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Très belle formule, au demeurant, dont le citoyen lambda, de la rive nord
de la méditerranée et d'ailleurs, use et abuse à satiété, car convaincu, qu'il
tient là un sésame lui permettant, si besoin était, de contester, légitimement,
toutes les formes d'abus dont il se sentirait l'objet, par la faute d'une
administration malveillante à son égard ou, de quelques fonctionnaires trop
zélés à son goût.
Ce même citoyen rencontrera, bien évidemment, son député à sa guise, au détour du marché de son quartier ou dans la permanence de ce dernier et pourra lui parler, sans protocole et lui exposer ses griefs ou ses espérances, avec la garantie, déjà, d'une attention non feinte et la conviction que sa requête sera, pour le moins, étudiée. Quid de tout cela dans notre pays et des rapports députés-citoyens ? Comment peut-on mesurer leur relation et la confiance entre eux ? Arrêtons-nous, tout d'abord, sur quelques séquences-clefs, tant elles sont révélatrices des processus d'élection de nos députés et de leurs activités, une fois élus, au parlement. L'élection du député n'est pas liée à une quelconque compétence, qu'il peut éventuellement avoir, mais qu'il faut qu'il étouffe, mais à une allégeance qui tire ses fondements dans un atavisme qui plonge dans la nuit des temps et qui est appelé « aççabya » par Ibn Khaldoun, « Benaamisme » aussi, ou encore « aarouch », bref, qui fait appel à des expressions du terroir qui avaient toutes leur pertinence dans l'histoire séculaire de l'organisation sociale des communautés tribales(*). Conséquemment, la circonscription électorale aura un député, confortablement élu, qui n'aura pas à rendre compte à la population, qui a certes voté pour lui, mais plutôt à celui qui l'aura fait roi, c'est-à-dire son parti, celui qui l'a intronisé et l'a placé en tête de liste, pour le faire élire, sûrement, mode d'élection oblige. Le souci prioritaire de cet élu serait, outre sa reconnaissance éternelle à son parti, de se montrer dans sa wilaya, à chaque visite ministérielle, pour être vu, le plus possible, à côté des responsables locaux, en compagnie du ministre. En dehors de ça, c'est l'inaction politique qui le caractérise et qui est dissimulée par un emploi du temps chargé en apparence, car son contenu est bien souvent d'une indigence affligeante, en termes d'efficacité. Son parti se chargera de son approvisionnement doctrinaire et de la politique politicienne, qu'il doit servir, en tous lieux et en toutes circonstances, au nom de la discipline qu'il lui est imposée. Comment expliquer alors, le peu d'intérêt que ce député accorde à la vraie politique, celle pour laquelle il a été élu, et qui consiste à prendre en charge les attentes du citoyen ? En fait, le député à toujours en tête son « prochain mandat » et il ne veut pas, ne doit surtout pas scier la branche en or sur laquelle il est assis. La moindre incartade peut lui coûter sa position, ses privilèges et sa carrière politique. Et de Peter, il doit faire son principe. Rentrer dans les rangs, signifie pour ce député, une rente de situation assurée et la réélection, pour peu qu'il soit docile et caresse, dans le sens du poil, toutes les institutions de la république et fasse acte d'allégeance au Parti comme on l'a dit supra et aux apparatchiks du coin. Ainsi, un « petit candidat » à la députation, indépendant comme on dit, plein d'énergie, diplômé, expérimenté, ne fera pas le poids en période d'élection. Sans soutien et sans argent, il ne passera pas le cap du dépôt de candidature. Si parmi cette catégorie, des candidats indépendants arrivent quand même à l'assemblée, ils ne pourront pas, pour quelques uns d'entre eux, résister au chant des sirènes des grands partis, s'ils veulent durer, en dehors de leur groupe parlementaire et construire des carrières politiques. La situation des autres députés, qui tiennent à leur indépendance, ressemblera à « Fort-Alamo » et c'est peu dire. Et le citoyen dans cette histoire. Il continuera à voter, bien évidement, parce que la démocratie l'exige et qu'il doit assumer sa citoyenneté en caressant l'espoir de voir, peut-être, se multiplier les élus qui feront de leur mandat un engagement et une charge, pour servir et non se servir. Lors de ces dernières mandatures quelques uns d'entre ces derniers se sont fait connaître, comme le député du Sud Akhamoh Hag Moussa, qui a porté la voix des zones frontalières du Sahara, ou encore Nordine Aït Hamouda qui avait le courage de dire, haut et fort, ce que tout le monde pensait tout bas. Il y a certainement d'autres députés qui ont été aussi efficaces que courageux, ils se reconnaîtront. Beaucoup d'entre eux n'ont pas eu la chance de faire un autre mandat. C'était le prix à payer. D'autres en revanche, n'ont pas fait honneur à leur mandat, dès lors où, ils ont défrayé la chronique pour certains ou alors, ils se sont manifestés par des flops et des coups d'épée dans l'eau. Exemples : On a vu des députés en venir aux mains et en découdre parce qu'ils étaient à court d'arguments. On a lu dans un quotidien arabophone qu'un député a été épinglé pour cause de trafic de visa. On a cru, un instant, à la démarche des 26 députés qui voulaient instaurer un débat sur la corruption. On a cru aussi à la mode des commissions d'enquête qui n'ont jamais vu le jour, pour semble-t-il, un manque d'ancrage juridique. On nous a parlé aussi des députés qui ont voté des lois dont ils ne connaissaient même pas la consistance et aussi des députés qui n'ont pas ouvert la bouche durant tout leur mandat. On a encore en mémoire, ce documentaire tourné par une télévision privée algérienne, montrant des députés avouant, toute honte bue, n'avoir jamais lu de livre. On n'a pas vu encore, à ce jour, une loi porter le nom de son député, on a, en revanche, regardé avec ahurissement les travées vides de l'APN à l'occasion de discussions de textes fondamentaux, comme la loi de finance. Finalement, nous sommes trop indulgents à l'égard des députés, y compris ceux qui se disputent des responsabilités, dans l'hémicycle même, en recourant à des méthodes, pour le moins, inélégantes. La représentation nationale, émanation du peuple, est censée porter les idéaux et les doléances de celui-ci. La réalité est, hélas, toute autre aujourd'hui. Sommes-nous restés au stade de l'apprentissage ? Peut-être bien. C'est agaçant, tout de même, car les députés, eux, s'accommodent aisément de cette situation, dès lors que l'Etat les entretient, grassement, autant qu'il les déresponsabilise, avec cet argument du mandat national et non pas local. Il ne faut pas donc attendre grand-chose des députés actuels, trop nombreux, majoritairement inféodés à des partis inamovibles, devenus institutions dans les institutions (FLN-RND). Ces partis politiques «institutionnels» ont tout intérêt à maintenir cette situation et ce mode de gouvernance, garants de leur pérennité et sources de confortables subsides. Donc et en l'état des choses, personne d'entre nous n'irait se plaindre à son député, alors même qu'il lui a conféré mandat ? Oui, personne pour l'instant, dès lors que le député n'a pas d'adresse connue et que nul ne peut l'interpeller lors des visites ministérielles, sécurité oblige. A moins de recadrer les choses et de dire : Le député représente la Nation et doit donc parler au nom de l'intérêt national ; il a aussi une responsabilité locale qui l'oblige à être à l'écoute de ses électeurs, de prendre en charge leurs doléances et leur rendre compte. Il devra, lorsqu'il présentera sa candidature aux élections, engager personnellement sa responsabilité sur un programme, fût-il celui élaboré par son parti. Il devra non seulement ouvrir une permanence, localement, mais s'assurer de l'aide d'un assistant parlementaire, autre que membre de sa famille, pour donner plus de crédibilité à sa charge. Ceci, pour le député. Pour les partis, ils ne pourront pas leurrer, indéfiniment, les citoyens en leur faisant croire que leurs listes sont conduites par des universitaires et des personnes instruites, sachant bien, qu'un diplôme quel qu'il soit, ne donne pas une compétence et une intelligence dans la gestion des situations ; seul le quotidien permet de juger sur pièce. Que de fois nous avons été dépités par la qualité des interventions des députés et la stérilité de leurs débats, qui apparaissent hors histoire, hors sujet et sentant la langue de bois (*). Quant aux pouvoirs publics, ils devront trouver le chemin d'une démocratie réelle, crédible et véritablement représentative de toutes les couches sociales de la population. Cela passerait, obligatoirement, par une réforme du parlement, par la suppression du Sénat, par exemple, dont personne n'entrevoit l'utilité ou ne perçoit l'expertise tant louée. Cela passerait, également, par la réforme des règles de campagne électorale, du mode de scrutin, du statut de député et du lancement de la formation des assistants parlementaires et du métier y afférent. En conclusion, peut-on un jour aller nous plaindre à notre député ? Rêvons quand même à ce jour où le citoyen de Tébessa, de Tizi-Ouzou, de Tlemcen, ou de Tamanrasset, emprunterait cette formule ce qui signifierait que notre pays va bien, qu'il jouit d'une bonne santé démocratique et que réellement on peut commencer à parler de séparation des pouvoirs en Algérie. Je me suis permis cet exercice, juste pour le fun, et ce député là, président de commission de son état, se reconnaîtra, lui qui a fait l'impasse sur son congé de détente de l'année passée, par respect pour sa charge et pour se consacrer à la préparation de la rentrée parlementaire. Au risque de heurter sa modestie, j'ajouterais qu'il est de tous les débats parlementaires et qu'il n'est pas au parlement pour l'argent, la puissance, ou la jouvence, puisque Dieu dans sa grande bonté l'a doté de tous ces bienfaits. A ce député et à tous ceux qui veulent marcher dans ses pas, je leur dédie cet article. Note de lecture : (Voir article du Pr. Chems Eddine Chitour ? A quoi sert un député ?) |
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