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Les plans de
l'intervention militaire dans le nord du Mali sont en train de changer de
nature. D'une démarche initiale d'une force de 3.300 hommes à pourvoir par les
pays de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), on passe à un effectif de 5.500 soldats
dont une partie ne viendrait pas de l'Afrique de l'Ouest.
Plus d'effectifs et plus de pays impliqués. Telle semble être le cap pour les ministres ouest-africains de la Défense et des Affaires étrangères. Pourquoi les ministres de 15 pays membres de la Cédéao éprouvent-ils le besoin de demander des renforts à d'autres pays africains alors qu'ils semblaient, il y a peu, très confiants ? Les engagements pris d'envoyer des troupes par chacun des pays n'auraient-ils pas été respectés ? Est-ce qu'on a découvert des problèmes opérationnels qui commandent d'engager plus de troupes ? Est-ce une manœuvre pour impliquer des pays, comme l'Algérie, qui restent rétifs à l'idée d'intervenir hors de leurs frontières ? Ce changement de cap des pays de l'Afrique de l'Ouest, largement sous orbite de Paris, suscite des questions légitimes d'autant que ce changement de cap, non encore officiel, souffre d'un défaut d'explications. C'est en effet une source anonyme - un ballon sonde ? - qui a révélé que les «chefs d'état-major de la Cédéao ont proposé de changer la composition des troupes qui seraient déployées» pour aller reprendre le nord du Mali. IMPLIQUER L'ALGERIE, LE MAROC, LA LIBYE? ET L'AFRIQUE DU SUD ! «Ils recommandent que 5.500 soldats soient déployés, au lieu des 3.200 prévus dans la proposition initiale de la Cédéao», a ajouté cette source, et les troupes supplémentaires viendraient «d'Etats hors Cédéao». «C'est la raison pour laquelle l'Afrique du Sud, la Mauritanie, le Maroc, la Libye, l'Algérie et le Tchad sont invités à participer au sommet de dimanche», a-t-il précisé, ne citant que des pays du continent africain. Cela fait du monde et rien n'indique d'ailleurs que les Français, dont les forces spéciales sont déjà sur zone, se contenteront de faire du «soutien logistique». Jusqu'à présent, on présentait les préparatifs militaires comme allant de pair avec l'approche politique (défendue par l'Algérie et le Burkina). Or, il devient de plus en plus évident que l'option militaire, prônée par Paris, est en course et en concurrence avec l'option politique et que l'on cherche, par tous les moyens, à décrédibiliser. Il s'agit probablement d'aller au Conseil de sécurité présenter ce plan en affirmant que l'option politique - qui pourtant a fait son chemin avec les évolutions constatées du mouvement Ançar Eddine - n'est pas jouable. En tout cas, cette extension du nombre de pays à impliquer n'augure rien de bon même si le président de la commission de la Cédéao, Kadré Désiré Ouedraogo, invoque le «besoin urgent de stopper les pratiques mafieuses et criminelles des groupes terroristes et les atrocités commises dans l'impunité par les extrémistes». Il reste à connaître les détails de ce plan qui doit préciser la composition de la force, le niveau de participation des différents pays africains, le financement et les moyens militaires dont la force devra disposer. Il reste à vérifier que ces préparatifs militaires ne visent pas à obstruer toute perspective d'une issue politique dont la base est une démarche inclusive des différents courants des rebelles targuis maliens. 1.400 KILOMETRES DE RAISONS D'ETRE PRUDENTS POUR LES ALGERIENS Le patient travail de déconnexion d'Ançar Eddine - qui sans surprise a dit tenir à la charia mais pourrait se démarquer d'Aqmi et du Mujao - mené par l'Algérie n'est-il pas court-circuité par le tout militaire qui se profile ? On peut se le demander. Romano Prodi, l'envoyé spécial de l'ONU pour le Sahel, a déclaré à Alger que l'intervention militaire est celle du «dernier ressort». On peut se demander si c'est vraiment le cas. L'Algérie va-t-elle accepter d'être embarquée dans une action aux résultats aléatoires si elle ne prend pas la précaution préalable d'inclure les targuis, qui sont chez eux au Nord-Mali, dans un processus de refondation de l'ensemble de l'Etat malien. L'Algérie, qui a 1.400 kilomètres de frontières avec le Mali, n'a rien à gagner à être partie prenante à une action mal préparée qui risque d'être déstabilisatrice. Même le MNLA, qui semble dérouté sur l'attitude à prendre après son affaiblissement militaire, a mis en garde les «adeptes d'une intervention militaire» dans le nord du Mali et a demandé à Paris à «renoncer à son attitude va-t-en-guerre» et à soutenir au contraire le dialogue pour une solution politique à la crise malienne. |
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