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On parle déjà du
ramadhan, de sa hausse des prix et de ses pénuries. Le ministre du Commerce
assure que ses services maîtrisent la situation. C'est le signe que l'Algérie a
plongé dans le grand sommeil de l'été.
C'est parti ! L'Algérie est entrée dans la longue période de somnolence qui couvre traditionnellement l'été et le mois du ramadhan. Le coup de départ a été donné par le ministre du Commerce, Mustapha Benbada, qui a assuré que les produits de large consommation seront disponibles durant le ramadhan. M. Benbada a affiché un bel enthousiasme. Il ne s'est pas contenté de répéter les éternelles promesses d'avant ramadhan concernant la maîtrise du marché, les mesures prises et celles à venir, ainsi que la fermeté de l'Etat et sa détermination à sévir contre les spéculateurs de tous bords. Il est allé jusqu'à promettre une baisse des prix de certains produits pendant le ramadhan. Au vu de l'abondance de l'offre, a-t-il dit, il est probable que les prix de certains produits vont baisser. On ne sait s'il parle de la viande, de la tomate ou de la pomme de terre. Le ministre du Commerce ne contrôle pourtant ni la production agricole, ni les financements des importations. L'administration qu'il dirige n'est pas particulièrement connue pour son efficacité à réprimer les fraudes ni à réguler le marché. Ce qui ne l'empêche pas de donner des garanties sur ces sujets alors qu'il n'a visiblement aucune emprise sur le réel. Ses moyens d'intervention sont des plus archaïques. La viande est trop chère ? Il finance des importations pour casser les prix. La pomme de terre atteint des seuils trop élevés ? Il organise des opérations d'importation coup de poing, en supprimant les taxes douanières, pour éviter l'émeute. C'est le comportement du pompier, chargé d'éviter l'extension du moindre incendie, pendant que le reste du pays dort. Et sur ce terrain, c'est la grande inquiétude. A la déliquescence des institutions, s'ajoutent désormais deux facteurs, liés à l'été, et à la conjoncture politique. Depuis les législatives, le président Abdelaziz Bouteflika s'est fait discret, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a disparu, les ministres vivent chacun dans son coin, ne sachant s'ils seront reconduits ou non, ne sachant même pas si leur chef de gouvernement sera maintenu. A l'exception de ceux qui gèrent les affaires urgentes, les autres ministres chôment. On a ainsi les ministres très sollicités, comme MM. Djamel Ould Abbès et ses pénuries de médicaments, Rachid Benaïssa et cette récolte de céréales si abondante qu'on ne sait où la stocker, Abou Bakr Benbouzid et ses erreurs dans les sujets d'examen. Mais il y a aussi les autres, qui ne savent que faire, non parce qu'il n'y a rien à faire, mais parce qu'ils ne savent dans quel sens aller. Amar Ghoul va-t-il continuer à inaugurer des morceaux d'autoroute, ou bien va-t-il quitter le gouvernement, après la décision de son parti de quitter l'Alliance présidentielle pour passer dans l'opposition ? Depuis les élections législatives du 10 mai, le pays s'est ainsi installé dans une position d'attente, « en mode veille », une situation qui risque de se poursuivre jusqu'à octobre prochain, « jusqu'à ce qu'on boive de l'eau », selon la formule consacrée. Seule la célébration du cinquantième anniversaire de l'indépendance peut déranger un peu cette somnolence. Pourtant, il faudra bien régler les questions en suspens, dont certaines sont urgentes. Certaines ne peuvent attendre : faut-il garder Ahmed Ouyahia ? Et dans ce cas, quelle autorité aura-t-il sur les ministres FLN, particulièrement après le résultat des législatives où son parti a été écrasé ? Faut-il remplacer les ministres députés, et par qui ? Quels équilibres faudra-t-il préserver s'il faut nommer de nouveaux ministres ? Que vaudra un gouvernement FLN, au vu des conflits humiliants qui agitent le vieux parti ? Quelles que soient les décisions prises, il faudra, en plus, qu'elles tiennent compte des prochaines échéances : une rentrée incertaine, en septembre, puis des élections locales prévues à l'automne, le tout devant être organisé sur fond d'une grande échéance, celle de 2014, qui concerne la succession de M. Abdelaziz Bouteflika. Comment aborder ces échéances sans trop de vagues, alors que l'administration s'apprête à plonger dans un long sommeil ? La réponse est complexe. Elle est d'autant plus délicate qu'elle risque de menacer des équilibres précaires, de déranger des situations de rente bien établies, alors que le pays est en hibernation. Faut-il absolument y répondre ? Pas forcément. On peut bien attendre quelques mois. Il sera toujours temps d'y voir plus clair, après le Ramadhan? |
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