur deux ! Le déclin progressif de la présence économique de la France en Algérie a été accentué par la récente annonce par les commerçants algériens, cette semaine, du gel des accords de partenariat d'un montant d'un milliard d'euros. En évaluant l'indice coopératif entre l'Algérie et Paris depuis l'élection du président Tebboune, les économistes considèrent que la coopération se caractérise par un déclin dramatique de plusieurs facteurs dont le plus important est le passé colonial et la volonté de garder l'Algérie en tant que marché, par l'influence dans la prise de décision. Ils citent la suspension du travail avec les bureaux d'études étrangers dans les grands projets, pour la plupart français, car ils drainaient 10 milliards de dollars par an. Les économistes évoquent une baisse de 50% des importations de blé pour l'année 2020, la première du genre en 58 ans, estimant la perte de la France à environ 2,5 milliards de dollars. A cela s'ajoute le non-renouvellement du contrat de gestion de l'eau de la société française (Suez), ce qui a entraîné une perte de 277 millions de dollars, ainsi que le non-renouvellement du contrat du métro d'Alger, avec une perte de 130 millions de dollars. Le Maroc, lui aussi, tend à diversifier ses importations (surtout en armes) et se tourne vers Israël en pénalisant la France qui considérait le Makhzen comme sa chasse gardée. Une délégation israélienne vient de rencontrer le gratin de l'establishment sécuritaire marocain avec, à la clé, la signature d'un accord de collaboration militaire et stratégique, le premier du genre avec un pays arabe. Il ouvre la perspective de ventes d'armes défensives et offensives d'une valeur de plusieurs centaines de millions d'euros que la France a perdus. Le pacte survient alors que l'affaire Pegasus, ce logiciel espion de la société israélienne NSO, vraisemblablement vendu au Maroc, suscite toujours des remous. Cette tension diplomatique française avec Israël tranche avec l'apparente inertie diplomatique dont fait alors preuve la France à l'égard du Maroc. Malgré la prise de position de Christian Cambon, président du groupe d'amitié France-Maroc au Sénat contre toute condamnation du Maroc sur l'affaire Pegasus : «Comme je préside le groupe France-Maroc au Sénat, il est assez normal que ma première réaction soit : ?A-t-on les preuves ?', se justifie-t-il. J'ai trouvé positif que l'ambassadeur du Maroc en France ait initié des procédures auprès du tribunal de Paris pour que des enquêtes soient lancées». Les «enquêtes» auxquelles il fait référence sont en fait des plaintes en diffamation, distinctes de l'enquête ouverte sur le fond par le parquet de Paris.»Je suis un ami du Maroc, poursuit Christian Cambon. Donc, je n'en rajoute pas !», cela n'a pas empêché le Maroc de se tourner vers Israël qui s'engage à lui faciliter sa mainmise totale sur le Sahara occidental et ses richesses, contrairement à l'attitude «timide» de la France dans ce dossier. En s'attaquant à l'immigration et à l'Algérie qui a chassé la France, après une colonisation de 130 ans, Macron et les autres candidats font tous fausse route. |