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«De la Aççabiya d'Ibn Khaldoun à la... Arrouchia libyenne»

par Houssine Mourad Salim*

Je ne me rappelle plus du lieu où j'avais entendu parler un citoyen lambda de l'ennemi invisible qui risquait de terrasser l'Etat algérien... de l'intérieur de ses frontières ! Ce n'était pas une cafétéria universitaire préoccupée à sauter sur les offres de service(s) d'une nébuleuse de chaînes TV déchaînées après avoir été longtemps enchaînées, court ...circuit didactique et tunnel de sortie des facultés pour contourner le ghetto vicié à l'empirisme activiste des campus que le sociologue allemand Max Weber abhorrait ; ce n'était pas non plus un cercle littéraire genre café-théâtre informel regroupant artistes et scribes non encartés et non... encadrés ; cela devait être sûrement un café...mort au tout début du hirak et qui était bien plus vivant et réel que le plus «méritant» de nos labos de recherche en épidémiologie et statistiques... appliquée(s) au développement local et durable... L'atmosphère y était matinale à la limite de l'aurore côtière où le cri des premières mouettes rieuses donnait un timbre écologique à la rumeur d'un écran TV suspendu au-dessus de consommateurs qui regardaient de biais une actualité National Geographic... Les personnes présentes faisaient sûrement partie du lot de la population active, y compris chômeurs déguisés hors statistiques, et préféraient la civilisation orale du téléphone arabe à celle écrite et symbolique des réseaux sociaux. L'un d'eux, à une table de mes expresso/séparés par un croissant viennois d'origine turque, invita Ibn Khaldoun dans ce café maure sans le nommer ni le référencer en élevant la voix sur «ces petits et grands Kabyles, Chaouïs et Nemamchas, Mozabites et Châambas, bedouis et Banou Hillal, Touaregs et sahraouis, Arabes des zaouïas du Tell et des Oasis, Senhadjas et Zenatas... les exhortant à arrêter de se tirer dessus tantôt en mode rafale, tantôt au coup par coup, souvent en snipers grâce à des lunettes importées !»

«Arrouchia !!!», le phonème à la limite de l'anathème fut lancé au milieu de la fumée des cigarettes et du cliquetis des sous-tasses, tout à l'honneur de la «Aççabiya» tribale du fondateur de la sociologie, l'illustre Abderrahman Ibn Khaldoun, traduite plus tard en Europe en esprit de clan...

Ce citoyen lève-tôt, apparemment alphabétisé puisqu'il prit son journal, héla le serveur avant de sortir d'un pas cadencé en me fixant dans les yeux. Il bifurqua aussitôt vers la gauche d'une rue qui commençait à s'animer de la présence d'une jeunesse insouciante de son avenir scolaire. Je n'ai pas oublié l'expression d'un profond désarroi dans son regard qui contrastait avec l'assurance de sa démarche... à moins que ce ne soit aussi à ce jour la projection de mon malaise devant la sagesse de cet inconnu !

L'Histoire reste un éternel recommencement ; le scénario libyen d'une déconfiture tribale et ethnique programmée... après l'Irak et la Syrie, une étude longitudinale expérimentée dans des laboratoires étrangers qui ont réussi à concilier et combiner les cursus des ethno/anthropologues orientalistes et chercheurs en technologies NTIC d'écoute et d'investigations, adaptés à une armada de prédators...

L'histoire pas du tout mythique des Numides Syphax de l'Ouest et Massinissa de l'Est ne relève pas seulement d'études diachroniques tant elle reste d'actualité ! Le premier, roi berbère, fut livré par son alter ego comme trophée d'allégeance aux Romains en épongeant le contentieux d'une sulfureuse carthaginoise d'origine punique dénommée Sophonisbe... loin de Tamazgha !

*écrivain