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«Quel intérêt de
taire la vérité sur les hausses et les baisses des cours pétroliers ? Un secret
de polichinelle alors que ce pétrole, don du ciel et malheur de tous les pays
arabes, voit les grandes puissances s'entredéchirer pour s'en accaparer ? Non
pour le consommer puisqu'il est un produit fossile libre à l'exportation mais
au privilège monétaire exorbitant qu'il octroie à la puissance américaine qui
l'utilise pour répercuter ses déficits sur les pays du reste du monde. Un
privilège exorbitant déjà dénoncé par le président De Gaulle ».L'auteur
Dans un article d'AFP (1), «Coup de frein à Wall Street, effrayée par le déficit commercial et la hausse du pétrole», du 5 mai 2015, on y lit: «Wall Street a subi un coup de frein mardi, prise d'inquiétude devant un déficit commercial fortement creusé et des cours du pétrole en plein élan: le Dow Jones a perdu 0,79% et le Nasdaq 1,55%. Selon des résultats définitifs à la clôture, l'indice vedette Dow Jones Industrial Average a perdu 142,20 points à 17.928,20 points, et le Nasdaq, à dominante technologique, 77,60 points à 4.939,33 points. L'indice élargi S&P 500, sur lequel se basent beaucoup d'investisseurs, a reculé quant à lui de 1,18%, soit 25,03 points, à 2.089,46 points.» 1. L'EXTREME COMPLEXITE DANS LAQUELLE SE TROUVE LE MONDE La première constatation que l'on peut faire est que la politique monétaire non seulement pose des problèmes sérieux à l'économie américaine et par ricochet à l'économie mondiale mais vient confirmer l'extrême prudence de la Réserve fédérale américaine (Fed) de reporter aux calendes grecques la hausse du taux d'intérêt court directeur. En effet, depuis octobre 2014, la Fed a mis fin à la politique d'assouplissement monétaire non conventionnel. Estimant que l'économie américaine se porte bien que confirme d'ailleurs le taux de chômage qui est de 5,5% (bien loin de son sommet de 10% après l'éclatement de la crise financière de 2008), la Banque centrale est en situation d'attente pour procéder pour la première fois à la remontée du taux d'intérêt depuis dix ans. La dernière hausse s'est produite le 30 juin 2004, faisant passer le taux de la Fed de 1% à 1,25% (+0,25 point). De plus, ce taux directeur est resté au taux plancher de 0 à 0,25% depuis le 28 juin 2009 à aujourd'hui, soit plus de six ans. Et la Fed craint toujours de relever son taux d'intérêt directeur. Du jamais vu dans l'histoire économique contemporaine des Etats-Unis ! L'extrême complexité dans laquelle se trouve le monde nous fait dire que combien la superpuissance a une puissance militaire écrasante sur le reste du monde, elle reste aujourd'hui presque désarmée sur le plan économique face aux pays émergents. En continuant la lecture (1): «Avec les données décevantes qu'on a vues depuis deux mois, on s'inquiète de plus en plus pour l'économie», a déclaré Michael James, chez Wedbush. Chroniquement déficitaire, le solde des échanges des Etats-Unis s'est établi en mars à 51,4 milliards de dollars, en données corrigées des variations saisonnières, soit une hausse de 43,1% par rapport à février. Ce creusement brutal du déficit, tiré par une augmentation historique des importations (7,7%) alors que les exportations ont stagné (0,9%), a surpris les analystes, qui l'ont mis sur le compte du dollar fort. Surtout, il devrait conduire à réviser en baisse la croissance du Produit intérieur brut du premier trimestre, qui, la semaine dernière, s'était affichée à un déjà très décevant +0,2% dans une première estimation. Facteur supplémentaire d'inquiétude pour le marché, selon M. James, le pétrole a repassé mardi à la hausse le seuil des 60 dollars le baril. «C'est très handicapant pour l'industrie des biens de consommation et les compagnies aériennes», a-t-il souligné. «On commence à avoir peur du risque d'inflation» due à la hausse du coût de l'énergie, a commenté pour sa part Jack Ablin, chez BMO. Le souci des financiers américains est compréhensible et n'échappe pas aux banquiers centraux. L'Occident comme le reste du monde évolue dans un contexte économique international difficile où tous les coups sont permis. 2. LES BANQUIERS CENTRAUX DEPASSES PAR LES ALEAS DES CONJONCTURES ECONOMIQUES Tout d'abord, la chute des valeurs boursières relève de la situation financière des Etats-Unis. Une situation financière marquée depuis la crise financière par une «boulimie financière» que les marchés américains ont des difficultés à réprimer. Cette boulimie qui exprime en réalité une fausse croissance économique nous fait penser «une économie américaine ressemblant à un homme qui se ratatine sous le poids d'un fardeau? mondial, et n'arrive à se maintenir que grâce à des béquilles? monétaires». Il y a dans cette image deux mots qui ont le même poids dans la définition de l'économie américaine. «Fardeau? mondial et béquilles? monétaires». Si on enlève le fardeau mondial, on enlèverait aussitôt les béquilles monétaires. L'Amérique serait alors l'Amérique pour elle-même et non pour le monde. Il ne faut pas avoir peur des mots ni de la vérité sur ce qui se passe dans le monde. Les Etats-Unis ont depuis les deux guerres mondiales une destinée universelle. A deux reprises, ils ont sauvé l'Occident. Aujourd'hui, de plus en plus désarmée face à la nouvelle architecture du monde ? un monde désormais multipolaire ? elle n'est de plus en plus qu'un élément de «ce grand corps qu'est l'économie mondiale» (2), même si elle reste encore le moteur principal de la machine économique du monde. Précisément la crise de 2008 a révélé au grand jour les contradictions qui existent dans la distribution des richesses dans le monde. Contradictions qui continuent de produire des effets improvisés, s'assimilant presque à de la «débrouille» dans les agissements des grands Banquiers centraux du monde. A défaut de politiques conventionnelles qui ne marchent plus, ils se sont rabattus sur des politiques non conventionnelles. Et il faut dire «par nécessité». Les Banquiers centraux, qu'il s'agisse de Ben Bernanke, aujourd'hui débarqué et remplacé par Janet Yellen à la tête de la Fed depuis fin 2013 (prise de fonction en janvier 2014), ou de Mario Draghi qui a remplacé, en 2011, Jean-claude Trichet à la tête de la Banque centrale européenne, ou de Mark Carney, premier gouverneur non Anglais, d'origine canadienne, de la Banque d'Angleterre depuis 2013, ou de Haruhiko Kuroda, gouverneur de la Banque du Japon depuis 2013, ou de Zhou Xiaochinan, gouverneur de la Banque de Chine, depuis 2002, tous ces banquiers y compris ceux du FMI, de la BM savent et ne savent pas ce qui se passe dans la finance mondiale. Et lorsque l'on dit qu'ils savent, cela signifie qu'ils sont bien au fait des blocages et ceux-ci sont très bien situés intrinsèquement, c'est-à-dire dans leur essence. Le problème qui se pose est qu'ils ne savent pas «comment les résoudre tant ils sont imbriqués». Tant ils sont imbriqués dans des équations à n paramètres et à plusieurs inconnues. Et qu'il n'y a pas de concordance entre le nombre de paramètres qui obéissent aux aléas des conjonctures (comme depuis mars les déficits commerciaux américains se creusent et le pétrole rebondit) et les équations qui ne satisfassent au nombre d'inconnues. Et on sait que l'économie n'est pas une science exacte pour la simple raison que tant le paramètre que l'inconnue relèvent de la biologie humaine. Et c'est ce qui a fait défaut dans «la compréhension d'une économie mondiale en devenir» et a engendré cette cacophonie mondiale sur le plan financier qui s'est traduite par une guerre silencieuse de monnaies. On comprend aussi que la première réponse occidentale à la crise financière de 2008 a été la régulation monétaire du système financier occidental par le haut, c'est-à-dire des perfusions monétaires comme on l'a vu par les plans de sauvetage américains (Paulson?) et européens, et autres plans de relance qui ont suivi en 2009. Même la Chine s'impliqua par un plan de relance de 500 milliards de dollars. Les systèmes bancaires dans le monde, en particulier en Europe et aux Etats-Unis, ployaient sous le poids des dettes hypothécaires irrécouvrables (subprimes). Et cette réponse par le haut a non seulement été improvisée mais rendue nécessaire ? l'homme ne commande pas son devenir ou plutôt n'a pas cherché à comprendre ce devenir. 3. LE «SURENDETTEMENT», UNE EPEE DE DAMOCLES SUSPENDUE SUR L'ECONOMIE OCCIDENTALE Cependant, le monde étant ce qu'il est, cette perfusion pendant de longues années a créé une addiction du système financier occidental aux perfusions monétaires. Le système financier occidental, qui s'est habitué de plus en plus aux politiques d'assouplissement monétaire non conventionnel, devenait de plus en plus accro à ces perfusions. Un peu comme un homme malade à qui on injecte du «sang monétaire» pour tenter de l'aider à se reprendre de sa faiblesse de plus en plus chronique. (2) Le message que la FED, la BCE et les autres grandes Banques centrales du système financier mondial transmettaient était un peu ceci: «Ne vous inquiétez pas ! Nous sommes là, aux commandes, pour traiter et régler vos problèmes de financement». Dans ce déversement de liquidités pendant sept ans depuis 2007 jusqu'à la nomination d'une gouverneure femme à la tête de la Fed, Ben Bernanke n'a pas démenti sa renommée d'«Helicopter Ben» (déverser de l'argent depuis un hélicoptère), en référence à ses conclusions sur la crise de 1929. Evidemment, on ne peut critiquer «cette stratégie monétaire américaine qui a fait tache d'huile sur l'Europe et les autres pays occidentaux» pour la simple raison qu'elle a été nécessaire. L'existant commande à l'existant, c'est-à-dire ce qui est commande à ce qui vient à être. Cet existant apparaît en postulat à un autre postulat identique puisqu'ils sont deux existants successifs liés par leur développement causal. L'un commande l'agir de l'autre comme l'avant-l'un a commandé l'un. D'autre part, comme on l'a dit, la crise financière de 2008 a imposé une «stratégie monétaire non conventionnelle nécessaire» qui ne doit pas être comprise comme si cela avait été un choix pour l'Amérique. Puisque la crise financière de 2008 elle-même qui a existé a été imposée, donc nécessaire. Par conséquent, ce qui est venu ensuite, l'Occident n'avait pas de choix. La stratégie qu'il a menée était simplement une nécessité, sans autre voie. Une stratégie qui s'est imposée d'elle-même, il fallait à tout prix du «sang neuf pour réanimer ce grand corps qu est l'économie mondiale». (2) Donc nécessité rimait avec situation. Mais le problème, c'est que cette stratégie quand bien même imposée ne peut durer indéfiniment. L'Amérique comme l'Europe et le Japon, qui détiennent les monnaies internationales et de réserve du monde ne peuvent continuer à maintenir leurs économies avec le soutien de «béquilles monétaires» sans qu'elles n'apportassent de graves conséquences. Comme, par exemple, «le surendettement». Et quand bien même celui-ci est libellé en monnaies occidentales qui limitent les risques, une menace pèserait toujours sur leurs économies si ce processus se perpétue et surtout si le surendettement engendre un autre processus qui annihilerait la prépondérance sur ce qui leur reste, la «domination monétaire». Il faut le dire, il existe aujourd'hui une sorte d'«épée de Damoclès» invisible qui est suspendue sur l'économie occidentale. 4. LES «BEQUILLES MONETAIRES DE LA CHINE» Qu'en est-il des «béquilles monétaires» en Chine. Il est évident qu'elles sont d'un autre type. Sur quoi se fondent-elles ? Tout d'abord la Chine a un avantage pratiquement unique au monde. D'abord, le formidable réservoir humain transformable facilement en main-d'œuvre qualifiée et laborieuse et surtout à bas coût. Une image un peu de la fable de La Fontaine «La cigale et la fourmi». Et on devine qui sont la cigale et la fourmi. Pourtant cigale et fourmi se complètent quoi que dirait Jean de La Fontaine. L'humanité a besoin de cigales et de fourmis, elle est ainsi constituée. Il y a ceux qui consomment et ceux qui travaillent. Les rentiers et les travailleurs, une «loi de la nature». Pour ce qui est des «béquilles monétaires», elles se fondent sur la «sous-évaluation du yuan chinois». Et là aussi, on peut ajouter cette image humoristique, «sous-évaluer pour mieux dévaliser». Là encore, la politique monétaire de la Banque de Chine s'assimile à de la «débrouille chinoise» dans sa forme la plus atavique qu'il soit. C'est-à-dire la moins moderne, la plus mercantile. Et le problème est que la Chine ne peut rien contre la nécessité. Elle n'a pas le choix. A suivre... |
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