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A l'heure de
boucler cette chronique, le sort de l'équipe nationale de football n'est pas
encore scellé. Ces lignes sont en effet rédigées à la veille d'un match de
barrage à Khartoum dont on espère qu'il ouvrira enfin les portes du mondial à
l'EN. Vingt trois ans d'absence, c'est long, trop long, même s'il y a d'autres
attentes et désirs bien plus importants et urgents. On pense notamment à la
paix civile, à la démocratie, réelle, et au développement. Mais là n'est pas
vraiment le propos de cette réflexion.
Gardons à l'esprit le match qui a eu lieu au Caire pour nous intéresser, non pas à ce qui s'est passé pendant la rencontre mais avant et, certainement après. Et c'est d'influence et de lobbying dont il s'agit, deux armes non létales mais ô combien efficaces avec lesquelles nombre de pays, et pas seulement les plus puissants, manient à la perfection pour défendre leurs intérêts. Revenons d'abord au caillassage du bus de l'équipe d'Algérie sur une route du Caire. Nombre d'observateurs ont noté à ce sujet l'étonnante léthargie de la Fédération internationale de football (Fifa) qui s'est contentée d'exiger de la part des autorités égyptiennes des garanties écrites à propos des conditions de sécurité entourant le match. A ce sujet, il est possible que cette institution ait décidé, par prudence, d'attendre la fin des éliminatoires ? et donc la fin de la rencontre de Khartoum ? pour annoncer des sanctions à l'encontre de la fédération égyptienne. En réalité, il y aurait pu avoir mort d'homme et dans un monde parfait de tels agissements auraient valu à l'Egypte plusieurs matchs de suspension et cela sans même évoquer - non ne riez pas - la perte de la rencontre sur tapis vert. La question qui se pose en premier lieu est donc de savoir si la délégation algérienne a officiellement déposé des réserves ou même si elle a entrepris une action officieuse auprès de la Fifa. Les liens dits fraternels avec l'Egypte, les relations diplomatiques complexes entre nos deux pays et, c'est moins connu mais cela mérite d'être signalé et creusé, les relations d'affaires entre donneurs d'ordre algériens et entreprises égyptiennes ne peuvent constituer des excuses qui inciteraient le staff des Verts à ne pas marquer le coup, fusse de manière symbolique. Car, bien entendu, nous savons que la probabilité de lourdes sanctions à l'encontre de l'Egypte est très faible même si une (bonne) surprise n'est jamais à exclure. Cela fait des années, pour ne pas dire des décennies, que ce pays donne le « la » en matière de football africain. Jamais ou presque, une décision de la Fifa ou de la Confédération africaine de football (Caf) n'est allée à l'encontre de ses intérêts, bien au contraire. Est-ce le cas de l'Algérie ? Loin de là. Rappelons l'épisode de la Coupe d'Afrique des Nations de 1988 où, après la défection de la Zambie, c'est le Maroc qui fut désigné pour l'organiser au lieu de l'Algérie. On peut aussi exhumer le dernier match comptant pour les éliminatoires de la Coupe du Monde de 1990 entre? l'Egypte et l'Algérie. On se souvient de l'ambiance pesante dans laquelle a eu lieu cette rencontre (interrogeons-nous au passage sur le fait que les matchs retour ont toujours lieu au Caire?) et du mandat d'arrêt lancé contre Belloumi. Rappelons aussi l'élimination de l'Algérie sur tapis vert lors des éliminatoires pour la Coupe d'Afrique des Nations de 1994 pour le plus grand bonheur du Sénégal. A chacun de ces épisodes, l'Algérie n'a rien pu faire pour prévenir ou infléchir son mauvais sort. Fatalité ? Pas si sûr. Il est vrai qu'il est facile de crier au complot anti-algérien. De se dire que nous sommes les mal-aimés ou les jalousés du Continent. On peut aussi continuer à se lamenter en accusant les Egyptiens de tous les maux, en laissant entendre que leur diplomatie est intrigante voire corruptrice, ce qui expliquerait les succès sportifs des « pharaons ». Pourtant, il n'y a rien de honteux ou d'exceptionnel dans les stratégies déployées par Le Caire pour défendre son leadership footballistique. Ce n'est que du lobbying, constant et exercé sans relâche. Ce qui vient de se passer en Egypte devrait donc plutôt sonner comme un avertissement et nous obliger à nous interroger sur l'incapacité de notre pays à profiter d'une situation (le caillassage) qui, au départ, servait pourtant ses intérêts. Cela en dit long sur la faiblesse algérienne en matière de lobbying auprès d'une instance internationale comme la Fifa. Pour dix, quinze, vingt émissaires égyptiens qui grenouillent dans et autour de cette institution ou de la Caf, combien de représentants algériens alignons-nous ? Et surtout, sommes nous capables de mener une action d'influence sur le long terme, sans à-coup, sans bouleversements intempestifs dans la composition de ceux qui nous représentent ? Et ces interrogations, car là est l'objet de cette chronique, ne se résument pas au seul domaine du football. Remplaçons la Fifa par d'autres organisations et nous serons amenés au même questionnement. Les relais de l'Algérie dans les instances internationales sont-ils efficaces ? Ou plutôt, première question : ces relais existent-ils au moins ? Un exemple. Pour qui est amené à fréquenter de manière régulière les colloques et les réunions internationales, il y a une absence récurrente qui saute aux yeux. C'est celle de la voix ou des voix algériennes. Oui, l'Algérie, qu'elle soit officielle ou non, est trop souvent absente, pratiquant la politique de la chaise vide ou de la bouche fermée. Une attitude que nos voisins maghrébins, qui ne perdent aucune occasion pour défendre leur propre agenda, attribuent à une arrogance confortée par la manne pétrolière. On sait bien que les grands raouts ne servent pas à grand-chose mais on sait aussi que tout se joue en coulisse. Les contacts officieux, le networking, sont autant de passages obligés pour qui entend défendre ses intérêts dans le long terme. Il faut absolument s'interroger sur cette absence. Traduit-elle une volonté politique qui impose une discrétion obligatoire ? Relève-t-elle de la crainte de prendre des initiatives ? De l'inexistence d'un agenda clair et précis ? Ou est-ce une preuve patente, une parmi tant d'autres, de l'affaiblissement de l'Algérie et de ses institutions ? Comment, en effet, être fort à l'extérieur quand on est faible chez soi ? Voilà où devraient porter nos réflexions et cela dépasse de loin le cadre (anecdotique) du football. |
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