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Syrie : le dernier tournant

par Belhaouari Benkhedda *

Le conflit syrien prend un nouveau tournant. Le récent bombardement de l'armée israélienne sur la Syrie a failli enflammer la région du Moyen-Orient.

Le mardi 07 mai 2013, les Américains et les Russes se sont mobilisés pour trouver une solution à la crise. Après ses entretiens avec Sergei Lavrov et Vladimir Poutine, le secrétaire d'État américain John Kerry a déclaré que les solutions aux problèmes du Moyen-Orient, notamment le conflit en Syrie, sont politiques. Le chef de la diplomatie américaine a toutefois souligné que le président Bachar el-Assad ne doit pas participer à un gouvernement de transition. Pourtant la Maison-Blanche était prête à appliquer l'accord sur la Syrie conclu avec le Kremlin, le 30 juin 2012, concernant le déploiement d'une force de paix de l'ONU et le maintien au pouvoir de Bachar el-Assad s'il est plébiscité par son peuple.

QUE S'EST-IL PASSE DEPUIS JUIN 2012 ?

Il ne faut pas oublier que l'économie américaine est en crise, le PIB américain a enregistré une augmentation dérisoire de 0,4% au cours des derniers mois, le taux de chômage a effleuré les 20 % et la dette publique a dépassé les16 000 milliards de dollars. Pour que l'Empire américain continue d'exister, il doit absolument sauver le dollar. Pour ce faire, il est prêt à se lier avec le diable. Il ne sera donc pas étonnant de voir les Américains et les Russes conclure un accord global incluant les relations économiques au Moyen-Orient.

Par ailleurs, les Etats-Unis ne veulent surtout pas réitérer l'expérience de l'Irak. Le conflit en Syrie dure depuis 26 mois et risque d'engendrer des fracassions militaires incontrôlables. La violence en Syrie menace de déborder et de compromettre les intérêts vitaux des Etats-Unis.

A présent, Washington et Moscou tentent de mettre en place une solution satisfaisante pour toutes les parties. La Russie maintiendrait finalement sa présence en Syrie et donc en Méditerranée, passage stratégique de commerce international. La politique d'isolement de l'Iran exercée par les Européens et l'Empire américain pourrait être prochainement abandonnée. Concernant l'exploitation des réserves pétrolières prouvées de la Syrie, estimée à de 2,5 milliards de barils selon l'EIA (The U.S. Energy Information Administration), les Russes, les Chinois et les Américains sont prêts à trouver un compromis équilibré.

LES PARTIES QUI S'OPPOSENT A L'ACCORD

La Turquie et Israël sont les principaux opposants à une solution politique pacifique en Syrie. Pour que la paix soit possible, la Turquie doit mettre fin à son ingérence en Syrie. Récemment, le gouvernement de Tayeb Rajab Erdogan a reçu deux messages. C'est la politique de la carotte et du bâton. D'un côté, les militants séparatistes du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ont accepté de se retirer de la Turquie et de mettre fin à un conflit qui remonte à 1984. D'un autre côté, l'attentat de samedi, dans le Sud de la Turquie, près de la frontière avec la Syrie, a mis Ankara devant deux solutions : entrer en guerre ouverte contre la Syrie ou cesser de soutenir les djihadistes. Visiblement, c'est vers la deuxième option que les Turcs vont se diriger.

Quant à Israël, elle a tout fait pour que l'accord du 30 juin 2012 ne se concrétise pas. Les porte-parole des intérêts israéliens aux Etats-Unis ont proposé au sénat américain plusieurs résolutions au sujet de la crise syrienne. Israël veut surtout mettre la pression sur la Syrie pour l'écarter du conflit israélo-palestinien. En bombardant la Syrie, les Israéliens voulaient véhiculer le message suivant : « Si Bachar el-Assad continue à soutenir le Hizbollah, Damas tombera. » Pendant plusieurs mois, les Israéliens ont mobilisé leurs subordonnés dans la région. Le Qatar a recruté massivement des djihadistes, et plus encore. Le Qatar, qui régisse la Ligue arabe à son gré, veut liquider la cause palestinienne dans le plus bref délai.

A l'heure qu'il est, la mise en place d'une solution politique pacifique à la crise syrienne reste tributaire de deux choses : les Etats-Unis doivent contrôler Israël, et la Syrie doit vaincre les djihadites. C'est toute la région qui risque de s'embraser s'ils n'arrivent pas le faire dans les prochaines semaines.

* Universitaire