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Le 6 mai, Hollande fêtait très tristement sa première année de président.
Mais il lui reste quatre ans?
A Paris, il fait gris et froid, quand il ne pleut pas. Le printemps est mort, c'est en réalité l'hiver qui n'en finit pas. Au moindre rayon de soleil, c'est le coup de soleil que vous risquez, tant la peau n'y est plus habituée. Au mois de mai, sous-vêtements, pull, veste et manteau quand vous sortez. Ca doit être comme ça en Norvège, en Suède ou en Finlande. Mais nous, on est France ! Que fait la police ? La plaisanterie qui court, moult fois répétée dans ce printemps calamiteux : « pour un mois de novembre, il ne fait pas si froid? ». Dépêche du 27 avril : « La neige est venue s'ajouter aux fortes précipitations enregistrées toute la journée sur Rhône-Alpes. ll a neigé dans l'Ain mais aussi de façon plus spectaculaire dans le Pilat. Des conditions difficiles en ce jour de départs pour les vacances de «printemps». » (On appréciera les guillemets entourant le terme printemps »). Depuis dix jours, on a le droit à un grand feuilleton « inondations ». La Seine est sous haute surveillance. Après les fortes pluies qui ont touché le centre-est de la France en fin de semaine dernière, une partie du fleuve a été placée en vigilance orange. D'importantes inondations sont en effet redoutées dans l'est de la France et tous les regards sont tournés vers l'Île-de-France où le niveau de la Seine ne cesse de monter. Tout le monde craint le retour de la grande crue de 1910 quand Paris baignait sous deux mètres d'eau. On avait baptisé à l'époque, ce déluge de « crue centenaire ». 1910, 2013 ? Zut on n'est pas très loin? Maussade météo politique L'influence climatique joue beaucoup sur le moral de la population. Deux jours de beau temps, et l'on voit refleurir partout « jupes et calicot »s, comme disait le poète ; dès que la température dépasse 15° degré, les jardins publics et les terrasses sont envahis. Sourires et rires. Patatras ! Le lendemain, il faut ressortir les parapluies et les caches-nez. Et les visages se ferment. Dans les bureaux, chez les petits commerçants, dans les bistros, au téléphone, les commentaires sur le bulletin météo constituent une part importante des discussions, souvent conclues d'une voix sépulcrale, « çà doit être pour ça que j'ai pas le moral ». C'est vrai et le phénomène est assez général : ces temps-ci les Français n'ont pas le moral. Mais le climat n'est pas la seule cause de la morosité générale, même si nos températures de fin d'hiver en rajoutent une couche. Car l'autre grand sujet de conversation, c'est évidemment « la crise ». Quelques extraits quotidiens : « Tu sais que Machin vient de perdre son boulot », « Ma fille a réussi a décrocher un stage. Mais de deux mois. Avec un bac + 5? », « t'as vu ce qui se passe en Espagne (Italie, Portugal, Grèce?). Je suis sûr que ça va nous arriver sur la tronche »? Le 6 mai dernier, François Hollande célébrait le 1er anniversaire de son arrivée à l'Elysée. Il n'y a pas eu de bals populaires et les manifestations officielles furent d'une extrême discrétion. Le 15 mai 2012, à la sortie de son investiture, François Hollande avait remonté les Champs-Elysées sous une pluie battante. Et ce mercredi 6 mai 2013, alors que le président s'apprêtait à effectuer le même trajet, il pleuviotait encore sur Paris. Même mésaventure lors de son 1er voyage présidentielle au Maroc. Son arrivée a coïncidé avec des trombes d'eau. « Hollande, passager de la pluie » ? Il avait pris comme slogan de campagne électorale « le changement, c'est maintenant ». Il parlait du changement climatique ? Non ! Soyons rationnel. On ne peut prêter autant de pouvoirs à un président « normal ». Mais la 1er année du quinquennat s'il ne s'est pas déroulé dans un climat de tempête, a subit tout au moins quelques « gros grains », comme on dit dans la météo marine. Il est vrai que l'arrivée au pouvoir de François Hollande coïncide avec un événement international très négatif sur lequel l'actuel président ne porte aucune responsabilité. C'est en effet à partir de 2012 que l'Europe et la France ont ressenti les premières conséquences concrètes de la crise économique sans précédent ouverte aux Etats-Unis en 2008 avec la faillite de grandes banques internationales. Pour sauver leur propre système financier, les états européens ont du massivement intervenir, creusant leur propre déficits budgétaires. Les mêmes sociétés financières dont l'ingratitude n'a d'égal que leur voracité, ont immédiatement spéculé contre les états qui les avaient sauvés. Pour résorber les déficits budgétaires, ces mêmes états européens se sont lancés dans une cure d'austérité : réduction des dépenses publiques, augmentation de la fiscalité. Résultat : la croissance déjà atone a laissé place à une récession. La consommation a fortement baissé aussi vite que le chômage a augmenté, nourrissant de fortes inquiétudes dans les populations. Les Français, champions du monde du pessimisme Notamment en France, alors que les Français sont traditionnellement les champions du monde en en matière de pessimisme économique. Une enquête de l'institut américain Gallup montre régulièrement que huit Français sur dix estiment que l'année qui vient sera pire que la précédente. Après les Français, les Irlandais puis les Autrichiens et les belges affichent les niveaux de pessimisme les plus élevés parmi les 51 pays étudiés. Selon l'étude, les neuf premières places du classement sont occupées par des pays européens, déprimés par la crise de la dette qui affecte le Vieux Continent. L'étude conclut ainsi que «l'Europe mène en matière de désespoir, suivie par l'Amérique du Nord. Le reste du monde, Afrique en tête, demeure globalement optimiste». Le Nigeria, troisième économie africaine, se montre le pays le plus optimiste du monde, devant le Vietnam et le Ghana. Avec une économie en berne et des Français angoissés, pas facile de diriger le pays. Pour des raisons de conjoncture et de cure d'austérité contestable, il était pas non plus facile au nouveau président de mettre en œuvre ses 60 promesses électorales pour lesquelles il s'était fait élire. Plus particulièrement dans un pays qui, face aux difficultés à tendance naturellement à se recroqueviller sur lui-même et à voir resurgir en son sein, de vieux antagonismes. Le « mariage homosexuel » avait fait partie des promesses de la campagne présidentielle. Son institutionnalisation par voie législative a mobilisé de très grandes manifestions d'opposants, largement dominées par des courants catholiques. On peut penser que si l'intitulé de la Loi avait été « union homosexuelle », le texte de loi serait passé sans grandes difficultés. Mais le mot mariage a choqué une partie de l'opinion dans un pays profondément laïc mais qui reste de tradition chrétienne. On a pu constater aussi qu'une partie de ces courants catholiques se radicalisaient à droite, alors on constatait depuis les années 70 un glissement à gauche continue des régions plus marquées par le phénomène religieux, comme l'ouest de la France. Les députés socialistes inquiets ont, en revanche, renvoyé à plus tard une promesse électorale, celle du droit de vote des immigrés aux élections municipales. Bon, il est vrai que tant que les immigrés ne votent pas, ils ne constituent pas une clientèle électorale intéressante? Mais le retrait ou le report de cette promesse électorale très attendue dans un grand nombre de banlieues (constituant parfois l'essentiel de la population de municipalités, notamment de l'est parisien) ne constitue pas un acte de courage de l'actuelle majorité socialiste. Bref ! Le climat est un peu partout à la déception. Les sondages plongent de façon inquiétante : plus de trois quarts (76 %) des Français jugent le bilan de l'action de François Hollande plutôt négatif un an après son élection, selon un sondage TNS Sofres pour i>Télé publié lundi. Ils sont seulement 15 % à estimer ce bilan plutôt positif. 9 % des sondés sont sans opinion. Plus particulièrement, 56 % ayant voté pour François Hollande au premier et second tour de l'élection présidentielle de 2012 juge négativement son bilan. Au-delà de ce revers de popularité, François hollande affronte de surcroît une presse qui lui est globalement défavorable. C'est le « Hollande bashing », la raclée, le tir-à-vue. La plupart des hebdos, radios, télés multiplient les critiques cinglantes fustigeant les travers du « pépère » (c'est le surnom qui lui est donné), trop mou, hésitant, incapable de prendre des décisions. Ces mêmes medias consacrent très peu de place aux nombreuses réformes réalisées ou mise en chantier, qu'elles concernent le système éducatif, la modernisation de la justice, la sécurisation du travail? Même l'opération au Nord-Mali qui avait acquis un consensus parlementaire quasi-complet et qui à ce jour, est plutôt réussie, fut somme toute peu traitée par certains medias d'importance. Une certaine solitude Dernière difficulté pour François Hollande, une certaine solitude. Le président affronte bien sûr une opposition mais celle-ci se radicalise sur sa droite de façon un peu irresponsable. Il arrive parfois même que les propos de certains leaders de l'UMP soient plus virulents que ceux du Front National de Marine Le Pen ! Et l'on garde en mémoire cette image d'un député UMP giflant un CRS. Le monde à l'envers ! Mais c'est à gauche que le problème est le plus épineux. Bien évidemment il existe une « gauche de la gauche » qui n'appartient à la majorité présidentielle, regroupant le Parti communiste et le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon, très habile orateur. Ils ont tous deux réussi les 5 mai à regrouper plusieurs dizaines de milliers de manifestants sous l''étiquette un peu ambiguë de « Du balai ! ». S'adressaient-ils au président ? Alors qu'il est majoritaire au Sénat et à l'Assemblée nationale, que le PS dirige de nombreuses, régions et départements et qu'il a pu composer le gouvernement de son choix, le nouveau président doit surtout veiller actuellement à la cohérence de ses équipes. Les affrontements entre ministres se multiplient, les élus veulent à tout prix exister médiatiquement. Beaucoup de couacs depuis un an dans ce domaine ! Longtemps 1er secrétaire du Parti socialiste, François Hollande est plutôt naturellement un homme de synthèse qui répugne aux mesures autoritaires. Certains dans son propre parti y voient une preuve de faiblesse. Quels sont les atouts de François Hollande ? Plus nombreux qu'on le croie Tout d'abord, c'est lui qui contrôle le grand calendrier du quinquennat : il a encore quatre ans à exercer le pouvoir. Quel que soit le verdict des prochaines élections intermédiaires, élections municipales l'an prochain, puis les élections européennes, qui seront défavorable à son camp, il dispose d'une majorité parlementaire très solide. Par ailleurs, cet homme naturellement jovial, bon enfant et très drôle dans le privé est également un être très secret qui lui aussi son propre calendrier d'actions sur lequel il ne se livre pas. S'il aime le consensus, il n'est du tout certain qu'il ne soit pas capable de mesures autoritaires qui pourrait surprendre autant son opposition que sa propre majorité, comme un remaniement surprise au creux de l'été. Non, la principale difficulté que devra affronter ces prochains mois François Hollande est la question européenne. L'union européenne a quasiment consacré l'absence de solidarité entre les 27 pays adhérents. La Commission de Bruxelles, organisme non élu, se comporte de façon de plus en plus dirigiste, comme l'a montrée la taxation autoritaire des comptes des particuliers à Chypre, préparant la même mesure pour tous les pays européens en difficulté. Les politiques économiques européennes se sont enfermées dans des imprécations d'austérité qui tuent tout espoir de reprise de croissance. Le tout sous la férule de Mme Merckel, qui joue les seuls intérêts à court terme de son propre pays et qui ne veut surtout pas parler d'un éventuel « pacte de croissance ». François a lui-même qualifié ses relations avec Angela comme frappées actuellement de « tensions amicales ». Après les élections allemandes de septembre 2013, les tensions subsisterons, plus vives et peut-être moins amicales. |
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