Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
D'un point de vue technique,
rien n'empêcherait que l'épidémie de coronavirus soit qualifiée de catastrophe
naturelle. L'article 10 de la Loi n° 04-20 du 13 Dhou El Kaada 1425 correspondant
au 25 décembre 2004 relative à la prévention des risques majeurs et à la
gestion des catastrophes dans le cadre du développement durable, stipule que
les risques majeurs qui doivent être pris en charge par des dispositifs de
prévention au sens des dispositions de l'article 5 de ladite loi, sont les risques
suivants : - les séismes et les risques géologiques, - les inondations, - les
risques climatiques, - les feux de forêts, - les risques industriels et
énergétiques, - les risques radiologiques et nucléaires, - les risques portant
sur la santé humaine, - les risques portant sur la santé animale et végétale, -
les pollutions atmosphériques, telluriques, marines ou hydriques, - les
catastrophes dues à des regroupements humains importants.
Les conditions semblent remplies au cas présent : le coronavirus (Covid-19) à l'origine de l'épidémie est bien un phénomène naturel, si l'on veut bien admettre que l'origine la plus probable de ce virus est animale. De même, il est permis de penser que le virus présente une intensité anormale en raison de ses particularités et des conséquences potentielles qu'il peut avoir pour ses victimes et pour une population entière, tant d'un point de vue médical que social et économique. Enfin, il ne fait pas de doute que les conséquences du virus étaient inassurables, c'est-à-dire qu'il n'existait sur le marché de l'assurance de possibilité de couvrir le risque en question. Or, aucun contrat n'existe sur le marché pour assurer les risques des entreprises liées à des pandémies et même, celles-ci sont de manière systématique exclues des garanties souscrites. Il faut cependant souligner que la déclaration de catastrophe naturelle n'est pas automatique. En effet, c'est le gouvernement qui seul a le pouvoir de déclarer un état de catastrophe naturelle, par arrêté interministériel. La déclaration de l'état de catastrophe naturelle garantirait-elle l'indemnisation de toutes les pertes subies par les entreprises ? Rien n'est moins sûr, car les conditions d'indemnisation en matière de pertes d'exploitation sont strictes. Pour que les entreprises soient indemnisées des pertes d'exploitation subies par l'effet d'une catastrophe naturelle, le Code des assurances exige en effet que le dommage entre dans le champ de la garantie d'assurance, qu'il ait été causé par la catastrophe naturelle et qu'il présente un caractère inévitable. Si on admet sans difficulté qu'aucune mesure n'a pu empêcher les dommages subis par les entreprises et que ceux-ci trouvent directement leur source dans la propagation du virus, il n'est en revanche pas évident que les pertes subies par les entreprises entrent dans la garantie d'assurance. Les assurances dommages souscrites par les entreprises définissent en effet précisément ce sur quoi elles portent : dans la quasi-totalité des cas, les contrats n'assurent que les locaux dans lesquels est menée l'activité, les machines, le matériel. Ensuite, les contrats définissent les risques auxquels ces biens sont exposés et contre lesquels ils sont garantis : incendie, vol, dégât des eaux, catastrophes naturelles? Ainsi, en cas de catastrophe naturelle, le contrat d'assurance qui garantit par exemple les locaux et les pertes d'exploitation, prend en charge les dommages subis par les locaux du fait de la catastrophe naturelle (remise en état, éventuellement reconstruction si besoin) et les pertes d'exploitation liées à ces dommages, c'est-à-dire la perte de chiffre d'affaires liée à l'indisponibilité des locaux. Or dans le cadre du coronavirus, quand bien même un état de catastrophe naturelle serait déclaré, les biens assurés (les locaux, les machines) ne subissent aucun dommage et les pertes d'exploitation ne sont pas liées à une indisponibilité des biens assurés suite au sinistre, mais à l'impossibilité même d'exercer l'activité. Il s'agit finalement de ce que l'on appelle « des pertes sans dommage ». Dès lors, il est fort peu probable que la garantie pertes d'exploitation puisse être d'un quelconque secours. Pour qu'elle puisse être mise en œuvre de façon certaine, il faudrait que le bien objet de la garantie soit le fonds de commerce ou le fonds artisanal lui-même, ce qui est en pratique très rare et nécessiterait en tout état de cause une stipulation contractuelle en ce sens. A ce sujet c'est sûr qu'il n'existe aucun contrat sur le marché pour assurer les risques des entreprises liées à des pandémies et /ou épidémies même, celles-ci sont de manière systématique exclues des garanties souscrites. |
|