Alors que toutes les régions du pays célèbrent le mois du patrimoine, la
Gendarmerie nationale vient encore de dévoiler un trafic de pièces
archéologiques à travers l'arrestation, mardi dernier, sur la route entre Mila
et Constantine, d'un individu âgé de 34 ans, qui transportait dans son véhicule
de marque Chevrolet une grande quantité d'objets antédiluviens.
D'une valeur marchande pouvant atteindre les 5 milliards de centimes,
selon les estimations des spécialistes, les pièces archéologiques saisies par
les éléments de la gendarmerie «remontent à l'époque des ?'foutouhates'' ou
conquêtes musulmanes», comme le souligne une dépêche APS qui se réfère aux
déclarations du commandant du groupement territorial, le lieutenant-colonel
Mohamed Haben. Ce dernier fait état de la saisie d'un sabre sur lequel sont
gravés des versets du Saint Coran, un chandelier en bronze où l'on peut lire
l'inscription gravée «Jérusalem», une lampe à huile en argile, neuf pièces
numismatiques, ainsi que d'autres anciennes pièces en argile. Cette action de
la Gendarmerie nationale a été déclenchée à la suite de l'obtention de
renseignements, dont l'exploitation a permis d'opérer cette importante saisie
et l'arrestation du trafiquant, lequel s'apprêtait à livrer la marchandise à un
étranger qui devait l'attendre à Constantine. Sur ce registre, le commandement
régional de la Gendarmerie nationale indique qu'une vaste opération de lutte
contre le commerce illicite des pièces archéologiques a été déclenchée depuis
le dernier trimestre de l'année écoulée, non sans rappeler dans ce sillage la
saisie durant cette période d'une vieille coiffe en forme de casque, sertie de
motifs en or et l'interpellation, au début du mois d'avril passé, d'un individu
au niveau d'El-Khroub, âgé de 30 ans, en possession de 29 pièces de monnaie
anciennes. Dans le contexte de ce pillage à grande échelle du patrimoine archéologique,
le juge d'instruction près le tribunal d'Oum El-Bouaghi a placé, au début du
mois de mars dernier, trois personnes sous mandat de dépôt pour détention de
biens archéologiques en vue d'une exportation illégale. Les trois personnes en
question ont été appréhendées en possession d'une pièce rare pesant 5 kilos et
longue de 52 centimètres sous forme de statuette en bronze représentant le
Christ. On rappellera, aussi, que les réseaux de trafic des pièces
archéologiques transitent généralement par les villes de l'est du pays et
prennent ensuite les chemins de la contrebande menant en Tunisie, d'où la
marchandise est transportée vers les pays européens, signale la Gendarmerie
nationale. Les éléments de la Gendarmerie nationale relèvent sur le chapitre du
pillage des sites historiques la prolifération de fouilles clandestines qui ne
prennent aucun soin pour éviter la dégradation des lieux ciblés. Faut-il
relever, a contrario, un autre grave déficit, en l'occurrence l'inexistence en
Algérie d'un marché de l'art dûment réglementé par des textes clairs. Ce sont
des collectionneurs d'objets d'art, en possession de pièces anciennes de grande
valeur matérielle et surtout morale, qui nous ont fait part de toute leur
inquiétude face aux risques encourus en l'absence d'un espace légalement
réservé à ce créneau commercial.