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Deux week-ends et demi...

par K. Selim


Finalement, le nouveau week-end, pré-sumé «semi-universel», est devenu à la pratique tellement confus que même les «modernisateurs» acharnés, qui croyaient avoir obtenu une demi-victoire sur les islamistes (ces derniers pensant avoir infligé à leurs «adversaires» un semi-échec), en sont à regretter la clarté carrée du jeudi-vendredi. Il n'y a désormais plus un seul week-end, mais deux week-ends et demi...

Certains Algériens ne travaillent pas le vendredi-samedi, d'autres continuent à se reposer le jeudi-vendredi et enfin beaucoup ne se reposent plus que le vendredi et travaillent le samedi ! Un sondage publié par l'hebdomadaire économique «Les Afriques» confirme qu'un nombre important d'employeurs algériens font travailler leurs personnels le samedi par une sorte d'adaptation obligatoire à la «sacralisation», tardive, du vendredi qui est venue brouiller la signification du changement de week-end.

Beaucoup se demandent désormais pour quelle raison le gouvernement a changé les jours de repos hebdomadaire. Ce changement aurait un sens si le vendredi matin remplaçait le jeudi matin. Voilà désormais que le ministère de l'Education, un des plus gros employeurs du pays, donne latitude aux chefs d'établissements d'user comme bon leur semble du samedi, la seule consigne étant de ne pas toucher au vendredi... Il a été contraint de le faire face à la grogne des lycéens, qui supportent mal le coup du tablier et encore moins l'allongement des heures de classes quotidiennes.

Ce qui aurait été un déplacement simple - le vendredi à la place du jeudi - est donc devenu un casse-tête que l'on essaie de résoudre comme on peut.

Cette affaire du week-end est symptomatique. Alors que les Algériens font comme ils peuvent suivant l'ordre impérieux de la nécessité, les «islamo-modernistes» et les «islamo-machin-conservateurs» se positionnent, par réflexe pavlovien, l'un par rapport à l'autre, voyant dans la réforme déroutée du week-end la semi-victoire de l'un ou la semi-défaite de l'autre. Le gouvernement, lui, ne sait que faire, si ce n'est d'envoyer le vieux message subliminal qu'il est au «centre». Au centre de quoi? Nul ne peut le dire.

Dans le sondage cité plus haut, on a deux éléments importants. Une petite majorité relative d'Algériens - incluant donc ceux qui travaillent, les chômeurs, les femmes au foyer - se dit attachée au repos du vendredi. Le second chiffre concerne les Algériens qui travaillent effectivement le samedi: à plus de 50%, ils se disent prêts à travailler le vendredi. Ce que nous dit ce sondage est que la proportion des personnes ayant un emploi qui sont attachées - par habitude et non par religiosité - au repos vendredi n'est pas si éloignée de ceux qui se disent prêts à travailler le vendredi.

En sacralisant le vendredi, le gouvernement a choisi d'aller dans le sens d'un conservatisme relativement majoritaire. Il aurait pu choisir de s'appuyer sur la disponibilité presque aussi forte de ceux qui sont prêts à travailler le vendredi. Cela aurait donné un sens au changement du week-end. Mais le gouvernement, qui dispose des leviers de l'action, a choisi d'être «conservateur», au lieu d'assumer un rôle de réformateur. L'affaire du week-end est en train de devenir le symbole d'un réformisme qui n'est que velléitaire.