|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Au plan du
respect des valeurs démocratiques et républicaines, la rupture est consommée
entre la droite et la gauche en France.
En politique il y a bien une droite et une gauche. La tournure prise par les événements, suite au premier tour des élections législatives en France, vient de porter un sérieux coup à la nouvelle « théorie » politique qui veut qu'en ce début de siècle, la différence idéologique entre les courants politiques de gauche et de droite est ténue, voire inexistante, eut égard à l'état des sociétés occidentales et leurs modes de gouvernance. Mis en face de leurs responsabilités pour se positionner par rapport au Front national (FN), au deuxième tour de ces législatives, les deux grands courants politiques de France ont fini par laisser apparaître leurs limites idéologiques au regard du contenu « républicain » de leur matrice historique et celle des valeurs démocratiques. Alors que la gauche (PS, Radicaux de gauche, Front de gauche et écologistes) appellent au soutien du candidat de droite républicaine (UMP) pour battre le candidat extrémiste de droite dans le cas d'un duel avec un candidat du FN ; la droite (UMP) s'abstient de tout soutien à un candidat de gauche face à celui du FN de Marine Lepen. Autrement dit, le cordon national « sanitaire » autour du FN est rompu. L'argument de l'Etat major de la droite, celui de l'UMP, qui qualifie le Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon, allié du PS dans cette élection, de parti « extrémiste » et non républicain est une ineptie politique et une malhonnêteté intellectuelle qui frise le ridicule. Jean Luc Mélenchon qui revendique une plus grande justice sociale, une lutte contre la spéculation financière et une société du vivre ensemble dans sa diversité est qualifié par la droite française au même titre que le parti extrémiste du Front national qui revendique la préférence nationale, stigmatise les étrangers, revendique le retour au nationalisme acerbe et à la fermeture des frontières et, par-dessus tout, porte un lourd héritage d'attitude antisémite et de haine de « l'autre » d'une manière générale. En cela, la droite a rompu la dernière digue qui la séparait, politiquement et historiquement, de l'extrême droite d'une part, et marque depuis ce 10 juin 2012, sa différence avec la gauche dans l'approche des valeurs de la république d'autre part. Il ne fallait pas plus pour que les messages de « collaboration » droite ? extrême droite abondent, dès lundi soir, pour négocier les soutiens, là où l'un des leurs affronte dans un duel un candidat de gauche. A vrai dire, ce n'est plus une négociation entre droite et extrême droite, mais une collaboration politique en bonne et due forme. La gauche affronte, désormais seule, les dessins nationalistes et racistes de l'extrême droite, soutenue ouvertement aujourd'hui par la droite dite « républicaine ». En réalité la dérive extrémiste de la droite, représentée par l'UPM, ne date pas du seul contexte électoral de ces législatives. Rappelons-nous toutes les attaques contre « l'étranger » ; les discours de Dakar et celui sur les Roms de l'ex président Nicolas Sarkozy, ainsi que l'option du tout sécuritaire et du langage « musclé » d'une manière générale. Et jusque sur le plan international et diplomatique lors des événements en Libye, en Côte d'Ivoire etc. La dérive des attitudes et discours de la droite française vers ceux de l'extrême droite a progressé sensiblement durant le quinquennat de Nicols Sarkozy. Les sociologues et autres analystes ont lié cette brusque dérive aux conjonctures économiques et financières vécues depuis 2008 par la France et de l'occident d'une manière générale. D'ailleurs cette même tendance est traduite par une progression assez nette du vote populiste en Europe. Faut-il pour autant désespérer des démocraties occidentales d'aujourd'hui ? Ces démocraties n'ont pas pu, par le passé, éviter la montée, voire la prise de pouvoir par des partis fascistes (Allemagne ; Italie ; Espagne à la veille de la seconde guerre mondiale) ou plus récemment, dans les années 70 en Grèce par exemple. Le risque est discutable et il faut espérer que non, tant le contexte socio politique et culturel d'aujourd'hui est marqué, par ailleurs, par la présence d'une société civile vigilante, gardienne des valeurs fondamentales de la démocratie. Les très nombreuses organisations non gouvernementales défenderesses des libertés et droits humains disposent encore d'une capacité de mobilisation citoyenne importante. En outre, le droit international, avec ses faiblesses et malgré son interprétation variable et les organisations Onusiennes des droits de l'homme constituent encore un barrage supplémentaire à l'accès de formation fascistes et racistes aux pouvoirs en Occident. En revanche, le durcissement du mode de gouvernance et les atteintes aux valeurs fondamentales de la démocratie demeureront, pour des raisons de concurrence électorale, une tentation permanente de certains pouvoirs ou prétendants au pouvoir. Les exceptions d'un isolement des partis extrémistes par les démocrates et les républicains sont rares en Europe. L'exemple de la Belgique est édifiant : tous les partis démocrates sont engagés, par une charte de déontologie et un accord, de ne jamais faire alliance avec l'extrême droite, soit le Front national (francophone) et son pendant flamand, le Vlams bloc. Cette attitude politique est dénommée « Cordon sanitaire ». C'est le cas aussi en Suède. Pour le cas français, « l'ordre » de l'UMP de ne pas soutenir un candidat de gauche en cas de duel avec un candidat du Front national qui sous entend le soutien à ce dernier est, politiquement improductif et stratégiquement une faute historique. Car, il fait perdre des siège au parti démocratique qu'est le PS, et ne paie pas l'UMP pour les prochaines échéances électorales dans la mesure où les électeurs du Front national préféreront, toujours, l'original (FN) à la copie (UMP). |
|