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Vingt ans après la
création des premiers réseaux sans fil, la téléphonie mobile cellulaire est
devenue, en Algérie, la première industrie des réseaux malgré une prédominance
des formules prepaid. Un contribuable émergent pour l'administration fiscale.
Problème cependant, comment cerner le chiffre d'affaires généré par les flux de
communication ? Un enjeu central dans la conflictuelle évaluation de
l'opération Djezzy par l'Etat.
Depuis une dizaine d'années, trois stratégies d'offres commerciales s'affrontent quotidiennement sur le marché de la téléphonie GSM en vue de gagner plus d'abonnés ou consommateurs de cartes SIM. Ce marché a pris une importance significative dans l'économie algérienne. Les trois opérateurs activant dans le pays pèsent désormais d'un poids considérable dans les flux financiers. Ils sont devenus des contributeurs fiscaux très importants. Malgré un classement dans une catégorie fiscale primaire, les impôts de la téléphonie mobile représentent une source de revenus significative pour l'administration gouvernementale. Du côté du gouvernement, l'enjeu est encore plus stratégique. Le niveau des rapatriements de dividendes en devises des deux opérateurs étrangers présents en Algérie Vimpelcom OTH et QTEL - les Qataris n'y ont pas encore eu recours - dépend directement de la mainlevée de l'administration des impôts. Celle-ci n'a pas caché son embarras devant l'ubiquité d'une assiette fiscale de type nouveau. LES CONSEQUENCES DE LA DEFAILLANCE DU REGULATEUR Un acteur décisif, le régulateur du secteur des télécoms aurait dû venir à la rescousse de l'administration fiscale et par incidence de la Banque d'Algérie. L'incapacité de l'ARPT à quantifier cette explosion des flux de la téléphonie a pesé dans le marasme qui entoure les résultats des opérateurs et qui a notamment conduit à deux redressements fiscaux gigantesques à l'encontre de Djezzy. L'instauration par l'ARPT d'une comptabilité analytique dans le contrôle du volume de communications chez les opérateurs aurait dû aider à la transparence sur les chiffres d'affaires réels. De même des vérifications trimestrielles des activités réseau des opérateurs auraient été précieuses pour simplifier la fiscalisation de l'activité. Elles auraient concerné notamment le nombre des cartes SIM réellement en service, le volume des minutes téléphoniques consommées et le rapport entre le taux d'usage et celui de la couverture. C'est, estiment des spécialistes, cette incapacité à établir une traçabilité des revenus générés qui a poussé le gouvernement algérien à envisager alors le rachat pur et simple du leader de la téléphonie mobile. Une option contestée depuis le début par des experts qui semble s'orienter vers un échec. Point d'achoppement, la valeur des actifs de Djezzy en particulier le cash-flow généré sur son réseau. Les spécialistes notent toutefois que même en cas de non aboutissement de l'option d'achat, la tentative aura permis au gouvernement algérien de s'initier à la comptabilité des opérateurs depuis qu'il a eu accès fin 2011 à la data room de Djezzy au terme d'un accord avec Vimpelcom. Cette `intrusion` aura permis de constater l'importance des réglages et mises au point nécessaires lors du lancement d'un réseau de téléphonie mobile. Elle permet aussi de relever les difficultés de régulation engendrées par l'absence d'un observatoire de la téléphonie mobile ou d'une association de défense des consommateurs de la téléphonie mobile. On a bien vu un ancien ministre français de l'économie numérique suivre publiquement l'activité de plusieurs opérateurs en envoyant des huissiers sillonner les rues des grandes villes pour vérifier que l'opérateur Free avait bien activé son réseau. LA SOUTENABILITE DU RESEAU AUTRE ENJEU D'EVALUATION L'évaluation financière d'un opérateur téléphonique ne dépend cependant pas seulement des revenus que génèrent les flux sur son réseau, elle est liée à la taille et à la soutenabilité de ce réseau. D'un point de vue théorique, l'évaluation dépend essentiellement des activités du réseau de l'opérateur. Elles correspondent, d'une part, aux coûts des investissements introduits dans les équipements de couverture (radio) et de capacité (commutation et stockage des données) et à ceux des redevances des fréquences et de location des sites radio d'autre part. D'un point de vue pratique, le dimensionnement du réseau de l'opérateur joue aussi un rôle significatif dans son évaluation. Le sous-dimensionnement d'un réseau nuit grandement à l'écoulement du trafic. En clair, le principe de fonctionnement des réseaux cellulaires de type GSM se base toujours sur la recherche de compromis entre la couverture radio en termes de population et de zones géographiques et la densité de trafic téléphonique. Les abonnés doivent, en effet, être localisés en permanence par les BTS (Base Transceiver Station) afin qu'ils puissent effectuer ou recevoir un appel téléphonique. Ainsi, l'accessibilité au service téléphonique dépendra essentiellement de ce principe de localisation. La congestion de ce réseau, par exemple, aux heures pleines, rendra une majorité d'abonnés injoignables et fera donc diminuer les montants générés à partir du volume de trafic entrant et sortant. La valeur financière du propriétaire d'un tel réseau subira alors une chute vertigineuse. Finalement, les modalités d'évaluation financière des opérateurs de la téléphonie mobile ont dû, dans le cas de la transaction Djezzy, s'adapter au contexte algérien. Ce qui a été une autre source de clivage entre le propriétaire d'OTA et le ministère des Finances. Ce dernier ne voulant pas se référer exclusivement aux comparaisons internationales en raison des différences relevées dans les services télécoms offerts, les investissements effectués par les opérateurs et les conditions démographiques et économiques de l'Algérie. |
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