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Ce régime de
contractualisation partielle, assumé de manière timide, pouvait s'expliquer par
le fait que ses sponsors voulaient avancer masqués. Ils ont estimé ainsi qu'ils
devaient procéder par petites touches pour implémenter progressivement et
subrepticement le projet. Donc, il fallait le réserver, dans un premier temps,
aux emplois d'entretien, de maintenance et de service, pour verser à la fin
dans une contractualisation généralisée. Ce qui ne veut pas dire qu'ils
pouvaient techniquement aller au bout de leurs prétentions. Sur le moment, ils
se sont contentés d'installer un artifice de verrou au moyen de l'article 9 du
décret, promis pour sauter à tout moment pour faire basculer, quartier après
quartier, toute la fonction publique dans une contractualisation généralisée,
dès le moment que les conditions du passage à ce système viendraient à être
réunies et, si telle est la volonté de ses commanditaires.
Le plus étonnant c'est qu'on continue de faire vivre cette sorte de crypto-décret qui aujourd'hui n'est d'aucune utilité, bien au contraire, qui conduit à générer une distorsion injustifiée et injustifiable entre titulaires et contractuels, quand bien même ils exercent absolument les mêmes fonctions. Et pour corser la situation, on exige des gestionnaires publics de faire usage d'un tableau des effectifs ou sorte de plafond d'emploi, devant recenser les effectifs contractuels, y compris les personnels sous contrats à durée déterminée (CDD). Ce qui est notablement anormal, du fait que les emplois en CDD sont par nature imprévisibles et qu'en conséquence ils ne doivent pas mobiliser inutilement des emplois budgétaires. Plus surprenant encore, c'est que les gens du budget ont accepté sans rechigner ce dispositif. Ma compréhension des choses, qui n'est pas sans être faillible, soutient que les emplois sous CDD exigent ordinairement que les crédits qui leur sont réservés doivent être inscrits au titre des crédits évaluatifs, ou toute autre formule valide qui soit compatible, en tout cas, avec les dispositions la loi sur les lois de finances. L'avantage étant de ne pas immobiliser sans cause des crédits qui pourraient servir par ailleurs à couvrir d'autres dépenses bien plus réelles et bien plus urgentes. L'intérêt pour les ministères concernés c'est qu'ils auront la main sur ces crédits pour en apprécier de leur réalité et de leur opportunité. Cette démarche pourrait éviter, pour le moins, l'accroissement de cette fonction publique au rabais, si on peut dire, constituée de bataillons de contractuels à durée déterminée (CDD) essaimés dans toutes les administrations. Et dire que tout le monde sait, ou presque, que ces personnels ne bénéficient d'aucune protection juridique et qu'ils vivent dans une singulière précarité, surtout que leurs contrats ne sont pas renouvelés, pour la plupart, à leur échéance. L'inquiétude est plus grande, lorsqu'on sait que ces personnels ne peuvent exciper d'aucun droit acquis et même pas de se prévaloir du droit du travail, essentiellement la loi n°90-11 relative aux relations de travail, qui, fort généreuse, permet que « la preuve du contrat ou de la relation de travail peut être faite par tout moyen », qui n'est pas applicable aux contrats conclus sous l'empire du droit public. La question des vacataires, dits aussi suppléants, auxiliaires ou autres appellations non contrôlées est tout aussi préoccupante. Ces personnels connaissent à leur tour une extrême incertitude et qui, étant exclus du champ de compétence du décret relatif aux contractuels, sont relégués dans un no man's land juridique qui ne dit pas son nom. Il en est ainsi, alors même qu'ils exercent dans une large proportion des fonctions qui répondent entièrement à un besoin permanent de l'administration et qui sont donc en droit d'être regardés comme des contractuels. L'inacceptable, c'est que la plupart d'entre eux sont de « faux » vacataires, de « faux » suppléants et de « faux » auxiliaires, mais des vrais contractuels. Une simple décision du juge administratif pourrait contraindre l'administration à les faire bénéficier du statut des contractuels, encore qu'ils aient parfaitement le droit de demander à être dédommagés pour toute la période pendant laquelle ils ont exercé dans les conditions décrites plus haut. Aussi, faisons le vœu que le Conseil d'Etat, puisse être saisi d'une affaire du genre et qu'il s'inspire, sans fausse honte, de « l'arrêt Berkani », célèbre dans les annales du Conseil d'Etat français, pour constater que le lien qui unit un vacataire à son employeur, dans la mesure ou les fonctions occupées répondent à un besoin permanent de l'administration et qu'il est fait appel à lui de manière constante, est de nature à lui conférer la qualité de contractuel. Si par contre il est constaté que la personne est recrutée pour l'exécution d'un acte déterminé, qu'il y'a absence de continuité dans le temps et qu'il n'est pas observé une subordination directe à l'autorité administrative, il faut voir ici qu'on est en présence d'une simple vacation et que par suite la personne concernée doit être payée à la vacation, sur la base horaire déterminée par la règlementation. Comment ne pas évoquer aussi le lancinant problème du recrutement des personnels d'appoint des secteurs de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, même s'il y pallie en ce qui le concerne par le recrutement des professeurs associés et des professeurs invités, ainsi que de la formation et de l'enseignement professionnels et même d'autres secteurs qui assurent une activité annexe de formation, accessoirement à leur mission principale, qui se trouvent réduits à parer au plus pressé alors qu'ils sont dans l'extrême besoin de procéder à des recrutements d'urgence ou imprévus. Le recours au décret 84-296 du 13 octobre 1984, relatif aux tâches d'enseignement et de formation assurées à titre d'occupation accessoire, même s'il est d'une grande utilité, ne satisfait pas les gestionnaires qui requièrent en la matière beaucoup de souplesse et d'adaptabilité. Aussi faut-il se demander s'il n'est pas légitime, pour une fois, de prendre décret, pour chacun de ses secteurs, pour y consacrer des modalités spécifiques les autorisant à organiser le recrutement d'enseignants contractuels à raison de dix mois par an. Le tout serait de permettre à ces secteurs de parer à des situations impératives comme lorsqu'il y a défaut de la spécialité recherchée, ou au terme de concours restés infructueux, étant prouvé que l'absence d'enseignants fragilisent et déstabilisent le fonctionnement des établissements d'enseignement de ces secteurs. 3- Réformer l'actuel statut ou changer en profondeur 3-1 Le contexte A sa décharge, il faut dire que la fonction publique algérienne n'a jamais profité d'une feuille de route claire, qui aurait pu baliser son parcours ou désigné franchement ses objectifs et ses priorités, dans une démarche inclusive, allant de concert avec un projet de réforme de l'Etat clairement décliné. Il faut reconnaitre aussi, qu'il existe un fort et tenace préjugé qui affecte le jugement des autorités, qui, se basant sur le postulat que le fonctionnaire est vis-à-vis de l'administration dans une situation statutaire et règlementaire (cf. article 7 du statut actuel), refusent d'organiser le moindre dialogue avec les syndicats, même ceux qui sont dits représentatifs. Pis, il existe même un courant de pensée qui considère que les syndicats ne sont pas aptes à promouvoir des idées d'action, favorisant le bon fonctionnement de l'administration et qu'ils sont là juste pour réclamer plus et mieux de rémunération, abdiquant sur d'autres griefs qui font le cœur des doléances chez un syndicat qui assume son statut de revendicateur, voire de protestataire. Aussi, refusent-ils par principe de prendre langue sérieusement avec les syndicats à l'exception de la longue période de la tripartite d'autrefois qui s'explique par le statut de l'UGTA, qui avait un rôle particulier à jouer, aussi peu syndical que très politique. Pourtant, le dialogue ou la négociation, pour peu que toutes les parties s'y prêtent sincèrement, peuvent conduire les partenaires à se préoccuper chacun de l'intérêt de l'autre et d'une façon également favorable de son propre intérêt. Il n'existe pas un meilleur moyen qui permet de mieux comprendre les revendications du partenaire, de mieux les anticiper ou de mieux les gérer. De son côté, celui-ci aura aussi à mieux appréhender les priorités de l'autorité étatique. Ce n'est la matière qui manque, elle est plutôt abondante : politique de rémunération et pouvoir d'achat, la formation continue, les écoles du service public, le droit à la mobilité, la révision de l'architecture statutaire, la situation des agents contractuels, l'action sociale considérée comme un tabou et autres sujets qui concourent à plus de transparence dans la gestion des dossiers qui contribuent à améliorer la cohésion sociale. Il faut se convaincre que le temps est venu pour que tous ces dirigeants se débarrassent de cette attitude réductrice, pour donner prise à la naissance d'un dialogue social sincère et réellement opérant. La solution ne viendra pas comme par enchantement, il faut en effet donner consistance au dialogue, le stabiliser et l'organiser par des initiatives aussi concrètes que constantes. Pour ce qui est du statut lui-même, il semble être tellement statique qu'on a de la peine à croire qu'il n'aurait pas besoin d'être revivifié. La question ne se pose pas. Pour peu qu'on s'y intéresse de près on voit tout de suite qu'il y a nécessité de le rénover et les motifs pour le faire sont nombreux et variés. Même les pays qui ont inventé le système de carrière se rendent compte qu'il faut le renouveler, reconnaissant que le temps a changé et qu'il faut changer ce qui doit être changé. Il ne faut pas se voiler la face, une transformation qui toucherait aux fondements de ce système fera réagir nombre de ses adeptes qui refuseront par principe de se projeter hors de lui. On pourrait même s'attendre, que si seulement les autorités faisaient simplement mine de vouloir le renouveler, à ce qu'une levée de boucliers immédiate surgisse venant de personnes de tout bord, syndicalistes, politiques, analystes et autres qui vont s'arc-bouter pour défendre farouchement le système en vigueur, non pas parce que le service public s'en trouverait remis en cause, mais plus sûrement parce qu'elles perdraient les avantages acquis à l'ombre du statut. D'autres le feront soi-disant pour motif idéologique faisant croire que l'Etat n'a pas à se préoccuper de rentabilité, que sa seule mission reste de garantir l'intérêt général et qu'à ce titre la fonction publique de carrière reste le bon système, au nom justement de sa spécificité. Pour ces gens-là, bouger les lignes dans ce domaine reviendrait à vouloir concilier l'inconciliable. Dans le principe, il est vain de vouloir procéder à la réforme du statut sans se préoccuper d'une réforme de l'Etat. Réforme de l'administration et réforme de l'Etat, c'est aujourd'hui considéré comme étant les facettes d'une même problématique révélant au passage une évolution sémantique qui a fini par fusionner les deux concepts. Dans certains pays la formule modernisation de l'Etat a pris le pas sur les autres formules. Envisagée sous cet angle-là, la crainte serait que la réforme de l'Etat, mal embarquée, plusieurs fois éprouvée, plusieurs fois ajournée, sans résultats probants, inciterait à renoncer par avance à réformer l'actuel statut. On n'est pas ici pour porter un jugement, mais on voit bien que ce dossier est à l'arrêt. Il y a comme une absence de volonté politique, à moins que c'est imputable à l'absence d'une vision claire des objectifs et ou à la difficulté de concevoir une méthode opérante. En tout cas, ce n'est pas la Direction générale de la fonction publique et de la réforme de l'administration (DGFP/RA), à qui on a confié cette mission disproportionnée, qui pourrait faire avancer l'affaire. C'est vraiment manquer de clairvoyance et de discernement que de responsabiliser cette institution, qui est déjà lourdement empêtrée dans son pré carré traditionnel, qui absorbe l'essentiel de ses forces Il faut toutefois reconnaitre, à décharge de l'opérateur attitré, que la réforme de l'Etat doit être vue et ressentie comme l'affaire de tous, chacun, selon son niveau de responsabilité et qu'elle se doit de mobiliser une vraie force de frappe, qui engloberait et entraînerait dans un même mouvement des structures dédiées (coordination par le Premier ministre sous une forme ou une autre, comité interministériel permanent, secrétariat d'Etat, ou vice-ministère et tenue de conseils du gouvernement fréquents pour évaluer, recadrer et faire vivre le dispositif en entier). Ce ne sont pas, en tout cas, les quelques initiatives épisodiques lancées par certains ministères, quoique louables dans leur principe, qui sauraient faire acquérir au dossier de la réforme un rythme de croisière soutenu tel que le souhaiterait le Gouvernement. Il n'est pas exagéré de dire que toutes les réformes ayant vu le jour en Algérie évoquent plus des effets d'annonce, périodiquement ressuscités et recyclés, qu'une volonté réelle de prendre à bras-le-corps un dossier sollicitant engagement et persévérance. D'où l'amer constat que les conditions préalables de la réforme du statut ne sont pas sincèrement réunies, à moins de considérer qu'un projet de statut ambitieux peut lui-même impulser par effet d'entrainement le démarrage d'une réforme de l'Etat sur des bases solides, qui ciblerait des séquences arrivées à maturation ou dont la concrétisation pourrait être facilement abordable. Ceci dit, pour tout projet de statut, il faudrait se résoudre à engager des modifications à la marge pour œuvrer à réorganiser voire à normaliser le fonctionnement de l'administration pour assainir dans l'urgence les situations jugées paralysantes ou pour décanter le statut en cours de ses incohérences les plus flagrantes. Faire autrement, c'est-à-dire lancer une réforme radicale et précipitée débouchera inéluctablement sur une version «hors sol» qui ne satisfera personne. Concernant les digressions annoncées dans le titre de cette contribution, quand bien même certains trouveront que ces questions sont de la pure effraction à l'endroit de notre thématique, ou qu'elles sont hors de propos, nous insisteront ici pour en parler, car l'une et l'autre tendent à dévoiler certaines situations vécues par les fonctionnaires qui confinent à l'injustice. Il est d'abord question de la prime de départ à la retraite des fonctionnaires. C'est un sujet qui discrimine manifestement entre les employés du secteur public économique et parapublic et les fonctionnaires partant à la retraite. On ne peut rien reprocher aux commissions des œuvres sociales des administrations. Elles ne peuvent donner que ce qu'elles peuvent. Si la question n'avait pas son importance, on pourra même en rire, lorsqu'on entend dire par les gens du secteur public économique et assimilé que le montant de cette prime est décidée et servie à leurs travailleurs selon ce qui est approuvé et prévu par les conventions collectives ou les accords collectifs. Ils osent même dire qu'ils sont riches et qu'ils peuvent donc octroyer des primes à leur convenance, alors même que c'est de notoriété publique que c'est grâce aux subventions de l'Etat qu'ils se permettent de vivre sur un grand pied. Certaines entités croient même avoir trouvé la parade et argumentent que c'est l'environnement concurrentiel dans lequel elles activent qui les oblige à faire des largesses à leurs employés, même après leur départ à la retraite, pour mieux fidéliser les présents, oubliant de préciser qu'elles exercent, pour la plupart, dans un contexte ultra monopolistique qui leur permet de s'en donner à cœur joie avec les deniers de l'Etat, en s'arrogeant des conventions, ou accords d'entreprise ou interentreprises sur mesure, sans être soumis au moindre contrôle du propriétaire qu'est l'Etat. Grand bien leur fasse aux employés de ces organismes, mais il ne reste pas moins que c'est une situation qui est très mal vécue par les fonctionnaires qui la ressentent, à raison, comme de l'arbitraire pur, a fortiori qu'ils observent que des organismes et sociétés publics de tout poil (il est facile de citer des noms s'il le fallait) où l'Etat est actionnaire majoritaire ou actionnaire unique, dépensent sans compter et que l'Etat ne fait même pas mine de s'en soucier. A suivre *Enarque |
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