Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

HANA MANSOUR QUI AURA 25 ANS EN L'AN 2025

par T. H.

A l'affiche des deux films algériens présentés au Red Sea International Film Festival, «Bin U Bin» de Mohamed Lakhdar-Tati (en compétition officielle) et «Première ligne» de Merzak Allouache (hors-compétition), l'influente «instagrameuse» est bien décidée à faire carrière dans le cinéma. Et pas seulement en tant que comédienne.

LE QUOTIDIEN D'ORAN : Cela doit faire bizarre de se voir sur grand écran quand on a commencé sa carrière sur les petits écrans des réseaux sociaux ?

HANA MANSOUR : J'ai commencé en tant que mannequin à l'âge de 17 ans, en 2017, toute seule sans passer par les agences. À travers les réseaux sociaux j'ai contacté des photographes, ce sont eux qui m'ont donné confiance en moi, car très longtemps j'ai été complexée par mon vitiligo au visage. Le concept de mes contenus sur Instagram était simple, choisir moi-même mes habits et les spots à Alger pour des séances de photos. J'ai commencé à être très suivie et deux ans plus tard je pouvais quitter Rouiba où je suis née pour m'installer à Alger-Centre et découvrir le petit milieu culturel. C'était passionnant, je découvrais les gens du cinéma, les réalisateurs et les comédiens, mais aussi les plasticiens. En 2019, j'ai fait une résidence d'un mois à Dar Abdel'tif pour participer en tant que comédienne au court-métrage de Sarah El Hamed «Qardoun, la passation». J'ai beaucoup aimé cette expérience, du coup quand l'Institut français a lancé un appel pour une résidence de réalisation de courts-métrages à Tlemcen je me suis inscrite pour faire ma première fiction «404», sur les sdf, les marginaux, les voyous d'Alger, je voulais les représenter comme des poètes affranchis de fait des contraintes de la société.

Comme l'expérience était plutôt positive, j'ai profité de ma notoriété sur les réseaux sociaux pour lancer ma série «Souméya et Fiffi», filmée avec mon téléphone. Le concept était tout aussi simple, deux jeunes filles des quartiers populaires décident de mener la belle vie coûte que coûte.

C'est grâce à ces vidéos que Mohamed Lakhdar-Tati m'a contactée pour me proposer un rôle pour son film «Bin U Bin», il m'a fait confiance, m'a donné ma chance. Dix jours après la fin du tournage du film on m'a proposé de jouer dans la série à succès de Yahia Mouzahem «Ed'Dama».

LE QUOTIDIEN D'ORAN : Du coup, c'est fini les réseaux sociaux ?

HANA MANSOUR : Non, je n'ai pas encore laissé tomber les RS car je suis consciente que mon statut de comédienne n'est pas encore installé. Je continue à produire des vidéos d'une minute, en essayant de tenir le rythme d'une vidéo par jour. J'aimerai néanmoins me consacrer entièrement au cinéma. En tant que comédienne évidemment, mais aussi en tant que scénariste. D'ailleurs en tant que créatrice de contenus pour les RS j'ai l'impression de faire déjà cela. Et je ne m'interdis pas de devenir un jour, quand je serai prête, réalisatrice.

Les RS m'ont fait connaître c'est indéniable, mais ma popularité vient du succès de la série «Ed'Dama» où j'ai joué le rôle de Zakia. En 15 jours, mon compte a explosé de 100.000 à 500.000 followers sur Instagram.

LE QUOTIDIEN D'ORAN : Vous comptez rester en Algérie, ou est-ce que vous aussi vous rêvez d'un ailleurs ?

HANA MANSOUR : J'aimerai bien vivre et travailler en Algérie, mais en même temps je pense que j'aurai plus d'opportunités en France ou dans les pays arabes comme l'Egypte ou l'Arabie saoudite… et pourquoi pas aux Etats-Unis.

LE QUOTIDIEN D'ORAN : Vos deux premiers longs-métrages ont été sélectionnés par le RedSea Merzak Allouache «Première ligne» et «Bin U Bin» de Mohamed Lakhdar-Tati. Comment avez-vous décroché le rôle de «Première ligne» pour commencer ?

HANA MANSOUR : Sa productrice exécutive du film, Amina Salem Casting, m'avait déjà repérée car en 2020 j'avais fais une formation de théâtre. C'est elle qui a proposé mon nom à Merzak Allouache. La première fois qu'il m'a reçue Merzak Allouache m'a longtemps dévisagée, il est resté silencieux et au bout d'un moment il a lâché : «Le cinéma ce n'est pas comme la télévision». Je pensais qu'il me recalait, mais non, j'apprenais le lendemain que j'étais prise et je dois avouer que sous sa direction j'ai appris plein de choses. Je n'ignore pas le privilège que j'ai eu de travailler avec ce grand metteur en scène.

Dans «Première ligne», je joue le rôle de Souhila, une adolescente qui vit son premier amour et qui doit le dissimuler à sa famille. Le film se déroule à la plage le temps d'une journée chaotique. Dans ce film je dois annoncer à mon amoureux que je vais quitter l'Algérie, c'est drôle parce qu'il y a quelques années mon premier amour m'a quittée pour aller vivre aux USA et pour devenir acteur. On devait aller ensemble à l'origine, mais lui a eu le visa et pas moi ! Il n'est jamais revenu, et n'est jamais devenu acteur, et moi qui suis restée je suis en train de devenir une actrice. El Mektoub, enfin tout ça pour dire je connais bien cette douleur née de la séparation des jeunes amants, la fin du premier amour…

LE QUOTIDIEN D'ORAN : Après «Première ligne», vous enchaînez avec «Bin U Bin»

HANA MANSOUR : Pas du tout, c'est le contraire, j'ai commencé avec Mohamed Lakhdar-Tati. Dans «Bin U Bin», je joue Mehdia, une jeune femme libre entourée de voyous, de bandits au cœur tendre. Une fleur au milieu de la sécheresse des Aurès. Mahdia qui utilise les RS pour s'en sortir me ressemble beaucoup. Comme moi c'est un électron libre. Comme moi c'est une autodidacte pure et dure. J'ai arrêté les études au bac, et tout le reste je l'ai appris en écoutant des podcasts et en échangeant avec des communautés sur le web.

LE QUOTIDIEN D'ORAN : Quelle est votre culture cinématographique ?

HANA MANSOUR : Je sais que j'ai des lacunes, mais j'adore le cinéma. Mon réalisateur préféré est Xavier Dolan, pour moi «Mommy» est un chef-d'œuvre absolu, de loin mon film préféré. J'aime aussi Johnny Deep en tant qu'acteur et en tant que personnage. C'est lui qui a marqué mon enfance et j'aime son côté torturé. J'ai grandi avec les voyous d'Alger, cela n'a pas été facile tous les jours, mais je crois que je me suis imposée, et maintenant je peux dire que je les aime. Mon petit film fait avec des bouts de ficelles, «404», c'était aussi une manière de leur rendre hommage plutôt que de les critiquer. Côté actrice j'aime beaucoup Souhila Maâlem et Mina Lechtar qui m'inspire énormément.