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Le corps humain est assimilé à
une formidable machine dotée d'une «ingénierie complexe et intelligente», très
bien huilée dans laquelle de nombreux organes agissent en parfaite
synchronisation, en symbiose totale et interdépendants les uns des autres pour faire
de nous ce que nous sommes !
Certains de ces organes assurent des fonctions indispensables à la vie, et sans lesquels notre organisme ne peut y survivre, ils sont appelés les organes vitaux, d'autres sont qualifiés de nobles; c'est pour cela qu'ils doivent être, coûte que coûte, et à tout prix, continuellement vascularisés, nourris par notre liquide nourricier et vital qu'est le sang sous peine d'insuffisance de fonctionnement; ils sont au nombre de 06 (six) : le cerveau, le cœur, les poumons, le foie, le pancréas et les reins. Il est possible de vivre avec un seul poumon ou avec un seul rein, mais pas sans le cerveau, par exemple ! Pour ce qui est du cerveau, dont je ne vais pas rentrer dans les détails anatomiques et physiologiques ici, il est le principal centre de contrôle de tous les organes de notre organisme, plus parfait qu'un ordinateur, qui, faut-il le rappeler, fut conçu par un cerveau humain ! Le cerveau contrôle les fonctions vitales, envoie et reçoit des messages nécessaires à une communication continue avec le milieu interne, entre les organes eux-mêmes (motricité, sensibilité, équilibre, mémoire, émotions, le contrôle hormonal...) et externe avec le milieu environnant dans lequel nous vivons et nous y évoluons. Dans certaines situations, il peut être victime de complications brutales de maladies générales (cholestérol, hypertension artérielle, maladies cardiaques, obésité?), soit inconnues des patients eux-mêmes ou négligées et mal prises en charge. Les AVC sont définis par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) comme «le développement rapide de signes cliniques localisés ou globaux de dysfonction cérébrale avec des symptômes durant plus de vingt-quatre heures pouvant entraîner la mort, sans autre cause apparente qu'une origine vasculaire». L'accident vasculaire cérébral (AVC), parfois appelé «attaque», survient brutalement quand la circulation sanguine qui nourrit le cerveau est interrompue : Illustrations : (Institut du cerveau et de la moelle épinière - Paris) - Soit par un vaisseau sanguin qui s'est bouché, donc responsable d'une insuffisance d'apport d'oxygène et de sucres, indispensables au fonctionnement et à la survie du cerveau (AVC ischémique dans 80-85% des cas) - soit par un vaisseau sanguin, ou une maladie des vaisseaux (anévrysme, malformation artério-veineuse?) qui s'est rompu créant un hématome (caillot de sang) à l'intérieur du cerveau et augmentant la pression à l'intérieur du crâne (AVC hémorragique, dans 15% des cas). L'accident ischémique transitoire (AIT) que certains appellent «min-AVC» est dû à un petit caillot qui bloque temporairement une artère; les signes cliniques disparaissent en moins de 24 heures. Cette privation de sang va être à l'origine de divers dommages et à des degrés différents des cellules cérébrales (neurones), qui ne seront pas réparées ou remplacées. Cet enchaînement de dommages porte le nom de «cascade ischémique cérébrale» qui peut aboutir à la mort neuronale, à titre d'exemple, 01,9 million de neurones meurent par minute si la situation dure de plus en plus longtemps ! Les séquelles de l'AVC dépendent donc de l'importance anatomique et fonctionnelle de la partie du cerveau qui a été touchée ainsi que de sa durée. Dans notre langage médical, nous utilisons l'expression «coup de tonnerre dans un ciel serein» pour qualifier cette expression clinique brutale (d'où le terme d'accident), qui, jadis aussi, était dénommée «ictus apoplectique» ou «apoplexie», tout en sachant que 20% des AVC peuvent survenir pendant le sommeil rendant l'appréciation de la durée du début de l'AVC très difficile, timing indispensable à faire connaître au personnel soignant dès l'arrivée à l'hôpital pour des raisons d'éligibilité, ou non à la thrombolyse, par exemple qui doit se faire dans les 04h 30 après le réel début des signes. Certains traitements vont aider à minimiser les séquelles d'un AVC; ils ne sont efficaces que s'ils sont administrés dans des délais précis. Par exemple, des médicaments qui peuvent dissoudre et désagréger le caillot (thrombolytiques) sont indiqués chez les personnes dont l'AVC a été causé par un vaisseau bouché doivent être administrés dans les quatre heures et demie qui suivent l'apparition des symptômes. C'est la raison pour laquelle il est si important de connaître les signes de l'AVC. Ce type de traitement doit se faire après une imagerie médicale (scanner ou IRM), car cela peut être délétère et dangereux en cas d'AVC hémorragique. Actuellement, en plus de la thrombolyse par des enzymes spécifiques (altéplase ou tenecteplase), des moyens de «débouchage mécanique» de l'artère obstruée par le caillot existent : c'est ce qu'on appelle la thrombectomie. La double approche thérapeutique, «thrombolyse + thrombectomie» est préconisée et existe actuellement, dans de nombreux pays, elle permet un bénéfice 2 à 3 fois supérieur que la thrombolyse simple et concerne 1 AVC sur 2 chez de nombreux pays !! Illustration: (Institut du cerveau et de la moelle épinière - Paris) Le 18 mai 2022, je fus agréablement surpris par un papier paru dans vos colonnes traitant d'un problème de santé publique et plus particulièrement de pathologie du système nerveux, qui représente, entre autres, la 1ère cause du handicap et la 3ème cause des décès, et publié dans vos colonnes, intitulé «Urgences médicochirurgicales de l'hôpital d'Oran : une unité de neurologie pour prévenir les séquelles des AVC» et signé S. M. A la lumière de sa lecture, et en tant qu'acteur dans la prise en charge, du moins chirurgicale, de certains AVC au CHUO, bien entendu aux côtés des médecins réanimateurs, des radiologues (imagerie médicale), des neurologues et ceci depuis des décennies, il m'est paru nécessaire d'apporter des précisions, et pourquoi pas, un complément d'information, c'est selon, portant sur ce sujet bien précis. En effet, je tiens à vous informer qu'une «unité neurovasculaire» (Unv) ou «Stroke Unit», spécialement dédiée aux AVC, a déjà été mise en place par nos collègues du service de Réanimation médicale des UMC du CHUO qui ont, en outre, introduit la thrombolyse par l'altéplase, en 2015 et dans laquelle plusieurs intervenants exercent souvent simultanément à travers des protocoles de travail élaborés conjointement. Cette unité mise en place par l'ex-médecin-chef de service des urgences médicales des Umc du CHUO, le Pr H. D., que nous remercions pour l'amabilité de nous avoir remis une de ses plaques de diapositive, illustrant le nombre de patients pris en charge annuelle dont le chiffre varie de 400 à 800 AVC ! Sachant que la prise en charge des AVC est une «véritable course contre la montre», raison pour laquelle les Anglo-Saxons ont introduit la formule «Time is brain», et la multiplication des déclaration d'«unités AVC» çà et là, il est tout à fait concevable et relevant du bon sens qu'une véritable Unv doit être mise sur pied à des fins d'améliorer, encore plus, la stratégie multidisciplinaire de prise en charge de cette pathologie dans un hôpital. En février 2022, à la Nouvelle-Orléans (Usa), l'American Heart Association (AHA) en collaboration avec le Conseil sur l'AVC de l'AHA (AHA Stroke Council), le Conseil sur l'artériosclérose, la thrombose et la biologie vasculaire (Council on Arteriosclerosis, Thrombosis and Vascular Biology), le Conseil sur les soins infirmiers cardiovasculaires et de l'AVC (Council on Cardiovascular and Stroke Nursing), le Conseil sur la cardiologie clinique (Council on Clinical Cardiology) et le Conseil sur le mode de vie et la santé cardiométabolique (Council on Lifestyle and Cardiometabolic Health), a, lors d'un symposium durant l'édition 2022 de la Conférence internationale sur l'AVC (International Stroke Conference), publié une déclaration scientifique présentant sa stratégie d'optimisation de prise en charge des AVC à l'hopital en 05 points. 1. Tout le personnel hospitalier doit recevoir une formation sur l'AVC, y compris sur les protocoles pour activer les alertes d'AVC à l'hôpital. 2. Il est nécessaire de disposer d'équipes d'intervention rapide dédiées aux AVC dans les hôpitaux avec un accès rapide à une expertise neurologique. 3. L'évaluation des patients présentant un AVC potentiel à l'hôpital doit être standardisée par une évaluation physique et un examen d'imagerie. 4. Les obstacles potentiels au traitement, y compris le transfert des patients inter-établissements en vue d'un traitement avancé des AVC, doivent être abordés. 5. Il convient d'établir un programme de surveillance de la qualité pour les AVC survenant à l'hôpital, qui fournisse un retour d'information sur les performances, basé sur les données et qui oriente des efforts ciblés d'amélioration de la qualité. D'autre part, en avril 2022, lors du congrès de l'American Academy of Neurology (AAN) à Seattle (Usa), des chercheurs américains ont développé un algorithme d'apprentissage profond pour détecter l'ischémie précoce sur scanner sans produit de contraste chez des patients présentant un accident vasculaire cérébral (AVC), l'algorithme a réussi à détecter le cœur ischémique, de moins de 5 cc, avec une sensibilité de 96%. Alors que le Centre hospitalo-universitaire d'Oran a fait rayonner la médecine et continue toujours à le faire à ce jour, au niveau de l'Ouest algérien et en assume une grande partie de la demande en soins spécialisées, aussi divers que variés de nos concitoyens, ainsi que celle relative à la qualité de la formation des nombreuses générations de médecins, toutes spécialités confondues et de recherche, conjointement avec la faculté de médecine d'Oran bien évidemment, la carte sanitaire de notre ville fut enrichie ces dernières années par la création de nombreux hôpitaux universitaires et autres structures sanitaires de santé de proximité. Nous espérons les voir être animés d'un esprit plus coopératif et une coordination plus renforcée par la mutualisation de tous les moyens existants et mis à leur disposition par l'Etat, faut-il le rappeler, dans le souci d'améliorer l'efficacité de la prise en charge des patients en qualité et en proximité et aussi dans la formation universitaire à la manière des AP-HP (ou AP-HM), en France, à titre d'exemple, à travers une manière de travailler par protocole consensuel définissant les missions et rapports de ces différentes structures que nous pourrions assimiler fonctionnellement à un «grand centre hospitalo-universitaire multipolaire» pour Oran qui deviendrait, comme les politiques aiment bien qualifier, un véritable «pôle d'excellence» d'envergure national et plus, si possible, rédigé par tous les professionnels de la wilaya d'Oran, à la condition de mettre, bien entendu, leur «ego» de côté et faire valoir l'intérêt général en priorité, et ceci sous l'égide de la direction de la santé de la wilaya par exemple. Pour revenir aux AVC, certes, de nombreux progrès dans le domaine médical et des soins par nos collègues ont été réalisés, chacun dans sa discipline depuis quelques années, mais il me semble que l'on pourrait mieux faire en simplifiant et facilitant le «circuit du malade AVC» si nous arrivons à dépasser certaines mentalités cloisonnées à l'image du système pavillonnaire en identifiant une véritable structure, l'Unité neuro-vasculaire (Unv), dans laquelle le centre en serait un service (ou unité) de neuroradiologie interventionnelle qui permettrait de réaliser en urgence une angio-Irm cérébrale, autour de laquelle s'articuleraient une unité de réanimation, de neurologie, de cardiologie, de médecine physique, de psychologues, au moins, cette unicité de lieu serait d'un bénéfice majeur et pour le malade ainsi que pour le personnel soignant qui doit se battre très souvent pour réaliser tel examen ou prendre attache avec un collègue géographiquement éloigné de la structure d'accueil et de prise en charge des AVC, prérogatives évidentes des conseils scientifiques des CHU ! Ceci représentera une réelle amélioration qualitative de la prise en charge des AVC en augmentant, encore plus, leurs chances de récupération de ces patients, dont, faut-il le rappeler, 25% d'entre eux ont de moins de 65 ans et sont en capacité de travailler et d'être toujours productifs ! Tout le défi sera de raccourcir le plus que possible le délai entre la prise en charge des malades et l'apparition des premiers symptômes, car cet aspect revêt aussi un caractère de santé publique par le taux du handicap et la mortalité qu'ils engendrent. *Ancien médecin-chef de service de neurochirurgie CHU Oran |
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