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La prestigieuse revue médicale
britannique «The Lancet», appartenant en fait au groupe néerlandais Elsevier,
depuis 1991, a publié le 2 mai 2020, une étude internationale sur l'emploi de
l'hydroxychloroquine dans le Covid-19, sous la plume
du professeur Mandeep Mehra
de l'université de Harvard comme principal auteur avec trois autres auteurs.
C'est une méga-étude rétrospective qui passe en revue 96 032 dossiers de patients infectés par le virus SARS CoV-2 admis dans 671 hôpitaux répartis sur le six continents entre le 20 décembre 2019 et le 14 avril 2020, étant ensuite guéris ou décédés. Parmi ce groupe de malades, 15 000 ont reçu l'une des quatre combinaisons (chloroquine seule ou associée à l'antibiotique, hydroxychloroquine seule ou associée à ce même antibiotique), ils ont été comparés aux 81.000 malades du groupe témoin n'ayant pas reçu ce traitement. Les résultats montrent que les quatre groupes traités ont présenté un taux de mortalité beaucoup plus élevé par rapport au groupe témoin : 16,4% de décès pour la chloroquine seule, 22,2% quand elle était combinée à l'antibiotique; 18% pour l'hydroxychloroquine seule et 23,8% quand elle était associée au même antibiotique. Les auteurs concluent que le risque de mortalité est de 34% à 45% plus élevé chez des patients prenant ces traitements que chez des patients présentant des facteurs de comorbidité, c'est-à-dire des facteurs de risques. L'étude a aussi montré une fréquence plus élevée de troubles cardiaques sévères (troubles du rythme cardiaque) plus fréquents chez les patients recevant chloroquine ou hydroxychloroquine, surtout lorsqu'elle est associée à un macrolide (8% des malades contre 0,3% dans le groupe témoin). En clair, le risque d'arythmie était cinq fois plus élevé avec la prise de ces deux molécules. Est-ce à dire que l'hydoxychloroquine est un poison qui tue ? Les auteurs ne pouvaient pas se «mouiller» plus estimant que leur étude ne permet pas de conclure à l'existence d'un lien de cause à effet et souhaitant que d'autres essais cliniques randomisés (patients choisis par tirage au sort) soient entrepris rapidement avant de conclure. Lynchage médiatique de la chloroquine En d'autres temps et d'autres circonstances, la parution d'une telle publication n'aurait suscité d'intérêt que des les milieux médicaux spécialisés. L'article du The Lancet a entraîné des réactions en chaîne. A titre d'exemple, tous les médias français se sont donné le mot pour fustiger le médicament ou lyncher son promoteur, c'est-à-dire le professeur marseillais Didier Raoult. Face aux « petites études » qui ont « échoué à identifier des preuves robustes d'un bénéfice » de la chloroquine et de son dérivé, «nous savons maintenant avec notre étude que les chances d'améliorer» l'état des malades du Covid-19 «sont plutôt minces», affirment certains médecins. Dans ce vacarme provoqué et entretenu, les voix raisonnables ont été peu audibles comme celle du responsable du Centre régional de pharmacovigilance de Nice, interrogé samedi 23 mai par franceinfo, il affirme que l'étude «ne répond pas de manière extrapolable à l'ensemble de la population». Il en est de même du rapport de l'Agence nationale française du médicament pour la période allant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019. Il ressort de ce rapport que près de 120 millions de comprimés de Plaquenil (hydroxychloroquine) ont été consommés en France durant cette période et que 312 cas d'effets secondaires ont été recensés dont seulement 21 cas d'effets cardio-vasculaires. Les effets oculaires n'apparaissent que pour des périodes d'utilisation assez longues (5 ans en moyenne). La chloroquine et son dérivé restent des médicaments très utilisés dans le monde. Ils sont employés dans de nombreuses pathologies chez des centaines de milliers de malades dans le monde comme dans les cas du lupus érythémateux disséminé et de la polyarthrite rhumatoïde et chez des millions de malades, principalement en Afrique, dans le cas du paludisme. Les malades qui sont soumis à ces médicaments depuis des années, encore moins leurs problèmes cardiaques, n'ont pas attiré l'intérêt des médias. Cet intérêt sélectif pose des interrogations justifiées. De nombreuses études cliniques suscitent des doutes fondés : Le journal le Monde1 avec une vingtaine de médias a enquêté sur 10 000 revues classées comme scientifiques, il a consacré son éditorial du 19 juillet 2018 à ce sujet sous le titre : «Fausse science : il faut une prise de conscience mondiale». L'éditorial dénonce des «revues douteuses» qui «relaient parfois, en leur donnant le lustre de la scientificité, des «travaux» climatosceptiques, antivaccins, ou encore de fausses études cliniques vantant les mérites de faux médicaments. Selon des estimations récentes, cette production représente jusqu'à 2% à 3% de l'index de certaines grandes bases de données de la littérature savante. C'est six fois plus qu'il y a cinq ans.» Renaud Piarroux dans son livre «Quelle réparation pour les victimes du choléra en Haïti ?» raconte comment des scientifiques ont falsifié des données et aidé l'ONU à nier sa responsabilité dans l'importation du choléra en Haïti, introduit en 2010 par les Casques bleus népalais et qui avait fait plus de 8.300 morts.2 En décembre 2010, le Lancet Infectious Diseases estimait que « chercher d'où vient l'épidémie n'est ni loyal (...) ni utile pour combattre l'épidémie ». Finalement devant des preuves irréfutables (corrélation des génomes des isolats collectés au Népal et en Haïti), le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, finit par demander le 1er décembre 2016 pardon aux Haïtiens. De nombreux livres publiés dénoncent les résultats trafiqués des études cliniques, le fait que seules les études montrant des résultats positifs sont publiés, que moins d'un tiers des essais cliniques sont publiés par les laboratoires jetant le doute sur les produits médicamenteux mis sur le marché... Peter Gotzsche dans un livre préfacé par l'ex-éditorialiste en chef du British Medical Journal et par un éditorialiste du Jama, intitulé «Médicaments mortels et crime organisé» «démontre qu'en Occident, les médicaments sont la troisième cause de mortalité après les maladies cardiaques et les cancers». Philippe Even, dans son livre «Corruptions et crédulité en médecine», exécute une charge morbide contre les experts en essais cliniques... Plus incisive encore est la déclaration faite en janvier 2018 du Dr Richard Horton,3 rédacteur en chef de The Lancet, qui dit : «Une grande partie de la littérature scientifique, sans doute la moitié, pourrait être tout simplement fausse. Affligée d'études avec des échantillons réduits, d'effets infimes, d'analyses préliminaires invalides, et de conflits d'intérêts flagrants, avec l'obsession de suivre les tendances d'importance douteuse à la mode, la science a pris le mauvais tournant vers les ténèbres.» Le Dr Marcia Angell lui emboîte le pas : « Il n'est tout simplement plus possible de croire une grande partie des publications de la recherche clinique, ni de compter sur le jugement des médecins expérimentés ou les directives médicales faisant autorité. Je ne prends aucun plaisir à formuler cette conclusion, à laquelle je suis parvenu lentement et à contrecœur lors de mes deux décennies passées au poste de rédacteur en chef du New England Journal of Medicine (NEJM).» La récente publication de The Lancet semble ne pas faire exception : L'essai clinique européen baptisé « Discovery » lancé le 22 mars 2020 qui concerne sept pays (France, Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, Royaume-Uni, Allemagne et Espagne) et intéresse 3200 patients n'a pas pu recruter le nombre de patients requis retardant à ce jour la publication de ses résultats. Comment alors expliquer que l'étude du The Lancet ait pu embrasser 96 032 dossiers ? L'étude a commencé le 20 décembre ( ?)4 et s'est terminée le 14 avril 2020 et la publication faite le 21 mai 2020, un temps record ? Durant ce laps de temps très court, il a été possible de recueillir, par seulement quatre personnes, les données, de les traduire, de les homogénéiser, de faire les analyses statistiques nécessaires, d'évaluer le travail, de faire la rédaction et de s'entendre sur les conclusions ! Les données sont disparates intéressant des langues, des cultures et des systèmes de soins parfois très différents, comment a-t-il été possible d'homogénéiser toutes ces données en une durée record ! Qui a payé une telle étude, les spécialistes estiment qu'elle a dû coûter autour de 50 millions dollars. Un proverbe arabe dit lorsque la cause est identifiée, la surprise cesse. Au-delà des problèmes de forme, il y a beaucoup de questions de fond sur lesquelles l'étude n'a pas donné de détails, elle semble même truffée de biais. Un collectif de médecins français5 « Laissons les médecins prescrire », créé en mars dernier, relève une quinzaine de questions de fond dont : -L'hydoxychloroquine a été administrée à des malades hospitalisés, c'est-à-dire dans un état grave dont certains sous ventilation mécanique or les meilleurs résultats du produits semblent être obtenus dès le diagnostic posé étant donné l'action antivirale qui lui est prêtée. (20 % des malades étaient ventilés contre 7% dans le groupe témoin et la plupart avaient un taux de saturation en oxygène inférieur à 94% c'est dire qu'ils avaient besoin d'oxygène). -40% des cas étudiés ont reçu en même temps l'hydoxychloriquine et un ou plusieurs antiviraux, il est difficile dans ce cas d'imputer les complications à un seul produit d'autant que l'étude ne précise pas les groupes qui ont reçu tel ou tel produit. -L'étude ne précise pas le type de macrolide utilisé chez les malades, or seule l'azithromycine semble douée d'une action antivirale. -L'étude ne précise pas les patients ayant une comorbidité et quel a pu être l'impact des maladies associées sur l'évolution du Covid-19. (Exemple : 1 patient sur 3 avec hypertension dans le groupe hydroxychloroquine + macrolide). -Elle ne fait non plus état ni des doses données, ni de la durée de traitement de l'hydroxychloroquine or ces éléments sont déterminants dans le traitement. Le protocole Raoult à titre d'exemple recommande 600 mg d'hydoxychloroquine/jour pendant 10 jours avec l'azithromycine à 500 mg. -Les patients n'ont pas été soumis aux mêmes protocoles thérapeutiques, chaque service ayant ses habitudes en matière de produits utilisés en soins intensifs et en réanimation. -L'examen cardiologique et notamment le tracé électrique des malades n'est pas précisé. Comme ne sont pas précisés les autres traitements utilisés par les malades pour les maladies chroniques notamment cardiologiques dont ils sont porteurs. -L'étude ne comporte enfin aucun scanner thoracique à « la recherche des atteintes cardiaques du virus qui sont fréquentes pour une analyse correcte de ce qui est appelé événement indésirable ». En l'absence de tant données, il est difficile d'identifier des causes de décès et encore moins de les imputer à l'hydoxychloroquine. La retenue des auteurs demandant des études randomisées montre bien la difficulté de conclure une telle étude à partir de données aussi inhomogènes. La question cruciale qui se pose au plan éthique est de savoir pourquoi une équipe aussi prestigieuse que celle de Harvard Medical School se lance dans une étude somme toute futile et qui a coûté autant d'argent au lieu de s'intéresser aux facteurs qui permettent de lutter contre le Covid-19 ? Liens d'intérêts des auteurs Les auteurs dont aucun n'est infectiologue, leur chef est cardiologue, ont beaucoup de liens d'intérêts. Mehra donne des formations sur le Covid-19 financées par le laboratoire américain Gilead, promoteur de l'antiviral ?'remdesivir'' proposé comme traitement du Covid-19. L'étude publiée par le Lancet a été elle-même soutenue par le Brigham and Women's Hospital de Boston où deux études sur le remdésivir sur le Covid-19 sont menées. Il est enfin établi que le Pr Mehra a des liens déclarés avec de nombreux laboratoires pharmaceutiques dont Abbot, Mayer, Medtronic, Johson, Portolab...6 Réalité sur terrain : Les choses semblent être moins compliquées pour beaucoup de pays où l'hydroxychloroquine a été utilisée : Chine, Iran, Turquie, Grèce, Europe centrale, Grande-Bretagne... Le Brésil où l'épidémie vient de prendre un nouvel élan, les responsables basent leur stratégie de lutte sur ce produit. Au Maghreb, le recours à l'hydroxychloroquine s'est fait dans le calme et la sérénité, de l'avis des responsables de la santé et des équipes médicales en Algérie, le traitement précoce a donné de bons résultats, la mortalité par Covid-19 est de 2,4% donc bien inférieure à la moyenne mondiale de 3%. Pour information le traitement complet par hydoxychloroquine et azithromycine coûte environ 11 euros alors qu'un traitement par remdésivir est d'environ mille euros. La France fait exception. Les rivalités sociologiques entre le Sud et le Nord du pays ont pris une tournure polémique autour de l'hydroxychloroquine, entre les médecins marseillais et les médecins parisiens. Qui a raison et qui a tort ? Un chiffre peut départager les rivaux, la mortalité par Covid-19 a été cinq fois plus élevée à Paris qu'à Marseille. Dans cette dernière ville, la plupart des malades ont été mis sous protocole hydroxychloroquine plus azithromycine dès le début des symptômes, alors que dans la capitale française, les malades ont été surtout traités par des médicaments antiviraux et ceux en état grave admis en réanimation. *Professeur, médecin chercheur Références : 1https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/07/19/la-gangrene-de-la-fausse-science_ 5333560_3232.html 2https://www.la-croix.com/Sciences-et-ethique/Sciences-et-ethique/Importation-cholera-Haiti-manipulation-scientifique-2019-03-25-1201011253 3https://www.upgcs.org/2018/01/28/d%C3%A9claration-choquante-d-un-initi%C3%A9-du-domaine-m%C3%A9dical/ 4Selon le site de l'OMS (http://www.who.int./fr/emergencies/diseases/novel-coronavirus-2019?) la flambée actuelle de maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) a été signalée pour la première fois à Wuhan, en Chine, le 31 décembre 2019. 5https://stopcovid19.today/2020/05/23/lancet-publication-mehra-et-al-sur-lhydroxychloroquinechercher-lerreur-les-erreurs/ 6https://mail.google.com/mail/u/1/?zx=wp 9drjbu6cvt#inbox/QgrcJHsTgGJhv LKnwhTq SfDfbK HjJnNZgnV?projector=1 |
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