Reprenons: les candidats aux prochaines élections sont
filtrés par «l'Administration», alias le système, alias le Pouvoir, alias pas
nous mais eux. Ensuite les candidats sont interrogés par la police et la
gendarmerie avant de se faire élire, alors qu'il faut le faire après leur
mandat selon la loi de déclaration de patrimoine. Ensuite, on valide et on
rejette et on exclut selon soi, selon le wali qui a, de par la loi, le pouvoir
discrétionnaire de rejeter une candidature (on nous l'a cachée, cette loi).
Ensuite, on achète des urnes transparentes à quelque 200 millions de dollars
(les anciennes ne l'étaient pas ?). Et ensuite, quand tout sera fait et défait
et refait, on vous appellera pour voter, c'est-à-dire valider. Reprenons donc:
le vote est un choix mais on n'a pas le choix de ne pas voter, ni même de
parler de ne pas voter. Le MJIC, Mouvement de la jeunesse indépendante pour le
changement, a vu certains de ses membres arrêtés à Alger parce qu'ils
distribuaient des tracts appelant à ne pas voter. La raison ? Le vote n'est pas
un choix mais c'est un choix obligatoire de le choisir et de voter. Absurde. La
raison ? Evidente: le vote est destiné à l'exportation, comme certaines dattes
du Sud. Pas le choix des électeurs mais le taux de participation. C'est
d'ailleurs un référendum, un plébiscite des «réformes». Ensuite, c'est un
mouvement de jeunes et le vote, le prochain, est un choix de vieux. Du système
vieux, de ses vieux, de sa vieillesse, de l'emploi de vieux et du
vieillissement précoce de la population assise entre la ride et l'évocation. Il
y a dans l'arrestation de ces militants du biologique, du politique. Du
persistant contre le naissant. De la relique contre le nouveau monde.
Donc Bouazizi est mort, Kadhafi aussi, Moubarak presque,
Ali Salah un peu, Bachar déjà, Benali absolument, mais ici, chez nous, rien.
Rien n'a changé. Les mêmes méthodes, la même propagande, les mêmes
interdictions de dire non ou de dire que je vote autrement, la même
administration qui vote et signe avant le peuple, le même jeu de liste et
d'ailleurs les mêmes partis mais avec d'autres sigles et les mêmes pouvoirs
accordés au wali et ôtés des mains du peuple. On ne démocratise pas un système
avec un discours. D'ailleurs c'est l'une des étonnantes croyances de l'ancienne
génération au pouvoir: croire que donner des instructions suffit pour provoquer
la pluie. Croire que «jurer» est «changer». Le système actuel n'acceptera que
ce qu'il voudra. Le vôtre est contrôlé, balisé, fixé. On aurait pu croire que
c'est un vote si on avait le droit de dire que je ne veux pas voter mais ce
n'est pas le cas. Un ancien membre du Conseil constitutionnel l'a même expliqué
à l'ENTV: ceux qui ne votent pas sont des hors-la-loi, des repris de justice et
on peut les retrouver, à partir du 11 mai, car ils n'auront pas d'encre noire
sur l'index gauche. «A voté» est déjà tamponné sur certains dos. Beaucoup.