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Le Dr Fekhar
est décédé tout seul dans le pavillon carcéral de l'hôpital de Blida, loin de
son épouse, de ses enfants, de tous ceux qui l'aiment, ses amis et ses
camarades de combat, de son codétenu Hadj Brahimi Aouf, loin de sa ville natale Ghardaïa, bijou touristique
de l'Algérie et berceau de la tolérance, et où, de par sa fonction de médecin,
il a allégé les souffrances de ses concitoyens et particulièrement parmi les
plus humbles.
Il est décédé dans un hôpital psychiatrique (acte pour lequel l'administration pénitentiaire et le corps médical de la prison doivent s'expliquer devant le peuple) baptisé du nom du martyr de la révolution algérienne Frantz Fanon, psychiatre de profession, qui a quitté sa Martinique natale pour rejoindre la révolution algérienne. Tout comme Fekhar il rêvait d'une Algérie démocratique, plurielle et tolérante. Quelques jours avant sa mort il déclarait à son avocat «qu'il était prêt à mourir pour ses idées». Malgré l'acharnement politico-judiciaire dont il a été victime (rappelant que 18 chefs d'inculpation ont été retenus contre lui), il ne reniera à aucun moment ses convictions, il ne pliera jamais, malgré toutes les méthodes et tous les moyens aussi vils qu'inhumains utilisés par les tenants du pouvoir. Jusqu'à son dernier soupir ces derniers resteront «droit dans leur bottes», en ne lui apportant aucun secours. Cela s'appelle juridiquement non-assistance à personne en danger. Tout médecin, même les profanes, savent que l'on ne peut réanimer une personne au seuil de la mort. Cela aurait pu être possible quelques jours avant, quand sa famille et son avocat avaient donné l'alerte sur son état de santé. L'acharnement du pouvoir contre lui était tel qu'un ex-Premier ministre n'a pas hésité à la télévision de porter atteinte à sa dignité et à son honneur d'algérien, militant de la cause de la démocratie, en l'accusant d'atteinte à la sûreté de l'Etat et à l'unité nationale. Son combat pour une Algérie démocratique, plurielle, où chaque citoyen vit dans une totale liberté d'expression, de pensée et de conscience est porté aujourd'hui par des millions d'Algériennes et d'Algériens chaque vendredi, marchand dans toutes les villes et tous les villages d'Algérie. Fekhar a rejoint Mohammed Tamalt, lui aussi mort en prison suite à une grève de la faim pour protester contre son incarcération pour «délit d'opinion». D'autres prisonniers politiques ou d'opinion pourraient connaître le même sort si n'est pas instaurée une démocratie véritable et non démagogique ou de façade, et un Etat de droit, seuls garants d'une citoyenneté pleine et entière. Docteur Fekhar, tout en s'excusant de ne pas avoir réagi de votre vivant, je suis convaincue qu'aujourd'hui vous reposez auprès des martyrs de la révolution de Novembre, mais aussi auprès des martyrs de la démocratie, tous ceux assassinés par les terroristes islamistes, les 127 jeunes de Kabylie tués par le pouvoir et tant d'autres inconnus. En début du hirak, on a pu lire à Oran lors d'une marche, une banderole «Reposez en paix, la relève est arrivée». La naissance de la deuxième république algérienne libre et démocratique, où règne la justice sociale est inéluctable grâce à «la Révolution du Sourire » menée par le peuple, digne héritier de ses aînés de la révolution de Novembre. Une Algérie que Fekhar et les autres n'auront pas, par le fait d'un pouvoir autoritaire, la chance d'y vivre, mais auront eu le bonheur d'avoir participé à sa naissance par le don de leur vie. |
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