« J'ai tout fait, et
toute la famille avec
moi, pour extirper mon frère Smaïn de la spirale des stupéfiants mais en vain. Je n'ai
jamais à aucun moment, pensé à le tuer. C'est un
malheureux accident de voiture et Dieu m'en est témoin». C'est ce que ne
cessera de répéter tout au long de son interrogatoire, Ahmed S.M âgé
aujourd'hui de 32 ans, par le président du tribunal criminel près la cour de justice de Médéa
qui le jugeait pour «homicide volontaire avec préméditation et guet-apens dont
a été victime son propre frère, Smaïn, âgé de 34 ans. En effet, les faits
remontent au 28 novembre 2006, aux environs de 13h, à la résidence universitaire
de Kouala à Médéa, l'accusé Ahmed, au volant de la voiture familiale,
percuta de plein fouet son frère Smaïn, le tuant sur le coup», selon l'arrêt de
renvoi dressé par la chambre
d'accusation.
Comment en est-on
arrivé là ? Selon les déclarations de l'accusé et les témoignages du père et de
deux de ses autres enfants, faits durant l'audience, les causes de ce
malheureux et tragique drame familial sont liées à un profond différend, qui
opposait la victime,
qui avait malheureusement plusieurs antécédents judiciaires, à toute la famille y compris le
père. Condamné à trois reprises pour terrorisme, vol
qualifié et coups et blessures sur ascendants, le défunt était devenu d'une
violence extrême à sa dernière sortie de prison. Il s'adonnait à la
consommation de stupéfiants à l'insu de toute sa famille. Ce
qui amena son frère Ahmed, aidé de toute la famille, à essayer de le
«récupérer» en lui ouvrant un local commercial puis en lui achetant un camion
de transport de marchandises sans pour autant arriver à «assagir» Smaïn. Ce
dernier basculera carrément dans la commercialisation de
kif traité : «ce qui rendit mon frère Smaïn d'une violence extrême jusqu'à
interdire, à plusieurs reprises à notre père l'accès à la maison familiale
», dira sur un ton pathétique l'accusé qui ajoutera: «le jour du drame, le
défunt s'est confectionné deux cocktails Molotov qu'il lança contre le local
commercial familial mais sans grande gravité. Il sortit ensuite un couteau car
il était sous l'effet des stupéfiants. Je me rendis alors, en voiture au siège
de la brigade de
la gendarmerie
nationale pour les aviser et en revenant à la maison, je vis le défunt
traverser la rue puis
rebrousser chemin pour s'arrêter au milieu de la chaussée. Je ne pus
l'éviter et ce fut le drame». Une affaire qui était rejugée, la semaine dernière
après cassation du deuxième jugement le 26.11.2009 (5 ans de prison ferme) qui
venait après le premier jugement par contumace le 17.06.2007 (peine capitale). Dans
son réquisitoire, le représentant du ministère public dira: «pourquoi l'accusé
a-t-il pris la fuite après
avoir percuté son frère? Est-il normal de faire une vitesse de 70/80 km/h dans
un quartier? Et c'est sur un dos-d'âne que la victime a été percutée. Les
faits de l'homicide volontaire avec préméditation sont établis et c'est pour
toutes ces raisons que nous réclamons la peine capitale à l'encontre de Ahmed S.M». Quant aux deux avocates de la défense, elles se sont
évertuées à plaider pour «une prise en considération, par ce respectable
tribunal, des circonstances dramatiques dans lesquelles vivait cette famille
encore aujourd'hui éplorée par la
perte d'un fils alors que l'autre est en prison, depuis le
mois de mai 2009. Nous sommes loin d'un homicide volontaire avec préméditation».
Le tribunal criminel près la
cour de justice de Médéa a condamné l'accusé Ahmed S.M à la peine de 5 ans de prison
ferme.