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Devant le
rationalisme positiviste de la modernité et de la post modernité, des voix
s'élèvent un peu partout dans le monde réclamant le caractère sacré de la
nature. Cette dernière n'est pas uniquement un champ de production.
Des considérations spirituelles exigent que la défense et la protection de l'environnement soient la priorité de l'écologie intégrée. La dégradation de l'environnement est le signe visible des impasses vers lesquelles conduit le rêve de l'homme moderniste ; celui de se passer de la Transcendance. L'anthropocentrisme moderne épris de production, de conquête et de maîtrise forcenée de la nature a conduit au déséquilibre des rythmes cosmiques. Il a débouché sur une banalisation du sacré et une mathématisation de la nature. La finalité de l'homme est de vivre en harmonie avec lui-même, ses semblables et avec la nature. Cette demande est aujourd'hui plus que jamais, une réalité incontournable. Après un naufrage qui a commencé avec le positivisme scientiste et la géométrisation de l'Univers, l'homme repose les mêmes questions et retourne à sa nature première, celle d'un animal métaphysique. La confiance aveugle dans la science et la technologie se rétrécie. L'homme regarde vers les spiritualités ou tout simplement vers la métaphysique. Il cherche à nouveau sa place dans l'Univers et essaye de redéfinir son rôle dans la vie. La nouvelle vision qu'il souhaite avoir de lui et de l'Univers est globale. Il se rend compte qu'il n'est pas le maître absolu du monde mais qu'il fait partie de ce macrocosme impressionnant. Certains commencent à parler d'une nouvelle science méditante qui complète l'écologie classique. En 1960, le philosophe norvégien Arne Naess créa le concept «d'ECOSOPHIE» pour la protection de l'environnement planétaire. La racine «eco» dans son acception grecque originaire renvoie à «oîkos» c'est-à-dire : milieu naturel, habitat, maison. «Sophia» signifie en grec sagesse, savoir, connaissance. Au fait, tout cela est ancien. Mais le naufrage de la modernité et sa suffisance plate est tel que l'on appelle à des constructions cognitives nouvelles pour parer au plus urgent. Les adeptes de l'écosophie pour achever la construction de cette science méditante affirment d'abord que l'homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant mais s'inscrit dans l'écosphère comme une partie qui s'insère dans le tout. Nous allons voir infra que les anciennes sagesses ont déjà traité ces questions de la manière la plus appropriée possible. Donc, la notion d'écosophie est très ancienne. Au 4ièm siècle avant J.C., Kong-tseu (Confucius) disait : «Je suis un homme qui a aimé les anciens et qui a fait tous ses efforts pour acquérir leurs connaissances». L'écosophie dont il s'agit ici n'est pas l'écosophie des partis politiques, ni la pseudo-écosophie qui est une tricherie intellectuelle qui ne veut pas que l'homme retourne vraiment à sa nature céleste innée. Cela transparaît à travers les travaux de certains qu'Aristote appelait les «Théologues» qui ressemblent aux sophistes et qui sont les disciples des anciens sophistes. Les nouveaux sophistes sont les penseurs de la post modernité qui ont travesti la philosophie et les sagesses anciennes de l'Orient et de l'Extrême-Orient pour les remplacer par une inflation de langage qu'ils ont appelée philosophie. Ils définissent cette dernière comme une métalinguistique et une adlinguistique (J. Derrida, F. Guattari, G. Deleuze, M. Maffesoli, ?), autrement dit un jeu de mots qu'on ne trouve pas dans le dictionnaire et qui ne ne veut rien dire même pour eux. Le but c'est pour impressionner, faire du pédantisme arrogant et pour égarer l'homme qui veut retrouver son origine et sa boussole. Gilbert Hottois, philosophe et logicien belge a dénoncé dans plusieurs livres cette inflation du langage et notamment dans son livre «L'inflation du langage dans la philosophie contemporaine, Editions de l'université de Bruxelles, 1979, 379 pages). La science faustienne qui est un simple mythe, a dévoilé les secrets de l'Univers pour les rendre utilisables à des fins mercantiles. Les traditions métaphysiques indiennes, perses, grecques et orientales ont enseigné qu'il est de la nature du bien de se communiquer. C'est ce qui explique la présence à chaque niveau de l'environnement d'un système existentiel fait de contenants, de contenus et de modalités. La technoscience a profané et ridiculisé systématiquement tout ce qui est sain, sérieux et sacré et qui permet à l'homme de s'élever. L'intelligence de l'homme n'a de valeur que dans la vérité métaphysique pas dans une suite de langage ténébreux qui impressionne que les sots. Un homme sage et modestement doué de connaissances peut être supérieur à des philosophes habiles mais qui manquent de sens du réel comme les inventeurs de l'homme-dieu. Les anciennes sagesses considèrent que la nature (environnement) n'est pas uniquement les écosystèmes ayant des interrelations mais qu'elle est tout l'environnement cosmique et para-cosmique. Ses formes finies prouvent les traces de l'Infini. L'homme sage peut voir dans cet environnement les reflets du monde spirituel. Car pour lui, il est le miroir temporel pour approcher le suprasensible. Jadis, cet homme regardait les étoiles et lit dans le firmament les limites de l'Univers. Au-delà de ce ciel, il n'existe ni espace, ni matière, ni temps, mais uniquement la Présence divine. La symbolique que contient l'environnement est infinie. C'est cette symbolique qui a été négligée par la science de la post modernité et qui a débouché sur la destruction de l'environnement planétaire. Ce dernier est en réalité la face dévoilée d'un environnement caché immatériel. La préservation du dévoilé s'inscrit dans une démarche qui tend à la Transcendance. Grâce à cette symbolique, l'homme peut arriver, par la méditation à la connaissance de l'Etre. La science moderne avec sa métaphysique du Coca-cola a brisé les frontières de l'environnement. Toutes les possibilités à la dérive sont ouvertes à l'homme moderniste qui a coupé l'environnement de ses racines et l'a considéré comme purement matériel. Les sagesses anciennes ne s'occupaient pas uniquement des aspects quantitatifs de l'environnement mais des aspects qualitatifs et symboliques. Elles projettent de la lumière sur cet environnement jusqu'à ce qu'il devienne lucide, transparent et rattaché à ses archétypes transcendantaux. Elles permettent de saisir l'interrelation entre le microcosme et le macrocosme. A la lumière de toutes ces anciennes sagesses, on peut tirer une philosophie de l'environnement qui marie la raison et l'intellect afin d'éviter de tomber dans le piège du rationalisme agnostique de la Renaissance. La pratique profonde de cette connaissance peut délivrer l'homme de l'homme, l'environnement de l'homme et lui permettre de contempler l'Univers tel qu'il est pour rejoindre l'océan de l'existence universelle. Depuis la Renaissance en passant par le Darwinisme et toutes les pseudo-philosophies antimétaphysiques, tous les rapports entre l'homme, l'environnement et le Cosmos sont considérés à la lumière du flux et du changement. Cette Renaissance a élaboré une science séculière qui ne voit que l'aspect changeant dans l'environnement, c'est-à-dire, une science qui s'occupe uniquement du devenir sans s'occuper de l'être. La destruction de la vision sacrée de l'homme et de l'environnement correspond à la destruction de l'aspect immuable qu'y est associé. Les rapports entre l'homme et l'environnement sont permanents dans le changement. C'est ce que la Renaissance a négligé en ramenant la permanence au changement et à l'historicité. Les sagesses anciennes affirmaient l'existence de plusieurs éléments de permanence dans les rapports entre l'homme et l'environnement. L'élément capital c'est que l'environnement n'est pas une réalité ultime. Il comporte du relatif. Le relatif est tout ce qui n'est pas Absolu. L'Absolu est toujours l'Absolu et le relatif est toujours relatif. Le relatif est relatif par l'Absolu. L'Absolu est transcendant au relatif. La nature changeante de l'environnement montre métaphysiquement la réalité permanente qui le dépasse. Comprendre le relatif, c'est réaliser la présence de l'Absolu et du Permanent. Cette vérité métaphysique a toujours été associée à l'existence de l'homme même si des épisodes de son histoire sont venus la troubler si bien qu'il a pris le Permanent pour le relatif et le relatif pour le Permanent. Ceux qui soutiennent que tout est relatif, ont rendu Absolu ce relatif et vivent une contradiction étrange. La manifestation de l'Absolu dans le relatif en forme symbolique est un autre élément de cette permanence. Le symbole est comme un signe. Il n'est pas une émanation humaine. C'est un aspect de la réalité ontologique indépendante des catégories de perception de l'homme. C'est la révélation d'un ordre supérieur absolu dans un ordre inférieur relatif. Saisir ces symboles, c'est accepter la structure hiérarchique de l'environnement cosmique. L'homme de la Renaissance ne voit que changement dans la nature parce qu'il a fondé une civilisation d'images qui défilent en permanence dans son esprit si bien qu'il en est conditionné. Or si on réfléchit à l'environnement terrestre de l'homme, on y constate que la permanence est toujours présente. Le soleil se lève toujours à l'Est. La naissance d'un être a été toujours la même. L'homme lui-même est biologiquement le même depuis le premier jusqu'à aujourd'hui. Les changements apparents de la situation de l'homme dans la nature s'inscrivent dans la permanence. Toutes les choses, tous les êtres doivent avoir une réalité extérieure et une autre cachée qui les relie au monde métaphysique. C'est ce que professaient Platon, Aristote et leurs disciples. La forme appartient au monde de la multiplicité et l'essence conduit à l'Unité qui est l'origine de toutes choses. Cette doctrine de l'Unicité transcendantale de l'Etre a été exprimée par toutes les sagesses anciennes. L'homme ne peut plus continuer à voir dans la conquête de la nature son but final. La détérioration du cadre de vie, la pollution massive et la menace de destruction de l'humanité par le nouvel ordre économique de la terreur néolibérale doivent nous conduire à s'arrêter pour faire le point de la situation. La science qui se donne pour but la connaissance objective de la nature cependant refuse toutes considérations métaphysiques et spirituelles n'est pas le salut tant espéré. Le maintien d'une telle science finira par en détruire l'objet. La gravité de la situation est telle qu'il faudrait y revoir les principes. La réflexion pour une écosophie à la lumière des doctrines métaphysiques traditionnelles est une nécessité urgente. Cette écosophie doit être orientée pour étudier l'environnement comme étant une image d'un monde suprasensible plus grand. L'alliance de la science moderniste avec la technologie qui a donné la technoscience, mène le monde, sans aucun doute à l'échec. Jamais dans l'histoire de l'homme, le monde n'est en danger réel comme il l'est aujourd'hui. En appliquant les principes de la technoscience, l'homme moderniste a produit dans le domaine de l'urbanisme des monstres de laideur qu'on peut considérer comme la plus grande pollution architecturale jamais connue dans l'histoire. En appliquant la science méditante qui s'inscrit dans une vision métaphysique de la nature, l'homme traditionnel a produit des constructions d'une beauté inégalée et inégalable. La réalité matérielle n'est qu'un grain de poussière devant les mondes para-cosmiques qui l'enveloppent. L'homme doit changer son attitude possessive envers la nature. Il doit opter pour une vision où la nature devient pour lui un objet de contemplation et c'est normalement l'objet de l'écosophie. Autrefois, Platon avait compris que la simple chute d'un corps est en relation avec toutes les particules de l'Univers. Cette interrelation joue un rôle central. La sagesse traditionnelle de l'Extrême Orient parle des «dix mille choses» reliées entre elles et appartenant au tout. Le sage chinois Sêng-Chao disait : «Le ciel, la terre et moi avons la même racine, les dix mille choses et moi sommes d'une seule substance». Le principe métaphysique de l'Unité Transcendantale de l'Etre est le thème central de cette sagesse. Elle permet de connaître l'unicité de l'environnement planétaire qui dérive directement de l'unité du Principe divin. Bien que les écologistes modernes soient conscients de l'unité complexe de l'environnement et l'interrelation des écosystèmes, il leur manque l'aspect spirituel de la réalité ontologique qui est rattachée à la Source de tout ce qui est. Tout état inférieur de l'environnement tient sa réalité de l'état au-dessus de lui et dont il est inséparable. La destruction de l'environnement a eu lieu quand cette réalité a été négligée. Les considérations écocentriques pour la protection de l'environnement peuvent solutionner en partie la question. Mais elles ne peuvent pas résoudre les problèmes qui impliquent l'homme lui-même. Ce dernier trouble l'ordre qui existe dans les écosystèmes en intégrant des éléments non naturels dans la nature. Ce qui devait être recherché ce n'est pas l'équilibre économique de la terreur mondialiste mais l'équilibre cosmique qui maintiendrait l'harmonie et la beauté dans la nature. Ceci ne peut être possible que si et seulement si l'homme se remettait en paix avec la Transcendance, avec la nature et avec lui-même faute de quoi la tragédie actuelle ira en s'amplifi ant jusqu'au chaos total et sa disparition n'est qu'une affaire de temps. *Ancien cadre SNTF |