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Les forces de la
coalition s'apprêtent à quitter progressivement l'Afghanistan, laissant, comme
en Irak, le pays dans une situation pire qu'ils l'avaient trouvé.
Mardi soir, un commando-suicide de talibans s'est emparé d'un grand hôtel dominant Kaboul, faisant au moins dix victimes parmi la clientèle et le personnel. Dans quelques jours, les premières troupes américaines vont quitter l'Afghanistan. Les départs devraient s'étaler jusqu'à 2014. Aujourd'hui, le contingent américain compte quelques 90 000 soldats, auxquels il faut ajouter les troupes des alliés, 40 000 personnes dont 4 000 militaires français. A leurs côtés, l'armée afghane régulière compte environ 170 000 soldats et 109 000 policiers. En face, on estime à 25 000 le nombre des talibans et autres forces de résistance à l'occupation occidentale. La perspective du départ des troupes américaines présentes dans le pays depuis plus de dix ans n'a pas calmé les ardeurs des rebelles. Le 30 avril dernier, la hiérarchie talibane a annoncé sa traditionnelle offensive printanière et celle-ci a été plus violente que précédemment. Au-delà des accrochages traditionnels et des attentats à la bombe piégée (sept soldats américains tués le seul 26 juin, portant à 200 le nombre des militaires de la coalition décédés depuis le 1er janvier 2011 !), des attaques suicides se sont avérées très meurtrières. On en décompte 26 réussies ou tentées depuis le début de l'année : un attentat perpétré au nord de Kaboul, a eu raison du chef de la police, le général Daoud-Daoud. Les Afghans hésitants devant le retrait américain Face à cette offensive extrêmement violente, les troupes de la coalition ne sont pas restées inactives : entre la mi-mars et la mi-mai, 107 opérations ont été montées, entrainant la mort de plus de 700 Talibans et autres insurgés. Mais les pertes les plus lourdes sont parmi la population civile, dont on ne tient pas le décompte réel. Le président Hamid Karzai s'est récemment ému avec une virulence inhabituelle des « dégâts collatéraux civils » des opérations militaires occidentales. Cependant, l'homme fort de Kaboul (et de pas beaucoup d'autres régions afghanes), ne se maintient au pouvoir depuis une décennie que par l'appui américain. Comme la diplomatie américaine, Hamid Karzai appelle de ses vœux une réconciliation nationale et à la constitution à moyen terme d'un gouvernement d'union nationale. Reste à trouver les « bons » talibans ou autres opposants qui accepteraient une telle issue après plus de quarante ans de guerre civile, sous des formes et des motifs politiques fort différents mais toujours dans une extrême violence. Pays de 30 millions d'habitants, l'Afghanistan est avant tout une mosaïque d'ethnies : Pachtounes (42% de la population), Tadjiks (27%), Hazaras (9%), Ouzbeks (9%), Turkmènes (3%)? Dans ces populations, on retrouve tout autant des opposants aux talibans (particulièrement influents parmi les Pachtounes), que des adversaires au gouvernement légal. Et beaucoup ne sont pas favorable à une alliance entre ces deux composantes, même au nom de l'union nationale : « c'est notamment le cas de la minorité tadjik du Panchir, hostile par nature à la co-entreprise taliban - Al-Qaïda, ou encore des partisans d'un nouveau courant politique, le « Mouvement national » (Besij e Melli), animé par deux figures de prou emblématiques, l'ancien ministre des affaires étrangères et candidat malheureux de la dernière présidentielle, Abdullah Abdullah et l'ancien responsable des services de renseignement, Amrullah Saleh, explique Olivier Guillard, de l'IRIS, ce mouvement politique inspiré par le « printemps de la rue arabe », est à la fois réservé sur les initiatives du Président Karzai et très circonspect sur l'opportunité d'une coopération future avec les talibans ». La population afghane était certainement très majoritairement opposée à l'invasion de son pays par les États-Unis, elle est sans nul doute favorable au retrait des troupes. Mais, lassés et meurtris par des décennies de guerre, les Afghans peuvent paradoxalement s'inquiéter du nouveau vide politique crée par un départ rapide des troupes américaines qui laissent le pays sans solution politique visible. L'avenir de l'Afghanistan est d'autant plus complexe à appréhender qu'il faut compter avec les puissances régionales. Le Pakistan considère l'Afghanistan comme faisant naturellement partie de sa sphère d'influence. Ce qui a amené Islamabad à tolérer voire, pour certaines de ses franges gouvernementales, a apporter un soutien actif aux Talibans et à la mouvance islamiste radical. Cette politique ambigüe s'est retournée contre le gouvernement pakistanais qui doit aujourd'hui affronter sur son propre sol l'opposition armée de la nébuleuse Al-Qaida ? et des mêmes talibans, les Pachtounes étant fortement présents au nord du Pakistan. Le 1er ministre indien, le Dr Manmohan Singh, a fait le mois dernier une visite officielle à Kaboul pour rappeler l'intérêt de son pays, 1er investisseur étranger en Afghanistan, en cas de désengagement américain. Il faut enfin ne pas oublier l'intérêt ancien de la Russie pour les montagnes afghanes. L'attentat du 11 septembre 2001 avait été à l'origine de l'invasion de l'Afghanistan, Washington étant déterminé à traquer la Qaida et ses principaux alliés du mouvement des Talibans. L'assassinat au Pakistan de Ben Laden le 2 mai dernier, permet donc à Barak Obama de dire que « le boulot a été fait ». Dans les faits, la décision du président américain a des raisons plus prosaïques. En période d'austérité budgétaire, le conflit afghan coute aux États-Unis la coquette somme d'1,3 milliards par semaine ! Mais surtout, quelque soient les réussites sur le terrain enregistrées par les forces de la coalition, le conflit parait sans issue concrète. Les paris qui sous-tendent ce départ programmé paraissent tous incertains qu'il s'agisse d'une stabilisation du gouvernement Karzai, de la réelle capacité de résistance d'une armée afghane légale ou de l'hypothétique possibilité de créer un pacte d'unité nationale entre les ennemis d'hier et d'aujourd'hui. Les États-Unis quitte donc l'Afghanistan sans gloire. Retour sur un long gâchis de l'exécutif américain. USA: difficile repositionnement A la sortie de la Guerre froide, l'effondrement de l'URSS consacrait les États-Unis comme seule puissance planétaire, sans rival sur le plan militaire, diplomatique, économique et monétaire. Washington pouvait sans complexe s'afficher comme le « gendarme du monde », à l'image de la 1ère guerre d'Irak déclenchée par Georges Bush père. Son fils affiche des ambitions encore plus ambitieuses comme celle de créer un vaste Moyen-Orient démocratique, pacifié et sous influence étroite des États-Unis, quitte à renverser de force les régimes hostiles ou à redéfinir les frontières de certains états rétifs. Le double échec des occupations de l'Irak et de l'Afghanistan solde définitivement ces objectifs quelque peu mégalomaniaques. Les troupes américaines quitteront tôt ou tard l'Irak laissant un pays dévasté, divisé après un conflit très douloureux pour les populations civiles et ruineux pour le contribuable américain. Nouvellement élu, Barak Obama a rapidement opté pour une solution réaliste qui reconnait l'impasse stratégique dans laquelle s'était jeté Washington. Reste à trouver une posture stratégique alternative. Les États-Unis demeurent en effet la 1ère puissance mondiale qui recherche naturellement les moyens d'exercer son influence, notamment dans la grande région du Moyen-Orient, jusqu'aux confins de l'Asie centrale, décisive à ses yeux pour sa sécurité et ses besoins économiques, notamment énergétiques. Mais la recherche d'une politique alternative à la ligne Bush s'effectue dans une conjoncture difficile. Tout d'abord, la scène internationale est marquée par le poids croissant de grands pays émergents. La longue marche triomphante de la Chine cache en partie la place de l'Inde qui sera d'ici une quinzaine d'années le pays le plus peuplé de la planète, les succès diplomatiques du Brésil ou la reconstruction réussie de la Russie. Seconde difficulté rencontrée par les Etats-Unis, une conjoncture économique mondiale très déprimée. La crise ouverte par les faillites bancaires de 2008 a ouvert un cycle de difficultés qui est loin d'être achevé. La crise financière a entrainé une contraction de la croissance économique; les marges budgétaires réduites des états imposent des cures d'austérité qui invalident un retour à la croissance et peuvent déboucher, comme dans l'Europe du sud, sur de véritables crises sociales ; les tensions monétaires avivent les rivalités et dopent les prix des matières premières? Le modèle même de la globalisation, avec sa libre-circulation ouverte à l'infini des marchandises et des capitaux est partout remis en cause et peu d'économistes croient aujourd'hui avec confiance que les taux de croissance bien réel des pays émergents permettront de relayer des économies occidentales essoufflées, autorisant ainsi la relance de la demande mondiale. Enfin, la furia militaire et l'esprit de croisade de Georges W. a largement entamé le crédit des États-Unis auprès de nombreux peuples et leurs gouvernements. La déconfiture est telle que le petit allié israélien, pourtant l'un des principaux bénéficiaires de l'hégémonisme américain, se moque ostensiblement des appels à la prudence de Washington. Le dernier passage de Netanyahou devant le Congrès américain, applaudi trente-trois fois par celui-ci alors qu'il rejetait avec mépris toute concession à l'occupation des terres palestiniennes par les colons israéliens, montre à l'évidence l'impuissance de Barak Obama mais également les divisions profondes de la classe politique américaine. Républicains comme démocrates semblent incapables de fixer une ligne, louvoyant entre tentations d'un retour à l'expansionnisme armé et tentations du repli. De ce point de vue, l'affaire libyenne est symptomatique des hésitations actuelles. Pour la 3ème fois, les États-Unis se sont mis (avec réticence cette fois) à la tête d'une nouvelle coalition guerrière. Le motif invoqué, protéger une population des errements répressifs d'un dictateur, était justifié et adoubé par l'ONU à travers la résolution 1973. Mais la précipitation du projet militaire et l'absence de recherche de solutions politiques à terme peuvent entrainer cette nouvelle « croisade » franco-anglo-américaine vers une impasse : un ensablement du conflit qui incite aujourd'hui la coalition à durcir l'option militaire et/ou la liquidation de Kadhafi, chef d'un état encore souverain. Dans les deux cas, les choix faits dépasseraient très largement le mandat actuel de l'ONU. PS : toujours plus (de candidats) ! Martine Aubry, 1ère secrétaire du parti socialiste, vient donc elle aussi de se porter candidate à la présidence de la République française. Ou tout au moins dans un 1er temps, candidate à l'élection dite des « primaires » qui va permettre de faire le tri entre les très nombreux postulants. Après l'élimination dans des circonstances scabreuses de Dominique Strauss-Kahn, ils sont aujourd'hui cinq viser à la magistrature suprême. Et la liste n'est pas close. C'est beaucoup de candidats pour un parti qui s'ennuie dans l'opposition depuis plus de dix ans ! D'autant que le PS vient à l'unanimité d'adopter un programme unique de gouvernement? Le mode de désignation laisse également rêveur. Tous les citoyens français (y compris de droite) sont donc appelés à choisir qui va représenter le PS à la présidentielle. Il semble néanmoins que l'affrontement se réduise aujourd'hui à un duel entre Martine Aubry et François Hollande, avec pour l'instant un avantage notable pour le second. S'il y a pléthore de candidats au Parti socialiste, chez les écolos, ou chez les centristes, il n'y a qu'un seul candidat dans le principal parti de la majorité, l'UMP : c'est Nicolas Sarkozy. Malgré la discipline de ses militants et sa stature de président sortant, les sondages actuels montrent l'extrême difficulté rencontrée par Sarkozy à retrouver quelques petits points d'une popularité perdue depuis longtemps. |
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