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Le 77e Festival de Cannes - Karim Aïnouz revient chez-lui au Brésil et en compétition officielle à Cannes

par De Cannes : Tewfik Hakem

Déjà en compétition officielle, l'année dernière, avec «Le Jeu de la Reine», Karim Aïnouz, le cinéaste brésilien de père algérien, revient avec «Motel Destino» qui marque son retour au pays. Un film que notre envoyé spécial aimerait oublier le plus tôt possible.

Toute une page pour dire à quel point on n'a pas aimé un film, à quoi ça sert ? Plutôt qu'une critique très expéditive du «Motel Destino», étrangement en compétition officielle, il est préférable de vous raconter le making off de cette page.

Depuis qu'il a réalisé «Le Marin des Montagnes», bouleversant docu-fiction dédié à sa mère et consacré au pays et au village natal de son père kabyle (qu'il n'a jamais connu, voir encadré), Karim Aïnouz est devenu un ami, un frère. L'année dernière de retour à Cannes avec «Le Jeu de la Reine», film britannique autour de la personnalité de Catherine Parr, la 6ème épouse du roi Henri VIII, la seule à avoir échappé au sinistre destin que lui réservait ce Barbe bleu (ses précédentes épouses ayant été soit tuées soit répudiées), avec un Jude Law obèse et méconnaissable, on avait déjà un peu toussé, mais Karim Aïnouz est un frère de coeur, et pour ne pas faire de mal à nos 4 ou 5 lecteurs de Tagmut Azzuz, on a fait semblant de ne pas avoir vu le film.

L'annonce de son retour en compétition officielle, cette année, a été une bonne nouvelle pour tous les Algériens, accrédités ou pas à Cannes. Karim Aïnouz, de par son nom et prénom et surtout au nom de son documentaire «Le Marin des Montagnes» nous représentait un peu cette année, nous les éternels invisibles de Cannes.

Avec son titre mystérieux, Motel Destino sonnait comme la belle promesse de cette 77ème édition, d'autant que ce long-métrage marquait le retour de Karim Aïnouz, chez lui, au Brésil, après quelques années d'exil.

Pour rappel, le cinéaste avait quitté son pays quand le candidat d'extrême-droite, Jair Messias Bolsonaro, a été élu président, s'exilant en Europe (comme tout Algérien qui réussit à s'échapper) pour poser ses valises à Berlin. «Bolsonaro, n'est pas d'extrême-droite, pour moi c'est un fasciste» avait-il rectifié, lors de la passionnante master classe qu'il a donnée dans le stand algérien, animée par l'universitaire Fayçal Sahbi, par ailleurs conseiller de la ministre de la Culture.

Il était plus que légitime que Karim Aïnouz soit l'invité du stand algérien, la délégation officielle a eu la bonne idée de s'approprier le documentaire ‘Le Marin des Montagnes', même si ce film n'a bénéficié d'aucune aide algérienne.

Lors de cette rencontre, Karim Aïnouz a réitéré son envie de retourner en Algérie pour faire un film sur Reggane et les conséquences des expériences de la première bombe atomique française. Ayant déjà consacré une exposition à ce sujet, Karim Aïnouz, de par ses positions anticolonialistes développées dans ‘Le Marin des Montagnes', a tout pour plaire aux décideurs du cinéma algérien, et à cet effet il a été très bien accueilli. «Tu es chez toi ici» lui ont dit d'emblée les responsables et promoteurs de l'opération «Algérie is back à Cannes». Le cinéaste tout de blanc vêtu comme le veut la tradition brésilienne était parmi les VIP de la grande et belle fête algérienne qui a eu lieu lundi soir;

Il était donc normal que l'envoyé spécial du ‘Le Quotidien d'Oran' consacre, à son tour, toute une page à ce film l'attendu. Techniquement, les photos de Karim Aînouz dans le stand algérien étaient déjà mises en page, la chronique sur son film ‘Le Marin des Montagnes' en version restaurée devait accompagner la critique, forcément élogieuse, de son dernier opus. La projection de presse de ‘Motel Destino', prévue ce mercredi, à 11h, un espace était réservé pour un texte que l'envoyé spécial devait torcher en moins d'une heure puisqu'il tenait tant à une publication, dès le lendemain de l'avant-première mondiale du film. «Pas de retard, hein, on boucle tôt aujourd'hui, le responsable de la maquette n'a toujours pas acheté son mouton».

Et puis on a vu le film ! God, comme dirait Didine Canon 16, quelle catastrophe ! Motel Destino est en quelque sorte un Dikki légal et payant, géré par un couple bizarre. Un jeune Brésilien des environs vient y trouver refuge pour échapper à des narcotrafiquants à ses trousses. Le trio fatal mari-femme-amant se met en place pour la énième fois et plus mauvaise déclinaison du «Facteur sonne toujours deux fois».

Tout est laid dans ce film, et on s'y ennuie du début jusqu'à la fin, si bien qu'on aurait aimé que Karim Aïnouz, à l'instar de Bachir Deraïs avec «Ben M'hidi», nous interdise l'accès au film, pour deux très précieuses heures de sommeil en plus.

Surtout on aurait eu de la place pour dire ici le plus grand bien du film palestinien de Mehdi Fleifel, «Vers un pays inconnu», projeté le même jour à 8h30, dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs. Le sujet est plus courageux et autrement plus original : à Athènes, des exilés arabes font tout pour rejoindre l'Allemagne, pays plus accueillant pour ceux qui ont tout perdu. En attendant, et pour se payer des faux papiers, ils n'ont pas beaucoup de choix, trafics en tous genres, vol, prostitution, et... pire encore, une guerre intestine entre exilés palestiniens et exilés syriens. Sujet osé, réalisation parfaite, acteurs excellents. Tout le contraire de Karim Aïnouz et de son triste ‘Motel Destino'.



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