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Moments forts lundi à Tunis, sur le pied de guerre depuis un mois, lors
de la poursuite des manifestations réclamant le départ du gouvernement de transition
piloté par Mohamed Ghannouchi. C'est presque en fin d'après-midi d'une longue
journée émaillée d'incidents avec la police, que l'un des hommes les plus
populaires de la «révolution du Jasmin», le chef d'état-major de l'Armée de
Terre tunisien, le général Rachid Ammar, intervient devant le palais de la
Kasbah, abritant la Primature. Devant plus de 5.000 manifestants, dont des
jeunes venus des régions de l'intérieur du pays, il a harangué la foule en
mettant en garde contre «la vacance du pouvoir qui engendre la dictature».
«Notre révolution, votre révolution, la révolution des jeunes, elle risque
d'être perdue, d'autres risquent de la récupérer. Il y a des forces qui
appellent au vide, à la vacance du pouvoir. Le vide engendre la terreur, qui
engendre la dictature», a lancé le général Ammar. Il a ajouté, devant une foule
en colère contre le maintien au sein du gouvernement de ministres de l'ancien
système, que l'armée se portait «garante de la révolution». «L'armée nationale
se porte garante de la Révolution. L'armée a protégé et protège le peuple et le
pays», a-t-il déclaré lors de cette intervention
improvisée. L'armée tunisienne est sortie grandie lors de ce coup de force contre le régime déchu de Ben Ali, en refusant de tirer sur les manifestants. En outre, il a confirmé que l'armée tunisienne reste neutre dans le bras de fer entre l'opposition, qui a les faveurs du peuple, et des caciques de l'ancien régime qui veulent survivre à l'ère Ben Ali. Le général Rachid Ammar a ainsi confirmé que l'armée tunisienne est «légaliste» et «ne sortira pas du cadre de la Constitution». Devant des manifestants en délire, il a assuré que «nous sommes fidèles à la Constitution du pays. Nous protégeons la Constitution. Nous ne sortirons pas de ce cadre». Décodé, le discours improvisé du Chef d'Etat-major tunisien est un message clair adressé au gouvernement de transition pour qu'il redescende dans la rue et négocie avec les leaders de l'opposition une issue à la situation actuelle. La Kasbah, Bastille de Tunis Lundi était en fait une journée test pour les manifestants venus de toutes parts assiéger la Primature, mais également le gouvernement qui table sur son essoufflement, alors que les manifestants réclament la démission du gouvernement de transition formé avec d'anciens ministres de Ben Ali. De quelques centaines à l'aube, ils sont devenus à nouveau des milliers, entre 3.000 et 5.000 selon un militaire, en début d'après-midi à protester sur l'esplanade de la Kasbah, près du palais où travaille le Premier ministre Mohammed Ghannouchi. «La Kasbah, c'est la Bastille de la Tunisie et on va la démonter, comme les sans-culottes français ont fait tomber la Bastille en 1789», selon un manifestant. Le nombre de manifestants grossissait avec l'arrivée des lycéens et étudiants qui ont répondu à l'appel des syndicats d'enseignants, pour entamer à partir de lundi une grève illimitée. L'avenue Habib Bourguiba était noire de monde dans l'après-midi, et des cortèges monstres y défilaient, réclamant le départ de Ghannouchi et son gouvernement de transition. Des heurts ont été enregistrés, par ailleurs, dans la matinée entre manifestants et policiers près du palais de la Kasbah. Des manifestants ont jeté des pierres et des bouteilles sur des policiers antiémeutes qui ont riposté par des tirs de gaz lacrymogènes. Ces incidents se sont produits alors que des policiers antiémeutes tentaient d'exfiltrer des fonctionnaires du siège du gouvernement du Premier ministre Mohammed Ghannouchi. L'incident a été bref mais la tension restait vive sur la grande esplanade qui jouxte les bureaux du Premier ministre où des militaires parlementaient avec les manifestants pour tenter de les calmer. La tension restait vive aux abords de la Kasbah où campent des milliers de manifestants, attendant l'arrivée de la «flamme de la liberté» pour évincer du pouvoir tous les proches du président déchu et mettre en place un gouvernement «révolutionnaire». Par ailleurs, la grève illimitée des instituteurs tunisiens était «bien suivie» dans la plupart des régions de la Tunisie, selon Nabil Haouachi, membre du syndicat national de l'enseignement primaire, alors que les cours devaient reprendre après deux semaines de manifestations violentes à l'issue desquelles est tombé le régime de Ben Ali. Le gouvernement de transition avait décrété la reprise des cours pour lundi dans l'enseignement primaire et pour les élèves de terminales, dans le secondaire. Enfin, près de 80 personnes, des proches d'islamistes, emprisonnés, ont manifesté lundi devant le ministère de la Justice à Tunis, demandant la libération des membres de leurs familles détenus, dans le cadre de l'amnistie générale promise par le gouvernement de transition. «C'est le gouvernement qui est terroriste, il faut abroger les lois antiterroristes injustes, scandaient les manifestants, à quelques centaines de mètres des bureaux du Premier ministre. |
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