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« De Dallas à 24 heures Chrono», le principe du feuilleton qui marche est
d'offrir un rebondissement dramatique toutes les 3 minutes. Le ministre
français de l'Intérieur Claude Guéant semble l'appliquer à la lettre dans le
feuilleton qui pourrait s'intituler «comment je m'oppose mieux que le Front
national aux étrangers» et aux «pas vraiment français».
Il s'agit, alors que la campagne des présidentielles a déjà commencée, d'offrir l'image d'un hyper activisme sur le terrain privilégié de l'extrême droite. La forte médiatisation d'un refus d'accorder la nationalité à un Algérien pour des motifs de «défaut d'assimilation" fait partie de cette mise en scène permanente. Selon l'enquête réglementaire sur laquelle s'appuie le ministre de l'Intérieur pour refuser la naturalisation, l'Algérien en question qui répond aux initiales D.BA a un «comportement familial et social fondé sur une conception inégalitaire des sexes». Sa femme qui porte le voile «ne prenait la parole qu'après accord de son mari» et a «déclaré qu'elle n'avait jamais travaillé parce que son mari ne le souhaitait pas, considérant que le rôle de sa femme était de s'occuper de ses enfants et de préparer le repas ». Bref, D.BA est peut-être un conservateur, un macho, voire un fondamentaliste ? mais il n'est assurément pas du tout malin pour un demandeur de naturalisation. La tendance est de choisir des cas caricaturaux pour faire un discours caricatural. Sur le fond, l'affaire est uniquement un prétexte à l'étalage médiatique d'une compétition musclée avec le Front national sur le thème de l'anti-étranger. Le nombre de rejet de naturalisation ? et les obstacles mis à l'acquisition de la nationalité française ne manquent pas ? sont monnaie courante et ne font pas l'objet d'une médiatisation. Communication politique Il y a donc une stratégie de communication politique qui fait feu de tout bois et où M.Claude Guéant en tenant un discours de stigmatisation des immigrés veut montrer qu'il fait mieux que le Front national. M.Guéant pourra trouver un encouragement dans cette voie dans la décision prise hier par la Cour de justice de la République de classer sans suite la plainte déposée contre lui par SOS Racisme pour discrimination raciale. SOS Racisme réagissait aux propos de Guéant tenus le 4 avril dernier à la veille du débat controversé de l'UMP sur la laïcité et l'Islam. M.Guéant affirmait que «l'accroissement du nombre des fidèles de cette religion (Islam) et un certain nombre de comportements posent problème". La commission des requêtes de la Cour de Justice de la République a classé sans suite la plainte déposée à la suite de propos tenus par le ministre de l'Intérieur sur l'islam et cette décision n'est pas susceptible d'appel. Binationalité et remise en cause du droit du sol Claude Guéant est donc désormais à l'abri de toute poursuite concernant ces déclarations. SOS Racisme s'est dit, par la voix de son avocat, atterré «par ce filtre que rien ne vient justifier et qui empêche la tenue d'un procès pour des propos qui auraient valu à toute autre personne la comparution devant un tribunal et probablement une condamnation". On peut s'attendre, dès lors que Marine Le Pen, l'a mis sur le marché à ce que M.Guéant et l'UMP de Sarkozy décident d'en rajouter sur le thème du rejet des binationaux. Le thème est en tout cas dans l'air comme en témoigne le récent scandale de l'affaire des «quotas» sur la base des origines et de la fédération française de football. La stigmatisation ne touche plus des «étrangers» mais des jeunes nés en France et qui ont la nationalité en vertu du droit du sol. Marine Le Pen avait évoqué comme argument le «risque» que représenteraient les binationaux en cas d'une intervention armée français en Algérie ! Au-delà de l'esprit revanchard, très présent dans certains courants politiques en France, l'extrême-droite est en train d'imposer sa thématique sur la scène politique. La thématique est en cours avec clairement une volonté de remettre en question le droit du sol. Claude Guéant, en application de la règle du rebondissement toutes les trois minutes pour le «bon feuilleton», sera nécessairement de la partie. |
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