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Toutes sélections confondues, aucun film algérien ne sera projeté lors de
cette 68ème édition du Festival de Cannes. Ce qui ne veut pas dire qu'aucun Algérien
n'est attendu sur le Tapis rouge. Programmes alléchants, surprises assurées,
pugilats annoncés.
Alors que son précédent film «Les Terrasses» vient enfin de trouver un distributeur en France, Merzak Allouache fignole à Paris les dernières retouches de «Madame Courage», une comédie paraît-il, tournée à Mostaganem (Go West!) qui a été proposée aux sélectionneurs du Festival. Chanceux, Edouard Waintrop (le délégué de la Quinzaine des Réalisateurs) a pu voir ce seizième long-métrage de Merzak Allouache. Sans pour autant le retenir dans sa sélection. Une fois de plus, nada film algérien dans l'annuelle et plus grande manifestation internationale du cinéma. Cette absence chronique de l'Algérie à Cannes on peut la déplorer (voir mon article de l'année dernière à la même date), on peut la comprendre (voir l'article d'il y a deux ans, toujours à la même date), voire la condamner et l'applaudir en même temps (articles des années d'avant), en somme on a déjà tout dit. Alors, plutôt que de se répéter, on trappe le sujet, ni larmes, ni regrets. C'est comme ça et en fait pas si étonnant que ça. Un marronnier de moins, un ! Sinon, qu'est-ce qu'on est venu voir à Cannes cette année? Les noms alléchants de l'édition 2015 ressemblent furieusement à ceux des alléchantes années précédentes, mais est-ce une raison de se coltiner l'autre marronnier de saison «Ce sont toujours les mêmes qui reviennent à la compétition» bla bla bla... ? Quel hurluberlu se plaindrait du retour des habitués de la Croisette tels que l'Italien Nanni Moretti («Mia Madre»), l'Américain Gus Van Sant («The Sea of Trees»), le Français Jacques Audiard («Dheepan»), le Taïwanais Hou Hsiao Hsien («The Criminal»), le Japonais Hirokazu Kore-Eda («Notre petite soeur»), le Chinois Jia Zhang-Ke («Moutains May depart») ou encore l'autre Italien, Matteo Garrone, lui aussi en compétition avec «Tale of Tales». Quel vieil enfant gâté refuserait d'aller voir hors compétition et hors considérations artistiques «Mad Max: Fury Road» de George Miller - ne serait-ce que pour être le premier à le détester ? Comment ne pas se laisser aller, encore une fois, allez, à prendre des nouvelles de Woody Allen en compagnie de Joaquin Phoenix as «L'homme Irrationnel»? Comment résister au monumental hommage annoncé au géant des géants Orson Welles pour célébrer comme il se doit le centenaire de sa naissance, ou au Pixar de l'été («Le Petit Prince»). N'est-ce pas tentant de revoir en copie restaurée «Z» de Costa-Gavras tourné à Alger en 1968, et le lendemain découvrir «Oka» le dernier film du cheikh malien Souleymane Cissé. Le tout gratuit et sur les beaux écrans du monde. Dans la sélection parallèle du Certain Regard, on peut retrouver si on veut, surtout s'il pleut comme les années précédentes, le cinéma de la nouvelle vague roumaine représentée par Corneliu Porumboiu et Radu Muntean (social), mais aussi celui du très étrange cinéaste philippin Brillante Mendoza (sexe), sans oublier la magie envoûtante du réalisateur thaï palmé d'or et au nom si agréable à prononcer : Apichatpong Weerasethakul (métaphysique). Le festival des films continue hors sélections officielles. La Semaine de la Critique propose, elle aussi, des films qu'on a envie de voir. A commencer par celui d'ouverture: «Les Anarchistes» d'Elie Wajeman avec Tahar Rahim et Adèle Exarchopoulos, l'histoire d'un brigadier chargé d'infiltrer un groupe d'anarchistes dans le Paris de la fin du 19ème. Mieux encore, un film palestinien, «Dégradé» de deux frères jumeaux ghazaoui, Arab et Tarzan Abunasser (en réalité les deux zingues s'appellent Ahmed et Mohamed Abu Nasser, mais à 27 ans ils ont encore l'âge de faire les fous). L'histoire se déroule à Ghaza de nos jours. Une dizaine de femmes se retrouvent coincées tout un après-midi dans un salon de coiffure à cause d'un affrontement armé qui se déroule juste en face du salon. Hiam Abbès fait partie des femmes au bord de la crise de nerfs capillaire... On veut voir! Mais on n'a encore rien vu, ce n'est rien de le dire, car de toutes les surprises annoncées, la plus fracassante nous vient de la sélection La Quinzaine des Réalisateurs. Incroyable, parmi les vedettes attendues cette année, le chroniqueur d'El Watan, l'écrivain et journaliste Chawki Amari! Pour son premier Cannes, l'auteur du billet quotidien «Point Zéro» déboule en tant que comédien, excusez du peu, et dans un film français, excusez du plus. Après son expérience réussie en père bourru et commissaire de police dans «Les Jours d'Avant», le beau film de Karim Moussaoui, Chawki Amari joue ici l'ex-mari de la protagoniste principale, une femme de ménage qui élève comme elle peut ses deux filles dans la France de Caroline Fourest et d'Alain Finkielkraut. Fatima est le prénom de cette femme battante qui a la particularité de porter le voile et le handicap de ne pas maîtriser la langue française. «Fatima», c'est également le titre de ce film très attendu de Philippe Faucon, un des plus intéressants réalisateurs français du moment, auteur entre autres de la «Désintégration». Mais bon, bref, revenons à nos moutons algériens. Après Said Sadi, Dilem, Slim... voilà Chawki Amari annoncé à Cannes. Manquait plus que lui (et ma grand-mère Ma'Aîcha) ! Résumons, Amari vient à Cannes parce qu'il joue dans un film intitulé «Fatima» mais réalisé par un blanc (retenez le blanc). Du coup, Chawki Amari qui sera logé tous frais payés dans un appartement loué par la production pourra aller à sa guise voir des films dans des conditions royales, draguer à la plage sans craindre les mauvais yeux, faire la fête comme bon lui semble, snober qui il veut et surtout ses anciens amis, et la nuit venue fouler le tapis rouge du prestigieux Palais des Festivals (retenez le rouge). Vert de jalousie, telle est la couleur de l'envoyé spécial du Quotidien d'Oran à Cannes à l'heure où il retrouve la minuscule chambrette de son hôtel habituel, one star derrière la gare, les WC sur le palier. Blanc, rouge, vert: les couleurs de l'Algérie seront quand même représentées à Cannes. Avec au programme un duel au soleil inévitable et cruel entre deux anciens amis qui n'ont rien oublié de leurs chamailleries du passé. Avec «La tête haute», et sur l'air familier et atavique «Ulac smah ulac» s'ouvre ce soir le 68ème Festival de Cannes. On ne va quand même pas attendre que La Quinzaine des Réalisateurs dévoile «Fatima» (le 20 mai) pour ouvrir les hostilités. Mad Max l'australien peut déjà aller se rhabiller, la partie se joue entre Algériens. |
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