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Et maintenant ? On cont-nue : émeutes contre ar-gent, immolation
contre négation, routes contre impasses, statistiques contre bonheur et
réformes contre changement. D'ailleurs, c'est le mot clé : changement. Par une
vaste opération d'attentats sémantiques et de prise en otage du dictionnaire et
des définitions, le mot «changement» est passé de son statut positif de
transformation vers le mieux ou vers l'autre, à celle, politiquement incorrecte
de mutation vers le pire. «Changement» est désormais synonyme de OTAN, Al
Jazeera, invasion, désordre, émeutes sans fins, salafistes au pouvoir,
agressions, interruptions du commerce et des entreprises, chaos. Changer est
équivalent de Harkis, BHL, sionisme et trahison du pays, des martyrs et de
l'amour du sol natal. «Changer» est une pratique terroriste, la preuve d'un
manque de nationalisme, le processus d'une remise des clefs du pays à un colon
étranger qui attend à la porte.
L'opération sémantique a été menée à bien par le régime et ses batteurs de tambours : ils ont réussi à faire peur aux algériens, les plus vieux, ceux qui votent. Du coup, le pays s'est vu divisé en deux grandes familles politiques : celle qui a peur et celle qui s'ennuie. Les index noirs (signe du vote) et «les mains vides». Paradoxe de fond, la seconde catégorie ne veut pas, souvent, que le régime change mais seulement qu'il change sa façon de distribuer l'argent. Du coup, le pays contraire au pays : on vote contre le changement mais on change de pays par immigrations clandestines. On ne veut pas changer mais manger. On fait des émeutes et on vote pour ceux qui sont visés par les émeutes. On insulte le régime mais on choisit de revenir vers son parti unique. La preuve donc qu'il existe deux peuples peut-être. Deux générations, surement. Deux façons de définir le changement : «changer, c'est partir» et, la seconde, «changer c'est dire non au changement». Le paradoxe sera terrible cependant : voici un régime qui a été «élu» sur la base d'un étrange programme : ne rien changer, ne pas changer, ne rien toucher, continuer. On dirait un vote de Suisses riches pour une Suisse équitable dont on veut perpétuer le bonheur et l'équité. Sauf qu'il s'agit de deux autres sentiments : la peur chez ceux qui ont voté et le dégout, chez ceux qui ont refusé de jouer ce jeu. Quand on mêle la peur au dégout, cela donne le suicide ou la régression vers l'utérus. Du coup, une piste : ce vote est affaire psychologique, pas politique. Et maintenant ? La suite : Belkhadem se voit déjà Président de la république dans deux ans. C'est ce qu'à promis Bouteflika : donner le Pouvoir aux plus jeunes. C'est-à-dire ceux qui ont moins de 78 ans et qui ont près de 70 ans. On ne change pas des décolonisateurs qui ont gagné, même si cela remonte à 50 ans. On ne fait pas confiance à des Algériens qui naissent, même s'ils sont plus de 70% du peuple. On vote pour remonter l'histoire. Et maintenant ? Réponse : demain sera fait d'hier, avec les gens d'autrefois. Contre le changement, mais pour l'émeute... |
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