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Dans ce dernier volet
consacré à l'élection présidentielle française, c'est d'islam, d'islamisme et
de terrorisme dont il va être question. Tout d'abord, une interrogation d'une
brûlante actualité. La France est-elle en guerre contre l'Islam ? A en croire
certains éditorialistes de droite, elle n'en est pas loin.
Les présidentielles qui prennent fin aujourd'hui, si elles ont réveillé bien des peurs et quelques démons, exacerbent les tensions. Marine Le Pen, qualifiée pour le second tour pour la seconde fois consécutive, avec 23% de voix, est une autoroute protégée sans croisement, ni passage à niveau ouverte à l'extrême droite en France. Ceux qui ont pris l'engagement politique et surtout le risque majeur d'installer une candidate d'un parti extrême au second tour, ont-ils tenu compte de l'ampleur du danger réel d'implosion du pays si elle parvenait à l'Elysée ? Ceux qui de près ou de loin ont des liens avec la France parlent même de «bombe amorcée». Ce pays ne vit pas en autarcie. L'enjeu des élections est quasi planétaire. D'où la nécessité de mobiliser et de fédérer les opinions publiques. Le résultat aura certainement des conséquences majeures sur les plans national, régional et international. Si Marine Le Pen gagnait, cela changerait tous les équilibres en Europe et au sein de l'Otan. L'opinion éclairée en est marquée d'indignation. Ce sont les graves erreurs d'analyse et de jugement qui sont à l'origine d'une telle dérive. C'est ce qui arrive lorsque la politique est laissée aux aventuristes et aux charlatans politiques. Le moment est venu d'ériger des barrages anti-Le Pen (car si le patriarche ne peut plus sévir il ne faut surtout pas mésestimer la nièce diabolique qui s'agite dans les coulisses sentant son heure prochaine) et anti-Zemmour, véritable pompier pyromane ! Le grand talent de Zemmour est sa subtile exploitation démagogique des peurs des populations françaises et européennes. Nul n'est épargné à travers ses discours délirants qui distillent la haine et le mépris des Arabes et des Musulmans. Il dénonce, critique et accuse et sa cible favorite fait mine de ne pas le voir. Le monstre naissant qui a déstabilisé tout l'establishment politique, n'hésite aucunement à imputer aux autres, immigrés et musulmans en particulier, des accusations dont le caractère mensonger est flagrant. Il se considère comme membre d'une civilisation éclairée, d'un système supérieur, constamment menacé et mis sous pression par des étrangers, catégorisés par lui comme, sous-développés, arriérés et menaçants. Ce sentiment de supériorité, ce mépris qu'il cultive, ces préjugés qu'il conforte et renforce, cette image qu'il entretient et cette méfiance qu'il alimente, discours après discours, si elles lui permettent de nourrir sa confiance en lui-même, tout en le positionnant tout en haut de la civilisation occidentale, le plonge dans le désarroi, la peur et le ressentiment et l'incite à la stigmatisation et à l'outrance.. Hitler et sa race aryenne ne sont pas loin. D'où son antisémitisme à peine masqué (pour un sémite c'est un comble !) et sa haine sans limite même des Français d'origine étrangère et ses débordements de violence. Marine Le Pen qui n'a jamais cessé de critiquer rigoureusement l'Islam en stigmatisant les Musulmans, prétend aujourd'hui, que son parti le RN, ne porte pas un projet fasciste. Mais, à y voir de plus près, son programme, toujours sous étiquette «Extrême droite» plane toujours, malgré l'opposition de la candidate qui veut se dédouaner à bon compte en faisant des selfis à tout va et en distribuant des poignées de mains à gogo, le sourire figé en extra. Ne répète-elle-pas à satiété que «l'Islam n'est pas compatible avec la République», qu'elle compte «interdire, dans l'espace public le voile, le foulard, la burqa, qui à ses yeux «sont une trahison de l'esprit français et de la République» ? Trente années sont passées, la crise des foulards du collège de Creil, dans l'Oise, qui a conduit à la loi de 2004 sur l'interdiction des signes religieux ostentatoires à l'intérieur des écoles est encore là. Quand elle annonce qu'elle fermera 570 mosquées déclarées radicales (comment ? à partir de quel critère ?), quand Sébastien Chenu (porte-parole du parti des vautours (RN), assure qu'un référendum est prévu sur l'immigration, qu'«une loi est prévue pour interdire le foulard en France» (Chose unique en Europe et dans le monde) et que c'est la priorité nationale qui est mise en avant (logement sociaux, l'embauche, régularisation, droit d'asile, plus de droit du sol et du sang, ni regroupement familial...), comment se permettre de dire que le RN ne porte pas un projet fasciste ? Ces appels ne sont pas de simples slogans. Les gens raisonnables qui vont se rendre aux urnes aujourd'hui, ne sont pas dupes. S'ils votent Le Pen, ils n'auront à se prendre qu'à eux-mêmes. «Ils préparent une guerre civile», souligne Emanuel Macron qui a défendu la «Loi séparatisme» (inutile selon Marine Le Pen), et qui assure qu'il n'est pas question pour lui d'interdire tout signe religieux dans l'espace public. Fait marquant et grandes lignes : L'intégration de l'Islam à la République L'intégration de l'Islam à la République a, cette semaine encore l'objet d'âpres débats, tout en relançant la réflexion sur la place des religions et la conception de la laïcité dans l'espace public français. En ce jour de vote, et au terme d'un vaste tour d'horizon (1) il nous a semblé opportun, pour terminer ce marathon élyséen, d'aborder cette thématique où la confusion semble totale. Lors de l'ultime face-à face de mercredi dernier, le débat sur la place de l'Islam a été quelque peu escamoté alors qu'il s'est toujours situé au centre des débats depuis le début de la conquête de l'Elysée. L'opération de dédiabolisation de la candidate de l'extrême droite y est certainement pour quelque chose. On constate d'ailleurs que nombre de points clivant de son programme ont fait l'objet de modification, de détournement, de changement, voire de suppression temporaire et cela pour polir un style, un contenu, une présentation, et donc pour amasser encore quelques bulletins de vote chez les récalcitrants qui hésitent encore à se déplacer. Mais la démarche n'est pas toujours évidente. Adoucir un discours, rendre un visage plus sympathique, modifier un programme sans en changer le contenu relève de la prouesse technique et esthétique. Marine Le Pen n'a pas réussi à gommer toutes les aspérités du RN et briser le plafond de verre. Cette intolérance envers les Musulmans autochtones européens (2) appréhendés comme des citoyens de seconde zone, montre à l'évidence que l'Europe tolère le viol en permanence des son principe principal, à savoir que tous les peuples sont égaux et qu'ils méritent le même respect. Grave crise morale donc ! L'Islam, toujours ramené à son arabité de par ses origines est une chose caduque car les Arabes ne représentent en fait que 21% des musulmans dans le monde (3). En France et en Europe, le discours médiatique parle de Musulmans (appartenance ethnoculturelle), plus que de groupes religieux. Il y a des arabes, nous venons de le dire, mais il y a aussi des Berbères (Kabyles, Chleuhs, Rifains..., des Algériens, des Marocains, Tunisiens, Turcs, Kurdes, Maliens, Sénégalais... qui constituent une identité musulmane en pleine déculturation. Celle-ci facilitera un jour, l'émergence d'un Islam d'Europe. Pour l'heure, la forte dégradation de l'image de l'Islam en France, fait plutôt parler de menace. L'Islam n'est compatible que pour 56% de la population, Cf le Quotidien de droite, Le Figaro (4). Islam, islamisme et défi de l'extrême droite, dans sa grande majorité intégrée. Un quart de la population française est liée à l'immigration alors que le 1/8 a une origine musulmane. Selon A. Begag (5), il y a plus de mariages mixtes, plus de convertis, et plus d'enfants, environ 10 millions de personnes liées de près ou de loin sont culturellement musulmans. Agiter des menaces civilisationnelles, en étant obsédé par l'idée de domination nationale relève de la paranoïa. La candidate Marine Le Pen, individu frustré, méchant et résolument tourné vers le passé, peut faire rire. Mais si lundi s'ouvrent les portes de l'Elysée, c'est le pouvoir qui lui reviendra. Sauve qui peut ! Si l'intégration des deuxièmes et troisièmes générations d'immigrés, et en particulier ceux d'origine maghrébine apparaît aujourd'hui comme quasi-impossible, c'est en raison du sort qui leur est fait. Quand Zemmour qui ne recule devant aucune outrance dit : «En France, tous nos problèmes sont aggravés par l'immigration : école, logement, chômage, déficits sociaux, dette publique, ordre, prisons, hôpitaux, drogue. Et tous nos problèmes aggravés par l'immigration sont aggravés par l'islam, cela prouve qu'il n'a rien compris à un problème qui le dépasse. C'est la double peine», n'hésite-t-il pas à marteler pour résumer sa pensée. Autre énormité, proférée sur CNews en octobre 2020 : «Il n'y a pas de juste milieu, il faut que les jeunes immigrés ne viennent plus. Ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c'est tout ce qu'ils sont !» Là, le Rubicon de l'indécence est franchi. Ce qui a valu à la chaîne d'être épinglée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), qui l'a condamné à verser une amende de 200.000 euros. Il récidivera en déclarant à qui veut bien l'entendre : «Les immigrés - c'est-à-dire les Noirs et les Arabes - sont soit des profiteurs, soit des voleurs, soit les deux. Leur nombre est insupportable(6)». Il voit des Africains - Maghrébins et Subsahariens - partout, alors que les natifs du continent ne représentent que 41 % des immigrés arrivés en France en 2019 (contre 31,9 % nés en Europe, 16,2% en Asie et 10,9 % en Amérique ou en Océanie). Et il ne décrit qu'une population de délinquants analphabètes, alors que la moitié des personnes de plus de 15 ans qui arrivent sur le territoire français sont diplômées du Supérieur. Il déclare tout de go que «tous les musulmans sont des fanatiques potentiels» (7). Or, l'immense majorité des musulmans vivant en France, de culture musulmane, pratiquants ou non, agnostiques ou athées, croyants ou non, pratiquants ou non, respectent les lois de la République, et de ses semblables. Zemmour ne parle jamais d'eux. Ces millions d'hommes et de femmes, citoyens de ce pays, étudient, travaillent, respectent le code civil, paient leurs impôts, vivent en toute tranquillité et réprouvent toute instrumentalisation politique de l'Islam. Ils sont médecins, avocats, ouvriers, employés, cuisiniers, chefs d'entreprise, chercheurs, livreurs, chauffeurs, cadres... Zemmour n'a pas compris que sa croisade contre un islam fantasmé est une insondable bêtise. A terme, dans les banlieues, il ne manque que la mèche... Zemmour, qui s'inspire de journalistes et écrivains très à droite (Charles Maurras, Maurice Barrès ou Jacques Bainville), existe en tant que corollaire de la médiocrité actuelle de la classe politique française et d'un système à bout de souffle. Il existe aussi parce qu'il a su sévir à la télé, s'approprier les thèmes de l'immigration, de l'Islam et du déclinisme. Il existe enfin parce qu'il a su se cultiver un statut de victime d'«élites corrompues» qui tentent par tous les moyens de le bâillonner. Sa méthode est simple, voire simpliste : faire peur tout en rassurant son auditoire en étalant sa «culture», en serinant que lui seul parle vrai et peut sauver la France. Mais ses propos affligeants ne le mèneront nulle part. Soyons toutefois prudent l'imposteur totalitaire, aujourd'hui mis sur la touche, peut à tout moment resurgir et susciter de nouvelles adhésions. La nature a horreur du vide, disait Aristote. Est-ce une raison pour le remplir de fiel ? Notes : QO du 7/4/22 (Le Racisme aux trousses), QO du 12/4/22 ((A l'assaut de l'Elysée - Coulisses d'une élection hors normes), QO du 14/4/22 (Sémantique guerrière et climat d'intolérance), QO du 21/4/22 (Election-Médias : armes à double tranchant). 1) En 2015, il y avait 1,8 milliard de musulmans dans le monde, soit 24% de la population mondiale, ce qui en faisait la seconde religion du monde. Après le christianisme et devant l'indouisme. En 2050, l'Inde sera en tête (Rapport du Pew Rescarch Janv 2011) 2) Le Monde 13/10/01. «L'Islam en France». Paris PUF 2008 3) Le Figaro 25/10/18 4) «La faute aux autres». Azouz Begag. L'Esprit de printemps 2017. 5) Pourtant, la France ne compte que 12,7 % de personnes nées hors de ses frontières - ce qui la situe dans la moyenne européenne - et 7,6 % d'étrangers, moins qu'en Belgique, en Allemagne ou en Espagne. Zemmour «invente» un flux de 400.000 immigrés qui pénètreraient désormais chaque année en France depuis l'élection d'Emmanuel Macron, alors qu'ils ne sont que 139 000 (chiffres Insee). 6) Lire à ce propos, «Le fascisme islamique», une analyse de Hamed Abdel-Sammad, Grasset 2017. «Déruire le fascisme islamiste». Zineb Ek Ghazoui. 2016. «Les dérives de l'idéologie islamiste» Mezri Haddad. 1990... |
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