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«L'enfance a des manières de voir, de penser, de sentir qui lui sont propres : rien n'est moins sensé que d'y vouloir substituer les nôtres» J.J Rousseau. Age à peine d'une dizaine d'années, le garçonnet proposait aux automobilistes un petit bouquet de fleurs synthétiques. Cette image, anodine et émouvante d'apparence, n'est malheureusement que le reflet d'une société qui se délite à travers ce qu'elle a de plus cher : l'enfance. Qui a pu amener cet enfant en ce 4 juin, jour de classe pourtant, à mettre sa vie en danger sur la voie expresse, juste au niveau de la Résidence Sahraoui de Ben Aknoun. Choisissant, sciemment, l'endroit où le flux routier ralentit quelque peu, il met sa vie en danger mortel en toute insouciance. L'envie de le voir quitter, au plus vite, les lieux en lui achetant le bouquet, est réprimée par la crainte de le revoir sur les mêmes lieux. Ne dit-on pas que l'enfer est pavé de bonnes intentions ? A propos de l'enfance, n'a-t-on pas fêté, il y a quelques jours, à peine sa Journée mondiale célébrée le 1er juin de chaque année et dont l'histoire remonte à la première moitié du XXe siècle ? : « L a Journée internationale de l'enfant a été établie par la Fédération démocratique internationale des femmes (FDIF), lors d'une réunion à Moscou en novembre 1949, pour rappeler le souvenir douloureux des enfants tués pendant la Seconde Guerre mondiale par les nazis. Célébrée le 1er juin, la Journée internationale de l'enfant vise à attirer plus d'attentions sur la protection, l'éducation, la santé et le bien-être des enfants. La Journée mondiale de l'enfance a été proposée par l'Assemblée générale de l'ONU. En décembre 1954, l'Assemblée générale a recommandé la Résolution 836 (IX) à tous les pays d'instituer une Journée mondiale de l'enfance, qui serait une journée de fraternité mondiale et de compréhension entre les enfants du monde entier visant à promouvoir la protection, le bien-être et l'éducation des enfants. La Journée mondiale de l'enfance est célébrée le 20 novembre, la date qui marque également l'anniversaire de l'adoption par l'Assemblée générale de l'ONU de la Déclaration des droits de l'enfant en 1959 et de la Convention relative aux droits de l'enfant, signée en 1989 ». S'il faut reconnaitre au pays une chose, c'est bien celle d'avoir consenti des efforts colossaux en matière de santé et d'instruction en direction de cette frange de la population. Il n'en demeure pas moins qu'il reste beaucoup à faire en protection et en bien être social de l'enfance. Nous demeurerons toujours interpellés par l'image d'un enfant qui pousse une brouette pour charrier l'eau à son logis ou celle d'un autre qui pour jouer, doit porter des bottes dans son environnement boueux. La première des protections qu'il faille assurer à l'enfant est d'abord contre ses propres géniteurs qui souvent par ignorance, le relègue au rang de petit être sans personnalité, ni dignité propre. Les larmes qui coulent sont pourtant là, preuve d'un chagrin ou d'un déni ressenti. Innocent, il revient après avoir séché ses larmes en oubliant vite qu'il a été molesté ou sermonné. Une fâcheuse habitude sociétale a toujours fait que la réprimande soit souvent publique. Aucune intercession n'est permise et gare à celle ou celui qui s'interpose à la raclée. Il peut en payer le prix, soit par le verbe soit par le geste. Le parent « vengeur » considère qu'il est dans son bon droit, s'agissant de sa propre progéniture, il sévit dans toute la rigueur du terme. Il peut en ces moments de furie animale, infliger les pires sévices qui peuvent parfois aller à la mutilation (éborgnage) ou au traumatisme corporel invalidant. Le deuxième cercle de feu est constitué par certains membres de corps enseignant qui, faute de posséder une quelconque vertu pédagogique, exercent leur penchant fasciste sur des êtres physiquement inférieurs. Ils séviront avec raffinement ; l'humiliation fera partie de leur clé la plus efficace. D'autres, à l'esprit rétrograde, ont redécouvert la « falaka ». Cette pratique, sapait et le corps et l'esprit par les coups secs sur la plante des pieds et la posture humiliante des quatre fers en l'air. Le maitre était assisté en cela par un condisciple de l'élève châtié. Tout un cérémonial moyenâgeux. Certains scientistes, affirment même qu'une étude menée aux USA a confirmé le bien fondé de la « falaka » qui permet au cerveau d'être mieux irrigué par la flagellation des plantes du pied? ?!. Le troisième chemin de croix de la petite enfance est sans nul doute, les dadais qui les rackettent sur le chemin de l'école. Ces gangs sévissent au vu et au su de la cantonade qui se mure dans ses peurs. Quant à la « traite » éhontée des enfants dans la manufacture ou le négoce, il y a bien longtemps qu'on ne s'en offusque plus. La déchéance socio économique des ménages a livré pieds et poings liés, cette strate vulnérable aux nababs de l'informel. Une simple virée à un marché à volaille, entre autres, du Littoral ouest-algérois, renseigne quelque peu sur cette enfance « esclavagisée » pour déplumer les dindons. L'atmosphère confinée créée par la poussière du duvet, ne sera certainement pas, sans danger sur la santé de ces infortunés individus dont beaucoup n'ont pas encore atteint le seuil de l'adolescence. Les agressions sexuelles sont encore ce tabou qui n'a pas encore livré tous ses secrets d'alcôve. L'omerta familiale ou de voisinage, a, pour mieux éluder les déviances psychopathiques des auteurs de ces crimes, toujours dénié l'existence de l'inceste. Ce n'est que fortuitement et après bien des préjudices subis que les langues se délient, pour aboutir aux chambres d'accusation et à l'opprobre sociale. Plus rien ne sera comme avant, quand le doute est semé. Pour revenir à la célébration de la Journée internationale de l'enfance et pour laquelle notre pays, a opté pour le 1er juin, journée consacrée par l'ancien bloc soviétique, les manifestations célébrant cette journée ne semblent se cantonner que dans les structures éducatives (écoles, crèches et autres institutions). Elles auraient, certainement, plus d'effet si elles étaient organisées à ciel ouvert. Le Karting organisé cette année par la DGSN est, sans nul doute, l'une des rares expressions réellement festives de l'événement. De petits policiers, filles et garçons, en tenue réglementaire ce jour là, ont régenté le circuit. Dans le registre de l'émulation par la mise en situation, l'Assemblée populaire de wilaya de Laghouat a organisé une fidèle réplique d'une session d'adultes. Si nous rapportons ces faits, tout à fait anodins sous d'autres cieux, il y a tout lieu de croire qu'ils relèvent presque de la performance dans nos murs et d'espérer leur vulgarisation. Il est déjà heureux, que les célébrations-simulations dans les enclos fermés pour commémorer des événements marquants, commencent à perdre de leur crédibilité. Prêcher aux convaincus, n'est certainement pas la meilleure voie de salut. Les services sociaux sont, malheureusement, encore sous équipés pour entreprendre des opérations efficientes. Les placements par le juge des mineurs des enfants en danger moral dans les centres de spécialisés de rééducation ou les maisons de l'enfance, se fait encore par voie policière. Dès lors, de longs et éprouvants périples, mettent à mal le peu de sérénité que peut garder un enfant en détresse morale. Il ira de commissariat en commissariat jusqu'à sa destination finale. Son nouveau milieu, véritable radeau de la Méduse, fera en sort qu'il devra lutter ou dépérir. |
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