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La décision 20/D.CC/19 du 1er
juin 2019 vient d'être publiée dans le dernier Journal Officiel portant le
numéro 38 du 12 juin 2019, mis en ligne le mercredi 26 juin 2019 sur le site https://www.joradp.dz, relevant du secrétariat général du
gouvernement.
Cette décision qui a été rendue le 1er juin 2019 par le Conseil constitutionnel, avait fait l'objet d'un communiqué de cette institution, daté du 1er juin 2019 et publié le 2 juin 2019. Ledit communiqué donnait compétence à l'actuel chef de l'Etat «de convoquer de nouveau le corps électoral et de parachever le processus électoral jusqu'à l'élection du président de la République et la prestation du serment constitutionnel». La nature et la valeur juridique de ce communiqué ont déjà fait l'objet d'une contribution intitulée «le Conseil constitutionnel et le communiqué : une hérésie du droit», parue au journal «Le Quotidien d'Oran» du 08 juin 2019, à la rubrique «Opinion». Il était précisé dans cette contribution que : «le contenu de ce communiqué n'a aucune valeur d'avis ou de décision, du fait que les avis et les décisions du Conseil constitutionnel sont pris dans le seul cadre des compétences dévolues par la Constitution au Conseil constitutionnel. Et, le communiqué ne fait pas partie des avis et des décisions prévues par la Constitution et n'est ni un acte juridique ni un acte décisionnel». Le contenu dudit communiqué a été estimé comme étant : «une intrusion anticonstitutionnelle, illégale et sans fondement juridique dans les attributions dévolues par la Constitution et la loi au pouvoir exécutif». En effet, le Conseil constitutionnel s'est arrogé, de fait, une fonction attributive de compétence qui ne relève aucunement de ses attributions, au profit du chef du pouvoir exécutif, en l'occurrence et actuellement le chef de l'Etat ; en l'instruisant de convoquer de nouveau le corps électoral et de parachever le processus électoral jusqu'à l'élection du président de la République et la prestation du serment constitutionnel. Mais, et c'est là que ça devient intéressant, le Conseil constitutionnel a agi, en pleine conformité avec ses attributions prévues par la Constitution, dans son article 182/ 2ème et 3ème alinéas, en rendant sa décision portant le numéro 20 et daté du 1er juin 2019. En effet, par cette décision, le Conseil constitutionnel «Déclare l'impossibilité de tenir l'élection du président de la République à la date prévue le 4 juillet 2019» et prévoit «L'organisation de l'opération électorale de nouveau». Cette décision n'interpelle nullement le chef de l'Etat actuel pour procéder de nouveau à l'opération électorale, bien que le Conseil constitutionnel ait prévu dans l'article 3 de cette décision que : «Une copie de la présente décision est notifiée au chef de l'Etat», sans aucune autre précision ou indication devant découler de cette notification. Et, toute obligation constitutionnelle, légale ou réglementaire doit être clairement énoncée dans un acte régulier, et prise par l'autorité compétente, pour que cette obligation reçoive exécution. C'est dans les «attendus» ou les «considérants» de cette décision, notamment les 4ème et 5ème considérants, qui n'ont aucune valeur exécutoire et qui expliquent le cheminement de la construction juridique et factuelle des dispositions de la décision, que le Conseil constitutionnel s'est autorisé à préciser la fonction dévolue au chef de l'Etat, comme si la Constitution n'explicitait pas clairement dans ses dispositions, notamment les articles 102, 103, 104 et 109, les prérogatives incombant au chef de l'Etat. Conscient de ce coup de boutoir donné à la Constitution, le Conseil constitutionnel n'a pas osé reprendre ces «considérants», à rédiger dans une forme concise et directe, dans le dispositif (les articles) constituant la décision elle-même, c'est-à-dire la solution donnée par cette institution constitutionnelle de contrôle. Aussi, cette décision appelle les observations suivantes : 1 - Le Conseil constitutionnel a outrepassé ses attributions en matière électorale (élection du président de la République), qui sont clairement définies et ne souffrent d'aucune ambiguïté : a / la validation des candidatures à l'élection du président de la République. b / l'étude des recours formulés par les candidats ou leurs représentants dument mandatés et la proclamation des résultats de l'élection du président de la République. c / le contrôle des comptes de campagnes des candidats à l'élection du Président de la République. 2 - Le Conseil constitutionnel conscient de sa «déviation» des attributions qui lui ont été dévolues limitativement par la loi fondamentale qui «est au-dessus de tous 1», y compris le président et les membres du Conseil constitutionnel, n'a pas intégré les 4ème et 5ème considérants dans les articles formant le corps, le dispositif de la décision. 3 - Le Conseil constitutionnel a agi comme une entité politique et s'est immiscé, en violation de la Constitution, dans les attributions dévolues par la Constitution et la loi au seul pouvoir exécutif. 4 - Cette décision rendue le 1er juin 2019 n'a pas été publiée et portée à la connaissance du public le 2 juin 2019, alors que le communiqué du 1er juin 2019 a été rendu public le lendemain, soit le 2 juin 2019. 5 - Ledit communiqué qui n'a aucune valeur juridique, c'est un simple moyen d'information, est formel et donne attribution « au chef de l'Etat de convoquer de nouveau le corps électoral et de parachever le processus électoral jusqu'à l'élection du président de la République et la prestation du serment constitutionnel 2». 6 - Cette injonction, «Il revient au chef de l'Etat de convoquer?», contenue dans le dernier paragraphe du communiqué du 1er juin 2019, ne figure nullement dans le dispositif (articles) de la décision. 7 - Le Conseil constitutionnel a occulté de sa décision une disposition expresse de la Constitution, l'article 102 / 6ème alinéa qui prévoit ce qui suit : «Le président du Conseil de la nation assume la charge de chef de l'Etat pour une durée de quatre-vingt-dix (90) jours au maximum, au cours de laquelle des élections présidentielles sont organisées». C'est une durée maximum fixée par la Constitution, et il n'appartient pas au Conseil constitutionnel d'y déroger ou de la proroger. 8 - A l'expiration de cette durée maximum de 90 jours, soit le 9 juillet 2019, l'actuel chef de l'Etat sera un chef de l'Etat de fait et non de jure, et tous les actes pris après cette date n'auront aucune assise constitutionnelle ou légale. Ce seront des faits du Prince3, des actes arbitraires pris par une autorité illégitime, car continuant à exercer ses attributions après l'expiration de la durée de 90 jours au maximum, fixée par l'article 102 / 6ème alinéa de la Constitution. 9 - La Constitution a prévu dans son article 102 / 8ème alinéa un autre cas, celui de la « conjonction de la démission ou du décès du président de la République et de la vacance de la présidence du Conseil de la nation, pour quelque cause que ce soit... Dans ce cas, le président du Conseil constitutionnel assume la charge de chef de l'Etat dans les conditions fixées aux alinéas précédents du présent article et à l'article 104 de la Constitution». Cette situation prévue par la Constitution peut être concrétisée. En effet, l'actuel chef de l'Etat qui ne peut assumer cette charge au-delà de l'expiration de la durée maximum de 90 jours, et pour se conformer à la Constitution, devrait démissionner. La présidence du Conseil de la nation est actuellement vacante. Le Conseil constitutionnel est dirigé par un président, désigné, conformément à la Constitution, par le chef de l'Etat. Toutes les conditions seront réunies pour rendre effective cette voie prévue par la Constitution. Elle serait plus indiquée que la violation délibérée de la Constitution, par l'«institution indépendante chargée de veiller au respect de la Constitution 4». 10 - Le Conseil Constitutionnel a extrapolé les «considérants» de cette décision et «l'injonction», objet du communiqué du 1er juin 2019, du contenu de l'article 103 de la Constitution relatif au cas de décès ou d'empêchement légal de l'un des deux candidats au deuxième tour de l'élection présidentielle. L'emprunt fait du contenu de cet article, notamment ses alinéas 3 et 4, par le Conseil constitutionnel ne peut être valable du fait que l'opération électorale était à son début, la validation des candidatures à l'élection du président de la République, et non du deuxième tour de l'élection présidentielle. Cette décision du Conseil constitutionnel est loin, très loin de la position clairement et maintes fois martelée par le vice-ministre de la Défense nationale, chef d'état-major de l'Armée Nationale Populaire, de strict respect de la légalité constitutionnelle ainsi que de la constance et de la détermination de l'ANP à ne pas s'écarter de la voie constitutionnelle, chaque fois, réitérées par cette haute autorité militaire. Par ailleurs, et devant cette situation de fait qui, de mon avis, ne repose sur aucune disposition constitutionnelle, il me plaît de partager avec les lecteurs du journal «Le Quotidien d'Oran» la proposition suivante : I - Démission du gouvernement Bedoui et désignation par l'actuel chef de l'Etat d'un Premier ministre parmi les membres de la société civile, connus pour leur probité, droiture et expertise qui aura toute latitude à choisir, seul et en toute indépendance, les membres de son gouvernement. Il va de soi que le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah continuera, dans ce nouveau gouvernement, à assumer ses responsabilités de vice-ministre de la Défense nationale, chef d'état-major de l'Armée Nationale Populaire. II - Démission du président en exercice du Conseil constitutionnel et nomination du nouveau président de cette institution constitutionnelle de contrôle, parmi les compétences nationales ou les membres des organisations de la société civile ou des organisations professionnelles, conformément aux dispositions de l'article 183 de la Constitution. III - Démission du Chef de l'Etat. IV - Application des dispositions de l'article 102 / 8ème alinéa de la Constitution. Le nouveau président du Conseil constitutionnel assumera la charge de chef de l'Etat pour une durée de 90 jours. V - Elaboration et adoption du projet de loi relatif à l'autorité indépendante devant organiser, superviser et surveiller les élections ainsi que proclamer les résultats provisoires. VI - Convocation du corps électoral pour l'élection présidentielle. VII - Election du président de la République. VIII - Promulgation d'un décret portant mesures de grâce (remise totale du restant de la peine privative de liberté) pour les personnes condamnées définitivement pour des faits de liberté d'expression liés aux manifestations pacifiques qui se déroulent depuis le 22 février 2019, et abandon des poursuites judiciaires pour celles, inculpées des mêmes faits, prévenues, détenues ou libres. IX - Dissolution de l'Assemblée Populaire Nationale, dans les conditions prévues par les dispositions des articles 147 de la Constitution et 85 de la loi relative au régime électoral. X - Mise en place, sans lui fixer de délai, d'une commission ad hoc, composée de membres élus ou désignés, parmi les compétences nationales et les membres des partis politiques, des organisations de la société civile, des syndicats et des organisations professionnelles. Le président de cette commission devrait être élu par ses pairs. Et le projet de Constitution élaboré par cette commission devrait être soumis à référendum, sans que le pouvoir exécutif puisse disposer d'une quelconque attribution de modification ou d'enrichissement des dispositions de ce projet de la loi fondamentale. En guise de conclusion, il est temps, grandement temps, pour chacun, pour chacune, de privilégier l'Etat et la chose publique au lieu des intérêts purement personnels et/ou de l'entourage. Il appartient à chaque Algérien, à chaque Algérienne, exerçant ou appelé à exercer une autorité publique, de se conformer effectivement aux dispositions des articles 12 et 23 / 1er alinéa de la Constitution : «Article 12 : L'Etat puise sa légitimité et sa raison d'être dans la volonté du peuple. Sa devise est «Par le Peuple et pour le Peuple». Il est au service exclusif du peuple». «Article 23 / 1er alinéa : Les fonctions et les mandats au service des institutions ne peuvent constituer une source d'enrichissement, ni un moyen de servir des intérêts privés». L'application du contenu de ces deux (2) articles ne doit pas être un vœu pieux, mais une réalité concrète et effective de tous les instants. Le rêve est permis, mais la culture de l'Etat est inexistante. C'est, hélas, la dure et cruelle réalité. *Colonel à la retraite, ex-cadre / MDN. Notes: 1- In préambule de la Constitution qui fait partie intégrante de cette loi fondamentale. 2- Le contenu du communiqué, in fine. 3- A ne pas confondre avec la théorie du fait du prince en droit administratif. 4- Article 182/1er alinéa de la Constitution |
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