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Hormis quelques cadres dirigeants de la SNTF qui étaient, hier, en poste,
les quelque 1.000 cheminots, tous services confondus, ont observé hier une
journée de protestation à l'appel de leur fédération. Prévue initialement le 30
juin dernier, cette action a été reportée pour, croit-on savoir auprès de la
fédération nationale des cheminots, lui assurer toutes les conditions de sa
réussite. A la gare d'Oran tous les départs ont été annulés à l'exception de
celui de 7h45 dans le sens Oran-Alger qui a été jumelé à celui de 6h40, et qui
a quitté la gare avec un retard. C'est ce que nous a appris Djamal Bechikhi,
membre du bureau fédéral des cheminots, qui explique qu'en raison de la
fermeture des guichets, presque la moitié des voyageurs ont pris place sans
billets.
Cette journée de protestation s'est traduite, dans la région Est, par une paralysie totale du réseau: de Constantine à Souk Ahras en passant par Skikda et Annaba, aucun train n'a circulé et même les trains de banlieue étaient à l'arrêt. A Constantine, selon les informations recueillies auprès des cheminots, le débrayage a débuté hier matin à zéro heure et les quelques voyageurs qui sont venus tôt le matin prendre le train à l'arrêt à la gare furent informés par le personnel de service qu'ils observaient un arrêt de travail. Des voyageurs pénalisés M. Bechikhi précise que le service minimum n'est pas assuré et que même les trains qui ont pris le départ tôt le matin devaient être immobilisés en cours de trajet comme celui devant assurer la liaison Alger-Oran qui a été bloqué à El-Harrach alors que celui assurant la desserte dans le sens inverse a été immobilisé une première fois à Sig et serait éventuellement bloqué à Chlef où le personnel occupe la voie ferrée. Au niveau de cette gare, les voyageurs en partance vers les destinations ouest et centre étaient nombreux à être surpris de voir les guichets clos et attendaient les trains en provenance d'Alger ou Oran. La seule réponse à laquelle on a eu droit était que le personnel était en grève nationale avec un service minimum, mais que l'activité reprendra normalement durant la journée de jeudi. Non informés au préalable de cette protesta, les voyageurs étaient médusés comme ce jeune devant se rendre à Alger. « Le train devait entrer en gare à 9h et il est en retard », nous a-t-il déclaré en précisant qu'il arrivera à 10h. « Il est onze heures et le train n'est pas toujours arrivé alors que je devais partir le matin puis revenir le soir après avoir réglé une affaire », a-t-il ajouté. D'autres voyageurs ont, après avoir attendu en vain, préféré repartir chez eux ou prendre un autre moyen de transport. Une famille résidente à Alger a vécu la même attente jusqu'à onze heures et demie et comptait attendre jusqu'à midi pour rebrousser chemin. Mais à 11 heures 45 minutes que le train est entré en gare. Un voyageur qui a pris le départ d'Oran raconte qu'il y avait une affluence très nombreuse et les billets étaient établis manuellement. Quant au trajet, il était difficile avec en plus du retard, des arrêtes intempestifs. Retour à la gare d'Oran où des usagers rencontrés durant la matinée d'hier ont préféré se rabattre soit sur les cars ou les taxis notamment à la station située face au stade Ahmed Zabana où l'affluence était également inhabituelle. Une source du service commercial de la SNTF a précisé que les deux trains en partance sur Alger, à savoir celui de midi et 15h, allaient être jumelés également, mais à 16h le départ n'a pas encore eu lieu. Djamal Bechikhi, membre du bureau fédéral des cheminots, estime que cette action de protestation est un premier avertissement aussi bien pour la direction générale de l'entreprise que les pouvoirs publics, d'où la nécessité d'ouvrir un débat sérieux sur les perspectives du secteur du transport ferroviaire en Algérie d'autant que toute éventualité de privatisation a été officiellement écartée. Selon B. Bechikhi, cette question ne concerne pas seulement l'employeur, mais les pouvoirs publics qui ont mis en place un plan de développement d'envergure avec notamment la modernisation du réseau et l'acquisition de nouveaux trains, mais n'ont rien fait en matière de ressources humaines. « Sinon comment expliquer que les effectifs estimés au début des années 90 à quelques 18.000 agents, ne sont actuellement que de 10.000. En plus en matière de recrutement, rien ou presque n'a été fait », ajoute le syndicaliste. Aux dires de ce responsable syndical, la SNTF a confié à un bureau d'étude (INDEFOC) une étude portant sur un plan de redressement notamment en matière de ressources humaines et s'articulant sur une nouvelle classification des postes de travail qui viendrait remplacer celle du statut général du travailleur (SGT), une revalorisation du poste de travail, la gestion des carrières avec des chances de promotion aussi bien en amont qu'en aval. Cette étude a conclu que pour motiver le personnel, une revalorisation salariale de 53% s'impose. Toutefois, le partenaire social n'a revendiqué tout au long des rounds de négociations que 25%, un niveau refusé par l'employeur et qui se limite à 12%. Par ailleurs, les promesses de revalorisation salariale qui devait prendre effet à partir d'octobre 2006, date à laquelle il a été procédé à la signature de la convention de branche de l'activité ferroviaire, n'ont pas été tenues, selon le syndicaliste. Ce dernier ira même jusqu'à dire qu'il existe un paradoxe entre le plan de développement et de modernisation du rail avec une enveloppe financière de plus de 500 milliards de DA et la gestion des ressources humaines de la SNTF, une entreprise qui par ses salaires n'est plus attractive. « Peut-on intéresser un jeune ingénieur avec une rémunération de 18.000 DA au moment où certains secteurs proposent 4 ou 5 fois plus. Comment expliquer également qu'un cadre perçoit après 25 ans de service un salaire de 30 à 35.000 DA », devait ajouter notre vis-à-vis. Par ailleurs, le syndicaliste s'élève contre le fait que la DG de la SNTF a fait volte-face concernant certaines décisions prises en commun accord telles la mise en place d'une commission chargée de réactualiser l'étude INDEFOC avec comme objectif de mette en oeuvre une nouvelle cotation des postes de travail avant la fin du mois de juin 2009 ainsi que la révision de la convention collective de la SNTF. Le syndicaliste fustigera les responsables de la compagnie ferroviaire en dénonçant notamment la sous-exploitation aussi bien du réseau existant que les équipements chèrement acquis. A titre illustratif, il s'interroge sur la faible part du marché national du transport des marchandises dominé par ce qu'il qualifie de « lobbies de transporteurs routiers » en s'appuyant sur la suspension injustifiée de la ligne reliant la gare d'Oran au port de la même ville depuis 10 ans. Or, la réouverture de cette ligne peut aisément désengorger le port en 15 ou 20 jours et en plus éviter les mouvements de centaines de camions à travers la ville. D'autres débrayages en perspective De son côté, le SG de la fédération Abdelhamid Derradji a rappelé que le chapitre réservé à la classification et cotation des salaires de ladite convention, devenue une priorité pour les cheminots, a connu des retards quant à son application et à deux reprises (30 mars 2007 et 3 décembre 2008). Selon ce syndicaliste, les salaires de base des cheminots sont « très bas » comparativement à d'autres secteurs et EPIC, ils varient pour 28 niveaux entre 12.000 et 24.000 (pour les hauts cadres). En ce qui concerne le personnel de conduite des trains, celui-ci n'est pas mieux nanti, leurs salaires de base varient (pour les 5 catégories existantes) entre 12.900 DA et 14.300 DA. Classé au niveau B3, « mon salaire de base est de 13.560 après 29 ans de travail », souligne un travailleur. Selon le SG de la FNC, les travailleurs espèrent arriver à leur fin en mettant de la pression par des grèves cycliques dont la prochaine aura lieu la semaine prochaine, a indiqué un membre du bureau syndical. Du côté de la direction générale de la SNTF, M. Dakhli, directeur central des ressources humaines, questionné sur le sujet, nous précise « que la direction de SNTF a été d'accord avec le partenaire social en donnant suite aux revendications dans les domaines de la formation, la médecine du travail, le déroulement des carrières, mais la revendication salariale faite par le syndicat dépasse les possibilités financières de la SNTF». |
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