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Au point où en étaient arrivées les choses, la vie était devenue une
sorte de labyrinthe, où il y avait des passages secrets
pour éviter les barrages et les problèmes de toutes sortes que créaient les forces d'occupation coloniale. La résistance par le louvoiement devenue une seconde nature, un état d'âme, vous imprégnait dés que l'on était en dehors de son territoire. Et ce n'est qu'en entrant dans son secteur, son quartier, en ces lieux communs ou l'on retrouvait les personnes de confiance avec lesquels on pouvait se lâcher, que le naturel revenait, pour dire franc et fort, le fond de sa pensée, et ainsi donner libre cour à ces sentiments réelles. Alors c'est comme si la peur n'existait plus, qu'elle avait été vaincue et qu'apprivoisée, elle n'avait plus d'effets on vivait avec, elle ne faisait plus peur. Et ainsi dans chaque coin de ce vaste Clos Salembier, ou j'habitait, des petits groupes de personnes, les vieux à l'écart les jeunes plus en vue, tenaient leurs conciliabules et leurs débats en plein air ; l'ordre du jour étant partout et toujours le mêmes les «événements d'Algérie». Là s'échangeaient les informations que chacun, avait, a sa façon, collecter ou déduit à travers la rumeur, ou su lire entre les lignes des journaux, et surtout en- tendu la veille, à l'heure du couvre feux qui obligent a s'enfermer chez soit. L'heure ou le «roumi» dort et que les «indigènes» veillent, tendant l'oreille a l'écoute de «radio Algérie libre - Soute El Arabe» Et à l'écoute du passage des patrouilles militaires qui pouvaient vous tomber dessus en entrant par les terras-ses, et ou, en défonçant les portes, qu'il ne servait à rien de renforcer et de bar- ricader, car celas pouvait signifier « avoir quelque chose à cacher». A l'intérieur des maisons indigènes, tel des chats qui vivaient dans le noir, les ha -bitants hommes, femmes et enfants étaient tous branchées, n'ayant d'oreille que pour l'émission radio «chaîne brouillée» de l'Algérie libre et indépendante qui émettait tard dans la nuit, pour rapporter les faits d'armes des Moudjahidines. Et dans le lourd silence de la nuit, seul ceux qui savaient écouter, avaient raison de croire en la liberté. Et pour l'instant, de l'époque, la liberté traversait les ondes et pénétrait dans les foyers, pour y apporter les directives du FLN/ALN. Armant ainsi les patriotes de mots d'ordres qui allaient se transmettre dés le matin par l'autre chaîne de trans-mission «radiotrottoirs» qui allait quant à elle prendre la relève, par le bouche a oreilles, alimentant les relais d'opinions éparpillés à travers la ville. Et ces relais grouper au coin des rues transmettait à leurs tours les échos de la guerre comme eux seules savaient le faire. Moteur de sensibilisation en puissance, ils faisaient de nouvelles recrus pour l'action directe, et chacun aiguisé encore mieux son coutelas, fignolait un peu plus son programme d'action, projetant de rejoindre le maquis, après un coup d'éclat, après une action terroriste, liquider un ennemi dont il avait évalué la nuisance. On en était là. A ce niveau d'engagement. Après le congrès de la Soummam la situation dans les villes, a évolué si vite, que Les autorités Françaises eux même avaient perdu le contrôle de la société indigène. La situation était arrivée à ce niveau de maturité révolutionnaire, prédit par les précurseur du 1er Novembre, que l'ont pouvez constater dans les faits leurs prévi -sions, ils avaient dits : mettez la révolution entre les mains du peuple il s'en sai -sira, et la portera a bout de bras. En effets de plus en plus de jeunes patriotes la prenaient à bras le corps et ne pouvait que la mener à la victoire. En effet la révolution Algérienne avait fait mûrir la société Algérienne, qui avait dépassé les maîtres à penser français. Cette révolution en était arrivée à engen- drer sa propre dynamique, dont l'énergique rotation était à son rythme de croi- sance. La Révolution était parvenue à procréer ses propres pourvoyeurs, des combattants en marche. Elle avait donc atteint son point culminant de non retour. Elle était donc devenue invulnérable et plus rien ne pouvait ni l'arrêter, ni empêcher sa victoire, «victoire du peuple Algérien», et cela même si la guerre devait durer encore vingt ans. La victoire et inéluctable. C'est ainsi que dans et sur le tas, des jeunes hors du commun, sortaient du lot. Des érudits toutes les sociétés en possèdent, mais en temps de guerre les érudits, les géniaux, c'est ceux qui savent reconnaître la mort, et allait jouer avec elles, sans la craindre, au point que dans l'hardiesses, croire que la mort les aimaient, au point de ne pas les tuer. C'est ainsi que de très jeunes garçons et filles adultes avant l'age, prirent les armes pour aller à leur tour combattre pour la libération de leur pays. Et comme les papillons qui étaient seules à croire qu'ils étaient aimés des fleurs, beaucoup de ces jeunes ne s'étaient pas trompés en croyants que la mort les aimés ! Oui elles les aimées tellement qu'elles ont à pris beaucoup plus qu'il n'en fallait. Car pour une cause aussi juste ma mort aurait suffit, devait dire chaque Chahid. L'Algérie étant devenu un vaste champ de bataille, et puisque les morts, les bles -sées et les disparus ne pouvaient plus s'y compter, du fait que presque toutes les familles indigènes comme ils étaient surnommés, avaient quelqu'un, si ce n'est quelques uns, de leurs membres touchés et broyés par la machine de guerre de la 2éme puissance mondial qu'était la France. Et il n'en fallait pas plus aux jeunes de ces nombreuses familles indigénes pour pencher vers la cause nationale Algérienne, et vouloir intégrer les rangs des combattants de la libération. Et l'éducation musulmane faisant que le Djihad est un rite religieux auquel était soumis les musulmans; et le désir de vengeance aidant, ces jeunes ne rêvaient plus que d'en découdre avec ces soldats français qui les prenaient pour des moins que rien. Même les gamins étaient dans la désobéissance civile, et avaient leur code de conduite face aux soldats de l'armée française : A) Si les soldats demandent ou il y a des Fatma, leur cracher au visage, et dirent: «il n'y a pas de Fatma ici.» B) Si les soldats envoient acheter quelque choses:«fuir avec l'argent.» C) S'ils demandent des renseignements, «on ne sait rien» D) Si l'on peut crever les pneus des voitures militaires « le faire.» E) Ecrire sur les murs des slogans favorables a l'indépendance. Cette A.B.C.D du petit combattant était connu de la plus part des gamins, a qui ils n'en fallaient pas plus, pour que les plus courageux parmi eux, osent chaparder des chargeurs et des grenades, et parfois même des armes laissées par inadver- tance sur le fauteuil d'une jeep à porter de la main de ces enfants de la guerre. Le plus étonnants, est que l'on a jamais su qui avait donné à ces gamins pareilles instructions, ni comment ils ont fait pour savoir a qui ils devaient remettre les munitions et parfois les armes qu'ils avaient dérobés aux soldats négligents. Et encore ce qu'ils devaient écrire sur les murs. Il va de soit que parmi les adultes qui observent les jeunes de leurs quartiers, il se trouve toujours un homme du FLN chargé du recrutement, et qui, remarquant parmi les gamins, le plus dynamique et le plus dégourdi, l'approchait, et petit a petit, gagner sa confiance, jusqu'à l'intégrer dans l'organisation, pour en faire un guetteur, un messager, un agent de renseignement. Et après plusieurs mises à l'épreuve, il pouvait devenir un transporteur d'armes et un guetteur durant les actions armées. Le gamin ainsi reconnus et admis au rang des hommes, alors devenait un militant à part entière, prêt aux tâches plus importantes. C'est là un véritable parcourt du combattant qui faisant de ces gamins de futur «Fidai.» Les fidayîn sont les membres des groupes de chocs chargés des mis- sions dangereuses, et principalement les exécutions physiques. Une fois leurs nuisances décelées, et qu'ils étaient identifiés par l'ennemie ces «fidayîn» rejoi -gnait les combattants de l'ALN dans les maquis. Les jeunes étaient politisés très tôt. Ayant autour d'eux et dans leurs propres familles la vision des méfaits de l'armée coloniale, ils ne leur en fallaient pas beaucoup pour vouloir aller au combat. Pour eux, seul le temps était plus fort qu'eux, car il leur imposait d'attendre, qu'il daigne les grandir, pour pouvoir pas -ser à l'action armée. Et avec un petit peu de «malchance puisqu'il s'agissait de côtoyer la mort», qui, (pour eux) devenait de la chance à l'état pur» ils allaient rejoindre le maquis et avoir le suprême honneur d'intégrer l'A.L.N, pour être un combattant du peuple un « Moudjahed». C'était le rêve, le souhait et l'espoir de tout un chacun. Tel était la morale, tel était la forme mentale et physique, des gamins de cette époque de lutte de libération algérienne contre la guerre d'occupation française, où seul les plus intelligents devaient être plus malins que les autres, pour savoir se grandir et s'élever au niveau des événements, pour y accéder. Et ainsi sortir du lot de l'ordinaire, pour se situer dans le quota des hommes extraordinaires, les seuls sélectionnés pour servir le peuple et son pays comme s'ils en étaient « les authentiques propriétaire privilégiés.» C'est ainsi qu'il en fut en ce glori-eux Clos Salembier qui comme partout ailleurs dans la capitale, le peuple dans son ensemble, baignant dans une forêt de tissus au couleurs « vert et blanc », d'un drapeaux encore jamais vue par ce peuple, qui comme un seul être, pris le grand tournant qui mène à l'indépendance, et ce durant les manifestations du samedi 10-11 et 12 décembre 1960, qui finirent par lever le voile de la clandes- tinité et laisser place à l'action à force ouverte, qui permit de voir le coeur de l'Algérie en ébullition. C'est durant ces manifestations, en effet, que le peuple verra au grand jour les Fidais du FLN/ALN pour la première fois, en armes circulant dans les rues enca-drant cet historique manifestation populaire, qui donnera un second souffle à la révolution Algérienne. Et même les femmes qui traditionnellement se voilaient, pour se cacher à la vue des hommes, sortirent manifester ouvertement leurs exigences de liberté de sou- veraineté et d'indépendance pour leurs pays l'Algérie. Elles sortirent à décou- vert, le visage nu, sans haïk et sans voile, pour crier au monde entier « Non à la colonisation, non à l'Algérie française, vive l'Algérie libre et indépendante.» Ces hommes, femmes et enfants sortirent dans les rues se confrontés aux forces étrangères de l'Algérie française, dans une manifestation grandiose, digne de celle du 8 mai 1945. Et puis ce fut la rencontre historique du peuple Algérien authentique avec lui-même. Ce seras alors le bras de fer entre le juste et l'injuste C'est dans un élan d'ensemble que ce peuple étouffer, décida de la confrontation « du 11 Décembre 1960 ; Pour une Algérie, une et indivisible.» dont les échos se répercutèrent jusqu'au ghetto et gratte ciel de Manhattan aux Etats-Unis. l Cependant qu'en est-il «au plan officiel de la politique française». Depuis le discours de De Gaulle sur l'autodétermination, les dirigeants algériens ont noté: «l'accroissement de l'effort de guerre des militaires français» dont le but proclamé est de «gagner la guerre». Le Général De Gaulle, a confirmé ce qui na pas cessé d'être dit depuis qu'il a prononcé, du bout des lèvres et sans con -viction, le mot autodétermination: «Sa seule politique en Algérie est d'abord la poursuite de la guerre en vue de la destruction et de l'extermination de l'Armée de libération nationale du peuple algérien. Le principal instrument de sa politique est le corps expéditionnaire fran -çais en Algérie qui a pour mission de perpétuer la domination colonialiste à tra -vers un statut unilatéralement décidé par la France ». Quant aux ultras de la colonisation, de leur côté, ils ont décidé qu'il était temps pour eux, d'agir résolument contre l'homme en qui ils avaient mis tous leurs espoirs et qui, proclament-ils, les a trahis pour incarnait désormais la politique d'abandon. A la veille des négociations de Melun, en juin 1960, ceux ci ont mis sur pied le FAF (1), un mouvement, qui rassemble (prétendaient-ils), plus d'un million de membres dont 120.000 Français musulmans. Quoi qu'il en soit, leur force réelle est ailleurs. Elle est dans les multiples complicités et alliances, qu'ils ont, dans l'administra- tion civil et la hiérarchie militaire. Une fois de plus, à l'annonce du voyage du Président De Gaulle, ils croient leur moment venu. Les files d'un nouveau complot se nouent donc à Alger alors qu'à Paris se déroule le « procès des barricades ». A Alger, Bâb EI Oued, les pieds noirs s'esclafferont bientôt du bon tour joué par Pierre Lagaillarde à ses juges, lequel ayant été mis en liberté provisoire par des magistrats particulièrement compréhensifs, il a préféré filer à Madrid plutôt que d'attendre la sentence d'un tribunal pourtant si bien disposé à son égard et des autres inculpés. Ortiz en fuite depuis l'échec des barricades, est toujours installé en Espagne. De cet épisode les activistes ont tiré quelques enseignements : la tentative a échoué parce qu'ils n'ont pu faire «basculer «l'armée de leur côté, et disent ils: «ce n'étaient pas des hommes aussi peu représentatifs que Lagaillarde ou Joseph Ortiz qui étaient capables de déclencher un tel mouvement ».Alors, cette fois, la tête du complot sera un militaire, et qu'elle militaire ?: C'est le Général d'aviation Jouhaud, retraité et fixé en Algérie où il est né et où il a des attaches profondes parmi les pieds noirs partisans de l'Algérie française. Avec lui, estiment les chefs du F.A.F., plus d'hésitations, les militaires prendront leurs responsabilités et choisiront leur camp. Le scénario qu'ils ont bâti est sim- ple :« des manifestations de rues, déclenchées dès l'arrivée de De Gaulle, tour- neront à l'émeute. Les parachutistes, comme en janvier, refuseront de tirer sur des Français, et l'insurrection s'étendra, De Gaulle sera virtuellement prisonnier. L'armée se saisira de lui et prendra en charge l'Algérie tandis que, dans le désor-dre qui s'ensuivra, les défenseurs de l'Algérie française aidés par les généraux, prendront le pouvoir à Paris. Déjà, on discute entre les chefs des mouvements « nationaux Algérie française «sur le point de savoir si De Gaulle devait être abattu, jugé en cour martiale et fusillé, ou bien gardé en prison pour être renvoyé p!us tard en métropole et dégradé sous l'Arc de Triomphe par un sous officier musulman « (2). Si l'on comprend bien: suprême humiliation, De Gaule devait être déculotté par un indigéne, un «bicot» ? Reste alors à savoir avec qui négocier ? Les autorités françaises ont à mettre en place les «commissions d'élus» crées par le décret du 18 juillet 1960 et qui doivent comprendre des députés et séna- teurs, des présidents de conseils généraux, des maires et des personnalités diver-ses parmi lesquelles, ils avaient espéré encore découvrir, des interlocuteurs com- me en avaient souhaité le Générale De Gaulle.Dans son livre (1) Bernard Tricot écrit : « Venant après l'échec de Melun, cette décision paru à certain, révélatrice de la volonté du pouvoir de construire l'Al- gérie algérienne sans et contre le FLN «. Et dans ce même livre, Tricot nous révèle aussi, qu'au début d'octobre 1960, alors qu'il était à nouveau en Algérie, il constata «chez les musulmans, une extrême lassitude, et une profonde déception depuis qu'ils avaient mieux mesurer la gravité du désaccord de Melun ».Une hostilité fréquente envers les Européens d'Algérie et la volonté très générale de voir l'Algérie prendre elle-même son sort en main (...)». Bernard Tricot recevant une à une les personnes qui répondent à l'invitation du préfet, la conscience de n'avoir qu'un seul intermédiaire entre le Président de la République le Général De Gaulle et lui, incitait l'invité à surmonter prudence et réserve et à dire ce qu'il avait sur le coeur, ce qui fit que les opinions qu'ils rece-vaient devaient avoir de la valeur. Et Tricot écrit : « Je crains qu'il y ait une con tradiction dans la position du Général De Gaulle me dit le magistrat Cadi de tendance nationaliste, modéré dans son comportement et très respecté de la population, on ne peut à la fois vouloir un référendum d'autodétermination qui soit libre et maintenir la situation actuelle avec les regroupements, les interve- nants et la présence de l'armée qui intervient dans toutes les affaires publiques. Cette contradiction doit être levée, et ne peut l'être que par la voie de négocia- tions avec le GPRA portant sur les garanties de l'autodétermination». «Mais nous sommes bien d'accord pour discuter de ces garanties,» répond Ber-nard Tricot: «Excusez-moi dit le Caïd, mais il me semble que ce n'est pas assez claire, vous parlez seulement du cessez-le-feu, il faut aussi négocier au sujet de ce qui se passera après » (2). En effet, la France n'avait pas tiré les véritables leçons de l'histoire, puisqu'on Indochine, ayant refusé une véritable négociation avec Ho chi Min, elle trouva un « interlocuteur valable « en BAO DAI ; la suite est connue.., Au Maroc, elle récidiva avec le Glaoui, cela se termina par le retour triomphal du sultan Mohamed V. En Algérie, elle cherche des BAO DAI et des Glaoui individuels ou collectif. Elle n'en trouvera pas; c'est dans l'ALN et le GPRA que le peuple algérien se retrouve. Il faudra bien en prendre acte, hors de cette voie, pas d'issue, ou en est-on vraiment ??? (1 et 2) Bernard tricot, «Les sentiers de la Paix» Edition Plon Paris 1972. Les champions de l'Algérie française se retrouvent à Vincennes, Paris, les 3 et 4 novembre 1960 à l'Hôtel de Ville de Vincennes où les accueille pour leur deuxième colloque le député maire Quinson. Après avoir entendu les rapporteurs, les participants adoptent la motion suivante « la perte de l'Algérie signifierait l'Europe investie par le sud, est un danger de mort. Ce serait non pas la paix, mais la guerre subversive généralisée sur le continent européen « (1). Par contre et d'autre part, souffle et s'accélère le puissant courant de la paix : le 27 octobre 1960, des centaines de milliers de Français sont appelés à manifester dans une « grande journée nationale d'action « leur volonté commune d'en termi- ner avec cette sale guerre. Ensemble la CGT, la CFDT, la FEN et l'UNEF ont défini les mots d'ordres « pour la paix par la négociation en Algérie «, pour les garan -ties mutuelles de l'application loyale de l'autodétermination, pour la sauvegarde de la démocratie et ses principes fondamentaux. Mais aussi large que puisse être le consensus dégagé sur l'objectif de la paix en Algérie, il subsiste de multiples divergences sur les modalités de l'action à mener... A Paris, interdiction d'une manifestation des communistes, la raison avancée est que ces manifestations pourraient « entraîner des réactions passionnelles de sens opposé » qui troubleraient l'indispensable sérénité de la cohésion nationale ». Le gouvernement français a pourtant autorisé la manifestation « Algérie fran- çaise « du 3 Octobre 1960 qui s'est déroulée à la place de I' Etoile à Paris. En dépit des heurts et divisions, les manifestants ont imposé un fait désormais admis par tous les observateurs et jugé irréversible : la majorité des Français veut la paix en Algérie par l'ouverture de négociation. C'est la grande leçon de la journée du 27 octobre 1960. Le 4 novembre 1960 discours Radio-télévisé, du Général De Gaulle, il parle de la « République algérienne laquelle existera un jour, mais n'a encore jamais existé «. Dans cette phrase, les ultras voient une confirmation de leurs craintes et comme le signe avant coureur de l'abandon. A l'Elysée aussi il y a des remous. Pour De Gaulle « l'Algérie future est une Algérie émancipée, ou les Algériens eux-mêmes décideront et auront l'entière responsabilité de leur destin, une Algé -rie qui aura son gouvernement, ses institutions et ses lois, mais l'essentielle est de savoir avec qui sera bâti cette «Algérie émancipée»? Aa vaine recherche d'une troisième force Le Président De Gaulle n'a pas modifié son attitude vis-à-vis du GPRA. Il exige toujours le préalable du cessez-le-feu d'abord, la discussion ensuite. Ce que le GPRA continu de refuser. Alors qu'en France même, le courant pour la paix, se développe, grandit et s'accélère. Charles De Gaulle décide donc de contourner l'obstacle et déploie son plan consistant à réorganiser les pouvoirs publics en Algérie en attendant l'autodétermination. (1) Les cahiers du comité de Vincennes n° 2. Mois de novembre 1960 P/ n) 111. II espère certainement que cette, réorganisation qu'il va soumettre à référendum favorisera l'émergence des autres tendances et que du même coup, les conditions seront créées pour forcer la main au GPRA. A cette nouvelle situation qui allait commencer le 22 novembre 1960, il fallait de nouveaux exécutants. A Paris Louis Joxe est nommé Ministre d'Etat, chargé des Affaires algériennes. Pour Alger, un haut fonctionnaire d'autorité, Jean Morin qui appliquera la politique définie par Paris et ce, jusqu'en 1962. Le Président de la République française, De Gaulle, voulant faire avancer ses solutions, à cette fois-ci décide de s'entretenir avec les dirigeants des partis politi -ques français pour obtenir leur adhésion et conforter encore sa position avant son départ pour l'Algérie. Ce voyage qu'il prépara avec un grand soin est fixé du 09 au 12 décembre 1960. Pourquoi tant de soins à s'assurer des appuis auprès d'hommes dont il négligeait ordinairement les critiques et les avis. Il entamait une étape estimait capitale, et sans attendre la fin des combats, il déci -da de mettre en place en Algérie; des structures nouvelles sur lesquelles travail- laient déjà les commissions d'élus. Le parlement et l'exécutif algérien une fois installé détermineront en temps utile, la date et les modalités du référendum d'autodétermination. Dans cette perspective, le général demandera par une consu ltation de l'approuver et de lui laisser les mains libres pour prendre toute initia- tive nécessaire à bâtir les nouvelles institutions à venir. Vendredi 9 décembre 1960, de Gaulle entreprit son voyage présidentiel en Algérie, et alors qu'il était à Ain Témouchent, le soir du vendredi 9 décembre 1960, il a été publié par les journaux du 9.12.1960, le texte référendaire de la question à laquelle les électeurs seront appelés à répondre par «oui» ou par «non»; est qui et le suivant: «Approuvez vous le projet de loi soumis au peuple français par le président de la république et concernant l'autodéter-mination des populations algériennes et l'organisation des pouvoirs publi- ques en Algérie avant l'autodétermination » ? Ce texte soulève la polémique puisqu'il confond dans une interrogation unique deux questions différentes :-Approuve-t-on les réformes- Désirait-on maintenir le régime ? Par cette question, on demande en fait, aux citoyens de se prononcer à la fois, sur l'autodétermination et sur un projet de loi qui en est sur le principe, la néga- tion puisqu'il doit permettre de fixer par décret le statut qui préfigurera celui de l'Algérie future et ce, sans négociation préalable avec les représentants de cette Algérie future et le cadre où devra s'exercer « le libre choix des populations «. Ce qui se fera sous le contrôle de l'autorité française, précisera Michel Debré. Le général de Gaulle expliquera à ses interlocuteurs que la voie qu'il a choisie est la seule qui soit, à la fois française et réponde aux réalités modernes du monde. Ainsi, il s'acheminera donc, vers une République algérienne étroitement liée à la France. L'intégration réclamée par les partisans de l'Algérie française étant impossible et la cessession inacceptable, se sera donc «l'indépendance de l'Algérie dans l'interdépendance de la France.» L'idée n'est pas encore admise par le général de Gaulle que c'est avec le FLN qu'il faudra discuter, et pas seulement du cessez le feu comme ce fut le cas aux pourparlers de Melun. Vendredi 9 décembre 1960, de Gaulle entreprit son voyage présidentiel en Algérie. Comme il l'avait prévue, survolant Alger sans s'y arrêter. Cependant que dans la ville d'Alger, l'accueil de ce voyage est significatif. Tous les commerçants de la ville européenne ont gardé les rideaux de leur magasin baissés répondant ainsi, de gré ou de force, au mot d'ordre de grève générale décrétée par- le FAF, Front de l'Algérie française et ce, pour manifester « leur hostilité à l'égard de la présence du général de Gaulle en Algérie et à sa politique d'abandon «. Ouvriers, employés des usines et bureaux, chauffeurs et wattmen des trolleys et autobus chôment aussi, Des gardes mobiles et des soldats stationnent au carrefour, tandis que de jeunes européens, membres des commandos de choc du FAF arborent l'insigne «Jeune Nation» les observe alors que petit à petit se forment des attroupements et com-me prévu par les organisateurs, dès que la foule atteint une densité, alors furent lancés les mots d'ordre : « De Gaulle au poteau «, « L'Algérie française « et puis ce fut l'Action Directe ; ils s'attaquèrent aux autobus et les placèrent en travers de la rue Michelet (actuelle Didouche Mourad). Les CRS qui se mirent en marche furent repoussés à coup de pierres et de bouteil -les, les vitrines volèrent en éclats pendant presque deux heures ; manifestants et policiers, s'affrontèrent enveloppés dans la fumée lacrymogène. Les ultras du FAF s'attaquèrent avec violence aux CRS et gendarmes ; dans le centre-ville d'Alger les manifestations se poursuivirent jusqu'à la nuit tombante aux cris de l'Algérie française, scandées sur tous les temps et rythmés par les klaxons. D'autres villes connaîtront le même sort, Oran principalement, alors qu'ailleurs le mot d'ordre n'a été que peu suivi ; à Constantine échec total. Le FAF, diffusa d'autres tracts appelant à la poursuite de la grève pour le len- demain samedi 10 décembre. Menaçant de représailles, les commerçants qui ne fermeront pas boutique. Et tout cela se passait alors qu'en ce vendredi 9 décembre 1960 au matin à Ain Témouchent, le général de Gaulle, venait d'arriver en compagnie de Louis Joxe, Jean Morin et le général Crépin, encadré par le service de sécurité. Et une fois arriver sur la place de la ville, là le Président de Gaulle est accueilli par un brouhaha dont les voix discordantes se répondent et s'insultent. En première rangée bloquée par le service d'ordre, des Européens avançaient en criant :« A bas de Gaulle, Algérie française ».Derrière à l'arrière plan d'autres manifestants, des indigènes, ceux-là, agitaient des banderoles sur lesquelles était écrit ce que le général est venu entendre «Vive De Gaulle» - «l'Algérie algé- rienne ». Le général sans s'arrêter à ceux qui l'insultaient se fraya un chemin et se dirigea vers ceux qui l'acclamaient et serra les mains qui lui étaient tendues. Tout cela semble être dans la logique du général, qui est venu montrer qu'il ne craint pas de s'appuyer sur les Algériens, et que ceux-ci sont derrière lui. Tandis que le Président de Gaulle évitant Alger et Oran continuait sa tournée par Cherchell, Blida, Tizi-Ouzou, El Asnam, Bougie, Télergma, et Batna, les mêmes démonstrations se répétaient ; il tint le même langage : que les musulmans s'associent à sa tâche et que les rebelles comprennent qu'il leur offre « loyalement et sincèrement la paix «,» que les Européens sachent qu'ils ne seront pas abandonnés et qu'ils admettent que l'oeuvre de la France vis-à-vis de l'Algérie ne peut se poursuivre dans les conditions d'hier». L'imprévisible triomphe : le peuple tranche. En cette après-midi du vendredi 9 décembre 1960, brusquement à la surprise de tous et à l'étonnement du général et de son entourage, ministres et chefs de l'armée, gaulliste ou non, un événement imprévu sans précédent et qui va avoir des conséquences immenses, éclate sans crier gare... La sortie en masse dans les rues d'Alger, d'Oran, de Constantine et d'autres villes faisant front contre les ultras de l'Algérie françaises et contre l'armée soutenant et exécutant le plan de De Gaulle, ni pour l'Algérie française des ultras ; ni pour l'Algérie algérienne de De Gaulle, le peuple s'était réveillé pour trancher et dire le mot de la fin : le peuple manifestait pour l'indépendance totale, pour l'ouver- ture de négociations avec le GPRA. Ce GPRA, interlocuteur oublié, que ne soup- çonnaient plus les états major militaires et politiques qu'il puisse un jour encore se faire entendre avec une telle unanimité et une telle puissance. A suivre *Ecrivain Anciens Moudjahed membre ALN. Ripostant aux ultras les Musulmans interviennent; l'armee tire. Sans pitié, sans foie ni loi. La répression n'épargne personne. Hommes femmes et enfants, le peuple du clos Salembier en effervescence. L'émeute d'un peuple qu'on veut enfermer. Halte au colonialisme. «Vive L'Algerie libre et independante» 1- Front de l'Algérie français.. 2- D'après Vianson Pierre Ponté. |