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Dans le but d'équilibrer les
finances de l'État, le gouvernement a introduit des dispositions fiscales et
parafiscales nouvelles dans le cadre de la loi de finances (LF 2021) dont
l'avant-projet a été présenté à l'Assemblée nationale populaire (APN) le 10/11/2020
par le ministre des Finances.
Le grand argentier de l'Etat a reconnu que la relance économique dans le pays ne sera pas facile durant les années prochaines, affirmant que les autorités feront en sorte d'un retour vers l'activité économique d'une manière à permettre la récupération partielle des pertes dues à la pandémie. Également, il a prévu un assouplissement des déséquilibres budgétaires internes et externes par une rationalisation profonde des dépenses. Une dépréciation progressive mais importante du dinar algérien par rapport au dollar américain est prévue dans cette loi. Elle sera massive, puisqu'elle portera sur environ 47% au total, étalée en trois étapes. Le premier glissement sera effectif dès le début de l'année prochaine, soit une chute de 10,33%. La seconde phase sera opérée en 2022, une baisse d'environ de 15,77%. Enfin, la troisième et dernière intervention, interviendra en janvier 2023, sera d'une ampleur de 21,21 %. Telle qu'elle est élaborée, cette dépréciation massive va certainement infliger des dégâts au niveau de l'économie, en général, et des opérateurs économiques, en particulier. Ces derniers devront payer beaucoup plus cher, pratiquement tous les produits à savoir la matière première, équipement et intrant sont importés de l'étranger. L'écrasante majorité des produits consommés par les Algériens étant en effet importée, les augmentations de prix se feront arithmétiquement par le truchement des nouveaux différentiels de change engendrés par les dépréciations consécutives du dinar. L'inflation importée frappera pratiquement toutes les marchandises, y compris les inputs industriels et agricoles, en grande partie importés. Cette inflation va automatiquement produire un « effet domino » qui affectera la consommation dans son ensemble, avec le risque d'en réduire l'impact sur la croissance économique des années 2021 et 2022. MESURES MONETAIRES POUR EQULIBRER LES AGREGATS ECONOMIQUES Selon la définition du régime de change algérien, il s'agit d'un marché de change appelé flottant mais administré par la Banque d'Algérie. Afin de faire face à l'impact que les facteurs exogènes et endogènes pourraient infliger à la monnaie locale « DZD », une monnaie qui évolue contre un panier de devises constitué principalement en dollar & euro, la Banque d'Algérie intervient sur la valeur du dinar selon l'exposition de l'Algérie vis-à-vis de l'étranger. Dans un régime de change dirigé volontairement par une administration monétaire, il est difficile de se projeter sur l'évolution du dinar à court et à long terme d'une manière proactive. Actuellement, le seul curseur de la trajectoire qui drive la valeur du dinar reste principalement le niveau de la réserve de change de l'Algérie qui constitue un matelas de sécurité pour le fonctionnement de l'économie algérienne. En deuxième lieu, la balance des paiements et le déficit budgétaire qui constituent tous les trois fondamentaux sur lesquels la valeur du dinar est déterminée. Avant d'entamer le sujet de couverture contre le risque de change d'une manière approfondie, il est nécessaire de comprendre le mécanisme de la dépréciation en présentant une illustration numérique sur le comportement du dinar vis-à-vis des deux devises principales, lors de l'intervention de la Banque d'Algérie quant à la détermination de sa valeur. La première dépréciation de la valeur du dinar est enregistrée au mois d'août 2015 à hauteur de -7,9%. Cette mesure monétaire est introduite afin d'amortir le choc pétrolier suite à la chute drastique du prix du pétrole qui a impacté négativement les recettes d'exportation de l'Algérie en devise. Ce recul était suivi par un second de moindre ampleur entre février et mars 2016 (-3,9%). Ensuite, la valeur de la monnaie locale est passée par une période de stabilisation, c'est-à-dire elle fluctuait en parfaite corrélation avec la volatilité de la parité EUR/USD sur le marché international. Puis légèrement réévaluée de (+2,61%), entre le mois d'août 2016 et février 2017. Alors que l'euro s'est apprécié de 11,1% face au dollar. Entre le 20 février et le 29 septembre 2017, le dinar a chuté de -14,23% face à l'euro et de -2,83% face au dollar. Le degré du glissement de la valeur du dinar a ralenti entre octobre 2017 et fin janvier 2018 (-2.77%). Depuis le mois de février 2018, la dépréciation du DZD a diminué pour se situer à -0.73% sur la période allant du mois de février à fin août 2018. Entre la période d'août 2018 à septembre 2019, le dinar s'est déprécié davantage de -1,72%. Entre septembre 2019 à février 2020, le DZD s'est apprécié de +1,99%. Dans le contexte de crise sanitaire avec son fort impact budgétaire, les autorités monétaires ont procédé à la dépréciation du DZD de -8,2% entre le 28 février 2020 et le 01 juin 2020 tout en précisant que l'essentiel s'est réalisé entre le 01 février 2020 et le 30 avril 2020 (6,8%). Pour rappel, la parité USD/DZD est essentielle dans la détermination des recettes fiscales d'origine pétrolière qui contribuent à hauteur de 42% au budget de l'État en 2019. Avec ces fréquentes interventions aléatoires que la Banque d'Algérie avait effectuées durant ces années sur la valeur du dinar, sans prendre en considération notamment les engageants des entreprises vis-à-vis de l'étranger, ni leurs cycles d'exploitation qui ont été gravement perturbés engendrant ainsi des pertes colossales menaçant la survie de ces entreprises. Ces dépréciations ont aggravé davantage l'activité économique en l'occurrence pour ces opérateurs économiques qui n'ont pas su anticiper ces discisions monétaires. Il est grand temps de laisser le dinar flotter selon l'offre et la demande sans autant que la Banque d'Algérie le dirige d'une manière administrative, car les entreprises auront le temps nécessaire de mieux s'adapter quand les mécanismes de marchés sont les seuls qui dictent la loi. QUATRE ANNEES SONT PASSEES DEPUIS LE LANCEMENT DE LA COUVERTURE CONTRE LE RISQUE DE CHANGE Selon la règlementation en vigueur, il est nécessaire d'introduire la base juridique encadrant et régissant les opérations de change en l'occurrence la couverture contre le risque de change. En 2017, la Banque d'Algérie a fait promulguer un dispositif règlementaire 17-01 autorisant les banques commerciales de la place d'offrir des solutions de couverture contre le risque de change. Ce même règlement vient de s'abroger avec la sortie d'un nouveau règlement 20-04 du 15 mars 2020 relatif au marché interbancaire des changes, des opérations de trésorerie devise et aux instruments de couverture du risque de change. Quatre ans sont passés depuis la promulgation du premier règlement, une question qui se pose aujourd'hui, comment les entreprises ont réagi suite à cet évènement majeur qui a sans doute révolutionné le marché de change. Avec l'autorisation donnée aux banques intermédiaires de commercialiser cet instrument financier type dérivé «change à terme» auprès des opérateurs économiques, une grande étape a été franchie d'un pays qui envisage de s'ouvrir au marché international d'une manière graduelle, prudente mais bien réfléchie. Il est vrai que pour certains pays, le change à terme «Outright Forward» est considéré comme un produit classique vu la maturité de ces marchés ainsi que les solutions dérivées qui étoffent l'offre commerciale. En Algérie, le change à terme est perçu comme un produit dérivé de première génération «Plain Vanilla» que le marché, autant que pour la banque que le Corporate, essaient de se familiariser avec son utilisation. Cette contribution a pour but d'analyser les différents facteurs qui ont contribué à encourager sa mise en place ou bien les obstacles qui ont participé à la réticence de son utilisation par les entreprises algériennes. Un état de lieu avec des pistes d'amélioration seront énumérés tout au long des sujets qui seront abordés. Il est à préciser pour le lecteur, que l'approche couvrira le côté de l'opérateur économique comme utilisateur de cette solution financière. Avec la mise en place de cet instrument de couverture type dérivé de première génération, l'entreprise algérienne va être témoin à la naissance d'un nouveau métier au sein de l'équipe des finances qui, jusqu'à aujourd'hui, n'existait même pas dans les grandes multinationales bien structurées installées en Algérie. Ce nouveau métier s'articule principalement sur la gestion proactive de risque de change en amont et aval avec la situation de la trésorerie de l'entreprise. SE PREMUNIR FACE AU RISQUE DE CHANGE EST INCONTOURNABLE DANS LA GESTION MODERNE DE L'ENTREPRISE Cela veut dire, un élément existentiel à prendre en considération par le financier lors des négociations avec la banque des flux des opérations du commerce extérieur «Trade» à domicilier auprès de ses guichets. Une politique de couverture contre le risque de change s'impose en fonction de la devise d'exposition, les délais de paiements, la conjoncture économique actuelle ainsi que la qualité du service assurée par la banque. Cette politique de couverture qui reste en soit un outil efficace à la disposition du financier pour respecter le budget tracé et validé lors de l'élaboration du budget de l'exercice en cours, sans pour autant effectuer des ajustements à chaque fois que le cours de change s'écarte de la trajectoire prévue préalablement au début d'année. Encore, il est plus important, particulièrement pour les entreprises exportatrices, la gestion de la trésorerie en devise qui devient un axe stratégique pour l'entreprise exposée à l'internationale dans les deux sens, soit des flux financiers sortants et entrants versus une monnaie domestique non convertible. Ce contexte d'incertitude exige au financier de l'entreprise de développer impérativement certains réflexes de marchés. Ces réflexes vont lui permettre de gérer proactivement sa position de change soit, elle Short ou Longue en fonction de l'évolution de cours de change. En effet, le premier réflexe surgit quand l'entreprise évolue dans un contexte de dépréciation. Dans le cas échéant, le financier en charge de la gestion des positions de l'entreprise n'a nullement le besoin d'appréhender l'évolution de taux de change afin de décider de se couvrir. Le Hedging automatique de ses paiements à l'étranger s'impose sans attente. Le deuxième réflexe que le financier doit avoir est celui du suivi en temps réel, le marché de change au comptant « SPOT » afin qu'il puisse profiter d'une éventuelle opportunité sur le marché, en passant des ordres de couverture au moment où il aura des creux, c'est-à-dire une baisse favorable pour l'entreprise de la devise d'exposition. FACTURER EN MONNAIE LOCALE ET PAYER EN DEVISE FACILEMENT TRANSFERABLE Une fois que la décision de se couvrir est tranchée par le financier, ce dernier peut recourir à plusieurs techniques de couverture internes avant même d'aller solliciter le service d'autres institutions telles que la banque ou bien l'assurance. Plusieurs instruments de couverture s'offrent à lui afin de minimiser les pertes de change éventuelles : Choix de la monnaie de facturation: la monnaie de facturation est la devise dans laquelle sera libellé le contrat d'achat ou de vente international. De nombreuses entreprises choisissent de facturer les transactions en monnaie nationale quand il s'agit des prestations de services effectuées sur le territoire national selon la loi en vigueur imposée par la Banque d'Algérie. Choisir une devise : de manière générale, l'entreprise a intérêt à : - Facturer ou payer en une monnaie facilement transférable et servant de façon usuelle aux paiements internationaux (dollar américain, euro, ...) ; - Faciliter la gestion en utilisant peu de devises car suivre leur évolution demande de disposer de nombreuses informations et du temps pour les traiter. DISSOCIER LES OPERATIONS DE CHANGE DE CELLES DU COMMERCE EXTERIEUR EST LA SEULE SOLUTION QUE LE TERMAILLAGE SOIT UN OUTIL DE COUVERTURE EFFICIENT Parmi les techniques efficaces disponibles au niveau du financier de l'entreprise est la flexibilité qui pourrait avoir en choisissant la date des paiements par accélération ou retardement les encaissements ou les décaissements des devises étrangères selon leurs évolution anticipée appelée le «Termaillage». Cette flexibilité existe généralement entre les entreprises appartenant au même groupe. Le financier de l'entité locale travaille en étroite collaboration avec le trésorier de la maison mère sur le prévisionnel des cash-flows afin d'exécuter les paiements en fonction du niveau de la valeur du dinar. Le termaillage aura plus d'efficacité quand la Banque d'Algérie procèdera à la libéralisation du marché de change en dissociant les opérations de change de celles des opérations «Comex». En appliquant ces standards internationaux, le financier pourra établir une stratégie efficiente en exécutant des virements Out & In dans des délais qui ne dépassant pas les 48 h. Cette technique vise donc à faire varier les termes des paiements afin de profiter de l'évolution favorable des cours de change. Cette gestion de risque de change est utilisée d'une manière générale quand le paiement s'effectue par le mode de paiement remise documentaire au mieux par transfert libre où l'effet déclencheur du paiement vient à partir de l'instruction émise par l'entreprise locale. Sur le plan opérationnel, il est malheureusement difficile d'avoir un parfait termaillage dans le contexte actuel vu la rigidité administrative dictée par le contrôle de change. LE «NETTING», UN ISTRUMENT EFFICACE POUR NEUTRALISER LE RISQUE DE CHANGE Un autre instrument qui rentre dans le cadre de la gestion de risque de change disponible au niveau de l'entreprise, est la « compensation ». La Banque d'Algérie via le dispositif d'incitation destiné aux entreprises exportatrices de biens ou de services, laisse volontairement à la disposition des entreprises 50% de la recette de l'exportation en devise. La compensation est un instrument de couverture par lequel une entreprise exposée au risque de change dans les deux sens en même temps, de neutralisé par « Matché » des flux entrants avec flux sortants en même devise unitaire. Avec le mécanisme du « Netting », le financier limite son risque de change en compensant les encaissements et les décaissements dans la même unité monétaire. Ainsi, le règlement d'une créance en devise sera attribué au paiement d'une dette libellée dans la même monnaie. La position de change ne se rapporte alors que sur le solde. L'entreprise doit également agir sur les dates de règlement afin de disposer de suffisamment d'entrées pour payer les sorties. «COMMENT SE PREMUNIR CONTRE LE RISQUE DE CHANGE ?» LE HEDGING, UNE VISION STRATEGIQUE DANS LA GESTION DU RISQUE DE CHANGE Le corpus de la première partie de cet article a expliqué en détails le fonctionnement du régime de change algérien, ainsi que les possibilités de couverture contre le risque de change qui s'offrent au financier de l'entreprise. Il a mis également en exergue les différents instruments de couverture interne disponible auprès de l'entreprise afin d'éliminer le risque de change sans pour autant solliciter les institutions financières qui proposent des solutions exclusives pour faire face au risque de change. Cette deuxième partie abordera, en toute simplicité, dans la limite du possible, et d'une manière approfondie les mécanismes de couverture contre le risque de change en utilisant des instruments externes à l'entreprise, ainsi qu'un retour des utilisateurs « Entreprises » sur le fonctionnement de ces produits change à terme dans la gestion quotidienne de leurs engagements vis-à-vis de l'étranger. Plusieurs raisons font que les entreprises généralement préfèrent utiliser des techniques de couverture externes via des institutions financières dédiées, qui offrent des solutions adaptées à leurs besoins, afin de permettre à l'opérateur économique de se prémunir contre le risque de change. L'entreprise peut se couvrir contre le risque de change par la souscription à des assurances que proposent des organismes externes comme la Coface. Ces assurances ont pour objet de permettre aux entreprises exportatrices d'établir leurs prix de vente et de passer des contrats en devises sans s'exposer au risque de modification ou de variation des cours de change. La couverture sur le marché à terme est l'une des stratégies les plus utilisées par les entreprises, étant donné la simplicité de sa mise en place. Cet instrument type dérivé de première génération « Plain Vanilla », est autorisé par la Banque d'Algérie sous le même dispositif règlementaire 20-04. La couverture à terme se manifeste par un échange d'une devise contre la monnaie locale DZD selon un taux de change d'achat ou de vente de devises fixé à présent pour une échéance future. L'exportateur, pour se couvrir contre les effets du risque de change lié à la variation du cours d'une devise, vend à terme à sa banque le montant de sa créance. Il fixe ainsi de façon précise le montant de la monnaie nationale qu'il encaissera à l'échéance. L'importateur, quant à lui, pour se couvrir contre le risque de change lié à l'appréciation éventuelle d'une devise, achète à terme les devises correspondant au montant de sa dette. Il connaît ainsi avec exactitude le montant en monnaie nationale qu'il devra payer. Il est à signaler que ces contrats sont fermes et que l'exportateur ou l'importateur ne peuvent bénéficier d'une évolution favorable ultérieure de la devise. Le «Outright Forward» est le seul instrument disponible actuellement en Algérie. En effet, il permet d'éliminer le risque de change en contractant avec la banque un cours à terme au préalable avec sa banque domiciliataire. Cet instrument peut être utilisé par le financier pour couvrir ses importations ou éventuellement exportation selon la politique de couverture adoptée. Afin de clarifier le concept de couverture face au risque de change, il est nécessaire que les financiers des entreprises ne confondent pas entre l'aspect spéculatif qui est une logique à bannir totalement et l'utilité de cette solution pour maîtriser les coûts et minimiser les éventuelles pertes de change. Le financier peut souscrire à un contrat à terme une fois que l'opération « Trade » est domiciliée auprès de sa banque. Ce dernier doit être bien informé et devrait suivre en continu le marché de change, car le timing de couverture est important étant donné qu'il peut profiter d'une éventuelle opportunité sur marché dans le cas où la devise perd de la valeur face au dinar. Dans certains cas, l'écart entre les différents cours de la journée est important qui peut aller jusqu'à 30 points de base de différence. Il est dans l'intérêt de l'entreprise de faire recours à ce produit selon une politique de couverture réfléchie et planifiée dès le départ. Chaque année, le financier prépare un budget pour l'exercice en cours pour validation. Les importations sont libellées en devise, contrairement à la production et la vente qui sont libellées en monnaie locale. Dans cet exercice, il y aura un taux de change qui fixera le budget nécessaire à l'entreprise pour honorer ses engagements en faveur de ses fournisseurs étrangers. Afin que l'entreprise reste toujours dans ce budget, il va falloir qu'elle trouve le taux de change moyen d'équilibre entre les paiements couverts par un FORWARD et les paiements qui s'effectuent au cours SPOT, c'est-à-dire selon le taux de change de la journée. Cette politique permettra à l'entreprise de profiter d'une opportunité sur le marché si le dinar s'apprécie. Dans le cas contraire, les paiements s'effectuent selon un cours négocié au préalable avec la banque et qui sera inférieur à celui de la journée d'exécution du transfert. Le plus important pour l'entreprise est de rester dans le budget selon un taux de change moyen en évitant ainsi l'exercice d'ajustement à chaque fois que le cours s'écarte du niveau prévu dans l'élaboration du budget. Toutefois, il est à signaler que les techniques visant à mesurer l'évolution des cours de change mobilisent des ressources humaines ou financières importantes. La technique du termaillage, basée principalement sur cette estimation de l'évolution des cours, n'est applicable qu'avec des financiers bien introduits dans les activités de marché et ayant un background académique et professionnel familier avec ces opérations financières. Le timing de l'opération, le Pricing, le choix de l'instrument ainsi que l'anticipation des trajectoires des paires de devises nécessitent une ressource bien connectée au marché de change, que ce soit en local ou à l'international. L'instabilité économique que le pays est en train de vivre a conduit les entreprises algériennes à être plus attentives aux risques de change des devises face au dinar. Elles continuent à chercher à mettre en place un et/ou des instruments de couverture efficaces permettant de se couvrir contre les effets néfastes inhérents à ce risque. Il est vrai que la couverture par une version de change à terme plus au moins flexible tel que le « Flexi-terme » ou bien les options de change sont les alternatives les plus avantageuses pour les entreprises algériennes vu la rigidité de la version de change à terme actuellement disponible dans le marché algérien. Il est entendu par la rigidité, l'incapacité de cet instrument de couverture de faire face aux différents changements liés aux problématiques de fixation des dates de paiements difficiles de maîtriser par les financiers des entreprises. Ces difficultés sont liées aux contraintes de logistique ou bien les retards de livraison accusés par les fournisseurs. Il est donc difficile pour le financier de l'entreprise de maîtriser avec certitude la date du paiement pour laquelle il conclut un contrat à terme avec son banquier, sachant que selon la règlementation en vigueur, la demande de couverture est adossée à une opération commerciale « Trade ». Une fois que les termes du contrat changent, le prix à terme « cours à terme » change systématiquement. Par conséquent, il y aura d'autres frais financiers additionnels générés lors de la conclusion du nouveau contrat à terme. Depuis la promulgation du premier règlement 17-07 en 2017, les entreprises algériennes versées dans la production œuvrant à l'international, commencent timidement à se soucier de l'impact que la dépréciation du dinar pourrait avoir sur leurs marges bénéficiaires. Depuis l'accélération du processus de dépréciation de la monnaie locale entamée ces derniers mois, voire depuis le début de la pandémie Covid-19, il a été constaté selon le comportement de couverture adopté par les entreprises algériennes, qu'une petite catégorie avait commencé par des opérations en guise de test avec des petits montants afin de mieux maîtriser ce nouveau processus opérationnel « End-to-end » et constater en pratique leur dénouement avec les banques. Une fois que la maîtrise commence à prendre forme, les entreprises bien structurées exposées sur des délais de paiements plus au moins longs, à un important risque de change se couvrent systématiquement. Toutefois, la majorité d'entre elles ne le fait que de manière sélective. Ce comportement est suffisamment visible pour que l'on cherche les raisons. Il semble que le comportement de couverture en Algérie est déterminé par la perception accordée au risque de change. Ce comportement paraît répondre à une prudence des entreprises recourant à une couverture systématique ; ou un but de spéculation dans une conjoncture économique instable si ce n'est qu'une facilitation du processus de gestion du risque de change, chez les entreprises se couvrant d'une manière sélective. La couverture à terme sous contrat Forward reste en pole position, en l'absence des opérations d'option de change et l'octroi du crédit en monnaie de devise forte. La compensation est rarement utilisée par les entreprises algériennes, elle constitue un instrument de couverture pratiqué surtout par les entreprises qui sont à la fois importatrices et exportatrices. Le peu de devise reçu dans le cadre de l'exportation est utilisé pour servir comme frais de missions pour se déplacer à l'étranger, payer quelques services prévus par le contrôle de change, ou bien pour promouvoir les activités d'exportation. La plupart des entreprises algériennes ne se couvrent pas contre le risque de change faute d'une vulgarisation de ce produit par les banques de la place (deux banques privées qui offrent ce produit) ou par méconnaissance du produit de change à terme. Concernant le mode de gestion du risque de change par les entreprises locales, ces dernières manquent de vision stratégique dans la gestion quotidienne de leurs opérations de change. Ce n'est que depuis que le dinar a commencé de se déprécier brusquement et d'une manière significative que les responsables des entreprises sont devenus plus attentifs aux conséquences du risque de change. En effet, la couverture contre le risque de change vient plutôt comme une réaction par rapport au glissement du dinar que comme une action réfléchie et prévue qui devrait intégrer dans la gestion de leurs activités économiques. Au terme de cette analyse, il convient de tirer les conclusions suivantes : la gestion du risque de change revêt un grand intérêt pour les entreprises et doit être une partie centrale de la gestion stratégique de toute entreprise, car l'amélioration des résultats commerciaux et financiers de l'entreprise conduit à un développement global du tissu économique national. La décision d'utiliser des instruments de couverture est semblable à la souscription à une assurance. Si la plupart des entreprises algériennes utilisent la couverture à terme, d'autres restent toujours au niveau des outils classiques, ceci par souci de simplification et/ou par manque de moyen. En effet, la gestion du risque de change reste encore non prise en considération dans les grands domaines d'action stratégiques. Plusieurs améliorations et développements sont inéluctables afin de lui permettre de mieux correspondre aux besoins actuels. Si la couverture par les options ou bien les contrats de change à terme plus flexibles devait être appliquée, elle nécessiterait un staff dédié dans des structures adaptées en raison de sa complexité accrue. Ces instruments seraient une meilleure alternative au produit disponible aujourd'hui. Les solutions de couverture sont encore limitées pour répondre aux besoins des entreprises algériennes. Par ailleurs, contrairement aux pays voisins comme le Maroc ou la Tunisie avec des marchés de change un peu plus matures que le nôtre, il a été constaté que la plupart des entreprises exposées au risque de change utilisant le mécanisme de couverture « Forward » sont les PME, cela peut être expliqué par : - Le fait que ces entreprises sont plus agiles où le centre de décision reste centralisé au niveau des gérants ainsi que leurs proximités avec les DAFs. Contrairement aux grandes entreprises ou bien multinationales, la couverture obéit à des restrictions groupe assez lourdes administrativement pour la prise de décision. - La non-disponibilité des ressources humaines qualifiées en la matière. - La gestion du risque de change est perçue chez quelques entreprises comme des coûts supplémentaires. - D'autres ne s'estiment pas concernées car elles facturent uniquement en monnaie nationale ou bien passe par des centrales d'achats au niveau du groupe. La couverture se fait donc en Offshore. Il est constaté, également, que le choix de l'instrument de couverture du risque de change est tributaire de divers facteurs. Outre les caractéristiques et la structure des opérations propres à chaque entreprise, les préférences et les avis des responsables jouent un rôle crucial quant à la prise de décision de se couvrir contre le risque de change. Enfin, la mise en place de l'instrument et son utilisation pendant l'exercice annuel devrait se dérouler dans le cadre d'un processus bien défini où les compétences sont clairement exigées. *Membre du club d'Alger du Centre Algérien de Diplomatie Economique. |
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