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En
réalité, c'est surtout la détérioration de la situation financière américaine
qui provoque l'écroulement du fragile édifice construit depuis 1971. Les
États-Unis, ne parvenant pas à rééquilibrer leur balance extérieure, une
nouvelle vague de spéculation est déclenchée. Les achats de deutschemarks se
multiplient, les autres monnaies sont protégées soit par leur faiblesse (livre,
lire) soit par des contrôles rigoureux d'entrées de capitaux (franc, yen). La
RFA prend à son tour des mesures de protection et les capitaux spéculatifs se
rapportent sur l'or dont les cours montent rapidement.
Comme en 1971, les États-Unis tentent d'obtenir la réévaluation des autres monnaies, menaçant notamment le Japon de mesures de rétorsion douanières. Devant le refus de leurs partenaires, sans aucune consultation, ils dévaluent le dollar de 10% dans la nuit du 12 au 13 février 1973. L'unité monétaire américaine, qui reste inconvertible en or, est définie désormais par 42,22 $ l'once d'or fin. Ne pouvant plus défendre les nouvelles parités fixées unilatéralement par les États-Unis d'Amérique, la plupart des pays décide de laisser flotter leurs monnaies. Conséquence : le système mis en place à Washington en décembre 1971 s'écroule. Le 12 mars 1973, à la Conférence de Bruxelles, les neuf gouvernements de la CEE se mettent d'accord pour ne plus soutenir le cours du dollar, mais de maintenir les fluctuations de plus ou moins 2,25% entre les monnaies européennes. «Le Serpent européen sort du tunnel» Il flotte librement par rapport au dollar. Cet accord européen, mettant fin à l'existence du tunnel, pousse le dollar à flotter sur les marchés. Le change fixe des monnaies occidentales fait place au change flottant. Le 3 avril 1973, les pays d'Europe mettent en place un Fonds européen de Coopération Monétaire (FECOM), chargé de gérer le financement à très court terme des crédits nécessaires pour soutenir les monnaies à l'intérieur du Serpent dans les limites de leurs quotes-parts. Ce Fonds préfigure la future Banque centrale européenne. 3. Le privilège exorbitant du dollar, monnaie de facturation du pétrole, partagé entre les États-Unis, l'Europe et le Japon La crise énergétique qui commença à l'automne 1973 a entraîné un bouleversement des structures industrielles des pays occidentaux et du Japon, fondées jusque-là sur une énergie à bon marché. Sa brutalité, sa soudaineté, et ses conséquences qui jouent encore aujourd'hui en 2016, lui confèrent un caractère d'événement majeur dans l'histoire économique contemporaine. Cette crise énergétique a amené le monde arabe à entrer en force dans les affaires monétaires via le libellé monétaire du pétrole arabe en dollar. Et ce qui est le plus surprenant, c'est que cette intrusion du monde arabe dans les affaires monétaires internationales aura un effet salvateur dans les crises monétaires qui divisent les puissances occidentales. Evidemment cette intrusion arabe n'est pas venue ex nihilo, mais relève de forces historiques en lien avec l'évolution du commerce mondial et l'avènement de plus de cent nations indépendantes, depuis la décolonisation qui a commencé à la fin de la Deuxième Guerre mondiale et s'est pratiquement terminée en concomitance avec la fin des «Trente Glorieuses». Ce sont les pays arabes en accord avec les États-Unis qui vont imprimer un tournant aux crises monétaires, qui ne cessaient de déstabiliser l'économie occidentale. A l'époque, le secrétaire d'État Henry Kissinger qui faisait la navette entre les États-Unis et les pétromonarchies du Golfe aurait déclaré : «Si vous contrôlez le pétrole, vous contrôlez toutes les nations». Et, c'est ce qui s'est passé et se passe encore aujourd'hui, les Américains, en s'alliant avec les Arabes des pays du Golfe, plus précisément avec l'Arabie Saoudite, ont réussi ce tour de force, «substituer le dollar-or par une monnaie de facturation du pétrole en dollar, communément appelé «pétrodollar». Le pétrole arabe, et par extension, le pétrole du cartel pétrolier, l'OPEP, va jouer un rôle central dans les relations monétaires internationales. Précisément, alors qu'ils cherchaient à se libérer des dollars issus des déficits commerciaux américains (monétisation), en décidant en mars 1973 (Conférence de Bruxelles) de ne plus soutenir le cours du dollar, les pays européens se retrouvaient paradoxalement forcés, suite au premier krach pétrolier (quadruplement du prix de pétrole), à soutenir son cours par des achats massifs de dollars sur les marchés monétaires pour régler leurs importations de pétrole. Les pays arabes et ceux de l'OPEP ont forcément, via leurs exportations pétrolières, accumulé des montants considérables en dollars. Cependant, ce mécanisme monétaire qui, par la facturation du pétrole en dollar, et donc en obligeant les pays d'Europe à acheter des dollars, permet de répercuter les déficits américains sur le reste du monde, ne va pas amener la seule Amérique à en tirer bénéfice. En effet, monétisant leurs déficits, émettant massivement des dollars dans le monde, les États-Unis créent une grande quantité de dollars sur les marchés financiers. Certes, une grande partie des dollars est absorbée par les pays consommateurs de pétrole, dont les pays d'Europe, puisque ces derniers règlent leurs importations de pétrole en dollars. Mais, commerce oblige, les masses de liquidités en dollars que les pays arabes enregistrent dans la vente de leurs pétroles vont, à leur tour, financer les biens et services importés d'Europe, du Japon et des États-Unis. Si les pays arabes importent des biens et services des États-Unis, le problème monétaire ne se pose pas puisque ces pays règlent leurs importations en dollars. De même quand ils investissent leurs excédents pétroliers en bons de Trésor américains. Il n'y a donc pas l'utilité de convertir leurs dollars en une autre monnaie pour régler ou placer des excédents aux États-Unis. En revanche, la situation est autre quand les pays arabes importent des biens et services d'Europe et du Japon. Ces pays se trouvent obligés de convertir les dollars en franc, en livre sterling, en deutschemark, en yen, etc., sur les marchés pour régler leurs importations aux pays d'Europe et du Japon. Le problème qui se pose pour l'Amérique est que ces dollars qui retournent sur les marchés font forcément déprécier la monnaie américaine. D'autant plus si les déficits américains sont importants, et que les placements arabes en bons de Trésor n'arrivent pas à pondérer (à diminuer) les émissions monétaires américaines. Dès lors, les pays européens et le Japon vont se retrouver doublement pénalisés. D'abord par l'achat du pétrole auprès des pays arabes qui se fait en échange de richesses réelles par les pays d'Europe et du Japon, alors que les États-Unis règlent leurs importations de pétrole que par des dollars qui ne leur coûte que le prix de l'impression (planche à billet). Le deuxième facteur, tout aussi important, est le fait que le retour des dollars sur les marchés via les conversions monétaires opérées par les Arabes pour régler leurs importations de biens et services d'Europe et du Japon font déprécier le dollar, et donc apprécier les monnaies de ces derniers. Ce qui nuit à leur commerce extérieur. Leurs monnaies (franc, livre sterling, deutschemark, yen?) seront plus chères par rapport au dollar qui ne cesse de se déprécier, eu égard à la dégradation de la balance extérieure américaine, et des déficits accumulés avec le reste du monde, année après année. Quelle sera alors la réaction de l'Europe et du Japon pour défendre leur compétitivité dans les échanges internationaux ? Sans alternative, ces pays vont opter pour la création monétaire, i.e. émettre des liquidités ex nihilo (planche à billet)», sans contreparties de richesses réelles, dans le but évident de dégonfler leurs monnaies appréciées, et regagner leur compétitivité. Cette réaction de défense qui leur permet, par simple création monétaire, de régler leurs importations pétrolières en leurs monnaies, préalablement convertis en dollars, de bénéficier aussi de ce pouvoir de créer de l'argent à partir de rien, pour simplement abaisser le taux de change de leurs monnaies. Par conséquent force est de dire que les pays d'Europe et le Japon bénéficient, à l'instar des États-Unis, ce que tout le monde appelle le «privilège exorbitant du dollar». Ce privilège est donc partagé entre les États-Unis, les puissances monétaires européennes et le Japon. Ce pouvoir exorbitant du dollar qui associe ces puissances monétaires s'assimile incontestablement au droit de seigneuriage qu'avaient les rois, au Moyen-âge, de battre la monnaie dans leurs royaumes. De par ce pouvoir d'émettre de la monnaie internationale ex nihilo, i.e. à partir de rien, on comprend dès lors pourquoi la dette publique de la France, ainsi que celle des pays européens et des États-Unis ont été très peu influencées par le krach pétrolier de 1973. Ils n'ont pas enregistré de déficits publics, pourtant le prix du baril de pétrole a plus que quadruplé, après 1973. La dette publique de la France qui s'établissait en 1970, à 15%, hormis une brève remontée en 1974, suite au premier krach pétrolier de 1973, est vite revenue à 15% du PIB. Ce n'est qu'en 1980 qu'elle croît de nouveau et passe à 20% du PIB. (5) De même pour les dettes publiques des autres pays européens. Alors que les pays en développement qui n'ont pas de monnaies internationales et sont des importateurs nets de pétrole ont connu de graves déficits extérieurs. Et donc une hausse de leurs dettes extérieures. La dette publique des États-Unis reste très stable et évolue globalement autour de 35%, durant la décennie 1970. Seul le Japon a vu sa dette publique passer de 10% en 1970 à 50% du PIB en 1980. (5) Cela est dû probablement aux fortes politiques keynésiennes menées par le gouvernement japonais pour maintenir le plein emploi (grands travaux publics : universités, autoroutes, voies ferroviaires, centrales électriques?). Cependant la situation économique mondiale sera de nouveau bouleversée par un deuxième krach pétrolier. Le prix du baril triple, passant de 12 à 36 dollars, dans la première moitié de la décennie 1980. Conjuguée à la forte appréciation du dollar, il aura un impact négatif considérable sur les pays européens et le Japon. Mais ce sont les pays du Sud qui seront les plus touchés. Les dettes qu'ils ont contractées à taux d'intérêt variable, auprès des banques américaines, européennes et japonaises, vont exploser sous le double impact de la hausse drastique des taux d'intérêt et de change du dollar américain. 4. Le pouvoir exorbitant des monnaies européennes et japonaises tenu en échec par le dollar Ce «privilège exorbitant» qui a permis d'augmenter les cours du pétrole et des matières premières a été paradoxalement favorable à la fois à l'Occident et au reste du monde, en particulier les pays exportateurs de pétrole. Et dans une moindre mesure les pays exportateurs de matières premières. Faut-il souligner que c'est par ce transfert de pouvoir d'achat au reste du monde (hausse des prix du pétrole) que les échanges de richesses dans le monde se sont poursuivis, voire même accrus, évitant aux puissances industrielles une grave crise économique rappelant la Grande dépression des années 1930, qui a vu une forte montée du chômage en Europe et aux États-Unis, une constitution de zones monétaires, un protectionnisme outrance, et à la fin la guerre. Cette création monétaire dans les années 1970 s'est accompagnée cependant d'une forte inflation, portée à des sommets dans les pays développés. En France, le taux d'inflation a atteint une moyenne de 13,7%, en 1974. Aux États-Unis, 13% en 1974 et 15% en 1980. Mais c'est le Japon (grand importateur de pétrole) qui a enregistré le plus fort taux d'inflation, 25% entre 1974 et 1976. (6) Pour parer à la spirale inflationniste qui s'est enclenchée par la création monétaire des deux côtés de l'Atlantique et du Japon, et la hausse des prix de pétrole et des matières premières, la Banque centrale américaine (Fed) a procédé à une hausse drastique du taux d'intérêt directeur, en 1979. Le taux passe de 10% à 15,5%. Après une baisse qui ne durera pas, il remonte directement (sans palier) à 20% en 1980. La Fed ne commencera à baisser le taux d'intérêt qu'avec la récession qui a surgi aux États-Unis, en 1982. (7) La forte hausse du dollar sur les marchés, nuisant à la compétitivité de l'industrie américaine, a provoqué une forte montée du chômage. Le taux de chômage aux États-Unis, qui était de 5,8% en 1979, passe à 7% en 1981, et à un sommet jamais atteint depuis 1950, à 10,5% en 1982. (8) Cette hausse du taux d'intérêt américain se traduit, à partir de 1980, par la hausse des dettes publiques européennes. La dette publique de la France passe de 20% à 35%, en 1988. Les dettes publiques des autres pays d'Europe qui ont aussi augmenté ont suivi le sillage de la lutte contre l'inflation menée par les États-Unis. La dette publique des États-Unis qui a aussi augmenté passe de 35% à 50% en 1988. La dette publique du Japon passe de 55% en 1981 à 70% en 1988. (5) Le constat que l'on peut faire de la décennie 1980 est que les dettes publiques occidentales ont toutes augmenté, contrairement à la décennie 1970 qui les a vues globalement stables. Tous les grands pays d'Europe et le Japon ont vu leur PIB baisser entre 1980 et 1985. Et paradoxalement ils ont suivi la même évolution baissière. Ce paradoxe se retrouve aussi dans la forte baisse de leurs monnaies face au dollar, et toujours durant la première moitié de la décennie 1980. Une évolution des taux de change pour ainsi dire identique, sauf pour la monnaie japonaise qui ne suit pas du fait de son ancrage au dollar, et de son commerce particulièrement soutenu avec les États-Unis, son premier client. Les valeurs ci-après des taux de change avec le dollar montrent bien la forte dépréciation des monnaies européennes et leur évolution similaire. Le taux de change dollar/franc français (moyenne mensuelle) est passé de 4,037885 fr, en janvier 1980, à 7,219194 fr, en novembre 1982, à 8,382697 fr, en décembre 1983. Le franc continue de se déprécier et atteint 10,11169 fr pour un dollar, en mars 1985. La valeur du franc a été divisée par deux fois et demie passant de 0,25 dollar à 0,1 dollar, de 1980 à 1985. Ce n'est qu'en 1985 que la monnaie française commence à s'apprécier et revenir progressivement à ses taux de change des années 1970. Le taux de change dollar/franc passe de 7,691097 fr, en décembre 1985, à 5,536810 fr en décembre 1987. Même évolution pour le deutschemark, la livre sterling... Le deutschemark se déprécie fortement, le taux de change dollar/deutschemark (moyenne mensuelle) passe de 1,723970 DM, en janvier 1980, à 3,308957 DM, en mars 1985. A partir de cette date, la monnaie allemande commence à s'apprécier pour atteindre 1,633617 DM, en décembre 1987. Idem pour la livre sterling anglaise qui baisse fortement pour la même période. Le taux de change dollar/£ passe de 0,436602 GBP, en février 1980, à 0,911996 GBP, en février 1985. A partir de cette date, la livre remonte et atteint 0,599945 GBP, en mai 1987. Seule la monnaie japonaise échappe à cette formidable dépréciation face au dollar. Le taux de change dollar/yen fluctue très peu, il n'a pas de baisse continue. Il évolue en dents de scie entre 220 JPY et 260 JPY, dans les années 1980-1985. Ce n'est qu'après les accords du Plaza, signé le 22 septembre 1985 entre le G5 (États-Unis, Japon, Allemagne de l'Ouest, Royaume-Uni, France) que le yen commence à s'apprécier. Le taux de change dollar/yen passe de 236,739103 JPY en septembre 1985 à 202,688562 JPY en décembre 1985, et à son plus haut à 123,174428 JPY en novembre 1988. (9) Comment comprendre cette évolution presque similaire des puissances européennes et du Japon à la fois sur leurs PIB respectifs, leurs dettes publiques et leurs taux de change ? Excepté le change pour le Japon. Alors que la croissance des États-Unis, hormis la récession 1982-1983, a explosé. Le taux de croissance a atteint un sommet depuis la fin des années 1950, il est à 8%, en 1984. Alors que les taux de croissance des pays d'Europe ont évolué globalement entre -1% et 2%, l'Allemagne et le Japon, entre -2% et 3%, durant la décennie 1980. Ceux du Japon sont trop faibles, évoluant entre 0% et moins de 2%. (10) Est-ce que le «privilège exorbitant de la monnaie de facturation par le dollar » dont bénéficient les États-Unis ne fonctionne plus pour les pays d'Europe et le Japon ? Comment expliquer la hausse de la dette publique des pays d'Europe ? Et qui dit dette publique dit hausse des déficits commerciaux et courants des pays d'Europe. Comment expliquer le faible taux de croissance et la dépréciation de leurs monnaies dans leur ensemble (franc, deutschemark, livre sterling...) ? Une dépréciation de 90% pour le deutschemark et 149% pour le franc français, entre décembre 1979 mars 1985. La réponse de la hausse de leurs dettes publiques et de la forte dépréciation de leurs monnaies se trouve dans la hausse soudaine du taux d'intérêt américain à des niveaux sans précédents. En augmentant le taux d'intérêt, la Banque centrale américaine a procédé à un reflux des dollars dans le monde vers les États-Unis. En effet, la forte hausse du taux d'intérêt de la Fed a amené tous les investisseurs du monde à placer leurs dollars sur les places financières américaines. Ce faisant, le taux de change dollar par rapport aux autres grandes monnaies du monde s'est fortement apprécié. C'est ainsi que les pays d'Europe furent privés de la dépréciation du dollar américain des années 1970, et celle-ci, il faut le rappeler, leur avait permis de procéder à des émissions monétaires ex nihilo, sans contreparties physiques, à la fois pour dégonfler leurs monnaies qui s'étaient appréciées et monétiser en même temps leurs déficits extérieurs. Ce qui avait permis de financer la hausse du prix du pétrole qui avait quadruplé, après 1973, par la création monétaire. Sauf que cela a créé une forte inflation. La situation des années 1973 n'a plus joué dans les années 1980. En effet, la dépréciation du dollar US des années 1973 n'existant plus ? par la désinflation, le dollar s'est fortement apprécié sur les marchés monétaires ? et le triplement du prix du pétrole, suite au deuxième krach pétrolier, ont fait que les pays d'Europe et le Japon étaient dans une impasse. Utiliser la «planche à billet» ne pouvait que déprécier encore plus leurs monnaies, déjà dépréciées par la fuite de ses capitaux vers les États-Unis, attirés par les hauts taux d'intérêt, et par l'épongement des capitaux du monde entier vers les États-Unis. On comprend dès lors que toute création monétaire pour les pays d'Europe ne pouvait qu'accentuer la dépréciation de ses monnaies. C'est ce qui s'est opéré entre 1980 et 1985. Confrontés au deuxième krach pétrolier, ces pays ne pouvaient restreindre la création monétaire. Ce qui explique aussi pourquoi les taux d'inflation ont bondi en Europe et au Japon, alors que le taux d'inflation aux États-Unis a fortement baissé, passant de 15% en 1980 à 3%, en 1983, et moins de 2%, en 1984. En France, le taux d'inflation était de 9,6% en 1983, et 7,4% en 1984. Le taux d'inflation de l'Allemagne est passé de 3% en 1980 à 7% en 1983, et à 5% en 1984. (6) Cette situation de dépréciation monétaire généralisée et le triplement du prix du pétrole lors du deuxième krach pétrolier de 1979 ont provoqué une série de déficits commerciaux pour tous les pays d'Europe qui, accumulés, ont augmenté leurs dettes publiques. Cependant, bien que les dettes publiques européennes aient augmenté dans les années 1980, le Japon faisant cependant exception puisque sa dette publique a continué à croître (environ 70% du PIB), on note qu'elles sont restées faibles, évoluant entre 20% et 50%. Alors que normalement, elles auraient dû croître plus qu'elles ne l'avaient été, ceci en regard de la forte hausse des produits énergétiques. 5. Le retour du balancier de l'histoire. Endettement et restructuration de l'architecture mondiale D'emblée, faut-il dire que si les pays occidentaux avaient continué la création monétaire dans les années 1980, ils auraient créé une situation inflationniste telle qu'elle aurait mis en danger le système monétaire international. Il aurait fallu d'autres chocs pétroliers pour absorber les liquidités émises par les États-Unis, et qu'auraient dupliqué de leur côté les pays d'Europe et le Japon pour contrer l'invasion de dollars (issus de la monétisation des déficits américains) sur le monde. Cette invasion des dollars est, à bien d'égard, comparable aux hausses des prix du pétrole entre 2005 et 2014. La crise financière a vu le prix du pétrole atteindre, à l'été 2008, 147 dollars le baril. Malgré ces contreparties auxquelles le dollar était adossé, celui-ci s'est fortement déprécié, atteignant 1,60 dollar pour un euro. Précisément, pour éviter que le cours de pétrole explose et passe, par exemple, à 200 dollars, ce qui apparaîtrait anormal pour le monde, et que le taux de change du dollar par rapport aux monnaies européennes plonge encore, il a fallu les pondérer avec la hausse du prix de l'once d'or qui est passé entre 2007 (crise immobilière) et 2008 (crise financière), de 600 dollars à 1000 dollars. Le pétrole et l'or ont joué de contreparties physiques pour les injections monétaires massives ex nihilo, opérées par la Fed dans le cadre du programme d'assouplissement monétaire ou Quantitative easing 1 (QE1) pour sauver le système bancaire américain. Ces hausses de prix du pétrole et de l'or jouant de contreparties physiques, dans le cadre du QE1, pour les émissions ex nihilo en dollars, n'ont pas suffi au plus haut sommet de la crise de 2008, et se sont étendues aux matières premières y compris agricoles, engendrant, en 2008, une crise alimentaire dans le monde. A suivre... *Auteur et chercheur spécialisé en économie mondiale, relations internationales et prospective. |
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