A peine l'accord
paraphé vendredi dernier à Alger entre Ansar Dine, représenté par Mohamed
Aharib, et Bey Dickman mandaté par le Mouvement national de libération de
l'Azawad (MNLA), et le satisfecit tout diplomatique qui s'en est suivi, que
l'organisation islamiste qui contrôle une partie du nord du Mali depuis avril
2012, à travers la voix d'un de ses porte-parole, Senda Ould Bouamama, est
revenue sur ladite déclaration de partenariat pour le règlement de la crise du
Nord-Mali. Les deux parties se sont engagées, selon les termes de l'accord, à
«s'abstenir de toute action susceptible d'engendrer une situation de
confrontation et toute forme d'hostilité dans la zone qu'ils contrôlent». Ils
se sont engagés également à sécuriser les zones sous leur contrôle et à agir de
manière à permettre la libération de toute personne se trouvant en état de
captivité et/ou d'otage dans la zone affectée. Les deux parties se sont aussi
dites prêtes à «sécuriser les zones sous leur autorité, à travers la mise en
place de forces de sécurité composées des éléments de leurs groupes respectifs»
et à «conjuguer et coordonner leurs positions et actions dans le cadre de toute
démarche visant la recherche d'une situation pacifique et durable avec les
autorités de transition maliennes, avec les garanties des parties concernées».
Dans une déclaration faite à l'agence de presse turque Anatolie, Senda Ould
Bouamama affirme que son organisation rejette cet accord en expliquant que
Ansar Dine «avait effectivement envoyé un représentant pour discuter avec
l'émissaire algérien en vue de trouver une solution pacifique au problème du
Nord-Mali mais qu'il n'était nullement autorisé à signer un tel accord». Ce
refus de cautionner l'engagement de son représentant, Ansar Dine l'explique
également par le contenu même de l'accord dont le mouvement ignorait les
clauses, dévoilées par la presse, puisque Mohamed Aharib n'était pas en liaison
avec sa direction. Senda Ould Bouamama, allant plus loin, dira que «la question
n'est pas de s'opposer à cet accord, mais pour le mouvement, c'est comme s'il
n'a jamais existé et qu'il ne nous concerne pas». Cette position du mouvement
islamiste remet tout en cause et surtout cet accord brandi comme une victoire
de la diplomatie algérienne qui s'évertue à trouver une solution pacifique à
travers le dialogue entre les différentes factions en conflit au Mali, en
excluant les groupes terroristes du processus de normalisation. Surenchère ou
manœuvre politique, la sortie médiatique d'Ansar Dine fragilise les démarches
d'Alger et porte un coup dur au règlement politique de la crise malienne alors
que les bruits de bottes se font de plus en plus insistants avec la bénédiction
du Conseil de sécurité de l'Onu sous l'impulsion de la diplomatie française. Le
ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a affirmé hier que l'accord
signé entre le MNLA et Ansar Dine «est un nouveau jalon sur la voie du
règlement politique de la crise au Mali». Dans ce contexte, le ministre a mis
en exergue la nécessité de prendre «des mesures supplémentaires» pour trouver
une issue à la crise au Mali, rappelant les décisions prises récemment par
l'Onu qui a appelé à faire prévaloir le règlement politique de la crise au
Mali. De son côté, Amar Belani, le porte-parole du MAE, a déclaré que l'Algérie
se reconnaît dans les termes de la résolution 2085 (2012), sur la situation au
Mali adoptée jeudi dernier par le Conseil de sécurité de l'Onu et qui autorise
«pour une période initiale d'un an» le déploiement de la Mission internationale
de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA). Il a expliqué que cette
résolution «réaffirme les éléments fondamentaux d'une sortie de crise», ainsi
que «la désignation explicite d'Aqmi et du Mujao comme étant la véritable
menace pour la région du Sahel». Mais cette dernière sortie d'Ansar Dine
pourrait inciter le Conseil de sécurité à revoir sa copie. Par ailleurs, et
loin des voies feutrées de la diplomatie, l'AFP rapporte que les islamistes
armés qui occupent la ville de Tombouctou étaient en train d'y détruire hier à
coups de pioche les derniers mausolées qui avaient jusqu'alors été épargnés.
Abou Dardar, un responsable d'Ansar Dine, a annoncé à l'agence de presse
française AFP qu'«il ne va pas rester un seul mausolée à Tombouctou. En juillet
et en octobre, les islamistes d'Ansar Dine et d'Aqmi, qui considèrent la
vénération des saints comme «de l'idolâtrie», avaient suscité un tollé général
en détruisant des mausolées en terre dans l'enceinte de la plus grande mosquée
de la ville, classée patrimoine mondial en péril.