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Cette baie d'Along considérée
comme une merveille du monde, attire chaque année un nombre imposant de
touristes. Ha long signifie descente du dragon chez les Vietnamiens. Plus de
deux mille pains de sucre jalonnent la baie sur des centaines de kilomètres
carrés.
Par l'effet du tropisme de la nature, les rochers en forme de cône s'élèvent à la vericale, enrobés de lichen vert qui se confond avec le bleu de la mer. Ces grandes masses de rochers disposés anarchiquement émergent sur l'eau comme s'ils étaient plantés. La verdure les couvre, comme des poupées. Chacune rivalise avec l'autre comme dans un festival marin. Les jonques, avec leurs parasols, se frayent à tous bords laissant leur sillage de vaguelettes vibrer les ondes. Dans l'air, le sublime de quelques battements d'ailes se mèle aux cris stridents des mouettes en goguette. Et quand la blancheur de la chieuse d'écume se joint à ce tintamarre, l'horizon semble se faire chalouper avec encombrement. Une multitude de voiliers, noirs de touristes, tournoient autour des îles avec les vautours, en quête de sensations. La mélancolie est souquée subtilement par quelques vrombissements échappés des remorqueurs. Des Vietnamiens reconnaissables sous leurs larges et pointus chapeaux semblent partager le plaisir des lieux. Notre bateau à l'arrêt nous laisse le temps d'émerger d'une belle nuit étoilée, des férus continuent à saisir le paysage dans leur appareil. La beauté du paysage imprime son cachet dans notre vision et l'insolite contribue à la magie des lieux. Si l'Unesco a primé la baie, c'est que les avis ont vu juste comme la plupart du temps. Le Vietnam peut se vanter de cette aubaine qui devient une source de devises non négligeable. Au petit déjeuner, le groupe fit d'amples connaissances avec un anglais décousu. La politesse est de mise mais l'échange est limité dans ses banalités courantes de d'où tu viens, comment t'appelles-tu, que c'est beau, etc. Sur le chemin du retour, on nous gratifie d'une visite à une célèbre grotte. C'est son accès qui m'impressionne avec ses escaliers qui grimpent en hauteurs, clairsemés de petits espaces dominants offrant un paysage enchanteur des îles miniatures qui composent la baie. Le paysage extérieur est plus imposant que l'intérieur de la grotte, comme toutes les grottes du monde qui s'illustrent par leur stalactites et stalagmites géantes. Dans le programme, vers 11 heures, une séance de natation est prévue pour les amateurs sportifs. Une demi-heure de débarbouillage collectif augmenta l'intensité du mouvement de l'eau. Chaque chose à une fin, le bateau amorce son retour dans une constellation nappée de brume où tous les pourtours des îlots épousent des formes fantomatiques. Le chef nous propose une ballade dans la baie de Cat Va d'un supplément d'une heure pour dix dollars. Une curiosité à ne pas rater afin de faire connaissance avec les limules. Tout le monde aligne les dollars et le bateau amorce un large virage. Les limules sont proches des crabes. C'est un des rares endroits du Vietnam où ils gigotent. Au vivier, le propriétaire et ses enfants se font un plaisir de nous présenter leurs monstres. Nous sommes côte à côte avec leurs pontaux. Ces crabes géants avec ceux de l'Alaska sont les plus connus. Leur énorme carapace vert clair évoque un casque futuriste. Leurs doux yeux très écartés sont presque invisibles. Une longue et fine queue traîne à l'arrière comme une antenne. Il existe une expression populaire : «s'accrocher et aimer comme les crabes Sam». Pendant la période de fécondation, le mâle se colle à longueur de journée au dos de la femelle (qui est plus imposante en volume que le mâle). Selon l'usage au Vietnam, il faut toujours les vendre par couple et les manger de même. C'est ainsi que le crabe Sam est devenu le symbole des amoureux. Les photos s'accentuent pour mémoriser. Un autre symbole qui s'ajoute à la panoplie de la Saint Valentin. La ballade prend fin et retour sur le port. Une cohorte d'autobus aspire les touristes, chacun vers sa destination programmée. La ville d'Hanoï Au salon de l'hôtel, je demande à l'accueil le moyen de louer une place en train sur Saigon. Le préposé se porta volontaire pour m'aider à la tâche et m'obtenir une couchette. Il est midi, je sors confiant continuer une petite exploration du quartier, prendre un bain de foule même si on n'est pas président. On n'a pas idée combien la foule agit sur le moral, elle est là comme un écran qui se déplace, vous vous frayez le chemin au coude-à-coude, le contact est très proche permettant une proximité humaniste au plus haut degré. Le sourire aidant, si vous demandez quelque chose, tout le monde est volontaire pour vous aider. En fin de compte, au bout d'une heure vous êtes saturé et aspirez au calme. Le train de nuit est équipé de couchettes déjà préparées, elles sont disposées en longueurs, parallèles aux fenêtres, dans le wagon comme dans un dortoir. Nous avons trente-trois heures de secouses jusqu'à Saïgon, une seule halte à Hué et c'est non-stop jusqu'au matin. Une overdose de contemplation de paysages. Mais auparavant, la circulation s?intensifie par diverses hôtesses qui de par leurs chariots traînent des repas en boîtes et selon les goûts, vous rassasient. La boisson, généralement c'est du thé chaud. Observant les Vietnamiens dans leur action en voyage, ils sont très organisés. Leurs affaires toujours nickel, bien pliées avec des gestes précis, présentent une impression d'ordre. Tout le monde sombre dans le sommeil contagieux et le train continue son chemin jusq'à Hué au petit matin dont l'arrêt et la jactance des voyageurs vous remet d'aplomb. Inévitablement les chariots vont apparaître pour le petit déjeuner. Les Vietnamiens comme les Chinois et les Japonais ont bien appris des Occidentaux les services de la consommation. Les petites friandises de sachets de cheap, de bonbons, de chocolats bien présentés deviennent des amuse-gueules appréciés. Le téléphone sonne de tous les côtés, un autre fléau qui envahit le monde et dérange pour la plupart des cas. Rares les personnes discrètes qui n'étalent pas leur vie dans des propos extravagants. On est saisi par l'attrait de la sonnerie et le dérangement qui devient inconscient va à tous instant se perpétuer. La dernière gare nous cueille vers midi et tout le monde se disperse avec les siens vers des destinations différentes. Le voyage a bien duré, mais avec le sommeil qui a coupé la fatigue, on reste en forme et de nouveau on affronte la célébrité d'une ville légendaire durant ladernière guerre. Ho Chi Minh Saigon est devenue Ho Chi Minh, laissant le nom d'Indochine choir dans les archives de l'histoire, je me dirige vers la quartier des routards où je ne me sens pas dépaysé surtout en matière de linguistique. La causette avec le chauffeur se trouve au plus vite close. Des fois que le chauffeur est un ancien, il peut manier la langue française mais comme c'est un jeune, la guerre d'Indochine est un fossile enterré. Avec le maître d'hôtel c'est la même chose, juste quelques mots d'anglais pratiques pour le bon déroulement. Le reste c'est à découvrir soi-même. D'une ruelle où se place mon hôtel, je débouche sur un grand boulevard très animé. Je repère d'abord les lieux par les premières boutiques et je me lance à corps perdu dans les rues de Ho Chi Minh. Parfait, quand on a un petit bagage et l'on milite jalousement pour se garder léger, aucun souci d'achat ne vous traverse l'esprit. Donc aucune tentation en vue et les regards en vitrines sont à peine frôlés. Je suis à la veille d'une fête nationale où l'offrande est un arbre fruitier (oranger ou citronnier) ; ainsi sur des motos, au-dessus des toits des voitures ou carrioles, des petits arbres bien enveloppés se trimbalent d'un bout à l'autre. Les magasins exposent sur les trottoirs une quantité inqualifiable d'arbustes. Au milieu de la chaussée, un large trottoir fait fonction de parc pépinière. Une tradition qui nous parait assez bizarre pour une telle offrande. La richesse d'Ho Chi Minh par rapport à sa rivale du Nord n'est plus à démontrer. Comme Angkor, Phnom Penh ou Vientiane, Saigon est née du grand fleuve. Logée au cœur du delta du Mékong, la ville de plus de sept millions d'habitants reste la capitale économique du Vietnam. En 1975, quand les Viet-Cong envahirent le Sud, ils rebaptisèrent la ville, humiliation absolue, du nom de leur leader Ho Chi Minh, «le lumineux». Les langues en se déliant n'hésitent pas à lancer que la lumière n'est jamais parvenue. Les Saigonais s'amusent avec le nom de leur ville pour la surnommer «le Paris de l'Asie», en raison de l'architecture et de la manière de vivre longuement influencées par la présence des Français. Du parcours, je traverse une ville en pleine vie. Une fois que mon hôtel est localisé, je plonge aussitôt dans la grande immersion. La rue m'accueille chaudement, je pénètre au premier café pour prendre le pouls et me rafraîchir. L'ambiance est très calme, c'est une copie des bars américains : comptoirs tout le long et box de quatre places en parallèle. Je tente de lier conversation mais le barman m'oriente vers deux vieux consommateurs qui parlaient français. La discussion est vite écourtée car leurs mémoires ne sont plus fidèles. Ils ont enduré la guerre en militaire et leur vocabulaire est resté cantonné dans les ordres de combat. Les gens dans la rue font des courses, vendent des babioles et se promènent. La ville porte sur son visage les traits de son histoire et la majorité des bâtiments importants ont été construits par les Français. Ainsi on découvre la poste centrale construite par Effeil, la cathédrale Notre Dame de style néo-romain, le théâtre municipal, les messageries maritimes ou encore l'hôtel Continental où séjournèrent les célèbres journalistes comme Lucien Bodard ou André Malraux. La ville a conservé de nombreuses habitudes alimentaires comme la baguette, les croissants ou encore la méthode de brassage de la bière. Il règne dans les grandes avenues une frénésie indescriptible et la ville fourmille de milliers de personnes acharnées au travail. Dans les rues, un véritable ballet de motos, de vélos ou de cyclo-pousse, joue en permanence. Des familles entières se perchent sur les deux-roues. Nous voyons régulièrement deux ou trois enfants accompagnés de leurs parents. On y transporte des meubles ou des arbres. Tout est accroché à l'arrière, les lois de l'équilibre sont en permanence défiées. Les femmes portent la tenue traditionnelle, l'aodai, sorte de longue robe, souvent blanche, sur laquelle vient s'ajouter une tunique dont les pans flottent comme un scapulaire. Soucieuses de leur élégance, les Vietnamiennes ont une allure magnifique, qu'accentue la finesse de leurs lignes. Au Vietnamn, le canon de beauté est à la blancheur éclatante comme dans certaines villes d'Algérie (Tlemcen en particulier). Pour se protéger du soleil, les femmes portent de longs gants de soie qui leur couvrent les bras. Les traditionnels chapeaux coniques ou des voiles couvrent le visage. Des hommes ou des femmes tentant de subsister, vendent, assis sur les trottoirs, des jouets, des cigarettes, des beignets, de l'encens, des fleurs, toutes sortes de nécessités de la vie quotidienne asiatique. De l'informel comme chez nous. Est-ce le propre des pays sous-développés pour faire face au chômage déguisé ? Ou la débrouille d'un peuple face à sa survie ? Des réparateurs de vélos ou de motos se trouvent à tous les coins de rue. Pour quelques dôngs, ils restaurent les chambres à air, à l'endroit des crevaisons. Le choc des civilisations a déjà eu lieu. Les coutumes traditionnelles et les idéologies sans lendemain sont poussées par une jeunesse avide de la culture et des modes occidentales. Saigon, marquée par son passé colonial, a conservé une ouverture sur l'Occident par son port. L'un des plus grands de l'Asie du sud-est où de nombreux cargos et pétroliers accostent chaque jour, venant du monde entier. D'une économie planifiée, le Vietnam et en particulier Saigon passent à une économie de marché sous le contrôle de l'unique parti au pouvoir. La traversée dans les passages protégés peut être comparée au départ d'un marathon. Une centaine de personnes sont prêtes à se lancer tête en avant. Captivé par tant de curiosités, je ne me suis pas rendu compte de l'heure qui tourne et reprends mes esprits pour retrouver mon chemin. Une terrasse des plus huppées de Saigon, relatée souvent dans les reportages, me tente pour reposer mes mollets. A peine attablé que je suis interpellé par mon voisin qui avait l'air de deviner mon origine. Hello what are you from ? Ce début classique peut tendre des pièges. I am Algerien. - Vous parlez donc l'arabe ? - Bien sûr, avec le français ! - Je suis aussi algérien - A la bonne heure Il se lève et me porte un salut chaleureux. Il est enchanté, réjouit de tomber sur cet heureux hasard. J'avais compris que sa nostalgie doit être immense. On passa donc aux nouvelles du pays et par la suite à celle de Saigon. Ce jeune homme a suivi son père dans l'import-export en Chine et continue à faire le relais pour les affaires, fixé à Sanghaï. Il déniche les bonnes affaires auprès des fabricants chinois et les proposent par fax à ses nombreux clients, leur évitant le déplacement. Présentement, il a profité d'une accalmie pour faire un tour au Vietnam. -Vous devez parler la langue ? -Oui, j'ai appris à une école à Paris et sur le tas depuis deux années. Je me fais comprendre. -L'adaptation se fait normalement -En gros oui mais je n'arrive pas sur le plan alimentaire malgré tout. Je m'efforce de cuisiner mes plats préférés algériens. Pour le reste, la vie ici est plus animée que celle d'Alger qui est une fausse capitale. -Malgré tout on s'est habitué à notre situation et l'on est du moins maître chez soi. La quotidienneté nous accapare pour escamoter quelques charmes de vie et nous éloigne de l'optimisme. Qu'on le veuille ou non, nous sommes liés à cette terre d'Algérie et nos attaches familiales et amicales sont très fortes. Vous n'avez qu'à vous rappeler les matchs internationaux où la fibre patriotique vibre d'elle-même. -Le match Algérie-Egypte se grave dans toutes les mémoires. Il devient même historique. -Son slogan «One, Twoo, Three : Viva l'Algérie, s'est exporté et devient un second symbole malgré nous. Un cri de guerre d'une jeunesse sans pitié. -Oui, des fois il y a un parfum de nostalgie qui nous secoue et fait miroiter un amour d'Algérie. -J'en conviens avec lui de notre sort avec ses hauts et ses bas, et on se donne rendez-vous le soir dans un restaurant où l'on risque de trouver un autre Algérien. Je plie mes jambes et je rebrousse chemin pour retrouver mon hôtel. J'ai du mal à me retrouver surtout à l'entrée de la vieille ville. Il n'y a que les grandes pancartes avec l'image frappante qui me guide, exactement comme les analphabètes. Heureusement que la ville est plate et son plan rectiligne. Ce que je déplore, c'est le mauvais état du pavage des trottoirs. Segments dont l'Algérie est championne du monde. Qui peut se targuer d'avoir des trottoirs comme celles de nos villes et villages. Dans les futurs manuels d'histoire et de géographie on pourrait inscrire le commentaire suivant : l'Algérie quoique pays sous-développé, possède du pétrole qui la nourrit et des trottoirs extra luxe, le reste c'est au petit bonheur du hasard», en quelque sorte. Nous avons des paradoxes hallucinants, comme placer notre argent dans les coffres américains sous forme de bons de trésor, alors que nos postes se trouvent en pénurie de billets, de même nous sommes producteurs de pétrole et nous importons du mazout faute de raffineries, le gaz occupe nos nappes à presque jaillir en jersey et nos villageois butent à l'absence de bouteilles pour se chauffer en hiver. Les piétons saïgonnais ne sont pas trop marcheur, deux raisons à cela : la chaleur et un certain snobisme qui consiste à croire que marcher ça fait pauvre, alors que rouler en moto Honda ça fait plus chic. Dans la vieille ville, les cyclo-pousses font ravage. Ils sortent de partout, ils se faufilent avec une habileté troublante, ils zigzaguent et se glissent dans la marée pétaradante des vélomoteurs et des motos, défiant tous les codes de la route de la planète. Je patinais de rues en ruelles sans me retrouver. «Cyclo, Cyclo !», je lance mon cri de désespoir comme un SOS. Je lui glisse la carte visite de l'hôtel et le voilà en mouvement alternatif, pesant de toutes ses forces sur ses pédales, se frayant chemin jusqu'à l'hôtel. Ouf ! C'est moi qui avais ressenti la fatigue. Une bonne douche froide et je m'écroule sur le lit sous une climatisation indispensable. Encore une sortie sans boussole, cette fois l'objectif est de me restaurer à la vietnamienne. La cuisine vietnamienne a beaucoup de qualité et peu de défauts : elle est fine et légère, pas chère et très variée (près de 500 plats). Bien qu'elle s'en inspire parfois, elle se distingue nettement de la cuisine chinoise par le fait qu'elle est moins grasse et moins enrobée de sauces, qu'elle comporte beaucoup plus d'herbes et de légumes naturels. La carte d'un restaurant vietnamien reste plus simple à lire que celle d'un restaurant chinois. Un ingrédient fondamental sépare définitivement les cuisines vietnamienne et chinoise : c'est le nuoc mam, sauce de couleur brune faite à partir de la fermentation de poisson salé. Voilà un condiment national qui fait l'unanimité, du nord au sud ! Comme dans tous les pays du monde, les variantes régionales existent : la cuisine du Sud a une saveur plus sucrée que celle du Nord, parce qu'on y met souvent du lait de coco à la cuisson. La cuisine du Centre (Hué, Da Nang) se singularise par l'abondance des produits de mer. Au Vietnam, que l'on soit recroquevillé devant une table chic, on mange toujours avec des baguettes. Les baguettes sont bouddhiquement pacifiques, elles ne savent ni piquer, ni transpercer, ni découper ! Le bouddhisme vietnamien commence dans l'assiette. Il faut de la dextérité pour réussir à tenir une boulette toute ronde entre deux baguettes ! C'est tout un art ! En cas d'échecs répétés, et une faim tenaillante, il faut aller sans scrupules vers le raccourci occidental un brin plus féroce : la fourchette. En Vietnamien «prendre son repas», se dit an com. Si l'on traduit littéralement, cela signifie «manger du riz». L'habitude est bien révélatrice de l'importance du riz dans la vie quotidienne. Selon un vieux proverbe, «Pour faire la guerre, il faut du riz, pour faire la paix il faut du riz aussi» ! Il existe trois sortes de riz : le riz normal avec des grains ronds et blancs, le riz gluant, grains opaques (il sert à confectionner des gâteaux et des offrandes), et enfin le riz parfumé reconnaissable à ses longs grains. Phô : C'est un des plats les plus courants. Le mot «Phô» est inscrit partout. Dès que l'on aperçoit ces trois lettres au bord de la route, cela veut dire qu'on peut y manger de la soupe. Autre affaire : si vous entendez «Ding dong ding dong», il s'agit sûrement du marchand de soupe ambulant. Le Phô est une soupe de nouilles, originaire du nord, qui s'est répandu dans tout le pays. C'est un mélange de liquide et de solide, à la fois léger et copieux, que les Vietnamiens consomment à n'importe quelle heure de la journée. La grande finesse réside dans les nombreux plats de poissons. En sortant du restaurant, on se trouve pesant et le volume de la panse livré à une dure bataille qui nécessite une digestion à l'orée d'une sieste souhaitée. En fin d'après-midi, j'avais rendez-vous avec le copain algérien de Sanghaï dans un restaurant au centre de la ville. La ville compte environ 8 millions d'habitant et divisée en 12 arrondissements que l'on appelle Quan (ça viens du français : quartier. Les rues portent des noms vietnamiens depuis l'indépendance en 1956. L'Algérie itou sans exemptions. Seules, quatre rues de Saigon portent encore des noms français : La rue Pasteur (Louis Pasteur est considérée comme un bienfaiteur de l'humanité), la rue Calmette (Albert Calmette inventa le vaccin contre la tuberculose), la rue Alexandre de Rhodes (ce père jésuite du XVII° siècle romanisa la langue vietnamienne en lui donnant des caractères latins) et la rue Yersin. Alexandre Yersin (1863-1943) a fondé Dalat, introduit l'hévéa en Indochine et découvert le bacille de la peste. Faites de la science et vous entrerez dans la postérité ! Le Vietnamien sans son chapeau conique, c'est la City londonienne sans son chapeau melon, le Mexique sans son sombrero, le pays basque sans son béret, Tel Aviv sans ses kipas, les Péruviens sans leurs chapeaux ronds, le colon sans son casque colonial, Istambul sans sa chéchia, Adrar sans son chèche, Mascara sans ses mdals, et les stades algériens sans leurs casquettes. Bref, voilà presque un symbole patriotique, le conique est le couvre-chef national d'un pays de riz et d'eau. Un chef d'œuvre de simplicité, d'efficacité, de légèreté et d'élégance ! Et surtout «pour niaiser et fantastiquer» comme disait Montaigne. Simple parce qu'il est fabriqué avec quelques feuilles de latanier séchées ficelées entre elles sur une trame de cerceaux. Efficace parce qu'il protège à la fois du soleil et de la pluie (il est imperméable). D'où son succès dans toutes les rizières. Il peut aussi servir comme plafonnier dans un studio d'étudiant. L'appel de l'aventure, chevillé au corps, le voyage continue quelques jours tout en papillonnant en allant de soi en soi à travers l'Autre. Je voudrais accrocher ma charrue aux étoiles. |
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