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Chaque jour notre envoyé
spécial part d'un film présenté en sélection officielle pour imaginer son
équivalent en algérien et en Algérie. Chronique d'un film vu et d'un autre
imaginé. Aujourd'hui «Un homme intègre» (2/5).
«Allo, quoi, tu vas à Cannes et tu ne vois pas de film Iranien ?». Pour une fois, la réplique de Nabbila Ayoucha n'est pas si bête que ça. Voir un film iranien à Cannes est un passage obligé, un Cannes sans film iranien c'est comme un marché public en Algérie sans pots de vin. Le film iranien de Cannes n'est pas n'importe quel film iranien, il faut que cela soit un film d'auteur et que son auteur justement soit un tant soit peu malmené par le régime des mollahs, sinon ce n'est pas canonisé hallal par les dirigeants du grand Festival. Une fois qu'on a dit ça pour faire le malin, on peut reposer la question autrement et sérieusement . Est-ce que les autres productions iraniennes sont à la hauteur de la crème de la crème de pistache perse qui nous arrive à Cannes ? Pourquoi les Chiites sont meilleurs que les sunnites au cinéma? Est-ce parce que les perses sont les perses et que les arabes sont ce qu'ils sont ? Ou faut-il chercher les bonnes raisons de ce décalage vertigineux dans la différence fondamentale qui subsiste entre les deux branches de l'Islam en ce qui concerne toute formes de représentation? Déterminisme culturel, ou cultuel ? Si le chroniqueur avait un peu de temps devant lui il vous aurait gratifié d'une belle enquête argumentée comme on aime les lire dans les cafés non climatisés du profond pays ibadite. Ce n'est pas le cas, passons vite au film iranien «Un homme intègre» de Mohamed Rasoulof, très beau même quand les plans muets durent une plombe. Ce film présenté à Un Certain Regard, nous plonge dans l'Iran des champs plutôt que celui des villes. Reza, brave et taiseux jeune père a renoncé à la vie à Téhéran pour vivre dans une ferme avec sa femme, directrice d'école et son fils, en tant que que pisciculteur. Un jour la «compagnie», organisme sans nom mais qu'on devine lié à l'Etat, décide de s'approprier son terrain pour un projet d'envergure. Pour expulser au plus vite la famille «étrangère» les grands mafieux du village ne reculent devant rien. Harcelé par les autorités administratives, les flics, les notables du village, la famille est priée de se plier aux désirs du potentat local au plus vite. Le film dans son intrigue implacable nous entraine dans des eaux troubles où «l'honnête homme» est obligé de se salir les mains pour se défendre. L'éleveur de poissons d'eau douce va laisser peu à peu s'exprimer sa colère si longtemps contenue. Ce que filme Rasoulof c'est cette envie de tuer ses adversaires qui sommeille en chacun de nous. On peut dans un deuxième temps imaginer l'équivalent dans un contexte local. Une famille algérienne que des promoteurs véreux veulent déloger coûte que coûte. Ne pas sombrer dans la simplicité les bons d'un côté les mauvais de l'autres, mais juste essayer de voir comment les plus démunis peuvent s'approprier les méthodes de leurs bourreaux. Qui pour réaliser ce film imaginaire ? Pas lui, non, pitié. L'autre non plus. Et surtout pas elle. Oui, mais qui ? Sait-on déjà si le réalisateur/réalisatrice algérien(ne) qui peut égaler Mohamed Rasoulof est déjà né(e) ? Bref, à la fin de la projection cannoise de ce puissant film iranien, on rallume nos téléphones et une bonne nouvelle clignote comme un signe qui vient du ciel: La victoire éclatante du président sortant Hasan Rohani avec 57% des voix contre le candidat conservateur. |
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