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Le secrétaire général de la ligue Arabe à Alger : Palestine, Syrie et la position algérienne

par Ghania Oukazi

Lors de la conférence de presse qu'il a animée, lundi, aux côtés du ministre des Affaires étrangères, le secrétaire de la Ligue Arabe a qualifié le président de la république de «doyen des dirigeants arabes et le plus ancien homme politique arabe au passé honorable.»

C'est la première visite qu'El Arabi effectue à Alger après sa nomination en juillet 2011 à la tête de la Ligue Arabe. Il se rappelle quand même qu'il était venu en 1973 pour participer au sommet arabe organisé après la guerre contre les Israéliens. Et pour la première fois, un responsable égyptien reconnaît à l'Algérie un rôle courageux dans cette guerre qui devait réhabiliter l'Egypte et de là la Nation arabe après l'affront qu'elle a essuyé en 1967 après que l'armée israélienne ait écrasé au sol la flotte aérienne de Nasser. «Je suis venu à Alger après la guerre de 73 dans laquelle l'Algérie a participé avec courage,» a déclaré Nabil El Arabi. Tout en affirmant que «c'est un grand pays africain», le SG de la Ligue Arabe a noté que «l'Algérie a rassemblé tous les Arabes, sa révolution pour l'indépendance fait honneur à l'ensemble du monde arabe.» Le ministre des Affaires étrangères le lui rend bien en saluant «l'effort colossal que déploie la Ligue Arabe», et ce n'est pas facile, a reconnu Mourad Medelci «de traiter des questions aussi cruciales dans une conjoncture aussi difficile.»

Medelci a fait part de la disponibilité de l'Algérie «à faire avancer et renforcer le travail de la Ligue dans le règlement de la crise syrienne et la cause palestinienne avec en prime la situation désastreuse dans laquelle vit son peuple.» Il était question, entre Medelci et El Arabi, de revisiter les relations entre l'Algérie et la Ligue arabe qu'il qualifie de «très bonnes». Il est prévu que les deux hommes définissent les moyens de leur renforcement et une coopération plus efficace en ces temps de crises persistantes et renouvelées dans le monde arabe. Restée unie devant une telle déconfiture des sociétés arabes, l'Algérie fait, aujourd'hui, figure d'un pays qui a des forces de résistance importantes susceptibles de le préserver des desseins destructeurs.

«L'ALGERIE A HONORE SES ENGAGEMENTS VIS-A-VIS DE LA LIGUE ARABE»

Le MAE avait affirmé qu'il était question de discuter avec son hôte «des crises nouvelles et parfois anciennes» auxquelles il faut trouver des solutions. Il saisira l'occasion de la conférence de presse pour rappeler, officiellement et solennellement, que «l'Algérie a toujours honoré ses engagements financiers et autres vis-à-vis de la Ligue arabe», en précisant que «je parle sous le contrôle de son secrétaire général.» L'allusion est faite aux pays arabes, notamment, les plus riches dont la main accroche dans la poche pour ne pas payer leurs cotisations auprès de la Ligue arabe. Medelci remet alors pour la circonstance, sur la table des discussions des projets initiés dans le cadre de la Ligue dont, a-t-il dit, «certains ont avancé et d'autres non.» Entre autres projets réalisés dans ce cadre, la création à Alger d'un centre de traduction, d'autres sont en phase de réalisation ou d'étude comme celui relatif à l'installation d'un satellite arabe et que Medelci espère que sa mise en place avancera avec l'aide d'El Arabi. C'est aussi pour signifier que l'Algérie a respecté l'ensemble des engagements qu'elle avait pris pour amorcer la réforme de l'institution arabe.

Le MAE a reconnu que les partenariats économiques et technologiques, qui lient les Etats arabes, «ont fait un saut qualitatif ces dernières années.» Le défi pour lui est de «dispenser dans la zone arabe le savoir et la connaissance technologiques, et pourquoi pas faire en sorte de les exporter aussi ?». La coopération économique entre les Etats arabes membres de la Ligue arabe avait pris son envol selon Medelci à travers les sommets de développement organisés le premier au Koweït, le second à Charam Echeikh et un troisième, qui se teindra, selon la précision d'El Arabi, l'année prochaine à Ryadh.

Rentré dans le vif du sujet de sa visite, le SG de la Ligue a souligné que «la situation en Palestine est critique(?) et que le processus de paix est un processus et non une paix, le peuple souffre.» Les Arabes, a-t-il dit, se concertent pour trouver une solution à ce drame «sur la base des grandes orientations du président Mahmoud Abbas.» Pour ce qui est de la Syrie, El Arabi pense qu'«il ne peut y avoir de processus politique sans l'arrêt des tueries.» Processus qu'il pense qu'il ne peut être décidé que par «le peuple syrien et l'opposition.» Il avoue que la première mission d'observation de la Ligue envoyée sur place «n'avait pas le nombre suffisant pour une mission aussi sensible, ni les moyens qu'il fallait, ni le temps nécessaire.» Il a rappelé, rassuré que «l'ONU ait pris les choses en main sur demande de la Ligue arabe et a désigné un envoyé spécial, Kofi Annan pour tenter de faire arrêter les tueries.» Il a salué ainsi « le consensus de la communauté internationale autour de la crise syrienne.»

Pour la nouvelle mission d'observateurs, il fait savoir que «ce sont 500 observateurs militaires qui ont une expérience en matière de cessez le feu. Ils doivent savoir ce qu'il faut faire pour y arriver.»

«KOFI ANNAN DEMANDE A L'OPPOSITION DE LUI DONNER DES NOMS»

Interrogé sur la position algérienne vis-à-vis de la crise syrienne, Medelci répondra que «la position de l'Algérie est connue, elle a été prise sur la base de l'initiative arabe et soutient l'envoyé spécial de l'ONU qui est un facilitateur, un médiateur pour trouver une solution définitive qui permettra aux Syriens eux-mêmes de trouver la clef de la solution politique de leurs problèmes.» Il ajoutera que «nous attendons que le recul de la violence soit plus net(?) et l'Algérie continuera à accompagner les efforts de la Ligue arabe pour trouver une solution aux problèmes d'un pays qui est dans une région particulière.». Le SG de la Ligue Arabe a lui aussi été interrogé sur ce qu'il pensait de la position algérienne. Il a répondu que «chaque pays a le droit d'avoir la position qu'il veut, chaque pays a ses spécificités, on ne peut comparer l'un et l'autre.» Medelci répétera, à qui veut l'entendre, que le processus politique de résolution de la crise syrienne ne peut être exécuté que par les Syriens «eux-mêmes. Nabil El Arabi avait soutenu la même option comme pour conforter les propos du MAE en soutenant, en sus, que «l'Algérie joue un rôle important dans le monde arabe,» d'où son déplacement à Alger. Interrogé sur l'insistance de l'opposition syrienne de faire partir Bachar EL Assad avant tout adoption du processus politique en question, El Arabi répondra que «Kofi Annan a demandé à l'opposition de lui donner un ou les noms des personnes qui doivent partir.»

Le SG a décidé de remettre au goût du jour la réformer de la Ligue arabe qui a tardé à se concrétiser. Il a alors déclaré qu'il est venu pour «écouter l'Algérie pour ce qui est de la réforme de la Ligue arabe dont la charte date de 1944 et est inspirée de la Société des Nations avant la 2è guerre mondiale.» C'est dire que le fonctionnement de cette entité est d'une obsolescence avérée. Le MAE profitera pour rappeler que certaines propositions de réforme de la Ligue exprimées par l'Algérie lors du sommet arabe de 2005 ont été appliquées comme le régime du vote et le parlement de transition. «Pour décider, nous attendons, en septembre prochain, les propositions de la commission arabe instituée à cet effet que préside Lakhdar Brahimi,» dit le ministre. El Arabi a noté que la Ligue arabe envoie 132 observateurs en Algérie pour surveiller les élections législatives du 10 mai prochain. «Les observateurs bénéficieront, la semaine prochaine, d'une formation auprès de l'ONU. Leur envoi en Algérie prouve que nous avons un intérêt réel vis-à-vis de ce pays.» Le SG de la Ligue arabe a pris le soin de rappeler à la mémoire le défunt président Ahmed Benbella auquel a-t-il «le monde entier voue un grand respect.»