
Habitée par
d'innombrable peuples, multiconfessionnelle, multiculturelle, sous la coupe de
plusieurs empires (Assyriens, Perses, Grecs, Romains, Byzantins,...), la
Palestine n'a vu son caractère arabo-musulman sortir du lot et s'imposer « que
» depuis le 12ème siècle après la victoire de Salah-Eddine à Hattin, en 1.187.
Aujourd'hui,
Israël, État pour certains et entité tumorale pour d'autres, mise sur « le
temps » dans l'espoir que dans 1000 ans son existence soit inscrite dans la
normalité des choses, que la Palestine ne soit plus qu'un mot dans les livres
d'histoire et que le caractère juif de ce pays finisse aussi par sortir du lot
et se substituer à l'arabo-islamité ambiante. Autrement dit, le scénario de
Salah-Eddine version Ben Gourion.
Les Palestiniens
misent également sur « le temps ». On n'est plus au Moyen-Âge. Il y a eu deux
guerres mondiales et d'autres conflits majeurs se profilent au loin avec la
nucléarisation de la Corée du Nord, la montée en puissance de la Chine et le
jeu des alliances qui s'est mis en place. Aussi, les chocs externes qui peuvent
provoquer des ruptures, une redistribution des cartes, voire même un retour à
l'âge de pierre sont probables. Il y a aussi les aléas de la vie, les coups du
sort (Dieu ou miracles pour certains). On a vu la réactivité d'Israël durant la
pandémie de la Covid-19, vue comme une menace pour son existence. Les
Palestiniens ont conscience de tout ça et attendent leur heure, mais dans
l'attente de ces bouleversements, il s'agit avant tout, pour eux de ne pas oublier
ou de laisser le monde les oublier. Comment ? Résister, protester, se faire
entendre, revendiquer, faire du bruit, marquer sa présence,... etc.
«Normaliser» est donc l'objectif des Israéliens, «Ne pas oublier» celui des
Palestiniens, mais pour ces derniers, l'entretien de cet objectif coûte cher,
très cher : les bombardements subis n'en sont que la partie émergée. Les
conditions sanitaires ou autres font beaucoup plus de victimes. C'est donc un
combat entre « la normalisation » et « le souvenir » sur le terrain neutre de
l'usure avec « le temps » comme arbitre. Qui en sortira vainqueur ? Pour
combien de temps le restera-t-il ? Quel autre outsider devenu grand
revendiquera demain cette terre maudite (ou sainte, c'est selon) sous un
quelconque prétexte ? À l'échelle de nos vies, on ne connaîtra probablement
jamais les réponses à toutes ces questions. Dans la région, c'est en « siècles
» qu'on parle.