|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Rien n'est éternel en ce bas monde. Nous savons tous que nous ne sommes
que de passage. Mais lorsqu'un être cher nous quitte, nous précède, nous sommes
submergés par le chagrin.
Voilà un an que Ahmed Ben Bella, mon père, nous a quittés. Un an déjà ! Le temps est si vite passé. Il me semble que c'était hier. Il m'a fallu accepter la séparation avec mon père. C'est la volonté de Dieu. C'est la condition humaine. Mais mon père n'était pas que mon père. Il était le père de tant d'évènements dans l'histoire de l'Algérie. Il était Ahmed Ben Bella ! Son nom est intimement lié à l'Algérie et, par ce fait inaltérable, chaque Algérien en a une part. Mon père, celui dont je puis témoigner de son infinie bonté et de sa générosité sans pareille, était un homme semblable à tous les hommes. Ses proches, ceux qui le côtoyaient au quotidien, savaient l'écorché vif qui dénonçait jusqu'à son dernier souffle le sort fait aux plus démunis, aux laissés-pour-compte, au petit peuple auquel l'attachaient des racines paysannes et une pareille souffrance face à l'injustice, ce mot terrible dont, plus que quiconque, il savait le sens profond. Ils se souviendront de l'extrême humilité de cet homme face à son destin et face à ses semblables, de celui qui ne fut jamais chiche de son temps à l'égard de personne. Qui discutait à perte de vue des qualités de tel ou tel grand footballeur avec des passionnés rencontrés par hasard ou de son entêtement à imposer Zineddine Zidane au-dessus de tous dans le panthéon des gloires du sport roi. Exit Messi, Maradona et autres Pelé. Mais en ce jour anniversaire, ceux de sa génération, pareillement épris des principes égalitaires qui furent au fondement de la Révolution du 1er Novembre, dont l'histoire a déjà retenu qu'il en fut l'un des tout premiers acteurs, auront gardé le souvenir du premier président algérien, si fier de son pays. Un président qui dut affronter, à l'orée de l'indépendance et dans de terribles difficultés, les mains vides, les premiers pas chancelants d'une population pauvre, meurtrie par une guerre sans pitié. Un militant sincère qui sut préserver l'unité d'un pays, alors sans ressources, menacé par une «congolisation» que les ennemis extérieurs espéraient. Un révolutionnaire qui a toujours mis les intérêts de la nation au-dessus de tout. Sa révolte contre l'injustice dépassait les frontières algériennes. Il n'a jamais cessé de dénoncer le colonialisme, la guerre impérialiste, la faim dans le monde, le pillage de la planète, notre maison commune, mise à mal par un ordre mondial prédateur. Il ne fut pas toujours entendu mais, jusqu'à la fin de ses jours, il demeura égal à lui-même, un Algérien parmi son peuple, dans les bons et les mauvais jours. Toutes les causes humaines l'interpellaient et la cause féminine pour l'émancipation n'était pas des moindres. Ce musulman pieux, qui défendait l'islam des lumières contre les «vieux démons rétrogrades et les idéologies mortifères», réprouvait ceux qui donnaient de notre sainte religion une image si dégradée. Mon père refusait que de simples humains en vinssent à altérer le message de paix du Prophète de l'islam. Ben Bella, mon président, repose en paix ! Ta mission sur cette terre est accomplie. A toi, à tes compagnons, braves parmi les braves, nous devons notre fierté de femmes et d'hommes libres ! Repose en paix, mon cher père. Gloire à nos martyrs ! A Dieu nous appartenons et à Dieu nous retournons ! |
|