Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Je m'appelle
Islem Meghiref, j'ai 21 ans, et je vais vous raconter mon festival de Cannes vu
d'Alger.
Avant de mourir, un célèbre écrivain a dit en regardant par la fenêtre : «Fermez, c'est trop beau !». Aurait-il dit la même chose s'il avait regardé Alger en ce début d'après-midi? Je ferme les persiennes, et une fois plongé dans l'obscurité de ma chambre, j'allume mon ordinateur. Aujourd'hui encore, pour échapper à la monotonie solaire des journées Algéroises, je m'envole virtuellement vers Cannes. Entre mer et soleil, strasse et paillètes, récit d'une nouvelle journée où l'absurde s'harmonise avec l'art. Mais d'abord, je veux rendre un hommage certes tardif mais sincère à Malek Bendjelloul qui s'est donné la mort à l'âge de 36 ans. C'est au moment de la vérité qu'on s'habitue au silence disait Camus. Ce suédo-algérien, auteur d'un unique film, mais quel film! «Searching for Sugar Man» qui lui avait valu l'Oscar du meilleur documentaire en 2013. Ce documentaire qui relate la renaissance du chanteur Sixto Rodriguez, surnommé Sugar Man, avait été présenté au festival de Sundance l'année précédente, point de départ d'un succès, et que j'ai pu voir à la salle El Mouggar, quasi-vide, qui organisait le festival du cinéma politique ou un truc de ce genre... Je ferme la fenêtre, et entre à l'intérieur du site de Cannes. Là, c'est vivant. Jane Campion sourit, un couple fait l'amour sous un ciel orageux, Sergio Leone revient comme par enchantement, le jour se lève de nouveau sur Marcel Carné, un titre «Amour fou», un barbu à l'air anxieux, Les Go-Go boys qui sourient, Tarantino en tout petit dans la colonne d'information et puis un film. Celui de Mike Leigh. L'affiche montre un homme à la bedaine proéminente, aux cheveux roux, le regard fixé sur le lointain. Des clics plus tard, j'apprends qu'il s'agit du quatorzième long-métrage du réalisateur anglais diffusé pendant la seconde journée du Festival et que l'homme mis en avant dans l'affiche est un peintre de l'époque victorienne, précurseur du courant impressionniste, Joseph William Turner incarné par l'acteur Timothy Spall. La bande-annonce de toute beauté met en scène ce dandy de l'époque au physique ingrat entrain de conquérir la scène Londonienne grâce à ses tableaux, sa forte personnalité et ses théories audacieuses. Mort depuis plus d'un siècle et demi, il revit grâce à la magie du cinéma dans ce festival de bio-pics qu'est le festival de Cannes cette année, entre Fadhma N'ssoumer et Grace de Monaco, le genre n'en finit pas d'être à la mode. Allé, il est temps que j'aille manger mon sandwich garantita à 15 Da chez Merzak. Vite avant qu'elle ne refroidisse ! Tiens, au fait qui a inventé la garantita ? Cette personne ne mérite-t-elle pas un biopic ? |
|