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Avec ce film
documentaire, Brahim Hadj Slimane, qui a une longue histoire avec le
journalisme, la poésie, l'écriture et le cinéma, lance un pont entre l'art et
la culture en développant ses talents multiples de création et de production.
En effet, Brahim Hadj Slimane a travaillé dans plusieurs titres de la presse algérienne,
en particulier il a participé à la grande aventure de l'hebdomadaire Algérie
Actualité. Il a fondé et animé la revue littéraire Voix multiples (1981-1986).
Il est l'auteur de l'essai La création artistique en Algérie (Alger-Paris,
éditions Marsa, 2003), de 29 visions dans l'exil (poèmes, éditions Marsa,
Alger, 2008), a codirigé l'ouvrage pour Jean Sénac (Editons Rubicube,
Paris-Alger, 2004), a participé à divers autres ouvrages collectifs. Il est
l'auteur du documentaire La troisième vie de Kateb Yacine (Bejaïa, 2009) et de
spectacles poétiques.
Jeudi dernier, de nombreuses personnes trépignaient d'impatience à l'entrée de la maison de la culture « Abdelkader Alloula » pour voir son film documentaire « A la recherche des savants paysans », titre en hommage à Fanny Colonna. Ce documentaire retrace l'évaluation d'un programme étalé sur 4 ans et touchant une population de 9 localités regroupées dans 4 communes de la région de Tlemcen : Béni Mester, Térny, Aïn Ghoraba et Aïn Fezza. C'est un programme d'action cofinancé par l'agence espagnole de coopération internationale pour le développement et qui a tourné autour de trois axes : la gestion des déchets solides, l'amélioration agraire et l'éducation environnementale. Plus globalement, c'est l'amélioration des conditions de vie des populations défavorisées que visait ce programme et les régions ciblées sont des zones rurales protégées. Concrètement, ces actions ont été initiées par la fondation espagnole IPADE et réalisées dans le cadre d'une convention avec le parc national de Tlemcen et une association locale, la LASTJ-T. Ce documentaire, tourné récemment, a été l'occasion d'explorer un monde quasiment ignoré des citadins de Tlemcen et dont, pourtant, il se trouve à un jet de pierre. C'est une région où prédominent deux tribus ancestrales, les Béni Hdyel et les Beni Ournid, et qui a beaucoup donné à la guerre d'indépendance et donc particulièrement souffert de la répression coloniale. Les anciens se souviennent des dirigeants de l'ALN qui transitaient chez eux, en particulier le colonel Boumediene qui était un familier des lieux. Mais, paradoxalement, ces populations ont si peu bénéficié des bienfaits de l'indépendance. Ce film a visité celles-ci et, pour la première fois, des villageois ont eu l'occasion de s'exprimer sur leur histoire, leurs conditions de vie et leurs aspirations. C'était à Ouled Youcef, Feraouna, Terny, Aïn Ghoraba, Bouhassoun. Rien que ce dernier village, isolé et oublié, mériterait un film à lui tout seul. Tant il est atypique et donne à voir une Algérie qui remonte du fond des âges. Dans toute une première partie, le film explore l'économie agricole de ces localités, à travers son histoire et son état présent marqué par la sécheresse et la déperdition du système d'irrigation traditionnel qui est justement le principal souci de la mission d'IPADE et ses partenaires. Comment réhabiliter ce savoir-faire traditionnel dans la gestion de l'eau ? De larges séquences, avec des interviews sur les sites. Le second volet est la gestion des déchets solides. Une campagne de volontariat, organisée par un groupe de jeunes citadins de Tlemcen, est filmée en direct. Elle cible une impressionnante décharge sauvage à l'entrée d'Ouled Youcef. Une fois celle-ci nettoyée, les volontaires font le porte-à-porte au village pour sensibiliser les habitants sur la propreté de leur environnement. Cette séquence est rythmée, vivante. S'ensuit une partie tournée dans une école de Aïn Fezza et qui met en scène, dans la cour de l'école, une enseignante faisant un cours d'éducation environnementale à un groupe d'élèves. Cette enseignante volontaire est une femme habitée par une fascination pour la nature. C'est avec une flamme intérieure et des yeux qui brillent devant la caméra que s'exprime cette femme, Mme Rachida Belaïd. «A la recherche des savants paysans» est un film touchant, profondément humain et éloquent sur des fragments de l'Algérie profonde. C'est aussi un document intéressant pour les anthropologues et les gestionnaires de l'agriculture et de l'environnement. |
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