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Les producteurs
algériens de lait refusent de se prononcer sur le soutien des prix à la
consommation. Reconnaissant que le soutien de l'Etat a joué un rôle central
dans l'augmentation de la production, ils ne veulent toutefois pas se mêler à
la polémique lancée par le FCE, qui souhaite, quant à lui, que la subvention
soit supprimée et remplacée par de nouveaux mécanismes d'aide aux plus
défavorisés.
Mahmoud Benchakour ne veut pas s'en mêler. La subvention accordée par l'Etat algérien à la consommation de lait relève d'une politique décidée par le gouvernement, et le président du conseil interprofessionnel du lait ne veut pas se prononcer sur la question. Le sujet est trop délicat, a-t-il dit prudemment lundi au cours d'une émission de radio. Selon lui, le prix plancher du lait à la production est de 30 dinars le litre. Pour assurer une marge bénéficiaire à tous les acteurs de la filière, il faudrait qu'il soit vendu entre 45 et 50 dinars, dit-il. Mais le litre de lait est actuellement plafonné à vingt-cinq dinars, l'Etat algérien prenant en charge la différence, ce qui le contraint à verser des primes à tous les maillons de la filière, producteur, collecteur et transformateur. Faut-il supprimer ces subventions ? Rédha Hamiani, président du Forum des chefs d'entreprise (FCE), la plus médiatique des organisations patronales, affirme que oui. Cette subvention est antiéconomique et inefficace, dit-il. Elle profite à tous, y compris aux plus riches, mais également aux transformateurs de lait, fabricants de fromages et de produits dérivés, dit-il. Il faut donc la supprimer, et mettre en place de nouveaux mécanismes pour soutenir les couches les plus défavorisées. Mahmoud Benchakour est moins catégorique. Il reconnaît que la consommation de lait en Algérie est de loin supérieure à celle du Maroc et de la Tunisie, mais il note que le lait, malgré les gaspillages, constitue une source importante de protéines, difficile à remplacer à l'heure actuelle. Il déplore également que le lait, fortement subventionné, aille «aux produits dérivés et non au consommateur». BENAÏSSA: PAS TOUCHE A LA SUBVENTION Deux jours plus tôt, Rachid Benaïssa, ministre de l'Agriculture, avait rejeté toute idée de supprimer les subventions des produits alimentaires de base, affirmant que l'idée «n'est pas à l'ordre du jour». M. Benaïssa s'est même situé aux antipodes de cette idée, affirmant que la subvention doit être maintenue dans la durée. Il a en effet plaidé pour «l'organisation et la mise en place des conditions de durabilité d'une telle décision» et appelé à «construire un système et à créer des conditions qui vont garantir la durabilité de la décision». Le soutien des prix constitue une question cruciale pour le gouvernement, qui avait répondu aux émeutes de janvier 2011 en augmentant les subventions de certains produits alimentaires de base. Mais dans de nombreux cercles au sein de l'administration, on reconnaît que la politique actuelle mène à l'impasse, car elle constitue un frein à la production et impose la mise en place de mécanismes très complexes, difficiles à gérer, générateurs de rentes et de corruption. M. Hamiani a évoqué des «détournements» des subventions à d'autres fins. LE SOUTIEN A LA PRODUCTION FAIT CONSENSUS A défaut d'un consensus sur la subvention, qui devrait être maintenue tant que les revenus pétroliers le permettent, un consensus s'est fait sur la nécessité d'augmenter la production. Le soutien aux producteurs a d'ores et déjà donné des résultats probants, selon Mahmoud Benchakour. La production de lait collecté, qui augmente de 10 à 15 pour cent par an depuis quatre ans, a déjà dépassé 800 millions de litres, et la facture des importations de poudre de lait a été réduite de 300 millions de dollars, a-t-il dit. Atteindre l'autosuffisance impose toutefois de changer de modèle et d'échelle de production. Il faut franchir le cap du million de vaches, contre 800.000 vaches actuellement, et la production par vache doit passer de 4.500 litres/an à 7.000, pour atteindre une production de six milliards de litres, a indiqué M. Benchakour. Ceci impose une série de modifications dans toute la filière. Il a cité à ce propos l'introduction de nouveaux fourrages, comme le maïs, mais celui-ci consomme beaucoup d'eau, ce qui impose de nouveaux dispositifs pour l'irrigation, les économies de l'eau, et tout ce qu'implique l'introduction de nouvelles cultures. SOUTENIR LES FELLAHS ET LES ELEVEURS OU IMPORTER MASSIVEMENT Pour l'heure, a-t-il dit, les dispositions ont été prises pour cultiver 6.000 hectares de maïs, mais il reconnaît que cela reste très insuffisant, car il faut passer le cap des 100.000 hectares pour assurer un renouveau de la filière. Cet objectif impose une hausse importante de l'aide de l'Etat pour la culture du maïs, a déclaré M. Benchakour. Celle-ci s'élève actuellement à 6.000 dinars par hectare. Il faudrait qu'elle soit multipliée par dix, pour atteindre 60.000 dinars par hectare, alors que le coût global d'un hectare s'élève à 200.000 dinars, a-t-il dit. Mais avec cette aide, il sera possible de produire 300 quintaux de maïs à l'hectare, et de diminuer d'autant les importations. Le choix est là, a-t-il dit, entre donner cette aide aux fellahs algériens et aux 26.000 éleveurs, ou continuer à importer massivement la poudre de lait. |
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