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Une incroyable bourde de l'agence de notation Standard and Poor's (S&P), annonçant par erreur en pleine crise
de la dette que la France
avait perdu son précieux «triple A», a suscité jeudi la colère de Paris et
l'ouverture d'une enquête du gendarme français des marchés.L'agence
S&P, dont chaque communication est scrutée à la loupe dans le contexte
d'extrême nervosité des marchés, a fait savoir que «suite à une erreur
technique, un message» faisant état d'une dégradation de la note de la France avait «été
automatiquement diffusé» à certains de ses abonnés.
«Ce n'est pas le cas. La note de la République française est inchangée à «AAA», assortie d'une perspective stable, et cet incident n'est pas lié à une quelconque activité de surveillance de la note», a assuré S&P. La mise au point n'a pas suffi et le ministre français des Finances, François Baroin, a aussitôt demandé une enquête sur les «causes et les éventuelles conséquences de cette erreur», dont l'Autorité des marchés financiers (AMF) a annoncé l'ouverture dans la foulée. Le couac, sur lequel Standard and Poor's a elle aussi promis de faire toute la lumière, est survenu alors que l'écart entre le taux des obligations à 10 ans de l'Allemagne et de la France sur le marché de la dette a atteint un nouveau record historique jeudi, au-delà des 170 points de base. Cet écart reflète la différence de traitement entre les deux pays, pourtant l'un et l'autre notés triple A, la note la plus élevée, par les trois grandes agences de notation S&P, Moody's et Fitch. Cette note permet à la France d'emprunter aux meilleures conditions sur les marchés, mais Paris vit dans la hantise de la perdre depuis un premier coup de canif infligé le mois dernier par Moody's. L'agence rivale de S&P a annoncé mi-octobre qu'elle se donnait trois mois pour déterminer si la perspective «stable» de la note française était toujours justifiée, au vu de la dégradation de la situation économique du pays. Cet avertissement a pesé lourd dans la décision du gouvernement français de mettre au point un nouveau plan de rigueur, annoncé lundi, et qui prévoit des économies de 7 milliards d'euros en 2012. Il vient s'ajouter à un précédent train de mesures d'austérité annoncé fin août. Même si le gouvernement se démène pour sauver le triple A de la France, l'»erreur technique» de S&P nourrit le soupçon que le communiqué de l'agence annonçant la dégradation de la note de la France était prêt à être diffusé. Pour certains, à en juger par l'écart entre les taux français et allemands sur le marché obligataire, la France a déjà perdu de facto sa note triple A. «Ne nous faisons pas d'illusion : sur les marchés, la dette (française) n'est déjà plus AAA», a estimé jeudi Jacques Attali, l'ancien président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD). Une déclaration qui a indigné la ministre du Budget, Valérie Pécresse. «Des propos de ce type sont irresponsables car ils sont faux : aujourd'hui, nous faisons tout pour garder ce triple A. Dire le triple A est déjà perdu, se réjouir déjà du pire, c'est irresponsable», a-t-elle clamé jeudi soir. «La France a toujours démontré sa capacité à respecter strictement ses objectifs et je ne vois aucune raison pour qu'elle ne fasse pas de même cette fois-ci», a estimé de son côté le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, récusant l'idée d'une dégradation de la note française. |
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