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Affiches racistes de Le Pen: Les protestations de l'Algérie «légitimes», selon le Quai d'Orsay

par Amine L.

Pendant qu'Alger gronde, la justice française a autorisé le parti fasciste de Le Pen à accrocher les affiches de la honte. Alger a vivement protesté auprès de la France au sujet de la choquante affiche du parti de Jean-Marie Le Pen, diffusée en plein campagne pour les élections régionales.

 Mourad Medelci, ministre des Affaires étrangères, a indiqué, lundi, que l'Algérie avait protesté officiellement auprès de la France contre cette affiche électorale. «Nous avons protesté officiellement et c'est à l'Etat français de prendre les dispositions qui s'imposent lorsque des symboles de pays étrangers sont mis à genoux», a déclaré M. Medelci, en marge d'une cérémonie présidée par le président Bouteflika, à l'occasion de la Journée internationale de la femme.

 «Je n'ai pas besoin de dire aujourd'hui que des comportements de ce type sont condamnables, qu'il s'agisse de la France ou d'autres pays. Nous devons respecter les symboles des uns et des autres. C'est la position de notre pays et nous ferons en sorte qu'elle soit respectée chez nous», a fortement dénoncé M. Medelci.

 L'affiche représente une femme intégralement voilée à côté d'une carte de France recouverte du drapeau algérien sur laquelle se dressent des minarets en forme de missiles, avec en titre «non à l'islamisme». Le poster, diffusé par le mouvement jeunesse du Front National (FN), a été placardé notamment en région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

 Face à cette provocation raciste, la justice française s'est montrée extrêmement passive. Le tribunal de Marseille a autorisé, lundi 8 mars, le Front national à continuer d'utiliser cette honteuse affiche. Des associations antiracistes, dont la Ligue contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), qui avaient porté plainte pour demander le retrait de cette affiche, ont été contre toute attente tout simplement déboutées. Une injustice venait d'être commise au moment où les symboles d'un pays et d'une religion ont été salis et agressés. La justice française laisse ainsi faire. Jean-Marie Le Pen avait comparu vendredi devant le tribunal sur assignation d'une association de lutte contre le racisme réclamant le retrait de cette honteuse affiche électorale qu'elle juge «anti-musulmans».

 De son côté, le porte parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valéro, a déploré «avec force l'usage indigne et dégradant d'un drapeau national à des fins électoralistes». «L'Algérie a exprimé des protestations légitimes contre une affiche du Front National aux élections régionales en France, utilisant le drapeau algérien de manière ?extrêmement choquante'», a souligné hier le ministère français des Affaires étrangères.

 «Les autorités algériennes ont fait part hier de leurs protestations légitimes quant à l'usage extrêmement choquant qui est fait du drapeau algérien», a ajouté M. Valéro. «Il ne nous appartient évidemment pas de commenter une décision de justice», a-t-il dit. Deux autres organisations, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP) et SOS Racisme, ont également introduit des actions judiciaires contre cette campagne fasciste d'affichage. Cette affiche constitue «un trouble manifestement illicite à l'ordre public», parce qu'elle «stigmatise une communauté» à laquelle on fait courir «un risque», a estimé l'avocat de la Licra, Me Michel Pezet. «C'est une provocation», a-t-il poursuivi, dénonçant des «caricatures qui disent que les gens ne pourront pas vivre ensemble».

 Aussi, cette affiche fait déjà l'objet d'une plainte depuis Genève, non pour racisme, mais pour violation de la propriété intellectuelle, de la part du concepteur suisse de l'affiche pour le oui au récent référendum anti-minarets, s'estimant plagié.

 Par ailleurs, au sujet de la visite en Algérie du secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, M. Medelci a précisé que «toutes les questions importantes ont été traitées» lors des entretiens à Alger. «Nous attendons, après cette rencontre, des positions précises et concrètes de la part de la France», a-t-il souligné.