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Raids israéliens : bis repetita

par Mohammed Guétarni *

L'État hébreu fait fi à tous les appels et résolutions internationales de paix, même émanant de son tuteur : les États-Unis d'Amérique. Il jouit d'une totale impunité encouragé, en cela, par la bénédiction américaine et la lâcheté, voire la traîtrise des régimes arabes de l'Atlantique au Golfe persique.

Celle-ci est due en raison de leurs veulerie, division et désunion face à l'ennemi commun: Israël. Ce dernier commet de véritables crimes contre l'humanité à l'encontre du peuple palestinien désarmé et délaissé par ses propres frères pour ne pas irriter les maîtres occidentaux qui, sans eux, cela fait belle lurette qu'ils auraient été balayés de leurs trônes qu'ils occupent sans assises populaires, donc indûment. «Oh vous qui croyez, ne prenez pas Mes ennemis et les vôtres pour alliés. Vous leur témoignez de l'amitié alors qu'ils ont renié la Vérité qui vous a été révélée»(1). L'aveu semble échapper à un haut responsable algérien, au lendemain du raid, lorsqu'il reconnaît, sur les ondes de la chaîne 3, que le peuple palestinien ne doit compter que sur lui-même. Il a raison. Aucun peuple arabe ne peut compter sur aucun État arabe. Ceux-ci ne sont rien d'autre que des pions sur l'échiquier des puissances occidentales pour dompter leurs peuples dans l'unique but de s'éterniser dans leur pouvoir. «Où sont les Arabes», s'écriait une vieille palestinienne en pleurs face à la caméra lors du massacre de Sabra et Chatila en 1982 ? Où sont-ils aujourd'hui aussi ? Où seront-ils demain ? Eh bien, chère madame, pour voiler leur lâcheté, qui est, d'ailleurs, plus claire que le soleil après le raid sur Ghaza, les pantins, qui nous gouvernent, ne trouvent rien de plus urgent que de tenir des réunions aussi vides qu'inutiles pour ne jamais rien décider contre Israël comme à l'accoutumée ou, tout au plus, décident ce qu'ils n'oseront jamais entreprendre si ce n'est une timide condamnation du bout des lèvres pour se donner bonne conscience (de charbonniers) envers ces crimes odieux. « Certes, cette communauté religieuse, qui est la vôtre, est une seule et même communauté et c'est Moi votre Seigneur que vous devez adorez..(2)». Combien de fois l'État hébreu nargue les États arabes. Pourtant, tous les dirigeants savent pertinemment qu'Israël n'est pas l'ennemi des seuls Palestiniens mais de tous les Arabes. Encore une fois, ils ont bradé vilement leur honneur et celui de toute la nation. Ils baissent la tête et feignent ignorer le bras d'honneur israélien par ces raids, à répétition, contre Ghaza.

 Les ennemis des peuples arabes sont, d'abord, leurs propres dirigeants qui ne sont rien d'autres que des marionnettes au service de l'Occident. Ils dirigent leurs pays comme d'autres gèrent leurs boutiques. Egoïstes et mégalos, ils sont d'une incompétence et d'une pleutrerie inqualifiables. Ils se montrent redoutables uniquement envers leurs propres peuples qu'ils tiennent en laisse pour prévenir toute forme de revendication ou soulèvement populaire. Dans ce cas précis, ils font montre d'une cruauté sanguinaire implacable mais jamais contre l'ennemi commun à la nation. Ils passent les trois quarts de leur temps à réfléchir comment maintenir, même sous perfusion, leurs systèmes moribonds pourtant honnis et vomis par tous leur peuple, tous les peuples arabes, pour rester rivés à leur pouvoir oligarchique, voire dynastique qu'ils ne quittent que les pieds devant ou par la force des baïonnettes. Cependant, la rue arabe est en passe de s'embraser - et il y a de quoi - pour destituer ces régimes fantoches qui ne cessent de nous humilier devant les autres nations plus respectueuses des Droits de l'Homme et de leurs Citoyens que nos gouvernants continuent toujours à ignorer.

 Avec plus de 400 morts et près de 2.000 blessés en moins d'une semaine, ce n'est plus un massacre. C'est un véritable génocide proche d'un nettoyage ethnique. Insulte supplémentaire que la rue arabe refuse d'avaliser outre mesure. Selon la déclaration de Madame Hind Khouri(3), les Palestiniens peuvent compter plus sur la Communauté européenne que sur les États arabes eux-mêmes en raison de leur manque de courage, leurs faiblesse, division et désunion légendaires que les peuples sont en train de payer «chairement» certains dans leur peau, d'autres dans leur dignité. Autre humiliation. Selon le hadith : «Les Musulmans sont comme un seul corps [humain]. Si un membre est malade, tout le corps souffre de la fièvre(4)». Jusqu'à quand les peuples arabes continuent-ils à subir ces ignominies. «Vous êtes la meilleure nation venue au monde. Vous exhortez au bien et proscrivez le mal et vous croyez en Dieu(5)». Ce verset sacré est-il respecté par les dirigeants pourtant musulmans ? Si oui, sont-ils en concordance avec son esprit ou seulement avec ses lettres ?

 Ce énième raid israélien (qui ne sera, certainement, pas le dernier) est non seulement une expédition punitive contre les factions de Hamas mais une démonstration de fermeté à l'attention de tous les États arabes velléitaires pour les intimider, voire les assujettir. Ces derniers (il est vrai qu'ils sont les derniers de ce monde) ont pourtant plusieurs atouts en leur possession pour faire pression sur l'Occident et le domestiquer au lieu de subir sa vassalité : les 75 % des ressources énergétiques dans le monde (pétrole et gaz) sont en territoires musulmans, le canal de Suez, parfaite maîtrise des langues étrangères (français, anglais et autres), richesse des sols et sous-sols, positon géographique des plus enviables, les moyens humains et bien d'autres. En plus, les pays arabes ont deux ciments sociaux très solides qui ne perdent jamais de leur teneur : la même langue (l'arabe) et la même religion (l'Islam, excepté certaines minorités juive et chrétienne). Cependant, ils manquent de l'essentiel : des dirigeants de la trempe de Omar Ibn El-Khattab forts et courageux qui se sentent les fils chauds et jaloux de leur nation à même de la guider dans la bonne direction que souhaitent les peuples pour en faire, justement, une meilleure nation de ce monde. C'est-à-dire une nation instruite, forte et puissante capable de soumettre l'Occident à sa volonté. Or, il n'en est rien.

 Cette nation héritière de «Iqra'» n'a pas participé à la technologie depuis plus de sept siècles. Les dirigeants arabes préfèrent acquérir des armes pour asservir leurs peuples plutôt que d'investir dans la recherche scientifique pour être en conformité avec les préceptes religieux et posséder (et pourquoi non ?) son arme nucléaire.

 La nation musulmane patauge dans la misère, le dénuement et l'ignorance les plus crasses par la faute de ses gouvernants. Ces derniers en ont fait une nation au rabais à cause de leur courbette devant l'Occident.

 Ils exercent le pouvoir pour se servir sans jamais servir parce qu'ils ne servent à rien si ce n'est leurs propres intérêts et ceux de leurs gourous occidentaux qui les maintiennent au pouvoir. Ce dernier est exercé comme carrière plutôt que comme une simple mission limitée dans le temps. Dans les pays démocratiques, le nombre de mandats n'excède pas deux. Chez nous, ils se multiplient en nombre exponentiel. Les fraudes électorales sont rentrées dans «les moeurs de la politique arabe ».

 Cependant, que peut faire l'État hébreu - et même les États-Unis - si les pays arabes viennent à prendre leur courage à deux mains (faut-il qu'ils en aient et ça, ce n'est pour demain) et décident, unanimement, de bombarder Tel-Aviv perpétrant le même carnage et causant la même désolation parmi la population civile israélienne juste pour lui administrer une leçon bien méritée ? Va-t-il déclarer la guerre à tous les pays arabes ? «Serre tes dents, dit le sage adage arabe, celles de ton ennemi se desserrent». Ce serait au tour des Arabes de prouver «leur force d'union» d'abord et montrer «leur force de frappe » ensuite. L'union fait la force parce que le monde dans lequel nous vivons est, à très juste titre, la maison du fort. L'instinct de survie donne au désespéré une énergie insoupçonnable. S'il décide de passer à l'offensive, il est souvent un danger insondable que nul ne soupçonne. Nous vivons, hélas, une ère où il faut «être ou ne pas naître». Les faibles, comme nous, n'ont pas leur place dans ce monde qui ne diffère pas trop d'une jungle des temps modernes.

 C'est une des raisons qui poussent Israël à commettre ces crimes de masse contre les Palestiniens, en particulier, et les Arabes, en général. Telle est la loi de la sélection... naturelle ?

 Peuples arabes, unissez-vous et serrez vos rangs.

* Maître de conférences

Docteur ès lettres - Université de Chlef.



1- Soura 60 ; verset :01

2- Soura :21 ; verset :92.

3- Hind Khouri, déléguée palestinienne accréditée en France.

4- Hadith rapporté par El Boukhari

et Mouslim.

5- Soura : 03; verset : 110.